ONCOLOGIE COMPARÉE
Fiche
Auteur(s) : François Serres
Fonctions : Oncovet
Clinique vétérinaire des référés
Avenue Paul-Langevin
59650 Villeneuve-d’Ascq
Les principales différences entre les tumeurs hépatiques humaines et canines sont liées à l’étiopathogénie.
Les tumeurs hépatiques constituent la troisième entité cancéreuse en termes de mortalité chez l’homme (derrière les cancers du poumon et de l’estomac) dans les dernières décennies. Sur le plan histologique, quatre types de tumeurs hépatiques primitives sont classiquement décrits : des carcinomes hépatocellulaires (issus des hépatocytes), des cholangiocarcinomes (provenant des parois biliaires) et des sarcomes hépatiques et carcinoïdes (tumeurs d’origine neuro-endocrine). Cependant, les carcinomes hépatocellulaires représentent la majorité de ces cancers, et ce dans la plupart des espèces. Les lésions métastatiques hépatiques (issues notamment de cancers pancréatiques ou du tube digestif) ne sont pas évoquées. Elles sont extrêmement fréquentes dans toutes les espèces (les trois quarts des lésions hépatiques tumorales observées chez le chien sont des métastases), mais leur prise en charge est radicalement différente.
La prévalence des tumeurs hépatiques (en particulier des hépatocarcinomes) chez l’homme est étroitement liée à la présence de facteurs favorisants qui sont pour la plupart bien identifiés. Il s’agit d’expositions répétées à des substances toxiques (alcool ou aflatoxine), de certains agents infectieux (en premier lieu, les hépatites B et C) et du diabète de type 2 non contrôlé. Selon les régions du monde, les facteurs favorisants “prédominants” sont différents (l’hépatite B est prédominante en Chine alors que la cirrhose alcoolique est le plus souvent incriminée dans les pays occidentaux). Cependant, dans près de 25 % des cas, aucune cause évidente n’est identifiée. Les cholangiocarcinomes sont également associés à l’évolution de lésions de cholangiohépatite chronique (parasitaires, inflammatoires ou liées à des lithiases).
L’incidence des affections tumorales hépatiques primitives est moindre chez le chien et le chat, pour lesquels elles représentent 1 à 2 % des tumeurs. Le rôle favorisant d’une affection hépatique chronique sur le développement des carcinomes hépatocellulaires n’est pas retrouvé chez le chien et le chat. Une prédisposition des schnauzers miniatures et des chiens mâles aux carcinomes hépatocellulaires est rapportée, les chats, les chiennes et les labradors présentant une prédisposition aux cholangiocarcinomes [2, 4].
Dans les trois espèces, et quelle que soit la nature histologique de la lésion, les tumeurs hépatiques primitives peuvent se présenter sous trois formes : une forme massive avec une lésion unique, occupant tout ou partie d’un lobe, une forme nodulaire, multicentrique, atteignant plusieurs lobes simultanément, et une forme diffuse dans laquelle la distinction entre les tissus sain résiduel et tumoral s’efface. Alors que la plupart des lésions (notamment pour les carcinomes hépatocellulaires) chez le chien se présentent sous une forme massive, chez l’homme, les formes nodulaires et diffuses prédominent, ce qui correspond à l’évolution tumorale multicentrique d’une hépatopathie diffuse. Les conséquences de cette différence sur le traitement sont importantes.
La plupart des cas observés chez le chien sont présentés à un stade symptomatique précoce, à la suite d’une perte de poids, d’une dysorexie ou de la palpation d’une masse abdominale, mais avant l’apparition de signes d’insuffisance hépatique. De rares cas présentent des lésions cutanées plus ou moins étendues (photo 1). L’aspect échographique des lésions est souvent très évocateur. Cependant, des cytoponctions, voire des biopsies, sont souvent réalisées pour confirmer leur nature (photos 2 et 3). Le bilan sanguin met fréquemment en évidence une élévation des enzymes de cytolyse (non spécifique), une anémie et une thrombocytose (dont l’origine reste indéterminée). Un examen tomodensitométrique ou d’imagerie par résonance magnétique (IRM) (éventuellement associé à des biopsies après contrôle de la fonction de coagulation) est recommandé si un traitement chirurgical est préconisé (photo 4).
Chez l’homme, le diagnostic d’une affection hépatique est souvent réalisé dans le cadre du suivi ou du diagnostic d’une hépatopathie chronique (cirrhotique ou hépatite virale chronique). La démarche diagnostique est relativement similaire à celle proposée chez le chien, avec l’emploi de certains marqueurs sanguins (∂-fétoprotéine) et les éventuelles recherches étiologiques.
Le pronostic dépend essentiellement de la nature histologique, de la forme et de l’étendue de l’affection au moment du diagnostic, quelle que soit l’espèce. Les carcinomes hépatocellulaires massifs présentent un pronostic favorable. Chez l’homme, lorsqu’une exérèse est possible, le taux de survie est de 50 à 70 % à 5 ans, mais il est nettement minoré lors d’hépatopathie concomitante [1]. Chez le chien, le taux de métastases associées est faible dans ce type tumoral et l’absence d’une hépatopathie sous-jacente rend possible des chirurgies larges souvent curatives.
Pour les lésions de petite taille, diagnostiquées précocement mais associées à une hépatopathie chronique (présentation prédominante chez l’homme), une résection limitée est le plus souvent choisie. Des techniques de thermo-ablation ou de chémo-embolisation peuvent alors être proposées. Face à des lésions plus étendues, la seule solution alternative est la greffe de foie. Les carcinomes hépatiques ne répondent pas à la chimiothérapie, et ce dans toutes les espèces.
Le chien constitue un modèle unique pour étudier la pertinence de nouveaux moyens thérapeutiques mini-invasifs permettant l’élimination ciblée d’une tumeur localisée chez un individu qui présente des lésions et un format proches de ceux de l’homme. Des techniques d’ablation par ultrasons sous contrôle IRM ont ainsi été utilisées avec succès sur des adénomes canins [3].
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