La fièvre Q : actualités épidémiologiques - Le Point Vétérinaire n° 304 du 01/04/2010
Le Point Vétérinaire n° 304 du 01/04/2010

Maladies infectieuses des ruminants

Mise à jour

LE POINT SUR…

Auteur(s) : Claude Saegerman*, Guy Czaplicki**, Sarah Rebecca Porter***

Fonctions :
*Département des maladies infectieuses et parasitaires
Faculté de médecine vétérinaire
Université de Liège
Boulevard de Colonster, 20
B42, B-4000 Liège, Belgique
**Association régionale de santé et d’identification animales
Avenue Alfred-Deponthière 40
B-4431 Loncin, Belgique
***Département des maladies infectieuses et parasitaires Faculté de médecine vétérinaire Université de Liège Boulevard de Colonster, 20 B42, B-4000 Liège, Belgique

Avec 2 361 cas cliniques humains recensés aux Pays-Bas en 2009 dont 6 décès, un point sur la situation et l’épidémiologie de cette zoonose s’impose, à la lumière des dernières avancées scientifiques.

La fièvre Q est une zoonose endémique due à Coxiella burnetii qui se propage de façon importante aux Pays-Bas depuis trois ans. Un bilan de la situation épidémiologique actuelle de la maladie permet de faire le point sur les propriétés de la bactérie, les espèces hôtes, les voies de transmission et les facteurs de risque, et de proposer des solutions de gestion.

Extension des cas humains aux Pays-Bas

L’aire de répartition de la fièvre Q est mondiale, à l’exception de la Nouvelle-Zélande. L’augmentation de la sensibilisation et la mise à disposition de meilleurs tests diagnostiques peuvent expliquer la hausse du nombre de cas de fièvre Q recensés à travers l’Europe depuis une dizaine d’années (figure 1) [2]. La bactérie responsable, C. burnetii, est généralement à l’origine de foyers sporadiques et localisés de la maladie. La situation aux Pays-Bas fait exception à cette règle. Ce pays, qui comptabilisait en moyenne 17 cas humains de fièvre Q par an (sur un total de 16,5 millions d’habitants), est en effet confronté depuis 2007 à une extension de l’affection dans la province du Nord-Brabant (figure 2). D’autres provinces, en périphérie, sont également touchées. Plus globalement, la maladie a été confirmée dans 74 troupeaux caprins laitiers et 2 troupeaux ovins essentiellement localisés dans le Nord-Brabant (ProMED, message du 27 février 2010, portant le numéro 20100227.0656). Cette explosion de cas humains est probablement à mettre en relation avec un système intensif de production de chèvres laitières sans doute naïves vis-à-vis de C. burnetii, couplé à des vagues d’avortements constatées dans les troupeaux infectés et exploités dans des zones d’habitation qualifiées d’urbaines ou de suburbaines en raison de leur densité de population.

À ce jour, il n’existe pas d’augmentation significative du nombre de cas de fièvre Q chez l’homme comparable dans les pays limitrophes (Belgique et Allemagne). La situation sanitaire et les mesures de prévention et de contrôle de la fièvre Q aux Pays-Bas et en Europe peuvent être suivies sur des sites Internet (encadré).

Une bactérie intracellulaire aux nombreux hôtes et très résistante

1. Cycle d’infection

L’agent responsable de la fièvre Q, C. burnetii, est une bactérie intracellulaire obligatoire, à Gram –, de très petite taille (0,2 à 0,4 µm de large sur 0,4 à 1 µm de long). Celle-ci présente des caractéristiques similaires à celles des rickettsies, alors qu’elle s’en éloigne sur le plan de la phylogénie. Bien que proche du genre Legionella, C. burnetii est la seule espèce du genre Coxiella. En plus de l’homme, elle infecte presque toutes les espèces animales domestiques, mais aussi de nombreuses espèces sauvages, des oiseaux et des animaux à sang froid compris. Le spectre d’hôtes est donc très étendu, mais, sur le plan de la santé publique, les ruminants domestiques constituent le réservoir principal de la maladie. Chez ces derniers, l’infection par C. burnetii est le plus souvent inapparente, en particulier chez les bovins. Dans sa forme clinique, des avortements, des mises bas prématurées, des métrites et une infertilité peuvent être observés.

Deux cycles épidémiologiques d’infection sont observés, l’un sauvage et l’autre domestique (figure 3).

2. Propriétés de la bactérie

Sur la base des propriétés morphologiques, antigéniques et physico-chimiques de C. burnetii, trois formes bactériennes distinctes sont associées à différents stades du cycle de développement [4,11, 37, 54] :

– un variant cellulaire de grande taille (Large Cellular Variant, LCV : 0,2 µm de large et 1 à 2 µm de long) qui constitue la forme infectieuse de la bactérie. Il se retrouve dans le compartiment intracellulaire et se multiplie pour donner d’autres LCV, mais aussi l’une ou l’autre des formes suivantes ;

– un variant cellulaire de petite taille (Small Cellular Variant, SCV : 0,2 µm de large et 0,5 µm de long) qui représente à la fois la forme bactérienne de l’infection persistante chez l’hôte et une forme de résistance ;

– un variant cellulaire compact de petite taille (Small Dense Cells, SDC ; 0,4 µm de large et 0,7 µm de diamètre, parfois appelé “pseudo-spore”) qui constitue la forme extrême de résistance de la bactérie, et qui lui confère ses propriétés de conservation et de dissémination. Retrouvé à l’intérieur de la cellule infectée ou en condition extracellulaire, ce variant permet à la bactérie de persister durablement dans l’environnement et dans certains tissus de l’hôte. Il est à l’origine de la plupart des infections naturelles et revêt ainsi une importance cruciale en prophylaxie sanitaire.

En raison de sa résistance à des conditions drastiques de température (plus de 2 ans à – 20 °C, 2 ans à 20 °C, 30 minutes à 6 °C, 7 secondes à 100 °C), de pH (multiplication possible dans une large gamme de pH), de pression osmotique ou de rayonnements ultraviolets (sa destruction n’est assurée qu’après exposition aux rayons durant plus de 30 minutes), la bactérie peut survivre longtemps dans le milieu extérieur [32,41,58]. Coxiella burnetii possède aussi une résistance exceptionnelle vis-à-vis des désinfectants usuels utilisés à des concentrations usuelles (tableau 1). Sa résistance dans les matières virulentes, également marquée, implique que le contact indirect est une voie de transmission majeure (figure 4).

3. Variation antigénique et pathogénicité

De plus, C. burnetii présente une variation de phase antigénique. En effet, lorsque le lipopolysaccharide de surface (LPS) est long (complet), il constitue la phase I qui est la forme virulente, dotée d’un pouvoir immunogène et protecteur élevé. En revanche, lorsque le LPS est tronqué, il représente la phase II : la bactérie est alors peu ou non virulente, et, bien que le pouvoir immunogène soit partiellement conservé, son pouvoir protecteur est faible. Les conséquences de cette variation de phase sont importantes en termes d’efficacité de la vaccination.

Enfin, il existe également une diversité des souches de C. burnetii, imputable à une composition génétique variable, permettant de les classer en six groupes génomiques différents (I à VI) [26]. Le rôle de la diversité génétique des souches sur l’expression de leur pathogénicité reste un sujet de controverse. Actuellement, la nature de la souche isolée varierait selon son origine géographique plutôt que selon sa pathogénicité. Dans l’épidémie de fièvre Q aux Pays-Bas, l’hypothèse de l’émergence d’une souche hypervirulente a été posée [16, 29]. En effet, bien qu’une diversité génétique ait été constatée, une souche identique a été retrouvée tant dans des troupeaux caprins laitiers ayant subi des avortements en série que chez des patients (fermiers et habitants des villages voisins). Des infections expérimentales comparatives sont nécessaires pour confirmer ou infirmer cette hypothèse.

En résumé, C. burnetii est une petite bactérie intracellulaire, très résistante (formes SCV et SDC), très infectieuse, de composition antigénique complexe (phases I et II) et de pathogénicité variable (dépendant de sa structure génomique et/ou du statut immunitaire de l’hôte).

Voies de transmission

1. Une transmission principalement aérogène

La transmission aérogène est la voie principale tant chez les animaux que chez l’homme et un faible nombre de bactéries sont suffisantes pour le développement d’une infection chez un nouvel hôte [21,52]. Comme dans bien des zoonoses(1), les animaux domestiques, en particulier les ruminants, sont considérés comme les principaux réservoirs du pathogène. Les animaux infectés par la fièvre Q excrètent C. burnetii dans le lait, les fèces, l’urine, la salive, et abondamment dans les sécrétions vaginales, le placenta, le liquide amniotique et les autres produits de la conception (tableau 2) [19].

Chez les bovins, 65 à 85 % des vaches infectées excrètent des bactéries principalement par une seule voie et seulement 2 % d’entre elles en éliminent simultanément dans le mucus vaginal, les fèces et le lait [7,22]. Lorsque les voies d’élimination sont prises en compte, la combinaison la plus fréquente est l’excrétion simultanée dans le mucus vaginal et le lait [7]. Le lait est l’échantillon où la bactérie est le plus souvent rencontrée (24,4 %), en comparaison avec les fèces (20,7 %) et le mucus vaginal (19 %) [22]. Dans le lait de vache, C. burnetii a été identifié plus de 32 mois après le part [34]. Le lait de tank constitue donc une matrice d’échantillonnage de choix et, de surcroît, très économique. De plus, l’infection alimentaire est connue pour présenter un pouvoir plus faible tant chez les humains que chez les animaux [36, 39]. Chez les ruminants, l’impact des sécrétions bactériennes d’origines génitale et accessoirement fécale sur la contamination de l’environnement semble majeur [51]. C. burnetii peut résister plusieurs mois dans l’environnement et est aisément diffusable par des aérosols. Ainsi, l’incidence humaine de la fièvre Q a augmenté significativement peu de temps après les mises bas aux Pays-Bas (pics épidémiques annuels au mois de mai) [57]. Dans ce pays, un effet saisonnier a également été rapporté et est lié à l’épandage des fumiers de chèvres [13].

Plus fréquemment, l’inhalation de bactéries présentes dans l’environnement est la cause d’infections humaines et de la diffusion de la maladie entre animaux. Cependant, des cas de fièvre Q ont été diagnostiqués en dehors de tout contact préalable ou de proximité des animaux. Par conséquent, C. burnetii peut se propager par le vent et être à l’origine d’infections à distance d’une source initiale [38].

Parmi les ectoparasites, les tiques sont considérées comme le réservoir primaire naturel de C. burnetii. Plus de quarante espèces de tiques sont naturellement infectées par C. burnetii, parmi lesquelles Ixodes ricinus, qui est commune sous nos latitudes [36, 55]. Les fèces des tiques sont extrêmement riches en bactéries, où une concentration de 1012 organismes par gramme peut être atteinte [27]. Cependant, il est considéré que les tiques ne contribuent pas de manière significative à la persistance de la fièvre Q dans les régions où la maladie est enzootique [27, 52].

2. Une voie alimentaire mineure et controversée

Dans l’état actuel des connaissances, la contamination par la voie orale est mineure. Elle est controversée car la dose infectieuse requise, probablement supérieure à celle de la voie aérogène, reste indéterminée à ce jour. Des études anciennes ont montré que, après ingestion de lait cru contaminé par des personnes volontaires, une séroconversion était possible en l’absence de tout symptôme. Cependant, ces dernières vivaient dans l’environnement du troupeau de vaches laitières dont était issu ce lait [9]. De plus, à la suite d’investigations épidémiologiques, de très rares cas cliniques humains ont été décrits après consommation de lait cru ou de fromage à base de lait cru en provenance d’exploitations de petits ruminants infectés par la fièvre Q, sans que ces patients aient été exposés à d’autres voies apparentes de contamination [17, 33]. Dans un autre essai, encore, portant sur 477 patients en phase aiguë de fièvre Q, l’ingestion de fromage de chèvre a été notée dans 85 cas sur 366 (23,2 %), alors que la fréquence des contacts ruraux est de 40 % et celle des contacts lors du part d’animaux gestants, de 35 % [45]. Enfin, dans une étude récente incluant 241 étudiants en médecine, de hauts titres en anticorps spécifiques dirigés contre C. burnetii ont été plus fréquemment observés chez les consommateurs de lait cru et de fromage au lait cru de chèvre [15]. Il convient toutefois de préciser que ces consommateurs étaient également en contact journalier avec des ruminants domestiques, ce qui interdit toute conclusion hâtive quant à l’intervention du lait cru ou de ses dérivés comme facteur explicatif unique ou majeur. La pasteurisation basse à 72 °C pendant 15 secondes donne lieu à 11 réductions décimales de C. burnetii [52].

Enfin, sur la base d’une revue exhaustive, l’Agence française de sécurité sanitaire des aliments (Afssa) a conclu formellement au caractère négligeable de la voie orale comme facteur de risque de l’infection humaine, par comparaison à la voie aérogène [3].

La vaccination : une option de gestion

1. Gestion humaine

La fièvre Q étant une zoonose, les deux premières mesures préventives à proposer dans un troupeau reconnu infecté sont, d’une part, d’informer les personnes actives dans cette exploitation du risque zoonotique et, d’autre part, de conseiller un diagnostic précoce de l’infection chez tous les intervenants de ce troupeau, au besoin en prenant contact avec le médecin traitant des individus concernés. Ces mesures vont permettre la mise en place éventuelle d’un traitement spécifique adapté, visant à prévenir le développement d’infections chroniques et de complications secondaires parfois invalidantes. En effet, bien que la fièvre Q soit généralement reconnue comme une maladie professionnelle, son incidence est sous-estimée en santé publique. Par méconnaissance, mais également en raison de la grande variabilité des symptômes cliniques, les médecins généralistes ont parfois des difficultés à établir le diagnostic rapidement (figure 5) [52]. Pourtant, grâce aux tests sérologiques disponibles (tableau 3), le diagnostic des malades est aujourd’hui fiable et le traitement, même s’il est long et contraignant, l’est tout autant.

2. Gestion du troupeau

Pour la gestion du troupeau infecté, l’objectif majeur des mesures à appliquer est de prévenir ou de limiter la contamination à l’ensemble des animaux, et des humains les côtoyant, mais aussi hors de l’exploitation.

Mesures hygiéniques

Nous disposons d’outils à la fois hygiéniques, médicaux et de gestion, qu’il convient d’utiliser avec discernement. Toutes les mesures générales de biosécurité(2) contribuent, de manière non spécifique, à cet objectif. Toutefois, dans la mesure où C. burnetii est très résistant dans l’environnement et où sa présence est maximale dans les produits de la mise bas, un soin particulier doit être apporté durant cette période à risque. Ainsi est-il fortement recommandé de prévoir un local spécifique, au moins un box de mise bas indépendant, avec son propre matériel d’entretien. Il doit être nettoyé et désinfecté après chaque usage, en évitant la formation d’aérosols, particulièrement infectieux. Le personnel doit porter des gants et un masque pour toute intervention dans ce compartiment. Les placentas et avortons seront soigneusement éliminés ou détruits. Ces issues de mise bas se retrouvant dans la litière, contaminée également par les fèces et les urines infectées, le fumier doit faire l’objet de soins attentifs. Il peut être désinfecté par adjonction de cyanamide calcique à une concentration de 0,6 % [5]. Il est stocké en tas pour une période minimale de 3 mois, pour permettre la stérilisation par maturation, et ne doit pas être épandu par temps sec et venteux. De plus, le regroupement des mises bas et l’introduction fréquente d’animaux (plus de 10 par an) constituent aussi des facteurs de risque avérés qu’il est nécessaire de maîtriser [59]. Ces mesures sont préconisées par le collectif de l’Acerca [1].

Mesures médicales

Bien qu’elles soient importantes, ces mesures hygiéniques sont insuffisantes à elles seules pour empêcher la dispersion de la bactérie au sein et en dehors du troupeau. Des traitements médicaux doivent être envisagés, soit par une antibiothérapie, soit par la vaccination des animaux ou une association des deux. Toutefois, à ce jour, les quelques résultats de recherches disponibles sur l’utilité et l’efficacité des antibiotiques chez les ruminants font tous le même constat : les objectifs de prévention de l’avortement et de diminution de l’excrétion ne sont en aucun cas atteints [1, 6, 8, 10]. Une résistance de la bactérie ayant été décrite vis-à-vis de la doxycycline, tétracycline couramment employée pour le traitement de cette infection chez l’homme, la plus grande prudence doit nous guider dans la décision, le choix et la stratégie d’une éventuelle antibiothérapie chez les animaux de rente [49].

En revanche, le vaccin Coxevac® (Ceva-Santé animale, Libourne, France) dispose d’une autorisation temporaire d’utilisation (ATU) tant en France (depuis quelques années pour les ovins, les caprins et les bovins) qu’en Belgique (plus récemment pour les caprins). Ce vaccin inactivé, élaboré à partir de C. burnetii en phase I, a fait l’objet d’investigations chez les caprins et les bovins infectés ou naïfs. Ces travaux ont permis d’obtenir quelques conclusions intéressantes, qui permettent de proposer un schéma vaccinal cohérent prévenant l’avortement, limitant fortement l’excrétion et diminuant singulièrement la charge infectieuse dans un troupeau infecté, et, par conséquent, dans son environnement [4,23,24,51]. L’efficacité maximale de Coxevac® est obtenue en vaccinant des animaux non encore infectés avant de les mettre à la reproduction. Dans ces conditions, la prévention des avortements est réelle et une limitation singulière de l’excrétion est obtenue [51]. Un protocole idéal chez les ruminants viserait à une vaccination des animaux dans un troupeau naïf, ce qui est rarement le cas. Dès lors, un protocole réaliste va consister à vacciner toutes les femelles âgées d’au moins 3 mois et à effectuer un rappel vaccinal avant la mise à la reproduction. Toutefois, chez les bovins dont l’âge moyen au premier vêlage est fréquemment de 30 mois, il semble utile d’inclure une vaccination de rappel supplémentaire à l’âge de 12 à 15 mois avant le rappel lors de la mise à la reproduction. Le vaccin n’ayant aucune action curative, l’évaluation de l’efficacité d’une vaccination des animaux du troupeau en production (vaches) devrait être réalisée au préalable, à l’aide d’un test Elisa sur lait de tank. Si le résultat du test est négatif, une vaccination des vaches est indiquée. Si le résultat est positif, cela signifie que le nombre d’animaux infectés au sein du troupeau est élevé et que l’efficacité de la vaccination s’en trouvera affectée. Il convient cependant d’ajouter que la vaccination d’animaux infectés, si elle n’a pas d’effet protecteur, n’est pas nocive. L’innocuité du vaccin est en effet démontrée chez les chèvres et les bovins [4,23,24].

Aux Pays-Bas, des mesures drastiques de contrôle ont été mises en œuvre. La vaccination des petits ruminants à l’aide de Coxevac®, initialement réalisée dans les régions affectées, a été étendue en 2010 à toutes les exploitations de plus de 50 chèvres ou brebis et dans les lieux à risque tels que les fermes pédagogiques et les zoos. Ces mesures incluent également une interdiction de remise à la reproduction des animaux et un dépistage de la maladie par analyse du lait de tank des troupeaux de plus de 50 chèvres ou brebis. En décembre 2009, un abattage de toutes les chèvres gestantes, vaccinées ou non, provenant des troupeaux infectés a été préconisé. Les femelles non gestantes épargnées ont été éliminées du circuit de la reproduction pour toute leur durée de vie économique.

Améliorer la communication

En Europe, plusieurs épidémies humaines de fièvre Q, d’amplitude discrète, comme celle de Montoison en 2001, plus importante, comme celle survenue dans la vallée de Chamonix à l’été 2002, ou majeure comme l’actuelle épidémie aux Pays-Bas, illustrent la nécessité de structurer des canaux de communication et de collaboration entre les acteurs de la santé publique et ceux qui ont en charge la santé animale [16, 47, 48, 50]. Ces canaux sont le premier pas vers une meilleure gestion de la santé au sens large (concept « Un monde, une santé » ; informations exhaustives disponibles à l’adresse URL, http://www.onehealthinitiative.com/publications.php).

La fièvre Q semble être une préoccupation plus importante pour la santé publique que pour la santé animale. Toutefois, comme dans toute zoonose, la diminution du risque d’infection de l’homme passe par une inévitable gestion des animaux, dont une surveillance représentative et standardisée est nécessaire. À la suite de l’épidémie de fièvre Q aux Pays-Bas, de nombreuses investigations épidémiologiques et recherches multidisciplinaires sont actuellement en cours en Europe. Cela permet d’espérer une amélioration notable des connaissances dans les mois et les années à venir, en particulier en ce qui concerne la pathogénie, les modes de transmission de C. burnetii et les mesures de prévention et de contrôle de la maladie. Bien que la voie aérogène soit majoritaire, une controverse subsiste en ce qui concerne l’origine d’infections humaines attribuables à la consommation de lait cru ou de produits dérivés. L’attention devra donc être portée à l’avenir sur l’éventuelle quantité suffisante de bactéries capable de causer la fièvre Q par voie orale afin de trancher définitivement sur l’importance éventuelle de cette voie de transmission.

  • (1) Maladie ou infection qui se transmet naturellement des animaux vertébrés à l’homme et vice versa [60].

  • (2) Mesures visant à minimiser le risque d’introduction d’agents pathogènes dans des unités de production individuelles (bioexclusion) et le risque de transmission de ces derniers à l’extérieur (bioconfinement). La biosécurité nécessite l’adoption de comportements humains ayant pour objectif la réduction de ces risques [56].

Encadré : Adresses URL permettant le suivi de la situation sanitaire et des mesures de prévention et de contrôle de la fièvre Q en Europe

• http://www.rivm.nl/cib/themas/Q-koorts (Institut national hollandais de santé publique et de l’environnement) ;

• http://ec.europa.eu/food/committees/regulatory/scfcah/animal_health/index_en.htm (Comité permanent de la chaîne alimentaire et de la santé animale composé de représentants des États membres qui jouent un rôle clé dans la prise de décision en matière de sécurité alimentaire) ;

• http://www.eurosurveillance.org/Public/RSSFeed/RSS.aspx?keyword=q%20fever (Eurosurveillance, journal européen concernant l’épidémiologie, la prévention et le contrôle des maladies infectieuses) ;

• http://www.onehealthinitiative.com/promed.php (Site interdisciplinaire dédié au concept “Un monde, une santé” liant les aspects santé publique, santé animale et santé environnementale) ;

• http://www.promedmail.org/ (Site ProMED-mail de la Société internationale relative aux maladies infectieuses) ;

• http://ifr48.timone.univ-mrs.fr/Fiches/Fievre_Q.html#toc6 (Centre national de référence des rickettsioses, Marseille, France).

POINTS FORTS

• L’explosion de cas humains de fièvre Q aux Pays-Bas est due à la transmission essentiellement aérogène de la bactérie et à son fort pouvoir infectieux.

• Coxiella burnetii possède une composition antigénique complexe et une pathogénicité variable.

• La capacité de résistance de C. burnetii dans l’environnement implique une gestion sanitaire drastique.

• La vaccination d’animaux naïfs avant la mise à la reproduction est une mesure médicale de choix.

• Une communication est nécessaire entre les acteurs de santé publique et de santé animale.

Références

  • 4 – Arricau-Bouvery N, Rodolakis A. Is Q Fever an emerging or re-emerging zoonosis? Vet. Res. 2005;36:327-349.
  • 13 – Delsing C, Kullberg BJ. Q fever in the Netherlands: a concise overview and implications of the largest ongoing outbreak. Neth. J. Med. 2008;66:365-367.
  • 15 – Dorko E, Kalinova Z, Pilipcinec E. Seroprevalence of Coxiella burnetii antibodies among students of the Faculty of medicine in Kosice (Slovakia). Folia Microbiol. 2008;53:563-568.
  • 22 – Guatteo R, Beaudeau F, Berri M et coll. Shedding routes of Coxiella burnetii in dairy cows: implications for detection and control. Vet. Res. 2006;37:827-833.
  • 23 – Guatteo R, Joly A, Rodolakis A et coll. Prévention de l’excrétion de Coxiella burnetii à l’aide d’un vaccin dit phase I (Coxevac® en troupeaux bovins laitiers infectés). Renc. Rech. Rumin. 2008;15:59-62.
  • 24 – Guatteo R, Seegers H, Joly A, Beaudeau F. Prevention of Coxiella burnetii shedding in infected dairy herds using a phase I C. burnetii inactivated vaccine. Vaccine. 2008;26(34):4320-4328.
  • 41 – Ransom SE, Huebner RJ. Studies on the resistance of Coxiella burnetii to physical and chemical agents. Am. J. Hyg. 1951; 53:110-119.
  • 51 – Rousset E, Berri M, Durand B et coll. Coxiella burnetii shedding routes and antibody response after outbreaks of Q fever-induced abortion in dairy goat herds. Appl. Environ. Microbiol. 2009;75:428-433.
  • 52 – Rousset E, Duquesne V, Russo P et coll. Fièvre Q : problématiques et risques sanitaires. Bull. Acad. Vét. Fr. 2007;160(2):107-114.
  • 58 – Scott GH, Williams JC. Susceptibility of Coxiella burnetii to chemical disinfectants. Ann. N. Y. Acad. Sci. 1990;590:291-296.
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