Les tumeurs pulmonaires : comparaison entre les formes humaines et canines - Le Point Vétérinaire expert canin n° 329 du 01/10/2012
Le Point Vétérinaire expert canin n° 329 du 01/10/2012

ONCOLOGIE COMPARÉE

Fiche

Auteur(s) : François Serres

Fonctions : Oncovet
Clinique vétérinaire des référés
Avenue Paul-Langevin
59650 Villeneuve-d’Ascq

Les tumeurs pulmonaires humaines et canines diffèrent par leur étiopathogénie. Le pronostic dépend, dans les deux espèces, du bilan d’extension de l’affection.

Les tumeurs pulmonaires sont la première cause de mort par cancer chez l’homme dans les dernières décennies, avec plus d’un million de décès chaque année à l’échelle mondiale (représentant plus de 12 % des cancers et plus de 17 % de la mortalité liée au cancer). Deux principaux types de tumeurs pulmonaires primitives sont distinguées : les tumeurs à petites cellules et celles « non à petites cellules ». Ces types diffèrent par leurs étiopathogénies (même si un lien avec le tabagisme est trouvé pour tous ces cancers), mais aussi et surtout par leurs modalités de prise en charge et leurs pronostics.

En comparaison, ces tumeurs sont plus rares et pré-sentent un pronostic souvent plus favorable chez le chien.

Épidémiologie et étiopathogénie

La prévalence des tumeurs pulmonaires est étroitement liée à celle du principal facteur favorisant que constitue le tabagisme (actif et passif). L’exposition prolongée à certains agents toxiques (arsenic, amiante, etc.) et aux radiations ionisantes, ainsi que la présence d’antécédents familiaux augmentent également significativement le risque de développer ce type de cancer. La quasi-totalité des tumeurs primitives pulmonaires sont d’origine épithéliale. D’un point de vue histologique, huit groupes sont distingués, réunis en deux grandes catégories partageant des caractéristiques pronostiques et thérapeutiques similaires :

– les carcinomes à petites cellules, d’origine neuro-endocrine, représentant environ 15 % des tumeurs pulmonaires primitives. Outre leur petite taille, ces cellules sont caractérisées histologiquement par un très haut taux de mitose et la présence de zones de nécrose (critère pronostique souvent défavorable en oncologie) ;

– les carcinomes “non à petites cellules” regroupant des cellules de caractéristiques histologiques beaucoup plus variables (adénocarcinome et carcinome épidermoïde, représentant chacun un tiers des tumeurs pulmonaires, carcinome neuro-endocrine à grandes cellules, carcinoïde, etc.).

L’incidence des affections tumorales pulmonaires primitives est nettement moindre chez le chien (1 % des tumeurs) et encore plus faible chez le chat. Aucun facteur favorisant n’a été identifié chez le chien et le chat. Les adénocarcinomes sont largement prédominants, les carcinomes épidermoïdes (de pronostic moins favorable) sont plus rarement rencontrés [1].

Diagnostic

La plupart des cas observés chez le chien sont présentés à un stade “symptomatique”, à la suite de l’observation d’une perte de poids, d’une fatigabilité, d’une toux, voire d’une hémoptysie. L’aspect radiographique des lésions est souvent très évocateur (photo 1). Des cytoponctions, voire des biopsies, sont souvent réalisées pour confirmer la nature de la lésion. Un examen tomodensitométrique est recommandé si un traitement chirurgical est préconisé (photo 2). Contrairement à ce qui se passe chez l’homme, les syndromes paranéoplasiques (particulièrement l’ostéopathie hypertrophique) sont nettement plus rares.

Chez l’homme, le diagnostic anatomopathologique repose sur une biopsie par endoscopie bronchique, ou sur un prélèvement de nœud lymphatique (par écho-endoscopie bronchique ou transœsophagienne ou ponction d’une adénopathie) ou d’une métastase (sous-cutanée, hépatique, osseuse, etc.). L’examen tomodensitométrique (thorax et abdomen) reste l’examen de choix pour l’évaluation du stade clinique TNM (T pour tumeur [au niveau local], N pour nœud lymphatique, M pour métastase, selon une convention internationale), complété par une scintigraphie osseuse.

La réalisation d’un examen de dépistage “systématique” chez l’homme ne fait pas, pour le moment, l’objet d’un consensus. Un examen radiographique de dépistage n’a pas permis d’améliorer le pronostic. L’emploi d’un examen tomodensitométrique, s’il augmente le dépistage précoce d’une forme bénigne, ne diminue pas a priori la mortalité associée à ces tumeurs. Chez le chien et le chat, la rareté de ces affections rend inutile toute démarche de dépistage systématique.

Évolution et traitement

Le pronostic dépend essentiellement de la nature histologique et de l’extension de l’affection au moment du diagnostic, quelle que soit l’espèce.

Chez l’homme, les carcinomes bronchiques à petites cellules sont le plus souvent (dans deux tiers des cas) diagnostiqués à un stade métastatique, et ils ne sont habituellement pas opérés. Ces tumeurs sont très sensibles aux traitements cytotoxiques (chimiothérapie et radiothérapie), mais caractérisées par l’apparition d’une chimio – ou radiorésistance relativement rapide et les récidives sont très fréquentes. La survie à 5 ans est d’environ 20 à 25 % pour les formes limitées et de moins de 5 % pour les formes disséminées. Lors de carcinome « non à petites cellules », l’intervention chirurgicale reste, quand elle est possible, le traitement de référence et est associée à un pronostic nettement plus favorable (survie à 5 ans supérieure à 60 % pour les stades non métastatiques au diagnostic). Chez le chien, le pronostic est essentiellement lié à l’extension de la maladie au diagnostic : taille de la lésion, présence d’une métastase pulmonaire ou d’un épanchement tumoral néoplasique associé (photos 3 et 4). Le taux de survie à un an est nettement supérieur à 50 % pour un animal ne présentant pas de facteur pronostique péjoratif [1, 2].

Traitement adjuvant de référence

Pour les carcinomes à petites cellules, les molécules cytotoxiques “de référence” sont les dérivés platinés (association cisplatine-étoposide) et le paclitaxel. L’emploi de certaines thérapies ciblées (en particulier l’erlotinib, un inhibiteur de tyrosine kinase, et le bevacizumab, un inhibiteur d’angiogenèse) a permis d’améliorer le pronostic de ces affections. Chez le chien, l’intérêt de la vinorelbine, encore peu employée en première intention chez l’homme, est de plus en plus avancé [3].

Références

  • 1. Ogilvie GK, Haschek WM, Withrow SJ. Classification of primary lung tumors in dogs : 210 cases (1975-1985). J. Am. Vet. Med. Assoc. 1989 ; 195 : 106-108.
  • 2. Ogilvie GK, Weigel RM, Haschek WM et coll. Prognostic factors for tumor remission and survival in dogs after surgery for primary lung tumor : 76 cases (1975-1985). J. Am. Vet. Med Assoc. 1989 ; 195 : 109-112.
  • 3. Poirier VJ, Burgess KE, Adams WM, Vail DM. Toxicity, dosage, and efficacy of vinorelbine (Navelbine) in dogs with spontaneous neoplasia. J. Vet. Intern. Med. 2004 ; 18 : 536-539.
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