CANCÉROLOGIE CANINE
Analyse d’article
Auteur(s) : Catherine Laffort
Fonctions : Clinique vétérinaire
8, boulevard Godard
33300 Bordeaux
Les rétinoïdes constituent un groupe de molécules comprenant le rétinol, ainsi que ses dérivés naturels ou synthétiques.
Les rétinoïdes régulent de nombreux processus biologiques comme l’embryogenèse, le contrôle et la maintenance de l’homéostasie tissulaire et, au niveau cellulaire, la différenciation et la mort. Ils exercent leurs effets après interaction avec des récepteurs nucléaires spécifiques.
Les récepteurs aux rétinoïdes sont divisés en deux familles : les RAR et les RXR. Les premiers sont les récepteurs nucléaires de l’acide rétinoïque, et il en existe trois subtypes, a, b et g. Les RXR, pour récepteurs au rétinoïde X ou réxinoïdes, sont aussi au nombre de trois (a, b et g). Ces récepteurs se différencient, par exemple, par leur localisation tissulaire, leur expression dans le temps et leur affinité pour le ligand.
Les effets thérapeutiques, mais aussi secondaires, des rétinoïdes dépendent du récepteur sur lequel la molécule se fixe, et de nouveaux dérivés de synthèse qui ciblent avec une très grande spécificité certaines isoformes sont en cours de développement. En cancérologie canine comme en cancérologie humaine, mieux connaître la répartition de ces récepteurs pour cibler les dérivés à privilégier dans telle ou telle indication pourrait permettre d’optimiser l’apport de ces molécules dans la prévention et le traitement des cancers.Chez le chien, l’expression des rétinoïdes a, par exemple, été évaluée lors de lymphome ganglionnaire, d’hyperplasie bénigne lymphoïde et sur des nœuds lymphatiques normaux. Les tissus lymphoïdes non néoplasiques n’expriment pas de récepteurs aux rétinoïdes alors que les lymphomes les expriment fortement [13]. Après liaison avec leur ligand, les récepteurs changent de forme allostérique et peuvent dès lors se lier avec des éléments de réponse de l’ADN (ou RARE pour retinoic acid responsive element), ce qui active de nombreux programmes de régulation directs ou indirects des gènes cibles.
Des nombreuses études précliniques et cliniques suggèrent que les rétinoïdes, par leurs propriétés sur la différenciation cellulaire, ont un intérêt en cancérologie chez l’homme, à la fois comme agent de chémoprévention et comme agent thérapeutique [2]. L’apport des rétinoïdes en cancérologie est particulièrement bien illustré par le concept de “thérapie différenciatrice” : il s’agit de forcer une cellule cancéreuse à acquérir un phénotype différencié moins agressif et, finalement, de conduire cette cellule à la mort comme stade ultime de la différenciation [6].
Les études menées chez le chien sont beaucoup moins nombreuses que chez l’homme. Elles concernent l’ostéosarcome, le mélanome, le mastocytome avec des résultats in vitro prometteurs [4, 5, 8-10]. Quelques études in vivo plus anciennes ont évalué l’intérêt des rétinoïdes dans le traitement de tumeurs cutanées, avec des résultats intéressants pour les stades prénéoplasiques du carcinome épidermoïde, l’épithélioma intracutané kératinisant et le lymphome cutané, en particulier dans sa forme érythémato-squameuse [7, 14].
Les lymphomes cutanés sont des tumeurs rares (1 % des tumeurs cutanées du chien) et touchent plutôt des chiens âgés. Les lymphomes T sont de loin les plus fréquents des lymphomes cutanés chez le chien [12]. Une étude récente portant sur 608 cas de lymphomes malins, dont 75 présentaient une atteinte cutanée, a identifié 72 cas de lymphomes T cutanés primitifs [11].
Dans l’étude sélectionnée, 1 seul cas de lymphome B a été isolé. En revanche, la faible proportion de lymphomes T épithéliotropes (5/30) dans cet échantillon est plus étonnante. En effet, chez l’homme comme chez le chien, les lymphomes épithéliotropes, essentiellement le mycosis fongoïde (MF), constituent l’entité prédominante des lymphomes cutanés, à tel point que, chez le chien, certains auteurs ont pu abusivement utiliser un terme ou l’autre [12]. Sur les 72 cas de lymphomes T cutanés de l’étude de Ponce, seuls 22 ne présentent pas d’épithéliotropisme [11]. Les auteurs de l’étude mettent en avant de possibles variations régionales pour expliquer cette différence. Il est aussi envisageable que les critères histologiques utilisés (nette infiltration subépidermique et péri-annexielle par des lymphocytes tumoraux, présence de microabcès de Pautrier) aient été trop stricts. Dans une étude portant sur 46 cas de lymphomes T canins, il a été avancé que, dans les stades évolués, certains cas de MF pourraient se transformer, comme chez l’homme, en lymphome de haut grade avec perte de l’épithéliotropisme [3]. Pour ces auteurs, des critères cytologiques sont également à prendre en compte, à côté des critères histologiques, lors du diagnostic de MF [3]. À l’opposé, lors de stades débutants, le diagnostic de MF constitue également un challenge pour les histopathologistes et la détection par PCR (polymerase chain reaction) de la monoclonalité des lymphocytes T tumoraux pourrait permettre d’affiner précocement ce diagnostic [1].
Très à la mode dans les années 1990, les rétinoïdes ont, par la suite, été un peu délaissés en dermatologie vétérinaire en raison de leur apport parfois modéré, de leur coût et de leurs effets secondaires qui nécessitent un suivi rapproché. Ils connaissent un regain de popularité, notamment en cancérologie, grâce à une meilleure connaissance de leur mode d’action et à l’avènement de dérives plus ciblées.
OBJECTIF
Montrer que les lymphomes cutanés canins expriment, de façon variable, les récepteurs à l’acide rétinoïque (RAR) et les récepteurs aux rétinoïdes X (RXR).
MÉTHODE
L’expression des récepteurs aux rétinoïdes a été évaluée par immunohistochimie sur 30 biopsies cutanées de chiens atteints de lymphome cutané canin. Les subtypes a, b et g des récepteurs RAR et RXR ont été testés. L’immunophénotype de chaque lymphome a été identifié à l’aide des marqueurs CD79a (lymphocytes B) et CD3 (lymphocytes T).
RÉSULTATS
29 lymphomes sur les 30 sont CD3 positifs. Les récepteurs aux rétinoïdes exprimés le plus fréquemment sont RARb (87 % des cas), RXRa et RXRg (77 % des cas). L’expression de RARg n’a pas été observée.
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