OPHTALMOLOGIE DES NAC
Article de synthèse
Auteur(s) : Juliet Bazior-Langhan
Fonctions : Vétérinaire itinérante
en ophtalmologie
3, allée Gabrielle-Dorziat
64200 Biarritz
Connaître les spécificités qui concernent l’œil du lapin, est utile pour comprendre les affections qui en découlent.
Les yeux des lapins sont dotés de plusieurs particularités anatomiques et physiologiques qu’il est important de connaître pour comprendre les affections oculaires qui touchent cette espèce. Cet article décrit brièvement les différences par rapport aux carnivores, et met en évidence les implications qu’elles ont sur l’examen ophtalmologique et le traitement des maladies de l’œil chez le lapin.
Chez le lapin, qui est une espèce proie, les yeux sont situés latéralement [5]. Les orbites sont peu profondes (photos 1 et 2) [6]. Les valeurs des tests, réalisés à l’examen oculaire, sont différentes de celles des carnivores domestiques (encadré).
L’orbite est incomplète et possède une paroi médiale très fine. Chaque foramen optique communique directement avec l’orbite opposée par une petite ouverture de 5 mm. Cette particularité facilite le passage d’éventuelles infections (cellulite ou abcès rétrobulbaire) d’une orbite à l’autre [6].
Le lapin possède un plexus veineux rétrobulbaire important, d’où un risque important d’hémorragie pendant l’énucléation [4, 6]. L’énucléation par voie transconjonctivale est conseillée [6].
La membrane nictitante est de taille importante [4]. Elle est mobilisée par un muscle strié : le muscle nictitant [4]. La blépharorraphie est préférée à la tarsorraphie en raison de cette caractéristique [4].
Les lapins ne clignent des yeux que 10 à 12 fois par heure [3]. Une exophtalmie bilatérale physiologique est observée chez l’animal effrayé, laquelle disparaît généralement après quelques minutes.
Le lapin possède, associées à la membrane nictitante, une glande nictitante superficielle et une glande de Harder plus profonde. La glande de Harder est constituée d’un lobe dorsal blanchâtre et d’un lobe ventral rosé [4, 6]. Les canaux excréteurs des deux lobes confluent en un seul canal qui s’abouche à la surface de la membrane nictitante [5].
La glande lacrymale se situe en position caudo-dorsale de l’orbite [3]. Son canal excréteur s’ouvre en regard de la conjonctive de la paupière supérieure. Le lapin possède également une glande lacrymale accessoire (autrement nommée “glande infra-orbitaire”) très volumineuse, qui est placée dans la partie ventrale de l’orbite [3].
La glande de Harder présente la particularité d’être plus volumineuse chez le mâle et s’hypertrophie lors de la saison de reproduction, provoquant une exophtalmie physiologique [3, 5]. 40 % des lapins possèdent des atropinases dans leurs larmes, ce qui rend les collyres à base d’atropine inefficaces dans de nombreux cas [3]. Par conséquent, il est préférable d’utiliser un collyre à base de tropicamide 0,5 % (Mydriaticum®(1)) pour obtenir la mydriase lors d’un examen du fond de l’œil ou dans le cadre du traitement d’une uvéite [4].
Les larmes sont évacuées par l’unique point lacrymal qui se situe en regard du cul-de-sac conjonctival inféro-médial [4-6]. Elles sont ensuite attirées dans le canalicule par capillarité et aboutissent dans le sac lacrymal [5]. Puis elles passent dans le canal lacrymal, qui présente chez le lapin un diamètre fortement variable sur toute sa longueur, et longe de très près des racines des prémolaires et des incisives [1-4] (figure 1). Des changements abrupts de la direction et du diamètre de ce canal peuvent être observés à deux endroits bien distincts : à la sortie du sac lacrymal en regard de l’os maxillaire proximal et à la base des incisives [1-4] (photo 3). La proximité des racines des molaires et des incisives avec le canal lacrymal, ainsi que l’anatomie de celui-ci prédisposent l’espèce à la dacryocystite infectieuse.
La cornée est large et occupe 30 % du globe oculaire du lapin (figure 2) [5]. Le cristallin est très large et sphérique, et les muscles ciliaires sont peu développés, ce qui confirme un faible besoin d’accommodation de la vision dans l’espèce [4, 5].
La rétine du lapin est dépourvue de tapis clair [5]. Sa vascularisation est de type mérangiotique, c’est-à-dire que les vaisseaux rétiniens sont disposés en bande horizontale [3, 4, 6]. Des artérioles et des veinules rétiniennes temporales et nasales sont distinguées. Elles sont réunies par un système capillaire bien visible [3, 4, 6]. La papille optique est ovale, possède une dépression centrale naturelle et est richement myélinisée. Des faisceaux myéliniques horizontaux blanc nacré sur lesquels sont visibles les vaisseaux rétiniens peuvent être observés [3, 4, 6] (photo 4). Il convient de noter que le disque optique se situe dorsalement par rapport à l’axe visuel. Cette particularité a pour implication pratique la nécessité de diriger l’ophtalmoscope vers le haut pour le visualiser lors de l’examen du fond de l’œil [3].
Le globe oculaire est très peu mobile, mais, grâce à la position latérale des globes, le champ de vision du lapin est de presque 360 degrés [3, 4]. De plus, l’espèce possède une bonne vision nocturne et présente une bande horizontale riche en photorécepteurs dans la rétine qui permet aux animaux de voir un prédateur s’approcher de n’importe quelle direction. Le réflexe de clignement à la menace est cependant souvent absent, comme il s’agit d’une espèce proie. Le réflexe de placer visuel ou l’observation de l’animal dans son environnement sont de bons moyens d’évaluer la vision [4].
De nombreuses affections oculaires affectant les lagomorphes sont étroitement liées aux particularités anatomiques et physiologiques des yeux, du système lacrymal et de l’orbite. Une bonne connaissance de ces spécificités est essentielle pour comprendre les maladies oculaires du lapin.
→ Chez le lapin, les orbites communiquent, ce qui facilite la transmission d’éventuelles infections entre elles.
→ Le tropicamide est plus indiqué que l’atropine pour obtenir une dilatation pupillaire chez le lapin, en raison de la présence d’atropinases dans les larmes.
→ Le réflexe de clignement à la menace n’est pas un indicateur fiable d’évaluation de la fonction visuelle. Mieux vaut privilégier l’observation de l’animal dans son environnement.
→ Afin de ne pas léser le sinus veineux rétrobulbaire, il est préférable d’utiliser la technique transconjonctivale lors d’une énucléation.
→ Les deux points d’incurvation et de rétrécissement du canal lacrymal en regard des racines dentaires prédisposent le lapin à la dacryocystite en cas de pathologie dentaire.
→ Test de Schirmer : 5 à 12 mm/min.
→ Test au rouge phénol (Tévétest®, TVM) : 17 à 28 mm/15 s.
→ Pression intra-oculaire : 5 à 12 mmHg.
Nouveau : Découvrez le premier module
e-Learning du PointVétérinaire.fr sur le thème « L’Épanchement thoracique dans tous ses états »
L’ouvrage ECG du chien et du chat - Diagnostic des arythmies s’engage à fournir à l’étudiant débutant ou au spécialiste en cardiologie une approche pratique du diagnostic électrocardiographique, ainsi que des connaissances approfondies, afin de leur permettre un réel apprentissage dans ce domaine qui a intrigué les praticiens pendant plus d’un siècle. L’association des différentes expériences des auteurs donne de la consistance à l’abord de l’interprétation des tracés ECG effectués chez le chien et le chat.
En savoir plus sur cette nouveauté
Découvrir la boutique du Point Vétérinaire
Retrouvez les différentes formations, évènements, congrès qui seront organisés dans les mois à venir. Vous pouvez cibler votre recherche par date, domaine d'activité, ou situation géographique.
Découvrez en avant-première chaque mois le sommaire du Point Vétérinaire.
Vidéo : Comment s'inscrire aux lettres d'informations du Point Vétérinaire