Syndrome de la queue de cheval : traitement et pronostic - Le Point Vétérinaire n° 338 du 01/09/2013
Le Point Vétérinaire n° 338 du 01/09/2013

NEUROLOGIE CANINE ET F…LINE

Dossier

Auteur(s) : Laetitia Piane*, Marion Fusellier**, Dominique Fanuel***

Fonctions :
*Centre hospitalier universitaire vétérinaire
École nationale vétérinaire agroalimentaire
et de l’alimentation Nantes Atlantique-Oniris,
Atlanpôle La Chantrerie, Route de Gachet,
BP 40706, 44307 Nantes Cedex 3

Le choix du traitement médical ou chirurgical, et le pronostic lors de syndrome de la queue de cheval dépendent principalement de l’étiologie et de la sévérité des signes cliniques présents.

Après avoir conduit un examen clinique minutieux et eu recours à des examens d’imagerie adaptés, le praticien connaît la cause du syndrome de la queue de cheval (SQC) auquel il est confronté. Il peut ensuite choisir le traitement le plus adapté (médical ou chirurgical), en fonction de l’animal, de la cause du SQC et de la gravité des signes cliniques associés.

1 Traitement médical

Les indications du traitement médical sont multiples.

Fractures ou luxations vertébrales

Lors de fractures ou de luxations vertébrales pour lesquelles l’atteinte neurologique est discrète (douleur, parésie modérée sans incontinence), le traitement médical peut être suffisant, si aucune instabilité vertébrale radiologique ou clinique n’est présente [8].

Affections de nature infectieuse

En cas de spondylodiscite, un traitement conservateur avec un repos strict pendant 6 semaines, une antibiothérapie prolongée de 8 à 12 semaines pour lutter contre l’infection, et des anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) pour l’analgésie sont préconisés [8].

Affections dégénératives

Lors d’affections dégénératives pour lesquelles la clinique ne présente aucun critère de gravité, un traitement conservateur est préconisé en première intention. Son objectif principal est de réduire la douleur et d’améliorer le confort de l’animal. Il associe un repos strict, une perte de poids, des AINS et des opioïdes. L’utilisation de corticoïdes systémiques est controversée car le même effet analgésique peut être obtenu avec des AINS pour de moindres effets secondaires [4].

L’injection épidurale d’acétate de méthylprednisolone semble également donner de bons résultats avec 79 % d’amélioration et 53 % de guérison totale. Cette technique semble être une alternative séduisante, plus sûre et moins invasive, à la chirurgie décompressive [3].

Affections tumorales

Lors d’affections tumorales pour lesquelles l’exérèse chirurgicale complète est impossible, il convient d’instaurer un traitement palliatif (opioïdes, corticoïdes, éventuellement chimiothérapie), afin d’améliorer le confort de l’animal.

2 Traitement chirurgical

Le traitement chirurgical est indiqué dans plusieurs circonstances : lors d’échec du traitement médical, de rechute, de fracture vertébrale instable, lorsque la douleur devient chronique et trop importante, ou que le tableau clinique signe une grave atteinte nerveuse (paraplégie, incontinence urinaire ou fécale, etc.) [8].

Le traitement chirurgical consiste à décompresser les racines nerveuses de la queue de cheval [1, 4]. La technique de décompression par laminectomie dorsale a montré d’excellents résultats, avec un pourcentage de récupération allant de 78 à 93 % selon les études (photo) [1, 2, 6]. Cette technique peut être associée à une stabilisation vertébrale si nécessaire.

Il ne s’agit pas de la seule technique chirurgicale utilisable puisque lors de compression latéralisée par exemple, une foraminotomie L7-S1 est beaucoup plus indiquée.

3 Pronostic

Le pronostic du SQC dépend de l’affection qui en est à l’origine, de la gravité et de la chronicité des signes nerveux présents (encadré).

Fractures ou luxations vertébrales

Lors de fracture ou de luxation vertébrale, le pronostic dépend de l’atteinte nerveuse. En cas de neurapraxie ou d’axonotmésis, la continuité du nerf étant conservée, les chances de récupération fonctionnelle sont proportionnellement plus élevées. En revanche, elles sont faibles lors d’interruption complète des nerfs (neurotmésis). Le pronostic est généralement bon, malgré des déplacements parfois spectaculaires [8].

L’étude de Tatton et coll. en 2009, portant sur le pronostic de récupération du contrôle de la miction chez les chats après un traumatisme sacro-coccygien, tire plusieurs conclusions [7]. Si la sensibilité à la base de la queue est présente, le contrôle de la miction est recouvré dans 100 % des cas, en 2 jours en moyenne. Si elle est absente, il n’est recouvré que dans 60 % des cas, dans les 30 jours. La sensibilité et la spécificité de ce test pour prédire le pronostic de récupération du contrôle de la miction sont respectivement de 64,7 et de 100 %. En revanche, si aucune sensibilité n’est présente, il est plus difficile de se prononcer (valeur prédictive négative de 40 %), mais le pronostic reste plus réservé. Cette même étude montre aussi que, en cas de sensibilité présente à la base de la queue, le recouvrement de la fonctionnalité de celle-ci s’effectue dans 89 % des cas. À l’inverse, si elle est absente, ce taux est de 14 % seulement [7].

Affections de nature infectieuse

Lors de spondylodiscite, le pronostic est excellent si la stabilité est conservée. Le traitement médical est efficace dans 75 % des cas, avec une amélioration clinique dans les 3 premières semaines et une récupération fonctionnelle complète en 2 à 3 mois. Le pronostic est réservé lorsqu’une instabilité et une sténose importantes ont motivé une chirurgie [8].

Affections dégénératives

L’étude de De Risio et coll. portant sur les facteurs pronostiques chez les chiens atteints d’une instabilité lombo-sacrée traitée par laminectomie dorsale décompressive révèle que le pronostic postchirurgical est généralement bon à excellent, avec environ 78 % des chiens qui récupèrent après 38 mois en moyenne (+/– 22 mois). Cependant, une récurrence des signes cliniques est observée dans 18 % des cas [1].

Le pronostic de récupération est largement meilleur pour les animaux continents avant la chirurgie. De plus, une incontinence urinaire évoluant depuis plus d’un mois avant l’intervention chirurgicale est un facteur pronostique négatif [2].

Affections tumorales

Lors de processus néoplasique, le pronostic dépend de la nature de la tumeur, mais reste généralement mauvais [8].

De manière générale et quelle que soit l’affection causale, les facteurs qui assombrissent le pronostic sont une incontinence urinaire et/ou fécale, un mégacôlon, une dysplasie coxo-fémorale concomitante ou une lésion orthopédique associée [7].

Conclusion

Les causes de SQC étant multiples, le traitement est avant tout étiologique. Le pronostic de récupération dépend de la cause. L’incontinence urinaire est un facteur pronostique négatif, et d’autant plus si elle est chronique. La sensibilité à la base de la queue doit être évaluée car, si elle est présente, le contrôle de la miction est rapidement recouvré.

Références

  • 1. Danielsson F, Sjostrom L. Surgical treatment of degenerative lumbosacral stenosis in dogs. Vet. Surg.1999 ; 28 : 91-98.
  • 2. De Risio L, Sharp NJH et coll. Predictors of outcome after dorsal decompressive laminectomy for degenerative lumbosacral stenosis in dogs : 69 cases (1987-1997). J. Am. Vet. Med. Assoc. 2001 ; 219 : 624-628.
  • 3. Janssens J, Béosier Y, Daems R. Lumbosacral degenerative stenosis in the dog. The results of epidural infiltration with methylprednisolone acetate : a retrospective study. Vet. Comp. Orthop. Traumatol . 2009 ; 22 : 486-491.
  • 4. Meij BP, Bergknut N. Degenerative lumbosacral stenosis in dogs. Vet. Clin. North Am. Small Anim. Pract. 2010 ; 40(5): 983-1009.
  • 5. Srenk P. Cauda equina, clinical manifestations, diagnosis and prognosis. In : Proceedings of the 27th WSAVA Congress. 2002 : 45.
  • 6. Suwankong N et coll. Review and retrospective analysis of degenerative lumbosacral stenosis in 156 dogs treated by dorsal laminectomy. Vet. Comp. Orthop. Traumatol . 2008 ; 21(3): 285-293.
  • 7. Tatton B et coll. Predicting recovery of urination control in cats after sacrocaudal injury : a prospective study. J. Small Anim. Pract. 2009 ; 50 : 593-596.
  • 8. Viateau V, Moissonnier P. Le syndrome queue de cheval . 2e partie : diagnostic et traitement. Point Vét. 1991 ; 136 : 65-78.

Conflit d’intérêts

Aucun.

ENCADRÉ
Facteurs pronostiques du syndrome de la queue de cheval

→ Positifs:

– sensibilité de la queue présente ;

– pas d’incontinence urinaire ou fécale.

→ Négatifs:

– neurotmésis ;

– incontinence urinaire et/ou fécale d’une durée supérieure à 1 mois ;

– mégacôlon ;

– dysplasie coxo-fémorale ou autre lésion orthopédique concomitante.

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