ENDOCRINOLOGIE FÉLINE
Analyse d’articles
Auteur(s) : Mathieu Faucher
Fonctions : Clinique vétérinaire Alliance
8, boulevard Godard
33300 Bordeaux
L’hyperthyroïdie féline est l’endocrinopathie la plus fréquemment diagnostiquée chez le chat âgé. Elle est associée à une augmentation du débit de filtration glomérulaire (DFG) qui peut masquer une maladie rénale chronique (MRC) concomitante. Une baisse du DFG accompagne systématiquement le traitement de l’hyperthyroïdie (HT) et la restauration de l’euthyroïdie (eT) [1]. Si une MRC est présente, elle peut alors devenir clinique et aboutir au développement d’une azotémie. La question est de savoir si une hypothyroïdie (hT) iatrogène c’est-à-dire une surcorrection de l’HT peut constituer un risque accru de développer une azotémie et avoir un impact sur la survie.
La TSH est dosée en utilisant un kit destiné au dosage de la TSH canine et déjà évalué chez le chat [9].
L’intervalle de référence utilisé dans cette étude (inférieur à 0,03 à 0,15 ng/ml) provient d’une étude précédente sur 90 chats gériatriques à fonction thyroïdienne normale [10].
Lors d’HT, la sécrétion de TSH est inhibée : sa valeur est inférieure à la limite de quantification (0,03 ng/ml) chez tous les chats testés dans une étude [9]. La première partie de cette étude a pour objectif de déterminer la durée de cette inhibition après le traitement de l’HT à l’I131. Les 10 chats diagnostiqués hT ont une TSH augmentée (supérieure à 0,15 ng/ml) entre 3 et 6 mois après le traitement. Dans la seconde étude, les contrôles effectués au moins 6 mois après le début du traitement ont donc lieu suffisamment tard pour détecter une augmentation de la TSH.
Le diagnostic de l’hT repose ici sur la détection d’une T4 basse et d’une TSH augmentée. Cette approche a probablement été choisie en raison de la nature rétrospective de cette étude. Chez le chien, ces anomalies sont spécifiques d’une hT mais manquent de sensibilité : 20 à 40 % des chiens hT ont une TSH dans l’intervalle des valeurs usuelles [4]. Cette approche n’a pas encore été étudiée de manière extensive chez le chat, mais si un manque de sensibilité existe également dans cette espèce, cela aurait pu conduire à une sous-estimation du nombre d’hT dans cette étude.
Dans une autre étude, le diagnostic d’hT chez le chat a été établi après détection d’une T4 basse et d’une absence de stimulation par la TSH recombinante humaine [8]. Cette approche a déjà été validée chez le chien hT et a été utilisée chez le chat après traitement à l’I131 et non pas traité par des antithyroïdiens [2, 8].
Chez le chien, l’hT est associée à un DFG abaissé [5]. Chez le chat, le traitement de l’HT s’accompagne d’une diminution du DFG qui peut conduire au développement d’une azotémie si une MRC sous-jacente est présente [1].
Dans cette étude, les chats azotémiques sont significativement plus nombreux dans le groupe hT que dans le groupe eT, et la créatininémie des chats hT est significativement plus élevée que celle des chats eT. Cela peut signifier que la baisse du DFG est plus prononcée chez les chats hT, rendant plus probable le développement d’une azotémie dans ce groupe.
La fonction rénale est ici estimée par la créatininémie. Chez le chien, il est montré que la production endogène de créatinine est diminuée de 33 % lors d’hT [7]. Si cela est vrai également chez le chat, le nombre de chats à fonction rénale réduite dans le groupe hT a pu être sous-estimé.
Après restauration de l’eT chez des chiens hT, le DFG ne revenait pas à la normale dans la plupart des cas dans une étude [5]. Les auteurs citent plusieurs études issues de la médecine humaine suggérant que l’hT pourrait être responsable d’une altération de la fonction rénale de manière définitive [3, 6]. Cela reste à explorer chez le chat.
Les auteurs rappellent que lors du traitement de l’HT, la baisse du DFG est responsable du développement d’une azotémie chez 17 à 49 % des chats. Leur survie n’est pas différente de celle des chats ne développant pas d’azotémie, ce qui est confirmé dans cette étude chez les chats eT [11]. En revanche, les chats hT et azotémiques survivent moins longtemps que les chats hT non azotémiques, ce qui suggère que l’hT peut contribuer à la mortalité des chats azotémiques par des effets sur le rein ou d’autres organes.
En conclusion l’hT iatrogène favorise la survenue d’une azotémie chez le chat, et les chats hT et azotémiques ont une survie réduite comparé aux hT non azotémiques. Il paraît donc souhaitable dans ces cas de restaurer l’eT, même si les effets sur la fonction rénale après une période d’hT restent à étudier.
MÉTHODE
La première étude a pour objectif de déterminer le temps nécessaire à la reprise de la sécrétion de TSH (Thyroid stimulating hormone) après restauration de l’euthyroïdie (eT) chez des chats hyperthyroïdiens (HT) : la TSH est mesurée chez des chats HT 1, 3 et/ou 6 mois après traitement à l’I131.
La seconde étude consiste à suivre de manière rétrospective le statut thyroïdien et rénal de chats HT en cours de traitement. Les données cliniques et biologiques au diagnostic et au suivi (au moins 6 mois après le début du traitement) sont collectées. Les chats inclus doivent présenter au moment du suivi une thyroxinémie (T4) inférieure à 40 nmol/l et avoir une valeur simultanée de la TSH disponible. Une T4 basse et une TSH haute caractérisent les chats hypothyroïdiens (hT). Une T4 normale ou basse et une TSH normale caractérisent les eT. Les chats à T4 normale et TSH haute sont exclus.
RÉSULTATS
Première étude. Douze chats HT sont suivis dont 10 sont diagnostiqués hT 3 à 6 mois après le traitement : la TSH est augmentée chez 4 sur 7 d’entre eux à 1 mois, 7 sur 8 à 3 mois et 6 sur 6 à 6 mois. Les deux chats eT ont une TSH normale 3 mois après le traitement.
Seconde étude. Sur 75 chats inclus, 37 % sont classés hT et 63 % eT. Les chats azotémiques sont significativement plus nombreux dans le groupe hT (57 %) que dans le groupe eT (30 %). À 6 mois après traitement, les chats hT présentent de manière incontestable une créatininémie supérieure et une fréquence cardiaque, des phosphatases alcalines et un hématocrite inférieurs aux chats eT. Il n’existe pas de différence de survie entre les chats hT et eT, ni entre les chats eT azotémiques et eT non azotémiques. Cependant les chats hT azotémiques survivent significativement moins longtemps que les chats hT non azotémiques.
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