Effectuer une synthèse méthodique : exemple de l’efficacité des nutraceutiques - Le Point Vétérinaire expert canin n° 320 du 01/11/2011
Le Point Vétérinaire expert canin n° 320 du 01/11/2011

ORTHOPÉDIE ET MÉDECINE FACTUELLE

Conduite à tenir

Auteur(s) : Camille Coisnon*, Jean-Michel Vandeweerd**

Fonctions :
*Facultés universitaires Notre-Dame-de-la-Paix
URVI (unité de recherche vétérinaire intégrée)
Rue de Bruxelles, 61, 5000 Namur, Belgique
jean-michel.vandeweerd@fundp.ac.be
**Facultés universitaires Notre-Dame-de-la-Paix
URVI (unité de recherche vétérinaire intégrée)
Rue de Bruxelles, 61, 5000 Namur, Belgique
jean-michel.vandeweerd@fundp.ac.be
***Faculté de médecine vétérinaire
Université de Liège, bât. B41
Bd de Colonster, 20, 4000 Liège 1, Belgique
****Clinique vétérinaire équine
18, rue des Champs, La Brosse
78470 Saint-Lambert-des-Bois

La synthèse méthodique montre que les preuves de l’efficacité des nutraceutiques restent faibles chez le cheval, à l’inverse des supplémentations en acides gras ω3 chez les chiens et les chats.

La profession vétérinaire a des obligations éthiques afin d’assurer des services efficaces et prudents sur un marché en plein changement [11]. Les propriétaires d’animaux sont de mieux en mieux informés et le vétérinaire doit clarifier les informations glanées par le profane en distillant un discours clair mais scientifique. Il doit, comme le médecin, démontrer l’aspect rationnel de son approche clinique. Cependant, la littérature scientifique est volumineuse et les connaissances évoluent constamment. Rechercher la meilleure information scientifique, même avec la meilleure volonté, et malgré les bases de données bibliographiques à disposition, reste une tâche difficile au moment du choix thérapeutique.

Divers outils ont été proposés en médecine humaine, tels que la démarche de l’evidence based medicine (EBM) ou médecine factuelle, qui a fait l’objet de diverses publications depuis 2003 en médecine vétérinaire [11, 44-49]. Cette approche permet d’étayer les décisions médicales en les faisant reposer sur les données issues de la recherche [48]. Toutefois, le vétérinaire praticien n’est pas toujours formé à la recherche documentaire ni à la critique de l’information scientifique. La tâche peut donc lui apparaître difficile et peu compatible avec une pratique privée qui laisse peu de temps, au cours ou entre les consultations, pour analyser les données publiées. Une approche pratique de la recherche documentaire et les principes d’une technique de lecture rapide “par couches” des publications scientifiques ont été proposés aux praticiens équins [49]. À l’instar de ce qui se pratique en médecine humaine, des outils d’information tels que les synthèses méthodiques et méta-analyses devraient être mis à la disposition des praticiens (encadré).

Cet article vise, au départ de la question de l’efficacité réelle des nutraceutiques dans le traitement de l’ostéoarthrite (OA), à illustrer la démarche d’une synthèse méthodique et à la proposer comme un type de publication utile pour informer rapidement les vétérinaires soucieux de la qualité des sources et du message délivré.

ÉTAPE 1 DÉFINIR L’OBJET DE LA SYNTHÈSE MÉTHODIQUE DANS LA SECTION “INTRODUCTION”

→ Dans l’introduction d’une synthèse méthodique, l’auteur vise à définir clairement l’objectif de celle-ci et à démontrer la pertinence de la question posée par rapport aux connaissances du moment sur le sujet traité. Par exemple, pour répondre à la question clinique de l’efficacité des nutraceutiques, il est utile de rappeler les éléments suivants.

→ L’OA est une affection dégénérative chronique du cartilage fréquente chez les animaux de compagnie. Elle serait responsable de 60 % des boiteries observées chez les chevaux et 20 % des chiens âgés de plus d’un an seraient touchés par cette arthropathie [9, 25]. Il existe divers traitements possibles. Chez le cheval, les injections de corticostéroïdes, de glycosaminoglycanes polysulfatés ou d’acide hyaluronique sont fréquemment utilisées [23]. Chez les animaux de compagnie, les traitements sont plus souvent administrés par voie orale et les anti-inflammatoires non stéroïdiens constituent la thérapeutique de base [23, 43].

→ Récemment, des produits qualifiés de “nutraceutiques” sont apparus, élargissant ainsi le registre des méthodes mises à la disposition du praticien vétérinaire pour le traitement de l’ostéoarthrite [1, 23, 40]. Entre la nutrition et la pharmaceutique, ces produits sont considérés comme des composés alimentaires ne pouvant être qualifiés de “diététiques”, ce dernier terme étant réservé aux aliments à « objectifs particuliers qui visent à satisfaire les besoins nutritionnels spécifiques d’animaux dont le processus d’assimilation, le processus d’absorption ou le métabolisme est perturbé » [26]. L’industrie des suppléments alimentaires pour la consommation humaine considère le nutraceutique comme « n’importe quel aliment non toxique dont les bénéfices pour la santé en termes de traitement et de prévention des maladies ont été scientifiquement prouvés » [13]. En revanche, selon le North American Veterinary Nutraceutical Council(NAVNC), le nutraceutique correspond à « une substance produite sous forme purifiée ou extraite qui, administrée oralement à des patients, vise à procurer les éléments nécessaires à la structure et au fonctionnement normal de l’organisme, dans l’intention d’améliorer la santé et le bien-être » [7].

→ Pour le praticien vétérinaire soucieux d’apporter un traitement fiable, et de préférence de bon rapport qualité-prix, à des affections articulaires bien souvent synonymes d’inconfort et de contre-performances, il paraît légitime de s’interroger sur l’efficacité des nutraceutiques dans le traitement de l’ostéoarthrite chez les animaux domestiques. Ces produits ayant fait l’objet de diverses publications de niveau scientifique variable, l’objectif de cette synthèse méthodique est de faire le point, selon les principes de la médecine factuelle, sur les études cliniques (in vivo) publiées sur le sujet.

ÉTAPE 2 DÉCRIRE LA MÉTHODE DANS LA SECTION “MATÉRIEL ET MÉTHODES”

1. Élaborer et exposer la méthode de recherche documentaire

→ Une recherche documentaire est effectuée dans les bases de données bibliographiques. Lorsqu’il s’agit d’en publier les résultats, l’auteur doit rapporter dans son article les bases de données consultées, les concepts et les mots clés descripteurs utilisés, les équations de recherche élaborées. L’objectif est de varier les sources afin d’identifier un maximum d’articles traitant du sujet.

→ Dans notre étude, pour répondre à la question portant sur l’utilisation des nutraceutiques, une recherche documentaire a été effectuée dans les bases de données bibliographiques PubMed, Cab Abstracts et Google Scholar.

→ Dans PubMed, aucun mot clé descripteur n’a été identifié pour le terme “Nutraceuticals”. PubMed propose d’employer “Dietary supplements”. Ce descripteur n’incluant pas les nutraceutiques les plus couramment utilisés (tels que la chondroïtine, la glucosamine et les acides gras), les descripteurs “Chondroitin”, “Glucosamine” et “Fish oils” ont été ajoutés à la requête. Comme notre revue systématique ne considère que les animaux, le sous-descripteur “Veterinary” a été appliqué aux mots clés “Joint diseases” et “Osteoarthritis”.

→ Dans Cab Abstracts, une équation similaire a été utilisée ([“Nutraceuticals” OR “Dietary supplements” OR “Fish oils”] AND [“Osteoarthritis » OR “Joint diseases”] AND [“Dogs” OR “Cats” OR “Horses” OR “Bovine” OR “Ovine”]).

L’équation suivante a été utilisée dans Goggle Scholar : “Oral” AND “Treatment” AND “Nutraceutical” AND(“Horses” OR “Dogs” OR “Cats » OR “Cattle” OR “Sheep”) AND “Arthritis”, et en indiquant que “Veterinary” devait apparaître dans le nom de la publication. De plus, le moteur de recherche du site de l’American Journal of Animal and Veterinary Sciences fut consulté en utilisant le seul mot “Osteoarthritis”.

Afin de répertorier d’autres études et de s’assurer de l’efficacité de notre recherche, les bibliographies des synthèses méthodiques rédigées par Aragon et coll. et Sanderson et coll. ont été examinées [1, 40]. Pour l’espèce équine, la synthèse méthodique de Pearson et Lindinger et l’article de Richardson et coll. ont été consultés [35, 37].

2. Définir les critères d’inclusion et d’exclusion des articles

→ Il est indispensable que le lecteur puisse prendre connaissance des critères de sélection des articles qui ont été identifiés grâce aux bases de données bibliographiques. Dans notre exemple, les recherches se sont limitées aux articles publiés après 2000. Seules les études expérimentales contrôlées, synthèses méthodiques et méta-analyses publiées en anglais ou en français ont été incluses dans l’étude. En effet, elles constituent le plus haut niveau de preuve qui puisse être apporté à une question portant sur une thérapeutique [48].

→ Pour être éligibles, ces articles devaient également traiter des effets de la supplémentation orale (granulés, solution buvable, capsules) ou alimentaire, d’une ou de plusieurs substances naturelles (contrairement aux molécules de synthèse) sur l’OA. Ce critère s’appuie sur la définition du nutraceutique donnée par le NAVNC et a pour objectif d’exclure les études portant sur les effets thérapeutiques de substances injectables (par voie intramusculaire ou intra-articulaire, comme l’acide hyaluronique). De plus n’ont été prises en considération que les études in vivo, afin d’apporter une réponse concrète au vétérinaire praticien qui tient à pouvoir évaluer les bienfaits potentiels des nutraceutiques sur les symptômes cliniques liés à l’OA. Pour cette même raison, les essais évaluant tout autre effet que les signes cliniques ont été exclus. Enfin, le caractère contrôlé des travaux a été un critère de sélection indispensable, conduisant ainsi à l’exclusion des essais sans groupe témoin.

3. Décrire les critères d’évaluation de la qualité des publications

→ La revendication par l’auteur d’un protocole solide, comme une étude contrôlée randomisée, ne suffit pas à garantir la qualité de la publication. Encore est-il nécessaire que ce travail ait été réalisé selon les règles. Il convient donc idéalement de contrôler la validité et la pertinence des publications par une lecture approfondie et l’attribution d’un indice de qualité. Cela s’effectue par l’affectation d’un score à chaque document, idéalement par deux examinateurs indépendants, en fonction d’une grille de lecture destinée à en apprécier la qualité méthodologique et le niveau de preuve scientifique. Cette longue démarche n’est pas possible pour le praticien dans son quotidien.

→ Dans notre exemple, dans un souci de comparaison avec les synthèses méthodiques déjà publiées sur le traitement de l’OA, il a été décidé d’adopter le même système d’évaluation, c’est-à-dire celui proposé par la Food and Drug Administration (FDA) [1, 38, 43]. Ce système comporte cinq étapes.

Ces cinq étapes correspondent à la démarche de l’EBM. Celle-ci comporte d’abord une évaluation de la validité interne (étape 1), puis de la validité externe (étapes 2 et 3) des études. Leur signification clinique (étape 4) et le niveau global de preuve (étape 5) sont ensuite déterminés.

→ Pour rappel, l’évaluation de la validité interne d’un essai (étape 1) consiste à situer sa position dans la pyramide de l’évidence, à vérifier que les auteurs ont tout mis en œuvre pour éviter les biais (pour limiter l’erreur systématique) et à s’assurer que des statistiques ont été réalisées (pour réduire l’erreur aléatoire) [48]. Une grille officielle a été élaborée par la Cochrane Library en médecine humaine pour évaluer une publication portant sur un essai thérapeutique. Élaboré par un groupe d’experts internationaux, ce document porte le nom de Consort Statement (CONsolidated Standards of Reporting Trials). Nous avons décidé d’élaborer une grille similaire adaptée à la médecine vétérinaire et d’en pondérer chacun des éléments. Il a également été décidé qu’une étude dont le score de qualité est inférieur à 45 % est de faible qualité (-), qu’un score compris entre 45 et 60 % correspond à une qualité modérée (Ø) et qu’un score de plus de 60 % permet de qualifier un travail de haute qualité (+) (tableau 1 complémentaire sur www.WK-Vet.fr). Cette grille a été choisie pour combler le manque de transparence qui réside dans la détermination de la qualité méthodologique des essais cliniques dans le système d’évaluation de la FDA.

→ L’évaluation de la validité externe consiste à identifier si diverses études portant sur une même substance présentent des résultats concordants et si leurs conclusions peuvent être généralisées, ce qui implique qu’un nombre suffisamment élevé d’individus aient été étudiés. L’étape 2 considère donc de concert les essais cliniques relatifs à un même nutraceutique afin d’évaluer le niveau de preuve global qu’apportent ces études vis-à-vis de l’utilisation de cette substance, en attribuant un score relatif à la quantité de celles-ci et à la taille des échantillons utilisés. À l’étape 2, le nombre suffisant d’études a été établi à 3 de façon arbitraire vu le faible nombre d’études réalisées. Les résultats sont notés *** si trois études au moins ont été réalisées, ils sont notés * dans le cas contraire. De plus, sur la base des calculs effectués par Innes et coll. et Lascelles et coll. pour déterminer la taille de leur échantillon dans ce type d’étude, le nombre de 25 animaux par groupe a été considéré comme adéquat [23, 28]. À l’étape 3, les résultats sont “cohérents” si, pour chaque substance étudiée, les conclusions rapportées mettent en évidence un effet similaire d’une étude à l’autre, dans le même sens, qu’il s’agisse d’une amélioration ou d’une absence d’effet. Si les études sont cohérentes, elles sont notées ***. La cohérence est dite “modérée” (score noté **) si au moins deux tiers des études montrent des résultats similaires pour une substance donnée. Dans le cas contraire, les résultats sont considérés comme “incohérents”, notés * dans le système d’évaluation de la FDA. Néanmoins, dans la plupart des cas, les effets d’une substance donnée ont été étudiés par un seul essai clinique. Dans ce cas, la cohérence des résultats ne peut être appréciée et l’abréviation “NA” (non applicable) figure alors dans le tableau correspondant.

→ Les statistiques sont utilisées pour évaluer que l’effet mis en évidence n’est pas dû au hasard. Cependant, un résultat statistiquement significatif n’indique nullement si l’effet observé est important sur le plan clinique. En effet, si, dans un exemple fictif, la conclusion de l’étude est que le temps réalisé en course par les chevaux traités aux nutraceutiques est significativement (P est inférieur à 0,05 [5 %]) inférieur par rapport aux animaux qui ne l’ont pas été, cette information ne dit pas si cela cliniquement utile. Autrement dit, une différence d’un centième de seconde pourrait être mise en évidence de façon très significative statistiquement, un test statistique permettant en effet uniquement de conclure qu’il existe une différence et qu’il est très peu probable (moins de 5 % de chances) que cette constatation soit le fruit du hasard. Toutefois, un centième de seconde n’est pas très intéressant sur le plan clinique. Pour cette raison, à l’étape 4, l’ampleur de l’effet a été évaluée pour déterminer le caractère cliniquement significatif de l’effet décrit. Lorsqu’elle n’est pas rapportée par les auteurs et que les données le permettent, l’ampleur (magnitude) de l’effet rapporté a été calculée selon la formule suivante :

ampleur de l’effet = (a – b)/c,

où a est la différence entre la valeur obtenue après le traitement et la valeur de base pour le groupe testé ; b, la différence entre la valeur obtenue à la fin de l’étude et la valeur de base pour le groupe contrôle ; c, l’écart type relatif à la différence observée pour le groupe contrôle.

Ainsi, un effet dont l’ampleur est supérieure à 0,8 a été considéré comme “physiologiquement significatif” (***). La note ** a été attribuée à une étude pour laquelle l’évolution observée est significative par rapport à la valeur de base et/ou au placebo, et/ou l’estimation de la taille de l’effet est comprise entre 0,5 et 0,8. La note * signifie qu’aucun effet n’a pu être mis en évidence, l’hypothèse nulle ne pouvant pas être rejetée.

À l’étape 5, un score global du niveau de preuve de l’efficacité des nutraceutiques est attribué. La preuve est forte (***) s’il existe une quantité importante d’études de haute qualité, cohérentes et montrant un effet significatif sur les signes cliniques de l’OA. Elle est faible dans toutes les autres situations.

ÉTAPE 3 RAPPORTER LES RÉSULTATS DANS LA SECTION “RÉSULTATS”

→ Lors de la lecture d’une synthèse méthodique, il est intéressant de prendre rapidement connaissance des articles répertoriés (nombre, raisons d’exclusion) et des données contenues dans chacun d’eux, et de les comparer. Cela s’opère idéalement à l’aide d’un tableau qui synthétise les principales caractéristiques des différentes publications : références de l’article, population étudiée, nombre d’animaux, méthodes, résultats et particularités.

Dans notre exemple, les recherches permirent de répertorier un méta-analyse, deux synthèses méthodiques et soixante-cinq études expérimentales devant répondre aux critères d’éligibilité évoqués précédemment. La méta-analyse et les deux synthèses méthodiques ont été incluses dans notre étude, ainsi qu’un total de vingt-trois essais cliniques répondant aux critères (figure 3).

→ Les vingt-trois essais cliniques retenus testent l’efficacité de dix-huit types de nutraceutiques oraux destinés au traitement de l’ostéoarthrite. Parmi ceux-ci figurent la chondroïtine sulfate (CS), la poudre de moule verte (GLM) et les acides gras w3. D’autres nutraceutiques commercialisés, comme Synoquin® (à base de glucosamine et de chondroïtine sulfate), Cosequin® (Glu-CS : à base de glucosamine, de chondroïtine sulfate et de manganèse), Myristol® (à base d’acide myristoléique [un acide gras]) ou encore Cortaflex® (contenant des oligo-éléments, des acides aminés et des vitamines), sont également retrouvés. Innes et coll. se sont intéressés aux effets du curcuma (P54FP) en 2003 et Moreau et coll. à la poudre de bois de velours (QEVA) en 2004 [23, 32]. D’autres nutraceutiques ont également été étudiés tels que le collagène de type II non dénaturé (UC-II) (et ses diverses combinaisons possibles avec l’acide hydroxycitrique [HCA] et/ou le chromium nacinate [CM]), les insaponifiables de soja et d’avocat (ASU), les b-1,3/1,6-glucans, l’hydrolysat de gélatine, le SMPC (special milk protein concentrate)et la poudre de moule verte. Enfin, un seul essai clinique mené sur des chats a envisagé les effets d’un régime alimentaire supplémenté en acides gras w3 (acides éicosapentaénoïque [EPA] et docosahexanoïque [DHA]), en glucosamine, en chondroïtine sulfate et en poudre de moule verte (tableaux 2 et 3 complémentaires sur www.WK-Vet.fr).

ÉTAPE 4 DISCUTER LES RÉSULTATS DANS LA SECTION “DISCUSSION”

→ Dans un article de synthèse méthodique, la première partie de la discussion consiste à pondérer les conclusions des différents articles lus par rapport à leur niveau de preuve. Il s’agit de répondre à la question : « Dans quelle mesure pouvons-nous croire ce qu’on nous dit ? » La seconde partie se propose d’évoquer les forces et les faiblesses de la synthèse méthodique elle-même.

→ Les études réalisées ont montré que trois nutraceutiques n’ont aucun effet sur les signes cliniques de l’ostéoarthrite : l’acide hydroxycitrique et la chondroïtine sulfate pour l’espèce canine, les insaponifiables de soja et d’avocat pour l’espèce équine [16, 29, 37]. Ces considérations ne s’appuient toutefois que sur une seule étude pour chaque substance citée. En raison du faible nombre d’essais disponibles et du peu d’animaux testés, malgré les effets bénéfiques observés, les preuves restent insuffisantes pour appuyer l’utilisation du Myristol®, du Cortaflex®, du collagène de type II non dénaturé, du curcuma, du concentré de protéines du lait, de la poudre de bois de velours, de l’hydrolysat de gélatine ou des β-1,3/1-6-glucans dans le traitement de l’ostéarthrite chez les animaux domestiques. Les effets de la poudre de moule verte ont fait l’objet de quatre études dont une n’a pas démontré d’effet significatif. Ce dernier résultat peut être lié à une dose administrée plus faible. La glucosamine associée à la chondroïtine sulfate seule ou à la chondroïtine sulfate et au manganèse a obtenu des résultats contradictoires. Cosequin® a eu des effets positifs chez le cheval, mais pas chez les chiens, espèce pour laquelle Synoquin® s’est pourtant révélé bénéfique. Au même titre qu’une constance dans les doses utilisées, la durée des traitements devrait être standardisée. Selon une observation de McCarthy et coll., les futurs essais cliniques menés pour étudier les effets de ces molécules sur le traitement de l’ostéoarthrite canine devraient durer au moins 70 jours [30]. Le plus fort niveau de preuve est apporté par les régimes alimentaires supplémentés en acides gras ω3 chez les chiens et les chats. L’effet de la poudre de moule verte pourrait être lié aux acides gras qu’elle contient.

Conclusion

Cet article illustre l’intérêt que peut avoir une synthèse méthodique. Cette dernière est néanmoins fondée sur une grille de critères et de scores qui, bien que reposant sur des principes d’épidémiologie clinique et de médecine factuelle, n’en restent pas moins quelque peu arbitraires. D’autres critères pourraient aboutir à une conclusion différente. L’utilisation de la grille du Consort Statement a permis d’obtenir des scores similaires à ceux de la revue de Pearson et Lindinger, alors que des discordances ont été observées avec les synthèses méthodiques d’Aragon et coll. et de Sanderson et coll. [1, 35, 40]. Ces divergences ont été toutefois mineures. Une standardisation des méthodes d’évaluation des essais cliniques pourrait limiter une hétérogénéité des résultats.

Cet article illustre aussi ce que d’autres auteurs ont présenté comme une limite actuelle à l’application de la démarche de la médecine factuelle : le nombre limité d’essais contrôlés randomisés rigoureux et le nombre faible d’individus inclus dans ces études cliniques [2, 32]. Notre travail montre également une différence de niveau entre les études menées sur les chiens et celles conduites chez les chevaux. Le monde scientifique vétérinaire en est conscient et œuvre pour améliorer le niveau des études menées et de leur publication. Une plus grande participation des praticiens à la recherche clinique permettrait d’enrôler un plus grand nombre d’individus [32]. Il nous semble également important de travailler à l’amélioration des outils d’information à disposition des praticiens. Les synthèses méthodiques nous semblent un outil adéquat. Une formation de base à la médecine factuelle pendant le cursus universitaire permettrait ainsi au vétérinaire de pouvoir rapidement vérifier la méthode et la rigueur de la synthèse méthodique pour s’approprier ensuite, à bon escient, la conclusion portée sur une question clinique d’intérêt pour laquelle il n’aurait pas eu le temps d’effectuer une recherche bibliographique exhaustive.

ENCADRÉ
Articles de synthèse narrative, synthèse méthodique et méta-analyse

→ L’intérêt des articles de synthèse narrative (en anglais, “review”) est de fournir un résumé au lecteur. Ce type d’article est en général commandité par un éditeur à un spécialiste qui fournit ainsi un travail de résumé au gré de sa propre expérience, de ses lectures personnelles et sa compréhension du sujet. Cette publication n’est pas toujours contrôlée par un comité de relecture. L’auteur de l’article pourrait dès lors sélectionner consciemment, ou inconsciemment, des publications qui tendraient à confirmer sa vision personnelle des choses.

→ Comme son nom l’indique, une synthèse méthodique (en anglais, “systematic review”) suit une méthode précise. C’est celle-ci qui va lui donner son objectivité. En établissant dès le départ une démarche et en la décrivant dans la section “Matériel et méthodes” de l’article, l’auteur livre au lecteur la technique que celui-ci pourrait utiliser pour vérifier la sélection des articles et les faits qui en sont tirés.

→ Quand cette synthèse est de plus accompagnée d’une analyse statistique des mesures de l’effet étudié, il s’agit d’une méta-analyse. Synthèse méthodique et méta-analyse occupent le haut de la pyramide de l’évidence (figure 1). Une synthèse méthodique comporte plusieurs étapes illustrées dans cet article.

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