Traitement chirurgical de la luxation de la hanchechez le chien et le chat - Le Point Vétérinaire expert canin n° 325 du 01/05/2012
Le Point Vétérinaire expert canin n° 325 du 01/05/2012

ORTHOPÉDIE

Analyse d’article

Auteur(s) : Alexandre Caron

Fonctions : Fitzpatrick Referrals Ltd.,
Halfway lane, Eashing lane,
Godalming, GU72QQ,
Surrey, United Kingdom

Les luxations coxo-fémorales (LCF) sont les plus fréquentes chez le chien, comptant pour 90 % des luxations. La majorité est consécutive à un accident de la voie publique et d’autres lésions sont présentes dans plus de la moitié des cas. Le fémur est luxé cranio-dorsalement dans environ 75 % des cas.

La LCF implique une atteinte partielle ou complète des éléments stabilisateurs de l’articulation. La hanche est maintenue en position par le ligament de la tête fémorale et la capsule articulaire. Ces deux éléments sont considérés comme les éléments stabilisateurs primaires. Interviennent, dans un second temps, le ligament acétabulaire transverse (ventral), le labrum acétabulaire, le liquide synovial par l’intermédiaire de sa pression hydrostatique et les muscles péri-articulaires [13].

Le diagnostic est établi cliniquement par détection d’une position anormale du grand trochanter en association avec une boiterie sévère. Une rotation externe ainsi qu’une adduction du membre sont présentes lors de luxation cranio-dorsale alors que l’inverse se produit lors de luxation ventrale. Un examen radiographique permet de confirmer la suspicion clinique de luxation, de préciser le type de luxation, mais aussi de déterminer la présence de lésions concomitantes (fracture pelvienne, dysplasie coxo-fémorale, fracture de la tête fémorale, etc.).

RÉDUCTION MANUELLE ET À FOYER FERMÉ

Une réduction à foyer fermé peut être réalisée lors de diagnostic précoce de LCF et en l’absence de fracture articulaire (acétabulum ou tête fémorale) ou de signes de dysplasie coxo-fémorale.

Un moyen de stabilisation externe (pansement d’Ehmer, entraves) est nécessaire pendant environ 2 semaines. Certaines études ont démontré que, au-delà de ce délai, une réaction fibreuse de la capsule et du ligament de la tête fémorale est présente et résistante. Le taux de reluxation est néanmoins très élevé (> 50 %), et justifie le recours fréquent à une intervention chirurgicale dans le traitement des LCF [13]. Une reluxation peut être due à un défaut de coaptation entre la tête fémorale et l’acétabulum. Cela peut être lié à de mauvais rapports anatomiques (dysplasie, fracture) ou à une interposition tissulaire. Ainsi, après réduction à foyer fermé, il convient d’appliquer une pression latérale sur le grand trochanter et de mobiliser amplement la tête fémorale dans l’acétabulum de manière à évacuer ces débris. Quatre à 5 jours après la luxation, les tissus (caillots sanguins, fragments capsulaires, ligamenteux et musculaires) sont déjà considérablement réorganisés dans l’acétabulum et un débridement chirurgical est considéré comme nécessaire si l’animal est présenté en consultation plus de 5 jours après le traumatisme.

TRAITEMENT CHIRURGICAL

Le traitement chirurgical d’une LCF est indiqué dès lors qu’une réduction à foyer fermé échoue ou lorsque cette dernière est contre-indiquée d’après les critères présentés précédemment.

Toutes les techniques chirurgicales décrites dans le traitement des LCF cranio-dorsales visent à lutter contre la rotation externe et l’adduction du membre. Les deux critères nécessaires pour une récupération fonctionnelle satisfaisante sont la stabilité de la réduction et la restauration d’une amplitude articulaire physiologique.

De nombreuses techniques chirurgicales ont été décrites. Elles peuvent être classées selon leur caractère intra-articulaires (toggle-pin, broche transarticulaire, transposition du ligament sacro-tubéral, prothèse extra-/intra-articulaire, prothèse de fascia lata, prothèse totale de hanche) ou extra-articulaires (capsulorraphie, suture ilio-fémorale, transposition tendineuse/du grand trochanter, broche de De Vita, prothèse capsulaire, triple ostéotomie pelvienne) [1, 5, 7, 11, 12].

Une capsulorraphie est un bon moyen de stabilisation, mais, le plus souvent, trop peu de tissus sont présents pour permettre une suture solide. Un taux élevé de complications est associé à une broche transarticulaire ou à une broche de De Vita (ischio-iliaque). La transposition du ligament sacro-tubéral est techniquement délicate et une vis spécifique est nécessaire, rendant cette technique moins attractive, bien que les résultats cliniques semblent satisfaisants [6, 8]. Le remplacement du ligament de la tête fémorale (toggle-pin, fascia lata ou prothèse extra-/intra-articulaire) paraît être la méthode la plus satisfaisante d’un point de vue anatomique et biomécanique. De très bons résultats cliniques ont été rapportés (> 85 %), comme le confirme l’étude résumée [2, 4, 12]. Les inconvénients de ces techniques sont le risque d’ostéonécrose de la tête fémorale par lésion vasculaire et le développement d’une arthrose plus importante à long terme en raison de la présence de matériel en position intra-articulaire. La stabilisation extracapsulaire au moyen de prothèses, avec ou sans ancres osseuses, ou d’une ténodèse (fessier profond) apporte également des résultats cliniques satisfaisants [7, 10].

Conclusion

Le traitement chirurgical d’une LCF est souvent nécessaire, et la technique de toggle-pin paraît simple, anatomique et efficace cliniquement, notamment lors d’emploi du kit TightRope(r). Un nombre de complications plus important a été décrit lors d’utilisation d’un toggle-pin fait main [3]. L’évolution arthrosique à long terme est cependant inconnue.

Une prothèse totale de hanche est également une option de traitement possible lors de LCF, plus spécialement en cas d’arthrose avancée [9].

Aucune étude comparant objectivement les différentes techniques n’a, à notre connaissance, été réalisée.

RÉSUMÉ

OBJECTIFS

• Décrire la technique chirurgicale.

• Rapporter les résultats cliniques à court terme chez des chats et des petits chiens traités pour une luxation de la hanche au moyen du système TightRope™(TR).

MÉTHODE

Étude rétrospective incluant des chiens présentés pour une luxation traumatique de la hanche et sans autre anomalie orthopédique. Un abord cranio-latéral classique de la hanche est réalisé. Après luxation de cette dernière, un tunnel osseux fémoral est créé depuis l’insertion du ligament de la tête fémorale jusque distalement au 3e trochanter, latéralement. Un foret canulé (d’un diamètre de 3,5 mm ou de 2,8 mm) est employé avec une broche de 1,24 mm pour guide initial. Un tunnel osseux est ensuite réalisé depuis l’insertion acétabulaire du ligament de la tête fémorale jusque dans la filière pelvienne, médialement. La prothèse TR est passée latéro-médialement dans le tunnel fémoral, puis dans le tunnel acétabulaire. Le toggle (barre autour de laquelle la prothèse est verrouillée) est positionné contre la face médiale de l’acétabulum avant réduction de la hanche et verrouillage de la prothèse sur la face latérale du fémur par nouage des brins entre eux sur un bouton.

RÉSULTATS

Neuf cas ont été inclus (5 chiens, 4 chats). La durée médiane de reprise d’appui sur le membre opéré est de 1 jour. Les scores de boiterie médians à 2 et 6 semaines après l’intervention chirurgicale sont respectivement de 1/5 et 0/5. À une médiane de 16 semaines après l’acte chirurgical, tous les propriétaires décrivent un niveau d’activité de leur animal similaire à celui qu’il avait avant le traumatisme. La seule complication rapportée est un œdème important postopératoire dans un cas. Aucune révision chirurgicale n’a été nécessaire.

Références

  • 1. Altunatmaz K, Yucel R, Devecioglu Y et coll. Treatment of canine hip dysplasia using triple pelvic osteotomy. Vet. Med. (Praha). 2003 ; 48(1-2): 41-46.
  • 2. Ash K, Rosselli D, Danielski A et coll. Correction of craniodorsal coxofemoral luxation in cats and small breed dogs using a modified Knowles technique with the braided polyblend TightRope systems. Vet. Comp. Orthop. Traumatol . 2012 ; 25(1): 54-60.
  • 3. Baltzer WI, Schulz KS, Stover SM et coll. Biomechanical analysis of suture anchors and suture materials used for toggle pin stabilization of hip joint luxation in dogs. Am. J. Vet. Res. 2001 May ; 62(5): 721-728.
  • 4. Demko JL, Sidaway BK, Thieman KM et coll. Toggle rod stabilization for treatment of hip joint luxation in dogs : 62 cases (2000-2005). J. Am. Vet. Med. Assoc. 2006 Sep 15 ; 229(6): 984-989.
  • 5. Douglas IH. Modified De Vita pinning technique for the management of canine hip luxation : preliminary findings. Aust. Vet. J. 2000 Aug ; 78(8): 538-542.
  • 6. Kilic E, Ozaydin I, Atalan G et coll. Transposition of the sacrotuberous ligament for the treatment of coxofemoral luxation in dogs. J. Small Anim. Pract. 2002 Aug ; 43(8): 341-344.
  • 7. Martini FM, Simonazzi B, Del Bue M. Extra-articular absorbable suture stabilization of coxofemoral luxation in dogs. Vet. Surg. 2001 Sep-Oct ; 30(5): 468-475.
  • 8. Ozaydin I, Kilic E, Baran V et coll. Reduction and stabilization of hip luxation by the transposition of the ligamentum sacrotuberale in dogs : an in vivo study. Vet. Surg. 2003 Jan-Feb ; 32(1): 46-51.
  • 9. Pozzi A, Kowaleski MP, Johnson KA. Treatment of traumatic coxo-femoral luxation by cemented total hip arthroplasty. Vet. Comp. Orthop. Traumatol . 2004 ; 17(4): 198-203.
  • 10. Rochereau P, Bernarde A. Stabilization of coxo-femoral luxation using tenodesis of the deep gluteal muscle. Technique description and reluxation rate in 65 dogs and cats (1995-2008). Vet. Comp. Orthop. Traumatol . 2012 ; 25(1): 49-53.
  • 11. Shani J, Johnston DE, Shahar R. Stabilization of traumatic coxofemoral luxation with an extra-capsular suture from the greater trochanter to the origin of the rectus femoris. Vet. Comp. Orthop. Traumatol . 2004 ; 17(1): 12-16.
  • 12. Venturini A, Pinna S, Tamburro R. Combined intra-extra-articular technique for stabilisation of coxofemoral luxation. Preliminary results in two dogs. Vet. Comp. Orthop. Traumatol . 2010 ; 23(3): 182-185.
  • 13. Wardlaw JL, McLaughlin RM. Coxofemoral luxation. Coxofemoral luxation.In : Small Animal Surgery WB Saunders, Philadelphia. 2012. p. 816-823.
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