Le second vaccin West Nile : une protection croisée contre la lignée 2 - Le Point Vétérinaire n° 327 du 01/07/2012
Le Point Vétérinaire n° 327 du 01/07/2012

ZOONOSE RÉEMERGENTE EN EUROPE

Thérapeutique

Auteur(s) : Éric Vandaële

Fonctions : Le Fougerais
44850 Saint-Mars-
du-Désert

Le vaccin recombinant Proteq West Nile® (Merial) protège contre les lignées 1 et 2 du virus de West Nile qui sévissent en Europe.

Merial vient de mettre sur le marché le second vaccin équin autorisé en Europe contre la maladie de West Nile : Proteq West Nile®. Il s’agit d’un vaccin recombinant vivant sur le modèle des vaccins Proteq-Flu® contre la grippe équine (tableau). Le virus canarypox utilisé comme vecteur (vCP2017) exprime les protéines antigéniques protectrices du virus West Nile sans se répliquer chez le cheval. Le vaccin est adjuvé avec le même adjuvant à base de carbomère que les vaccins Proteq-Flu®. Il est présenté en boîte de deux flacons unidoses prêts à l’emploi pour un prix de 68 € HT les deux doses (prix centrale). Le premier vaccin, Duvaxyn® WNV, développé par Fort Dodge et autorisé depuis 2009, est un vaccin inactivé adjuvé classique. Il vient de changer de nom commercial pour adopter celui de la gamme des vaccins équins de Pfizer : Equip® WNV.

Quels sont les différents virus de la maladie de West Nile ?

→ Cinq lignées de flavivirus de West Nile sont identifiées. Mais seule la lignée 1 était connue jusqu’à récemment pour être à l’origine des cas cliniques sur les cinq continents. En 2004, un virus de la lignée 2, jusqu’alors restreinte à l’Afrique subsaharienne, est isolé en Hongrie, et se révèle pathogène pour le cheval et l’homme. Il est à l’origine de l’épidémie grecque de 2010 (262 cas humains, dont 35 mortels), ainsi que de cas humains et équins dans le nord de l’Italie en 2011. Simultanément, le virus de la lignée 1 est isolé à la fois en Italie, en Espagne, au Portugal, etc.

→ La France et les autres pays d’Europe sont donc menacés, non pas par un type de virus de West Nile, mais par deux lignées différentes de virus assez éloignées l’une de l’autre dans l’arbre phylogénique. Un des principaux intérêts du nouveau vaccin Proteq West Nile® est son efficacité démontrée par épreuve virulente sur ces deux lignées présentes en Europe.

La maladie de West Nile est-elle grave ?

→ La maladie de West Nile est rarement une zoonose grave. Mais les encéphalites de West Nile sont toujours des affections sévères, voire mortelles, chez les chevaux comme chez l’homme. La plupart des infections (70 à 80 %) sont asymptomatiques chez l’homme comme chez les équidés. 20 % sont des formes pseudo-grippales plus au moins graves. Chez les équins, des formes neuro-invasives graves se développent dans 1 à 10 % des cas. Elles sont alors mortelles dans 30 à 40 % des cas. Il est fréquent de recourir à l’euthanasie pour abréger les souffrances des animaux à terre (mortalité de 80 % dans ce cas). Chez l’homme, ces formes de méningo-encéphalites sont à la fois plus rares (moins de 1 % des cas) et moins souvent mortelles (7 à 9 % des cas de méningite, soit 5 décès pour 10 000 cas d’infection par le virus).

→ Aux États-Unis, où le virus de West Nile a été introduit en 1999 sur un continent vierge, la maladie a flambé trois ans plus tard, en 2002, chez l’homme, avec 284 décès et 3 000 cas de méningo-encéphalite, comme chez les équidés (plus de 15 000 cas cliniques graves recensés, avec une mortalité de 30 %). Dix ans plus tard, le virus de West Nile reste à l’origine d’un millier de cas humains recensés chaque année, dont une cinquantaine de décès (figure 1 complémentaire sur www.WK-Vet.fr). Chez l’homme, aucun vaccin n’est, pour l’heure, disponible.

→ Chez les chevaux, la vaccination s’est beaucoup développée et s’est révélée très efficace. Seulement une centaine de cas cliniques (graves) sont recensés chaque année chez des équidés non vaccinés.

Comment se transmet le virus de West Nile ?

Il s’agit d’une arbovirose avec un réservoir de virus, les oiseaux sauvages ou domestiques, et des vecteurs, les moustiques (Culex surtout). Les chevaux comme les hommes sont des culs-de-sac épidémiologiques car la virémie y est à la fois faible et courte. Ils ne sont donc pas infectants pour d’autres moustiques. Le cycle de ce flavivirus repose sur un réservoir, les oiseaux des zones humides, et une multiplication des moustiques en fin de saison estivale.

Comment sont organisées la surveillance et la lutte contre la maladie de West Nile ?

La maladie de West Nile est inscrite sur la liste de l’Office international des épizooties et, en France, sur celle des maladies réputées contagieuses (MRC) à déclaration obligatoire. Dans l’Hexagone, la surveillance aviaire (mortalité chez les oiseaux sauvages) et chez l’homme est organisée dans dix départements méditerranéens : Corse-du-Sud (20, 2A) et Haute-Corse (20, 2B), Alpes-Maritimes (06), Var (83), Bouches-du-Rhône (13), Vaucluse (84), Gard (30), Hérault (34), Aude (11), Pyrénées-Orientales (66). La surveillance entomologique ne concerne que les cinq départements les plus humides (13, 30, 34, 11, 66). Chez les équidés, la surveillance est uniquement fondée sur la vigilance des vétérinaires sanitaires à détecter des cas suspects. La sérologie sur les immunoglobulines M (IgM) permet de déceler une infection récente parmi des équidés immunisés et séropositifs en IgG protectrices.

Quelle est la réalité de la “menace West Nile” en France ?

→ Depuis les épidémies de Bucarest (Roumanie) en 1996 (835 cas humains dont 17 décès) et de Volgograd (Russie) en 1999 (835 cas humains dont 40 décès), le virus est régulièrement détecté en Europe, notamment en France en 2000, en 2001, en 2003, en 2004 et en 2006 sur le pourtour méditerranéen. Au total, 117 cas équins (dont 30 mortels) ont été recensés et 7 cas humains en 2003. Toutefois, aucun cas clinique n’a été diagnostiqué depuis 2007 en France. Cependant, il est probable que le virus circule à bas bruit dans les zones méditerranéennes humides. Les enquêtes de 2003 dans le Var relèvent parfois un taux de séroconversion élevé (55 %) dans les écuries où une circulation virale récente est suspectée (figure 2 complémentaire sur www.WK-Vet.fr).

→ De plus, plusieurs virus ont été isolés dans d’autres pays d’Europe : en Hongrie depuis 2003-2004, en Autriche, au nord de l’Italie depuis 2008, puis en Bulgarie, en Grèce, en Sardaigne et en Sicile, et, plus récemment, en république de Macédoine, en Espagne et au Portugal. Au Royaume-Uni, une séroconversion d’oiseaux sentinelles domestiques a été observée, démontrant une circulation virale à bas bruit, probablement à partir d’oiseaux migrateurs infectés.

→ Aux portes de l’Europe, des cas ont aussi été recensés au Maroc, en Turquie et en Israël. Et les zones favorables au virus sont nombreuses en Europe (figure 3).

Conclusion

La menace est réelle. Les vaccins sont efficaces. Cependant, le coût de la vaccination reste un des principaux freins à sa généralisation. D’autant plus que la maladie est, pour le moment, encore perçue (à tort ?) comme lointaine, hypothétique, voire improbable, sur une grande partie du territoire.

En savoir plus

– Afssa. Rapport sur la surveillance de l’infection à virus WN en France. 2004.

– Afssa. Rapport sur l’évaluation du risque d’apparition et de développement de maladies animales compte tenu d’un éventuel réchauffement climatique. 2005.

– Anses. Risques d’introduction et de diffusion d’agents pathogènes exotiques en France métropolitaine et propositions de mesures pour réduire ces risques. Rapport d’expertise collective. 2012. http://www.anses.fr/Documents/SANT2009sa0294Ra.pdf

– EMA. Rapport public d’évaluation de Proteq West Nile®.

– Gouvernement. Circulaire interministérielle DGS/RI1/DGALN/DGAL/2009/233 du 24 juillet 2009 relative aux mesures visant à limiter la circulation du virus West Nile en France métropolitaine. Guide de procédures de lutte contre la circulation du virus West Nile en France métropolitaine. 2009.

– Le point sur la maladie de West Nile aux États-Unis :

1. Cas équins, voir le site de l’USDA : http://www.aphis.usda.gov/vs/nahss/equine/wnv/ wnv_distribution_maps.htm

2. Cas humains, voir le site du CDC : http://www.cdc.gov/ncidod/dvbid/westnile/surv&controlCaseCount08_detailed.htm

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