GASTRO-ENTÉROLOGIE
Analyse d’article
Auteur(s) : Mathieu Faucher
Fonctions : Clinique vétérinaire Alliance
8, boulevard Godard 33300 Bordeaux
Une intussusception est l’invagination d’un segment de tube digestif dans la lumière d’un segment adjacent. Elle peut résulter en une obstruction partielle ou totale et en des lésions pariétales dépendantes du degré de compromis vasculaire. Une intussusception peut survenir à n’importe quel endroit du tube digestif mais la jonction iléo-colique est la région la plus souvent concernée.
Chez les chiens, une intussusception est plus fréquemment rencontrée chez des individus jeunes [6]. La prévalence des entérites, notamment infectieuses et parasitaires, est élevée chez les jeunes chiens, ce qui pourrait expliquer cette prédisposition [7]. Les intussusceptions idiopathiques restent cependant les plus fréquentes. Dans l’espèce féline, une prédisposition des jeunes individus est également rapportée, mais une étude récente rapporte une distribution bimodale de l’âge des chats atteints d’intussusception (la plupart des chats ont moins d’un an ou plus de 6 ans dans cette étude) [1]. Les résultats de notre étude concordent avec ces données : l’âge médian des chiens (7,5 mois) est significativement plus faible que celui des chats (36 mois).
Lorsqu’un diagnostic histologique est obtenu, une inflammation digestive est le plus souvent identifiée chez les chiens, tandis qu’un néoplasme est plus fréquemment identifié chez les chats. Cela est probablement lié à la différence d’âge observée entre les deux groupes.
Enfin, les animaux sans diagnostic histologique sont plus jeunes que ceux pour lesquels un diagnostic histologique est obtenu (âges médians respectifs de 12 et 29 mois). Les auteurs expliquent cela par une prévalence plus importante des maladies inflammatoires intestinales et des tumeurs digestives (facilement identifiables par l’examen histologique) chez les animaux âgés. En médecine humaine, seulement 10 % des intussusceptions survenant chez des patients pédiatriques présentent une cause identifiée. Les autres sont qualifiées d’idiopathiques et pourraient se former à la suite d’anomalies anatomiques, infectieuses ou fonctionnelles [2,8]. Chez les adultes, 90 % des intussusceptions sont secondaires à un processus intestinal pathologique [2].
De manière attendue, les intussusceptions sont plus fréquemment iléo-cæcales ou situées le long de l’intestin grêle (jéjuno-iléales, iléales), plus rarement colono-coliques. La localisation de l’intussusception n’est pas prédictive du diagnostic histologique dans cet essai. En médecine humaine, certaines études rapportent une origine tumorale plus fréquente lors de localisation colique [2]. La fréquence des tumeurs du côlon pourrait expliquer ces résultats. Lors de localisation grêle, une origine bénigne est attendue dans 50 à 75 des cas [2].
Un diagnostic histologique est plus facilement obtenu lorsque des biopsies digestives supplémentaires sont réalisées lors de l’intervention chirurgicale. La nature rétrospective de cette étude n’a pas permis d’évaluer tous les animaux selon un protocole standardisé et il n’est pas précisé pourquoi chez certains, d’autres prélèvements ont été réalisés pendant l’acte chirurgical. Un index de suspicion élevé pour une maladie intestinale a pu conduire à réaliser des biopsies additionnelles. Une étude prospective évaluant spécifiquement le bénéfice de biopsies digestives supplémentaires lors d’une intussusception paraît donc indiquée, avant que des recommandations en ce sens ne puissent être émises.
Lors de suspicion d’une maladie inflammatoire chronique de l’intestin, la réalisation de multiples biopsies est conseillée. Il n’existe pas de nombre de biopsies recommandé mais la probabilité d’identifier une lésion augmente avec le nombre de biopsies obtenues [9,11]. La probabilité augmente aussi avec la qualité des biopsies et varie avec le type de lésion recherchée [9, 11]. Les biopsies transpariétales obtenues par laparotomie peuvent être réalisées sur tous les segments du tube digestif, y compris ceux inaccessibles au cours d’une endoscopie. Elles sont jugées adéquates pour l’obtention d’un diagnostic histologique et particulièrement utiles pour diagnostiquer le lymphome digestif [3, 4, 5]. Dans cette étude, il n’est pas précisé combien de biopsies intestinales supplémentaires ont été réalisées et si elles ont été étagées le long du tube digestif.
La première limite de cette étude réside dans sa nature rétrospective qui a conduit à la réalisation de biopsies digestives supplémentaires au cas par cas, pouvant ainsi surévaluer leur intérêt.
La plupart des cas ont été suivis avant la publication de recommandations pour l’évaluation histologique de l’inflammation digestive [9]. De plus, l’évaluation de biopsies digestives donne des résultats dépendants de l’opérateur [10]. Classer les animaux selon un diagnostic obtenu par plusieurs pathologistes différents selon un protocole non standardisé constitue une limite importante de cette étude. Cependant, les auteurs avancent que la classification adoptée est simple (maladie inflammatoire, néoplasie ou absence de diagnostic) et pallie cette limite.
Cette étude permet de préciser quelles affections sont susceptibles d’être à l’origine d’une intussusception, selon le signalement de l’animal. La localisation n’est cependant pas prédictive de l’affection sous-jacente. La réalisation de biopsies intestinales supplémentaires lors de l’intervention chirurgicale pourrait augmenter la probabilité d’obtenir un diagnostic histologique, même si cela doit être confirmé par une étude prospective.
OBJECTIFS
• Évaluer les anomalies histologiques lors d’intussusception chez le chien et chez le chat.
• Évaluer l’intérêt de biopsies supplémentaires pour identifier une maladie sous-jacente.
MÉTHODE
Les dossiers médicaux des animaux opérés pour une intussusception (In) sont évalués de manière rétrospective. Les données relatives au signalement, à la localisation de l’In et au diagnostic histologique sont collectées. Trois groupes sont définis en fonction du diagnostic histologique : le groupe I (maladie inflammatoire), le groupe N (néoplasie) et le groupe ND (absence de diagnostic).
RÉSULTATS
Trente et un chiens et 18 chats sont inclus. L’âge médian des chiens est de 7,5 mois, celui des chats de 36 mois (différence significative).
• Il n’existe pas de différence significative de localisation de l’intussusception entre les chats et les chiens. Le groupe I comprend 43 % des animaux, le groupe N, 14,3 % et le groupe ND, 42,9 %. Aucune association n’est trouvée entre la localisation de l’intussusception et le groupe.
• Un diagnostic histologique est obtenu dans 57,1 % des cas. Lorsque des biopsies digestives additionnelles sont réalisées, la probabilité d’obtenir un diagnostic histologique est augmentée : 85 % versus 46,9 % lorsque seule l’In est soumise à l’histologie.
• Lorsqu’un diagnostic histologique est obtenu, il est plus fréquent d’identifier une maladie inflammatoire chez les chiens, tandis qu’un néoplasme est plus fréquemment identifié chez les chats.
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