La luxation de rotule chez le chien - Le Point Vétérinaire expert canin n° 340 du 01/11/2013
Le Point Vétérinaire expert canin n° 340 du 01/11/2013

CHIRURGIE ORTHOPÉDIQUE CANINE

Analyse d’article

Auteur(s) : Alexandre Caron

Fonctions : Fitzpatrick Referrals Ltd
Halfway Eashing Iane
Godalming GU72QQ
Surrey, United Kingdom

La stabilité de la patelle est assurée par un axe entre le quadriceps, la trochlée fémorale et la tubérosité tibiale. Une modification anatomique suffisante d’une ou de plusieurs de ces structures peut mener à une luxation de la patelle, latérale ou médiale.

ÉPIDÉMIOLOGIE

La luxation de la patelle (LP) est le plus souvent médiale (LMP) et concerne majoritairement des chiens de petite race. Néanmoins, les chiens de taille moyenne à grande sont touchés de manière non négligeable par la LMP. La fréquence de la luxation latérale est faible. Cette maladie est tout de même plus courante chez les chiens de race moyenne à grande que chez ceux de petite race. Une luxation bilatérale est présente dans 50 à 65 % des cas [1, 3, 6].

Aucune cause précise n’a été identifiée expliquant le développement d’une LP, hormis les cas où un traumatisme a engendré une déformation osseuse sur l’axe extenseur du grasset. Cependant, une mauvaise conformation de la hanche (coxa vara/coxa valga) pourrait mener à une LP. Chez les chiens de grande race, une position plus proximale de la patelle (patella alta) pourrait être associée à un plus fort risque de luxation médiale [7, 10].

Une rupture du ligament croisé cranial (RLCCr) peut être également présente et est rapportée dans environ 40 % des cas de LMP : un âge plus avancé et un grade de luxation plus élevé sont deux facteurs de risque pour la présence d’une RLCCr concomitante [4].

QUAND OPÉRER ?

La majorité des cas de LP bénéficie d’un traitement chirurgical. Les luxations de grade 3 et de grade 4, ainsi que les luxations de grade 2 responsables d’une boiterie (majorité des cas) requièrent une correction chirurgicale. Les luxations de grade 1 peuvent être gérées de manière non chirurgicale, la physiothérapie et l’hydrothérapie visant le ren for cement musculaire des quadriceps et la stabilisation du grasset en rotation.

En cas de LP chez le chien en croissance, les techniques de correction osseuse doivent être évitées au maximum de manière à conserver les plaques de croissance intactes. Néanmoins, il convient de réaligner la patelle le plus tôt possible afin d’éviter le développement de déformations osseuses secondaires plus sévères. Il est alors important de prévenir les propriétaires de la possibilité d’une réintervention chirurgicale à l’âge adulte.

TECHNIQUES CHIRURGICALES

L’objectif de la correction chirurgicale est le re po si tionnement de la patelle, ce qui nécessite impérativement une neutralisation des forces latéro-médiales engendrées par les anomalies structurelles. Cela revient à rétablir un bon alignement des structures anatomiques mentionnées ci-dessus.

Les techniques les plus simples visent à modifier les tensions sur les tissus mous péripatellaires : imbrication capsulaire/ fascia du côté opposé à la luxation parfois associé à un relâchement controlatéral.

Le réalignement des structures distales à la patelle passe impérativement par un repositionnement de la tubérosité tibiale (TT). Cela implique une transposition de la TT ou bien une ostéotomie tibiale correctrice en cas de déviation angulaire. Ainsi, dans les cas graves de déviation angulaire tibiale ou fémorale, une ou des ostéotomies correctrices peuvent être nécessaires. Le résultat clinique est décevant lors de traitement chirurgical simple en présence de déformations angulaires responsables de la LP. Cet aspect du traitement ne doit pas être négligé [11].

TROCHLÉOPLASTIE

Différentes techniques de modification de la trochlée fémorale ont été décrites, dont une nouvelle dans l’article résumé [5]. La trochléoplastie excisionnelle a été abandonnée au profit des autres méthodes préservant le cartilage. La chondroplastie trochléaire consiste à élever le cartilage trochléaire de l’os sous-chondral qui, lui, sera partiellement retiré, puis recouvert par le cartilage préservé. Techniquement délicate, cette procédure est réservée aux chiens très jeunes chez qui la correction trochléaire doit être évitée autant que possible.

Les trois autres techniques consistent à retirer le cartilage et l’os sous-chondral associé, puis à les remettre en position après résection d’une épaisseur d’os sous-chondral supplémentaire. Il est recommandé d’obtenir un résultat où la moitié de la patelle serait située dans la fosse trochléaire. La méthode décrite dans l’article résumé vise à élever la lèvre trochléaire médiale plutôt qu’à creuser l’ensemble de la fosse trochléaire [5]. La résection en bloc plutôt qu’en coin de la trochlée semble obtenir des résultats plus satisfaisants en termes de résultat anatomique [8]. Cependant, aucune étude clinique ne compare les différentes techniques de trochléoplastie.

Un essai récent rapporte de bons résultats lors de correction chirurgicale de LMP sans trochléoplastie [9]. Cette technique a, en effet, été historiquement recommandée dans beaucoup de cas, mais il semblerait qu’elle ne soit nécessaire que lors d’hypoplasie sévère de la trochlée fémorale et que les procédures de réalignement doivent être privilégiées.

Conclusion

Le pronostic fonctionnel à long terme est bon à excellent après la correction chirurgicale. Le taux de complications chirurgicales est acceptable (18 %, 13 % pour les complications majeures) avec un taux de reluxation de 8 % [2]. Le risque de complications est plus élevé chez les chiens de plus de 20 kg et est positivement corrélé au degré de luxation. Le résultat fonctionnel à long terme dépend du développement de l’arthrose, argument menant à restreindre la réalisation d’une trochléoplastie.

Références

  • 1. Alam MR, Lee JI, Kang HS et coll. Frequency and distribution of patellar luxation in dogs. 134 cases (2000 to 2005). Vet. Comp. Orthop. Traumatol. 2007;20(1):59-64.
  • 2. Arthurs GI, Langley- Hobbs SJ. Complications associated with corrective surgery for patellar luxation in 109 dogs. Vet. Surg. 2006;35(6):559-566.
  • 3. Bound N, Zakai D, Butterworth SJ et coll. The prevalence of canine patellar luxation in three centres. Clinical features and radiographic evidence of limb deviation. Vet. Comp. Orthop. Traumatol. 2009;22(1):32-37.
  • 4. Campbell CA, Horstman CL, Mason DR et coll. Severity of patellar luxation and frequency of concomitant cranial cruciate ligament rupture in dogs: 162 cases (2004-2007). J. Am. Vet. Med. Assoc. 2010;15;236 (8):887-891.
  • 5. Fujii K, Watanabe T, Kobayashi T et coll. Medial ridge elevation wedge trochleoplasty for medial patellar luxation: a clinical study in 5 dogs. Vet. Surg. 2013;42(6):721-726.
  • 6. Gibbons SE, Macias C, Tonzing MA et coll. Patellar luxation in 70 large breed dogs. J. Small Anim. Pract. 2006;47(1):3-9.
  • 7. Johnson AL, Broaddus KD, Hauptman JG et coll. Vertical patellar position in largebreed dogs with clinically normal stifles and largebreed dogs with medial patellar luxation. Vet. Surg. 2006;35(1):78-81.
  • 8. Johnson AL, Probst CW, Decamp CE et coll. Comparison of trochlear block recession and trochlear wedge recession for canine patellar luxation using a cadaver model. Vet. Surg. 2001;30(2):140-150.
  • 9. Linney WR, Hammer DL, Shott S. Surgical treatment of medial patellar luxation without femoral trochlear groove deepening procedures in dogs: 91 cases (1998-2009). J. Am. Vet. Med. Assoc. 2011;238(9):1168-1172.
  • 10. Mostafa AA, Griffon DJ, Thomas MW et coll. Proximodistal alignment of the canine patella: radiographic evaluation and association with medial and lateral patellar luxation. Vet. Surg. 2008;37(3):201-211.
  • 11. Swiderski JK, Palmer RH. Long-term outcome of distal femoral osteotomy for treatment of combined distal femoral varus and medial patellar luxation: 12 cases (1999-2004). J. Am. Vet. Med. Assoc. 2007;231(7):1070-1075.

Conflit d’intérêts

Aucun.

RÉSUMÉ

OBJECTIFS

Développer une technique chirurgicale d’élévation de la crête médiale de la trochlée fémorale par greffe ostéochondrale autogène asymétrique. Évaluer son efficacité clinique chez 5 chiens (6 grassets).

MÉTHODE

• L’ostéotomie médiale commence en regard de la crête trochléaire fémorale médiale (CTFM) et se termine cranialement à l’insertion des ligaments croisés, avec un angle de 10 à 20°. L’ostéotomie latérale commence au niveau de la crête latérale et rejoint l’ostéotomie médiale caudalement. La hauteur voulue de la CTFM correspond à la moitié de la hauteur de la patelle.

• Une fois l’ostéotomie réalisée, la pièce ostéochondrale est pivotée de 180° de manière que la portion distale de la trochlée soit placée proximalement. La géométrie de l’ostéotomie permet d’obtenir une élévation de la CTFM. La greffe ostéochondrale est stabilisée avec une broche placée latéro-médialement dans les condyles fémoraux.

• Cinq chiens avec une luxation médiale de la patelle de grade 3 sont inclus. Une hypoplasie de la crête médiale de la trochlée fémorale est identifiée radiographiquement. Le degré subjectif de boiterie, la circonférence de la cuisse et le grade de luxation de la patelle sont évalués à court, moyen et long termes.

RÉSULTATS

Aucune complication opératoire n’est rapportée. À 3 et 6 mois après l’intervention chirurgicale, 50 % des grassets étaient indemnes de luxation, les 50 % restants présentant une luxation de grade 1. Aucune luxation n’est observée à 1 et à 2 ans. Le score de boiterie est statistiquement plus faible à 3 et à 6 mois, et la circonférence de la cuisse est plus importante. Aucune boiterie n’est relevée à 1 et à 2 ans. Un scanner chez 2 chiens a confirmé l’élévation de la CTFM et le bon positionnement de la patelle.

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