Panarthrodèse du carpe chez le chien : quel type de plaque ? Utilité de la contention externe en phase postopératoire ? - Le Point Vétérinaire expert canin n° 353 du 01/03/2015
Le Point Vétérinaire expert canin n° 353 du 01/03/2015

ORTHOPÉDIE CANINE

Analyse d’article

Auteur(s) : Quentin Cabon

Fonctions : Service de chirurgie
VetAgro Sup
Campus vétérinaire de Lyon
1, avenue Bourgelat
69260 Marcy-L’Étoile

L’arthrodèse totale, ou panarthrodèse, du carpe est considérée comme une procédure de dernier recours, dans l’objectif de conserver la fonction du membre. Les lésions du carpe nécessitant une arthrodèse sont le plus souvent des lésions ligamentaires, telles que celles de l’hyperextension du carpe ou que celles des ligaments collatéraux, des lésions d’abrasion sévères, d’arthrose terminales ou de polyarthrite à médiation immunitaire ne répondant plus au traitement médical, ou encore des fractures articulaires non réductibles [4].

DIFFÉRENTS MONTAGES UTILISÉS

L’utilisation d’une plaque et de vis est la technique la plus fréquente [4, 8]. Ce montage peut parfois être rigidifié par l’ajout de deux broches en croix [1]. Plusieurs surfaces sont disponibles pour la mise en place de la plaque : médiale, palmaire ou dorsale. Cette dernière est la plus communément employée [1, 3, 4]. L’arthrodèse du carpe peut également être réalisée à l’aide d’un fixateur externe, linéaire ou circulaire [5, 8].

Parmi les différentes plaques utilisables pour la panarthrodèse du carpe, deux ont été conçues pour cette indication : la plaque dite castless (CLP pour castless plate) et la plaque de compression dynamique hybride (HDCP pour hybrid dynamic compression plate).

La CLP permet d’obtenir une fixation distale sur les métacarpes 3 et 4 au lieu du métacarpe 3 uniquement avec les implants standards ou la HDCP. Cette plaque est également plus épaisse que la HDCP. L’objectif de la CLP est de prévenir le risque de fracture du métacarpe et de limiter le besoin d’ajouter un moyen de contention externe en phase postopératoire [2].

La plaque HDCP présente des trous accueillant des tailles de vis différentes sur le radius ou le métacarpe 3 et l’os radial du carpe. Cela permet d’adapter la taille de l’implant à celle du métacarpe 3, principal facteur limitant. Ce caractère hybride, le plus souvent 2,7/3,5 mm, se retrouve également avec la CLP. En comparaison avec une plaque de compression dynamique standard 3,5, la HDCP 2,7/3,5 semble montrer des avantages en ce qui concerne les propriétés mécaniques et physiques in vitro (notamment la résistance en flexion) [10].

Les plaques CLP et HDCP ont également été comparées in vitro [6]. Cette étude ne démontre pas de supériorité biomécanique de l’une ou de l’autre, notamment en flexion [6]. Elle révèle également que la fracture de la plaque par cyclicité est peu probable pendant la période de convalescence, en l’absence d’un moyen de contention externe [6]. Les deux types de plaque semblent donc être des implants de choix pour la panarthrodèse du carpe, ce que confirme l’étude résumée ici.

COMPLICATIONS POTENTIELLES

Des complications peuvent être observées dans 7 à 50 % des cas lors de panarthrodèse du carpe [4]. Il s’agit le plus souvent d’un un arrachage de vis (9,3 à 23 %), notamment dans l’os métacarpien 3, d’une fracture d’implant, d’une infection, d’une fracture de l’os métacarpien 3 (11 %), d’une sensibilité à la palpation des implants ou d’une arthrodèse incomplète [2, 4, 6, 9]. Des recommandations ont été avancées pour limiter leur fréquence : l’utilisation de vis d’un diamètre inférieur à 40 % de celui de l’os dans le métacarpe 3, couverture dorsale par la plaque de plus de 50 % de la longueur du métacarpe 3, l’addition de broches en croix ou d’un moyen de contention externe et un alignement adéquat de l’extrémité distale du membre [4, 6].

MISE EN PLACE D’UN MOYEN DE CONTENTION EXTERNE ?

Lors d’une fixation par plaque dorsale, la plaque étant sur la face de compression et non sur celle de tension comme cela est recommandé, celle-ci est fortement soumise aux forces de flexion [4]. Un moyen de contention externe de type bandage avec attelle palmaire ou résine est donc communément conseillé pour 3 à 9 semaines, ou jusqu’à guérison osseuse [4, 6, 8]. L’application d’une résine n’est pas anodine : elle peut s’accompagner de complications telles que des dermatites, des tuméfactions cutanées et de la nécrose cutanée, dont la sévérité nécessite parfois l’amputation d’un doigt ou d’un membre [6]. Les complications liées à la résine s’observent dans 63 % ces cas. Elles peuvent apparaître à tout moment durant la phase postopératoire et augmentent le coût pour le propriétaire [7].

L’effet protecteur d’une résine sur une plaque de panarthrodèse (HDCP 2,7/3,5) a été étudié ex vivo [11]. Cette étude montre une diminution non significative des forces appliquées sur la plaque après ajout d’une résine, probablement sans effet clinique. Elle questionne ainsi sur l’utilité clinique d’une résine en phase postopératoire dans l’objectif de protéger la plaque du stress mécanique cyclique. L’étude de Bristow présentée ici permet d’avancer le même questionnement puisque la pose d’une résine à la suite d’une intervention ne semble pas avoir d’impact sur un résultat à long terme alors que les complications qui y sont associées sont observées dans 32 % (HDCP) et 18 % (CLP) des cas. Une étude prospective est nécessaire pour apporter de nouvelles informations sur la nécessité d’une contention externe après une panarthrodèse du carpe.

Conclusion

La panarthrodèse du carpe par plaque dorsale est associée à de bons résultats cliniques, notamment avec l’utilisation d’implants spécialement conçus pour cette intervention, telles que les CLP et HDCP. L’ajout d’un moyen de contention externe est remis en question, en raison d’une protection a priori minimale des implants, associée à une morbidité importante.

Références

1. Arnott JL, Bailey R, Shields A et coll. An in vitro comparison of a 2.7/3,5 mm hybrid plate alone and combined with crossed K-wires for canine pancarpal arthrodesis. Vet. Comp. Orthop. Traumatol. 2008;21:307-311. 2. Clarke SP, Ferguson JF, Miller A. Clinical evaluation of pancarpal arthrodesis using a castLess plate in 11 dogs. Vet. Surg. 2009;38:852-860. 3. Guerrero TG, Montavon PM. Medial plating for carpal panarthrodesis. Vet. Surg. 2005;34:153-158. 4. Kapatkin AS, Garcia-Nolen T, Hayashi H. Carpus, metacarpus, and digits. In: Tobias KM, Johnson SA, eds. Veterinary surgery small animals. Elsevier Saunders, St Louis. 2012;785-800. 5. Lotsikas PJ, Radasch RM. A clinical evaluation of pancarpal arthrodesis in nine dogs using circular external skeletalfixation. Vet. Surg. 2006;35:480-485. 6. Meeson RL, Goodship AE, Arthurs GI. A biomechanical evaluation of a hybrid dynamic compression plate and a CastLess arthrodesis plate for pancarpal arthrodesis in dogs. Vet. Surg. 2012;41:738-744. 7. Meeson RL, Davidson C, Arthurs GI. Soft-tissue injuries associated with cast application for distal limb orthopaedic conditions. A retrospective study of sixty dogs and cats. Vet. Comp. Orthop. Traumatol. 2011;24:126-131. 8. Piermattei DL, Flo GL, DeCamp. Fractures and other orthopedic conditions of the carpus, metacarpus and phalanges. In: Piermattei DL, Flo GL, DeCamp CE, eds. Brinker, Piermattei, and Flo’s handbook of small animal orthopedics and fracture repair (ed 4). Saunders/Elsevier, St Louis, MO. 2006;382-428. 9. Whitelock RG, Dyce J, Houlton JE. Metacarpal fractures associated with pancarpal arthrodesis in dogs. Vet. Surg. 1999;28:25-30. 10. Wininger FA, Kapatkin AS, Radin A et coll. Failure mode and bending moment of canine pancarpal arthrodesis constructs stabilized with two different implant systems. Vet. Surg. 2007;36:724-728. 11. Woods S, Wallace RJ, Mosley JR. The effect of external coaptation on plate deformation in an ex vivo model of canine ancarpal arthrodesis. Vet. Comp. Orthop. Traumatol. 2012;25:439-444.

CONFLIT D’INTÉRÊTS

Aucun.

OBJECTIF

Dans une large population de chiens, comparer les résultats obtenus lors d’une panarthrodèse du carpe par deux types de plaque : plaque castless (CLP pour castless plate) ou plaque de compression dynamique hybride (HDCP pour hybrid dynamic compression plate).

MÉTHODE

Étude rétrospective multicentrique (12 centres) menée sur 219 chiens ayant subi une panarthrodèse du carpe. Un questionnaire destiné à être complété par des orthopédistes a été envoyé aux centres volontaires. Les principales données récoltées étaient la cause de l’arthrodèse, le type d’implant orthopédique employé, l’utilisation d’un moyen de contention externe en phase post­opératoire, l’existence d’une complication per- ou postopératoire (mineure, majeure, catastrophique, liée ou non à un moyen de contention externe). Le suivi a été renseigné en ce qui concerne l’intensité de la boiterie (absente, légère, modérée, sévère) et la guérison osseuse radiographique.

RÉSULTATS

• 125 cas opérés avec une HDCP, 105 cas opérés avec une CLP.

• Cause d’arthrodèse la plus commune : blessure par hyperextension du carpe.

• Complication postopératoire la plus commune : infection du site chirurgical (18,3 %).

• Aucune différence en ce qui concerne les complications per- et postopératoires pour les HDCP et CLP (respectivement 11 et 21 % en phase per­opératoire, et 34 et 41 % en phase postopératoire).

• Aucun effet de l’ajout d’un moyen de contention externe sur le résultat ou le taux de complications postopératoires.

• Complications postopératoires engendrées par le moyen de contention externe : 32 % des cas de HDCP et 18 % des cas de CLP.

• Lors du suivi : pas de boiterie ou boiterie légère chez la plupart des individus (73 % des cas de HDCP et 83 % des cas de CLP). Guérison osseuse chez 40 % des cas de HDCP et 46 % des cas de CLP.

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