ORTHOPÉDIE CANINE
Dossier
Auteur(s) : Alexandre Caron
Fonctions : Fitzpatrick Referrals Ltd.,
Halfaway lane – Eashing,
Godalming, GU72QQ,
Surrey – United Kingdom
À chaque stade du temps postopératoire correspondent des éléments à surveiller. Il convient de savoir comment y parvenir et selon quelle chronologie.
La gestion postopératoire de la rupture du ligament croisé cranial (RLCC) s’étend du réveil de l’animal à la fin de sa vie, dans la mesure où la progression arthrosique est inéluctable. L’objectif de cet article est de répondre aux questions relatives à cette prise en charge à court et long terme : traitement de la douleur, type de pansement, conseils à donner aux propriétaires, etc. De nombreuses techniques chirurgicales ont été décrites dans l’article sur le traitement de la RLCC chez le chien. La gestion postopératoire est spécifique à chacune. Le pronostic est abordé par le biais des résultats cliniques attendus et des complications possibles, qui doivent être détectées. La prise en charge à moyen et long terme inclut de la physiothérapie-hydrothérapie et un traitement médical pour contrôler l’arthrose.
La gestion de la douleur pendant l’acte opératoire peut être obtenue par différents moyens et il est alors important de savoir quels agents analgésiques ont été utilisés. De même, l’étendue de la chirurgie (arthrotomie versus arthroscopie, méniscectomie versus pas d’affection méniscale, sutures extracapsulaires versus ostéotomie tibiale) pourrait influencer la douleur postopératoire.
La réalisation d’une injection péridurale d’agents analgésiques offre une analgésie postopératoire satisfaisante à la suite d’une arthrotomie du grasset [9, 10, 16]. Une injection conjointe de morphine (0,1 mg/kg) et de bupivacaïne (1 mg/kg) peut être satisfaisante. L’action de la bupivacaïne est de 4 à 6 heures alors que celle de la morphine se prolonge jusqu’à 16 à 24 heures après l’injection [10]. La bupivacaïne induit un bloc non seulement sensitif mais aussi moteur. Ainsi, les chiens qui reçoivent ce traitement peuvent ne pas recouvrer une fonction ambulatoire correcte dès le soir de l’intervention chirurgicale et il convient de veiller à ce que leur fonction urinaire redevienne normale (palpation régulière de la vessie jusqu’à l’observation de mictions volontaires). La repousse du poil est parfois plus lente en regard du site d’injection péridural. Aucune explication n’a été donnée à ce jour. Une injection intra-articulaire de morphine ou d’analgésique local apporte un confort postopératoire supplémentaire, et la bupivacaïne semble plus efficace que la morphine [10, 12, 36]. Aucun effet supérieur n’a été démontré pour l’emploi des anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) par voie intra-articulaire, par rapport à la voie systémique [26].
Le plus souvent, les chiens sont traités par voie systémique avec un opioïde agoniste pur de la morphine (méthadone à la dose de 0,1 à 0,4 mg/kg, morphine à celle de 0,1 à 1 mg/kg, toutes les 4 à 6 heures) au cours des premières 12 à 24 heures postopératoires, puis un morphinique agoniste partiel (buprénorphine, 0,005 à 0,02 mg/kg, toutes les 6 à 8 heures) au cours de la journée suivante. Le sevrage doit être progressif et dépend d’une évaluation objective de la douleur, qui peut se faire au moyen de grilles d’évaluation [7, 12, 29]. Lorsqu’une douleur intense est attendue en phase postopératoire, l’application d’un patch de fentanyl permet une gestion de la douleur pendant 48 à 72 heures, avec un délai de 12 à 24 heures après la pose. Ainsi, nous utilisons systématiquement un patch de fentanyl à la suite de la réalisation bilatérale d’une tibial plateau levelling osteotomy (TPLO).
L’injection d’un AINS est aussi toujours effectuée lorsque le statut biochimique de l’animal le permet [3, 18].
La gestion de l’œdème postopératoire est un autre aspect qui doit être considéré dans la période postopératoire immédiate (photo 1). Jusque récemment, aucune étude ne cherchait à démontrer l’intérêt de la cryothérapie par rapport au pansement compressif, et l’appréciation du chirurgien prévalait.
Après une chirurgie du ligament croisé cranial, un pansement de Robert-Jones modifié est souvent mis en place. Ce pansement compressif a un effet antalgique et peut également aider à limiter la formation de l’œdème. Il n’est laissé en place que pour 24 à 72 heures après l’intervention et n’a d’intérêt que sur cette courte période. Aucune stabilisation externe n’est cependant nécessaire, y compris après la mise en place d’une prothèse extracapsulaire latérale. La prothèse doit rester efficace dans la stabilisation du grasset, le temps qu’un tissu fibreux le stabilise. Ce processus est supposé prendre 6 à 8 semaines et l’emploi d’un pansement contentif afin de soutenir cette prothèse serait donc nécessaire pendant ce laps de temps. Une immobilisation si longue serait délétère pour la fonction du membre dans la mesure où l’atrophie musculaire serait très importante.
La seconde possibilité pour contrôler l’œdème post-opératoire après la mise en place d’une prothèse latérale extracapsulaire ou la réalisation d’une ostéotomie tibiale, est l’application de froid (cryothérapie) seule (30 minutes, 4 fois par jour pendant 3 jours) ou en association avec une légère compression. Elle semble donner les meilleurs résultats au regard de l’œdème, de la douleur et de l’usage du membre [11, 35]. La cryothérapie se fait par pose d’une poche de froid sur le grasset en prenant soin d’appliquer une couche de tissu entre la peau et la poche afin de prévenir toute brûlure (photos 2 et 3). La compression lors du traitement peut se faire à l’aide d’une chaussette spécifique et se poursuivre entre les sessions de cryothérapie par un pansement de type Robert-Jones. Dans ce cas, la fréquence des traitements est réduite à une seule application journalière afin de limiter le nombre de changements de pansement. En raison des implications pratiques de la contention externe, notre choix se porte sur l’application de froid au moins quatre à six fois par jour au cours des premières 24 à 48 heures, quelle que soit la technique chirurgicale employée.Dès que le chien semble confortable et ne nécessite plus de traitement antalgique spécifique, il peut être rendu à ses propriétaires. Il est conseillé de poursuivre la cryothérapie pendant les 5 premiers jours postopératoires (encadré 1).
Les consignes données au propriétaire pour les 2 premières semaines postopératoires sont de restreindre l’activité physique de l’animal. Seules deux à trois sorties par jour de 5 à 10 minutes chacune, en laisse courte, sont autorisées. À la maison, il est recommandé de réduire l’accès à une pièce seulement pour les chiens de races moyenne à grande et d’utiliser une cage pour les petits chiens, jusqu’au retrait des sutures cutanées, qui a lieu 15 jours postopératoires. Le port d’une collerette est requis et les traitements prescrits doivent être suivis.
En l’absence de contre-indication, une prescription d’AINS est réalisée pour les 4 semaines suivant l’intervention chirurgicale (photo 4). Aucun type d’AINS n’a démontré sa supériorité par rapport aux autres, et il convient de choisir la forme la plus pratique à utiliser pour le propriétaire (liquide versus comprimés) ou adaptée au poids de l’animal. Dans le cas où le chien est plus douloureux les 10 premiers jours, il est possible de prescrire du tramadol (2 à 5 mg/kg, 3 fois par jour).
Lors de la consultation de retrait des sutures, le calendrier d’évolution du niveau d’exercice doit être expliqué aux propriétaires. Entre 2 et 6 semaines postopératoires, l’activité en laisse courte est augmentée progressivement par paliers de 5 minutes par semaine, jusqu’à 20 à 30 minutes deux ou trois fois par jour la 6e semaine, si le chien le supporte. À partir du rendez-vous de suivi à 6 semaines postopératoires et dans la mesure où le processus de cicatrisation osseuse est en bonne voie, l’activité en laisse est accrue peu à peu. L’activité libre est réintroduite à partir de 3 mois après l’intervention. Ce programme doit être adapté à chaque animal. Plus particulièrement, la reprise d’exercice doit être ralentie si l’évolution clinique (boiterie persistante ou récidivante) et/ou radiographique (retard de cicatrisation) n’est pas satisfaisante. Par exemple, il est nécessaire de prolonger la période de repos strict lorsqu’une fracture fibulaire est diagnostiquée 2 à 4 semaines postopératoires. Il en est de même pour la période de promenade en laisse courte effectuée sur une distance limitée, en cas de desmopathie tibio-patellaire observée sur les radiographies de contrôle.
Notre protocole de suivi prévoit des visites de contrôles à 2, 6 et 12 semaines, et 6 mois après l’intervention. Les sutures cutanées sont retirées 10 à 14 jours après la chirurgie et un examen orthopédique, ainsi qu’une évaluation de la boiterie sont réalisés à chaque suivi afin d’évaluer l’évolution clinique. Les informations spécifiques à relever sont l’état des masses musculaires, la présence ou non d’un gonflement articulaire, de craquements/claquements en flexion-extension, de douleur à la palpation-manipulation et la bonne circulation de la patelle dans la trochlée fémorale. Le test spécifique de stabilité du grasset est systématiquement répété, sachant que le test du tiroir direct reste positif à la suite de la réalisation d’une ostéotomie tibiale, contrairement à celui du tiroir indirect. L’amplitude articulaire doit être évaluée, voire mesurée, à l’aide d’un goniomètre à chaque rendez-vous. Durant les 6 premiers mois postopératoires, l’objectif est de permettre au chien de récupérer après l’intervention chirurgicale. Cela comprend la cicatrisation osseuse, la persistance des implants en position adéquate, la récupération musculaire et la gestion de la douleur faible à moyenne qui peut perdurer. C’est également la période pendant laquelle les complications sont les plus fréquentes.
Le taux et le type de complications dépendent de la technique chirurgicale employée. Le taux de complications rapporté est de 18 à 34 % à la suite d’une TPLO, de 31 % après une tibial tuberosity advancement (TTA), de 17,4 à 21 % pour une suture latérale extracapsulaire. La grande majorité d’entre elles sont mineures et ne nécessitent pas de réintervention. Certaines études décrivant des taux de complications élevés ont été réalisées lors du développement d’une nouvelle technique, peu familière aux chirurgiens (notamment pour la TTA). Ainsi, avec de l’expérience, un taux de complications plus bas est obtenu. Il devrait être sensiblement similaire pour la TTA et la TPLO.
Pour chaque technique, des complications infectieuses, des défauts de cicatrisation osseuse ou des lésions méniscales différées sont rapportés. Le risque d’infection est de 3 à 8,9 % à la suite d’une TPLO, de 2,6 % après une TTA et de 4 à 10 % pour une suture latérale extracapsulaire [4, 14, 20]. La nécessité de retirer les implants est évoquée dans environ 30 % des cas d’infection à la suite d’une TPLO [13]. Un taux de retraits d’implant allant jusqu’à 21 % des cas de suture extracapsulaire est rapporté [4]. Un taux de lésions méniscales différées dans environ 2,8 à 21 % des cas pour lesquels aucune chirurgie méniscale n’était nécessaire lors du traitement initial est attendu, quelle que soit la technique employée [4, 13]. Lors de la réapparition d’une boiterie ou d’une évolution clinique insatisfaisante (claquement à la manipulation du grasset ou à la marche), une lésion méniscale doit être suspectée, d’autant plus si aucune infection n’a été décelée auparavant ou si la plaque a déjà été retirée. Une inspection méniscale est alors nécessaire par arthrotomie ou arthroscopie. Le cas échéant, la lésion méniscale est traitée par relâchement méniscal et/ou méniscectomie (partielle ou totale) [13]. C’est une des complications majeures les plus fréquentes et il est important d’y penser à chaque visite de suivi. D’autres complications, plus rares, peuvent survenir (encadré 2).
Des radiographies de contrôle sont réalisées 6 semaines après une ostéotomie tibiale. Elles peuvent être répétées à 12 semaines si les signes de cicatrisation étaient insuffisants précédemment. Les critères radiographiques à évaluer suivent la règle des 4A : alignement, apposition, appareillage, activité osseuse.
Pour une ostéotomie tibiale, à 6 semaines, un pontage osseux de celle-ci est bien souvent constaté en regard des corticales caudales et latérales, plus facilement évaluables car la plaque est située médialement. L’angle du plateau tibial doit être apprécié et comparé aux mesures postopératoires immédiates. L’objectif est de détecter une possible bascule du fragment proximal, bien qu’une augmentation minime du plateau tibial sans rupture d’implant ait été rapportée [27]. La fracture de la fibula est une complication connue qui ne nécessite jamais à elle seule un traitement chirurgical [31, 33]. Il est important de contrôler l’intégralité des vis sur les clichés réalisés 6 semaines après l’intervention et de comparer leur position grâce à ceux pris en postopératoires immédiats. Cela permet d’identifier une rupture d’implant non associée à un déplacement majeur des fragments osseux. Le contour de chaque vis doit être inspecté pour vérifier l’absence de signes d’ostéolyse qui indiqueraient une instabilité des implants ou une diffusion infectieuse le long des vis.
Après une TTA, la cicatrisation osseuse entre la crête tibiale et la partie caudale du tibia est progressive et n’apparaît que partielle à 6 semaines. La position des implants doit être vérifiée, de même que celle de la crête tibiale et l’angle du plateau tibial par rapport au ligament tibio-patellaire.
En cas de rupture partielle d’implant ou de signes d’ostéolyse non associés à un défaut/délai de récupération ou à une instabilité osseuse, aucune action n’est entreprise. Les propriétaires doivent en être informés pour surveiller toute anomalie.
Pour toutes les techniques, il convient d’évaluer le ligament tibio-patellaire qui, s’il est enflammé, peut entraîner un retard de l’amélioration clinique et nécessiter des mesures adaptées (prolongement des AINS, restriction d’activité plus longue).
Une révision chirurgicale doit être envisagée en cas de rupture ou de migration d’implant, associée à une mobilité des fragments ou à une douleur ou inflammation locale. Une infection est suspectée lors de retard ou de défaut de cicatrisation cutanée, d’ostéolyse autour des implants ou de douleur à la palpation du site chirurgical et/ou de l’articulation du grasset. Un prélèvement bactériologique est alors réalisé pour identifier la ou les bactéries responsables et instaurer un traitement spécifique. Lorsque la cicatrisation osseuse est radiographiquement documentée, le retrait des implants constitue une partie importante du traitement contre l’infection (30 % des cas) [13]. En cas d’infection sévère avant la cicatrisation osseuse, un débridement ou un rinçage chirurgical autour des implants est envisagé, avec un remplacement de ces derniers si nécessaire. Le retrait ou le changement des implants est le seul moyen d’éliminer efficacement le biofilm bactérien formé autour d’eux [13, 33]. Une mise en culture d’une ou de plusieurs vis est réalisée de manière à adapter l’antibiothérapie à l’infection. Le retrait des implants n’est possible qu’après cicatrisation osseuse complète à la suite d’une ostéotomie tibiale.
La différence de rapidité dans la reprise d’appui après l’intervention chirurgicale est l’argument majeur en faveur des ostéotomies tibiales, comparées aux techniques de suture extracapsulaire. L’évolution clinique du membre opéré doit être contrôlée régulièrement (tableau).
Elle est pondérée par les complications éventuelles et le degré ainsi que la rapidité de progression de l’arthrose.
L’évolution clinique à long terme est fortement dépendante de la progression de l’arthrose, qui est inéluctable quelle que soit la technique chirurgicale employée.
De plus, aucune étude n’a pu déterminer une différence dans l’évolution clinique ou arthrosique à moyen et long terme, entre les méthodes [1, 5, 6, 22].
Entre 6 et 24 mois postopératoires, l’amélioration clinique est limitée puisqu’un niveau d’activité subnormal est censé avoir été atteint entre 3 et 6 mois postopératoires. En revanche, l’amplitude de mouvement peut être réduite, probablement en raison de la progression arthrosique [1]. Enfin, environ la moitié des chiens développent une RLCC du membre controlatéral dans les 6 à 12 mois qui suivent le diagnostic de RLCC.
L’évolution de l’arthrose étant inéluctable, elle doit être prise en compte dans le traitement dès le lendemain de l’intervention chirurgicale. L’association glucosamine-chondroïtine sulfate a une action avérée sur les molécules inflammatoires au sein du liquide articulaire. Mais son efficacité clinique réelle est controversée chez le chien dans les publications vétérinaires [8, 27]. Elle a parfois démontré une action significative sur les signes d’arthrose [24]. L’extrapolation des résultats de la médecine humaine tend aussi à prouver que ces molécules portent bien leur nom de chondroprotecteurs, en présentant un intérêt dans la prévention de l’aggravation arthrosique [30]. Ainsi, nous recommandons l’utilisation précoce et prolongée de chondroprotecteurs à la suite d’une chirurgie de RLCC, en éclairant toujours les propriétaires sur le manque de preuves disponibles en médecine vétérinaire. De plus, des effets indésirables sont rarement rapportés et restent en général mineurs (troubles gastro-intestinaux, polyuro-polydypsie plus ou moins sévère). Certaines formulations alimentaires contiennent des chondroprotecteurs, permettant aux propriétaires de ne pas avoir à donner de comprimés au quotidien.
La gestion à long terme de l’arthrose est complexe et excède les objectifs de cet article(1). Au-delà des thérapeutiques anti-arthrosiques, la maîtrise pondérale est un paramètre important puisqu’il a été démontré que des animaux en surpoids développent des signes d’ostéo-arthrose plus précocement.
Seuls deux cas de développement tumoral en regard du grasset ont été décrits chez des chiens traités auparavant pour une RLCC par une TPLO [2, 15]. Hormis la présence d’un implant métallique, le tibia proximal est une localisation préférentielle des ostéosarcomes chez le chien. Des cas de tumeur se développant autour d’implants métalliques ont également été décrits en médecine humaine [19]. Le risque de développement tumoral apparaît alors très faible, mais doit cependant être considéré, particulièrement lorsque l’intervention chirurgicale est réalisée chez un animal jeune, d’autant plus qu’un retrait de plaque est simple, peu coûteux, avec un taux de complications faible [32].Néanmoins, peu de chirurgiens recommandent le retrait systématique des implants, et encore moins après une TTA (les implants sont alors plus délicats à retirer).
En médecine humaine, une chirurgie articulaire nécessite une rééducation fonctionnelle, parfois longue et contraignante. Bien que les propriétaires d’animaux attendent de leur vétérinaire des résultats immédiats, la rééducation est également un élément fondamental de la gestion postopératoire d’une RLCC chez le chien. Cette dernière étant l’une des affections orthopédiques les plus courantes, de nombreux auteurs se sont penchés sur les bienfaits de la physiothérapie. Grâce à des études cinématiques, l’impact de certains exercices sur le grasset a été défini [8, 11, 17, 21, 23, 25].
La masse musculaire d’un membre atteint de RLCC décroît significativement après la rupture et se poursuit sur plusieurs semaines, même si l’intervention chirurgicale est pratiquée précocément [28]. Ainsi, il apparaît important de commencer la rééducation aussi tôt que possible. Un programme de physiothérapie instauré dès les premières heures après l’opération et maintenu pendant 6 semaines permet de rétablir une amplitude de mouvement normale dès la 6e semaine postopératoire [28]. De plus, ce protocole a démontré une récupération de masse musculaire supérieure par rapport à une simple restriction d’activité. La technique chirurgicale employée a peu d’influence sur le commencement de la physiothérapie. Cependant, les exercices restent modérés pendant au moins 6 semaines et jusqu’à documentation radiographique d’une cicatrisation osseuse satisfaisante lors d’ostéotomie tibiale. Des instructions de physiothérapie sont généralement remises au propriétaire lorsqu’il récupère son animal après l’intervention chirurgicale (encadré 3).
L’utilisation d’un tapis de marche en immersion, ainsi que la nage incitent au développement d’une amplitude articulaire du grasset plus importante [25]. Il en est de même des exercices de marche proposant le franchissement d’obstacles, la montée ou la descente d’escaliers [13, 19, 23]. La montée en pente douce n’a aucun effet sur l’amplitude articulaire, et semble n’augmenter que faiblement l’activité musculaire des muscles fessiers et biceps fémoral. De même, la marche en descente diminue l’amplitude articulaire et l’activité musculaire des membres pelviens, et présente donc peu d’intérêt dans la réhabilitation après une chirurgie de RLCC [21]. L’avantage des exercices en immersion est la soustraction des articulations du poids de l’animal. En médecine humaine, ces exercices sont réputés être moins douloureux. En extrapolant au chien, ils devraient donc être plus faciles à réaliser et plus efficaces. Ces exercices de marche ou de nage sont généralement commencés à la 7e semaine (photo 5).
La consultation d’un physiothérapiste peut permettre l’accès à d’autres techniques telles que la thérapie par light amplification by stimulated emission of radiation (Laser), la thérapie par ondes de choc (shockwave therapy) ou l’initiation à l’emploi d’un électrostimulateur. Le Laser présente des intérêts multiples s’étendant de la cicatrisation cutanée à la gestion de la douleur. L’électrostimulation présente un intérêt spécifique dans la correction des troubles musculaires comme l’atrophie, le spasme, l’œdème et la gestion de la douleur. Enfin, la thérapie par ondes de choc peut être particulièrement intéressante lors d’un retard de cicatrisation osseuse (photo 6).
Bien que la récupération fonctionnelle semble plus rapide avec les techniques de stabilisation dynamique, la gestion postopératoire de la RLCC ne dépend que peu de la méthode chirurgicale employée. Il est conseillé de répéter les examens de contrôle durant les 6 premiers mois afin de surveiller la récupération fonctionnelle, de prescrire une physiothérapie/hydrothérapie adaptée et de détecter d’éventuelles complications. Une bonne connaissance de ces dernières et de leur probabilité de survenue est importante pour une gestion postopératoire efficace. La difficulté est d’identifier et de traiter le faible pourcentage de chiens pour lesquels la récupération est suboptimale. La progression de l’arthrose est inéluctable. Un rendez-vous de contrôle annuel est ainsi conseillé de manière à adapter la gestion médicale de l’arthrose et de la douleur ainsi que pour rappeler les mesures hygiéniques à poursuivre.
Le pronostic fonctionnel est considéré comme bon, mais doit néanmoins être pondéré par le degré d’arthrose et d’amyotrophie initial. La progression arthrosique et la réponse musculaire à la physiothérapie/hydrothérapie permettent d’affiner le pronostic de récupération fonctionnelle au cours des 6 premiers mois postopératoires.
Pour les propriétaires, l’utilisation d’un sac de petits pois surgelés est une méthode simple et peu onéreuse. La poche de froid doit être posée sur le grasset pendant 15 à 30 minutes, trois à quatre fois par jour. Il convient de rappeler aux propriétaires de l’animal d’emballer cette poche dans un linge propre avant l’application de manière à prévenir les brûlures cutanées susceptibles d’apparaître.
→ De rares lésions du nerf fibulaire, régressant généralement sans traitement en quelques semaines, ont été rapportées après une suture latérale extracapsulaire [4].
→ Le risque de fracture de la crête tibiale à la suite d’une TPLO (tibial plateau levelling osteotomy) est souvent très faible, mais peut atteindre 3 à 9 % [15, 34, 37]. Le risque de fracture fibulaire existe et peut atteindre 15 % (un traitement spécifique est rarement requis) [31]. Ce risque est plus important lors de réalisation d’un trou de forage dans la tête fibulaire, chez les animaux lourds, ainsi qu’en cas de rotation importante du plateau tibial [31, 33].
→ Quelques cas de rupture d’implant, de luxation médiale de patelle et d’inflammation du ligament tibio-patellaire sont également décrits après une ostéotomie tibiale.
Le plus souvent, il leur est recommandé de réaliser des flexions et extensions passives du grasset atteint (tenir la position fléchie puis étendue pendant 15 secondes et répéter 10 à 15 fois) et de soulever le membre controlatéral (15 secondes, à répéter 10 à 15 fois de suite). Ces exercices sont à effectuer trois fois par jour et doivent être adaptés au degré de douleur de l’animal traité. D’autres exercices peuvent progressivement être insérés de manière à augmenter l’intensité de l’effort et à diversifier le travail musculaire (biscuit offert du côté du membre non opéré, répétition assis/debout). À partir de la 6e semaine, il est possible de stimuler le membre opéré par des exercices de danse, des montées d’escalier en laisse et au pas, ou en demandant de manière répétée à l’animal de placer ses membres antérieurs sur une chaise.
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