Conduite à tenir face à un diagnostic incertain en cytologie et en histologie - Ma revue n° 017 du 01/01/2017 - Le Point Vétérinaire.fr
Ma revue n° 017 du 01/01/2017

CYTOLOGIE, HISTOLOGIE

Démarche diagnostique

Auteur(s) : Claire Dally*, Fanny Granat**, Catherine Trumel***

Fonctions :
*Laboratoire d’anatomie pathologique
vétérinaire du Sud-Ouest,
129, route de Blagnac
31201 Toulouse Cedex 2
**Laboratoire d’anatomie pathologique
vétérinaire du Sud-Ouest,
129, route de Blagnac
31201 Toulouse Cedex 2
***École nationale vétérinaire de Toulouse,
23, chemin des Capelles,
31076 Toulouse Cedex 3

La cytologie et l’histologie sont souvent indispensables à l’obtention du diagnostic définitif d’un cancer, mais il convient de connaître leurs limites et les moyens d’éviter les incertitudes diagnostiques.

La cytologie et l’histologie sont des disciplines cliniques précieuses pour l’établissement d’un diagnostic, particulièrement en cancérologie. Chacune possède ses forces, et des limites qui peuvent entraîner des incertitudes de diagnostic. La force de la cytologie réside dans l’étude de la morphologie cellulaire et son caractère peu invasif. En contrepartie, la représentativité du spécimen est cruciale.

La force de l’histologie repose dans l’étude de l’architecture d’une lésion. Ainsi, elle peut permettre l’étude des marges d’exérèse et la recherche d’emboles vasculaires ainsi que l’établissement d’un grading pour certains types tumoraux. Toutefois, l’histologie est moins sensible pour le diagnostic de certaines maladies infectieuses et les détails cellulaires sont moins précis qu’en cytologie.

ÉTAPE 1 DÉCRYPTER LE VOCABULAIRE DU COMPTE RENDU

Parfois, le compte rendu d’une analyse cytologique ou pathologique révèle une incertitude diagnostique qui peut être perçue différemment d’un pathologiste et/ou d’un clinicien à un autre [4, 10].

Un compte rendu de cytologie ou d’histologie tente toujours de signifier le plus exactement possible les lésions observées, et également le degré de certitude concernant l’hypothèse diagnostique émise. Toutefois, il s’agit de formulations subjectives qui dépendent à la fois de la perception du rédacteur et du clinicien [10]. D’une façon générale, s’il existe une incertitude, le cytologiste ou le pathologiste utilise des expressions destinées à nuancer l’hypothèse diagnostique. À titre d’exemple, une formulation du type « peut amener à considérer l’hypothèse de » montre un degré d’incertitude non négligeable, tout comme l’utilisation d’une catégorie plus globale de diagnostic. Ainsi la formulation « tumeur à cellules rondes éventuellement compatible avec un mastocytome peu différencié de haut grade de malignité » n’est pas équivalente à un diagnostic de « mastocytome de haut grade de malignité ».

Bien que cela puisse sembler surprenant, différencier un processus inflammatoire d’un processus tumoral peut se révéler délicat. Des expressions du type « population atypique » ou encore « dysplasie marquée » sont autant de façons pour le spécialiste d’exprimer son inquiétude vis-à-vis d’un éventuel processus tumoral sans avoir assez d’arguments pour établir un diagnostic de certitude. L’exemple le plus classique est le lymphome digestif du chat de bas grade de malignité qui évolue généralement au sein d’un contexte inflammatoire(1). Un diagnostic histologique ou cytologique doit toujours être confronté à l’ensemble du tableau clinique. Lorsque des nuances sont présentes dans la conclusion, l’hypothèse proposée ne doit pas être considérée comme un diagnostic de certitude, mais comme l’hypothèse la plus probable pour le cytologiste ou le pathologiste.

Une fois l’incertitude identifiée, il convient d’en mesurer le degré et d’en évaluer l’impact sur la conduite à tenir. Si elle porte sur deux affections dont le pronostic et le traitement sont différents, le meilleur moyen de confirmer ou d’infirmer l’une ou l’autre des hypothèses doit être déterminé. Généralement, l’incertitude du spécialiste le conduit à discuter du diagnostic différentiel ainsi que des examens complémentaires pouvant permettre de progresser dans l’établissement du diagnostic.

ÉTAPE 2 IDENTIFIER L’ORIGINE DE L’INCERTITUDE DANS UN COMPTE RENDU

Manque de données cliniques

La transmission de données cliniques est primordiale pour la fiabilité du résultat d’une analyse cytologique ou pathologique :

– des commémoratifs afin que le cytologiste ou le pathologiste puisse établir un diagnostic éclairé ;

– un résumé de la clinique de l’animal, de l’évolution (exemples : apparition récente versus ancienne, croissance rapide versus lente) ;

– la localisation et l’aspect macroscopique de la lésion prélevée (exemples : taille, forme, +/ – érythème, +/ – ulcération, +/ – prurit, +/ – infiltrant ou adhérent, rapport/localisation avec l’organe en question en cas de biopsies d’organes internes et/ou les autres organes à proximité).

Transmettre ces informations a encore plus d’importance lors d’une demande d’examen cytologique ou de biopsies, car le spécimen lui-même n’apporte pas d’indices sur sa localisation et ses rapports avec les tissus environnants. Le cytologiste doit également connaître le mode de prélèvement afin de pouvoir apprécier la représentativité du spécimen (exemple : cytoponction à l’aiguille fine, cytobrossage, raclage, calque, étalement de culot versus direct de liquide) [6]. Il peut ainsi identifier précisément les prélèvements transmis, notamment si plusieurs lésions de localisation différente ou divers organes sont ponctionnés.

Les résultats des divers examens complémentaires doivent être transmis si possible :

– imagerie médicale : les clichés radiographiques sont ainsi d’une aide précieuse lors de l’analyse d’une biopsie ou de la ponction d’une lésion osseuse ;

– hémogramme : indispensable lors d’une analyse de frottis sanguin et de myélogramme, ou d’une ponction d’organes pour lesquels une hémodilution est souvent rencontrée (exemples : rate, rein, foie) ;

– bilan biochimique.

Mode de prélèvement et artefacts en cytologie

Comment réaliser les prélèvements

Les prélèvements cytologiques sont plus fragiles que les prélèvements histologiques et demandent une certaine rigueur quant aux conditions préanalytiques. Il est recommandé de réaliser des étalements cytologiques avec délicatesse et au chevet de l’animal. Cela est valable pour des prélèvements issus de lésions solides ou liquides (pour lesquelles la transmission en complément de liquide collecté sur tube EDTA [acide éthylène diamine tétra-acétique] est recommandée) afin de préserver la morphologie des cellules [12]. Les prélèvements destinés à une analyse cytologique ne doivent pas être mis au contact de vapeurs de formol, car elles engendrent une fixation des cellules très délétère pour leur coloration [6].

Choisir un mode de prélèvement

Le choix du mode prélèvement est important. Par exemple, lors d’une suspicion de lymphome multicentrique chez le chien, il est recommandé de ponctionner divers nœuds lymphatiques hypertrophiés en évitant les sous-mandibulaires et/ou les plus hypertrophiés (en raison du risque de remaniements nécrotiques secondaires) [12]. Il est également important de comprendre les limites diagnostiques d’un mode de prélèvement. Les épanchements ou autres milieux liquidiens sont en général facilement analysables, et leur analyse apporte très souvent un grand nombre d’informations et permet parfois d’établir un diagnostic. Cependant, elle peut s’avérer peu spécifique puisque les cellules d’intérêt ne desquament pas toujours au sein du liquide (ce qui peut être le cas par exemple lors d’un hémopéricarde secondaire à un processus tumoral tel qu’un hémangiosarcome) [3]. La représentativité du spécimen peut également être limitée lorsque le prélèvement est trop superficiel ; des biopsies se révélant alors l’examen de choix ou de seconde intention.

Qualité des prélèvements et incertitude diagnostique

L’incertitude diagnostique émise par le cytologiste est intimement liée à la qualité des prélèvements. La pauvreté en cellules et la difficulté à confirmer la représentativité du prélèvement sont des éléments clés à considérer. Toutefois, des prélèvements trop riches en cellules pas assez étalées ou altérées peuvent compromettre l’interprétation cytologique (photo 1). L’utilisation de lames ayant déjà servi à étaler des prélèvements cytologiques est proscrite pour garantir la représentativité des spécimens transmis. Une contamination par du tissu à proximité de la lésion d’intérêt ou une contamination infectieuse par des saletés sont aussi à éviter. Toute lame cytologique doit être identifiée a minima avec le nom de l’animal, la date et l’origine de l’étalement.

La transmission de lames précolorées est également une gageure pour obtenir d’une coloration optimale [6]. Les colorations rapides (exemple : RAL©) peuvent limiter la visualisation de granulations intracytoplasmiques au sein des mastocytes et des lymphocytes à grains (photos 2a et 2b) [1, 5, 9].

Mode de prélèvement et artefacts en histologie

Choisir la taille et le lieu du prélèvement

Le choix de la taille et de la nature des prélèvements destinés à une analyse histologique est complexe. Il tient compte des possibilités techniques, de l’état général de l’animal, et de la nature invasive de l’acte comparée à la nécessité d’obtenir des spécimens. L’échantillonnage est une étape déterminante pour le diagnostic.

Les principaux écueils à éviter sont des prélèvements de trop petite taille, effectués dans des zones trop nécrotiques et/ou inflammatoires, ou trop superficiels. Le choix des echantillons doit etre adapte a la question que le clinicien se pose. Par exemple, des petites biopsies effectuees au centre d’une masse hepatique unique permettent d’identifier un processus tumoral metastatique, mais pas de differencier une hyperplasie nodulaire hepatique focale d’un adenome ou d’un carcinome hepatocellulaire bien differencie. Pour cela, le pathologiste a besoin de donnees architecturales telles que le mode de croissance (soit le rapport avec les tissus sains) et la repartition des espaces portes au sein de la masse (delicate a evaluer sur des petites biopsies). De meme, les biopsies de nœud lymphatique sont souvent decevantes car tres fragiles : parfois, elles ne permettent pas d’evaluer l’architecture, critere crucial pour l’etablissement du diagnostic.

Le choix des echantillons doit se porter en priorite sur les zones d’interface entre la lesion et les tissus sains. L’un des exemples les plus courants est celui d’echantillons provenant du centre d’une masse splenique d’aspect necrotique. Les images observees au centre d’un hemangiosarcome necrotique ou au centre d’un hematome sont souvent identiques. L’absence d’images suspectes dans ces zones ne permet pas d’exclure un hemangiosarcome. Il existe une notion de chance en ce qui concerne l’echantillonnage (photo 3).

Artefacts

Bien que l’histologie soit une technique assez robuste, elle peut être limitée par des artefacts. Les biopsies sont les plus concernées par ces artefacts qui peuvent être liés à l’utilisation d’un bistouri électrique, à la compression des tissus, au délai de fixation (une immersion immédiate dans le formol étant recommandée), ou à la fragmentation au cours du transport (toujours séparer les biopsies des grosses pièces pour le transport). Pour les prélèvements de plus grande taille, la sous-fixation est la principale difficulté rencontrée, ainsi que l’autolyse ou les artefacts de congélation pour des prélèvements d’autopsie. Il est recommandé de respecter un volume de prélèvement pour neuf volumes de formol, de rincer au sérum physiologique les tissus très sanguinolents, et d’enlever éventuellement le tissu adipeux sans intérêt pour l’examen afin d’obtenir une fixation correcte.

Nature de la lesion

Incertitude liee a la nature meme de la lesion

Il arrive que la nature même de la lésion soit à l’origine d’une incertitude. D’après une étude menée sur 430 cas de cancer du chien et du chat, environ 17 % des cas diagnostiqués donnent lieu à un désaccord majeur entre deux pathologistes [13]. L’incertitude diagnostique liée à la nature même de la lésion est plus importante en cytologie qu’en pathologie en raison du manque d’information sur l’architecture et l’organisation des tissus, et l’incapacité à déterminer le caractère invasif et la présence ou non d’embolisations qui sont autant d’arguments pouvant permettre de trancher entre un processus réactionnel ou tumoral.

Lésions inflammatoires ou tumorales ?

Il existe une grande quantité et variété de processus pathologiques, qu’ils soient dégénératifs, circulatoires, inflammatoires ou tumoraux. Certains processus inflammatoires ressemblent à des proliférations tumorales (exemple : fasciite nodulaire) et sont qualifiés de pseudo-sarcomes. Certains carcinomes imitent des sarcomes (exemple : carcinome épidermoïde à cellules fusiformes), et vice versa (exemple : hémangiosarcome épithélioïde). Les mélanomes peuvent prendre quasi n’importe quelle apparence.

Un contexte inflammatoire peut engendrer une dysplasie des tissus. Ils présentent alors des atypies qui rendent la distinction entre des cellules dysplasiques et néoplasiques délicates, notamment pour des prélèvements cytologiques (exemple : cellules urothéliales dysplasiques dans le cadre d’une infection du tractus urinaire versus cellules urothéliales néoplasiques associées à un contexte inflammatoire secondaire).

Type tumoral

Dans le cas des processus tumoraux bien différenciés, il peut également être délicat de différencier des cellules/tissus hyperplasiques de cellules/tissus tumoraux. Dans le cas des processus tumoraux anaplasiques (présentant une dédifférenciation et des atypies cytonucléaires sévères), le type tumoral peut être difficile à identifier en raison de la perte d’éléments morphologiques caractéristiques. Bien que les atypies sévères soient souvent l’apanage des processus tumoraux agressifs, il existe des exceptions. Ainsi, le plasmocytome présente souvent des atypies marquées en dépit d’un pronostic favorable (photo 4).

ÉTAPE 3 MESURES CORRECTIVES LIMITANT L’INCERTITUDE DIAGNOSTIQUE

La qualité du prélèvement est remise en cause

La qualité des prélèvements est liée à la richesse en matériel, à la représentativité de l’échantillon et à la limitation des artefacts. Si elle est remise en question, deux options sont à considérer :

1/ renouveler les prélèvements s’il paraît possible d’obtenir des échantillons de meilleure qualité. Par exemple, lorsque les prélèvements initiaux sont pauvres en cellules intactes d’intérêt, il convient de procéder à des prélèvements issus de divers sites au sein de la lésion et éventuellement d’un autre type de collection en cytologie [11] ;

2/ réaliser un autre type de prélèvement, par exemple, la ponction de portion tissulaire ou un examen histologique pour des lésions kystiques, ou encore la réalisation de biopsies ou d’une exérèse de la lésion au lieu d’un nouveau prélèvement cytologique.

La nature même de la lésion est source d’incertitudes

Effectuer un deuxieme prelevement

Si une incertitude diagnostique subsiste entre une lésion inflammatoire et tumorale, il peut être pertinent de rechercher une maladie infectieuse, de tenter de résoudre l’inflammation et de suivre l’évolution de la lésion. Un nouveau prélèvement est à envisager par la suite en cas de persistance de la lésion, selon les recommandations du cytologiste ou pathologiste. Ce prélèvement peut être ou non du même du type que le prélèvement initial. Il est parfois délicat de différencier une maladie infectieuse d’un processus tumoral, dans le cas, par exemple, de l’exploration d’une lymphocytose sanguine ou d’une infiltration plasmocytaire d’organe (exemple : splénique, médullaire) mise en évidence en cytologie. Les maladies vectorielles de type ehrlichiose ou leishmaniose peuvent être délicates à différencier d’une hémopathie maligne respectivement de type leucémie lymphoïde chronique ou plasmocytome/myélome multiple en l’absence de critères cytologiques évidents de la population d’intérêt.

Effectuer un prelevement histologique

Si l’incertitude diagnostique est liée au caractère bien différencié des cellules ou des tissus d’intérêt, il est souvent recommandé de réaliser préférentiellement un examen histologique. Il en est de même à l’issue d’un examen cytologique ayant émis une suspicion diagnostique sans certitude (exemple : lymphome de bas grade de malignité, carcinome hépatocellulaire, tumeur mammaire).

Realiser d’autres examens

Toutefois, l’examen histologique a ses limites. Si aucun diagnostic de certitude n’est établi, il devient nécessaire de réaliser d’autres examens complémentaires et de prendre en considération le contexte clinique et l’évolution de la lésion. Dans certains cas, un examen cytologique est parfois plus pertinent qu’un examen histologique ou peut être réalisé en complément de ce dernier (dans le diagnostic des tumeurs à cellules rondes, les critères cytomorphologiques sont plus précis en cytologie qu’en histologie).

Cas des leucemies chroniques

En hématologie, les leucémies chroniques, c’est-à-dire à cellules matures bien différenciées, sont délicates à diagnostiquer. Ces entités restent, le plus souvent, un diagnostic d’exclusion. En effet, leur aspect cytologique ne permet pas de distinguer une population tumorale clonale, d’une population réactionnelle observée lors de diverses maladies infectieuses ou inflammatoires. Toutes les autres causes possibles de lymphocytose, de neutrophilie, d’éosinophilie, de polyglobulie ou de thrombocytose majeures doivent donc être explorées avant d’établir un tel diagnostic.

Toutefois, il est théoriquement possible, actuellement, de confirmer un diagnostic de leucémie lymphoïde chronique en réalisant un test de clonalité. Il reste important de souligner que ce test n’est pas infaillible.

ÉTAPE 4 EXAMENS COMPLÉMENTAIRES PARFOIS NÉCESSAIRES

Immunohistochimie/immunocytochimie

Quand les realiser ?

Dans certains cas, la nature de la tumeur ne peut être déterminée avec certitude. S’il existe une différence significative de pronostic ou thérapeutique entre deux hypothèses tumorales, il convient d’envisager des marquages immunohistochimiques ou immunocytochimiques. Ces techniques permettent la mise en évidence de marqueurs, en général des protéines (membranaires, cytoplasmiques ou nucléaires) sur les cellules d’intérêt à l’aide d’anticorps (Ac) spécifiques afin de préciser leur nature ou leur activité biologique. L’immunohistochimie est plus fréquemment utilisée car elle est plus disponible et plus fiable. En effet, pour réaliser un examen immunocytochimique, la qualité des étalements doit être parfaite, car cette technique exige une cellularité et une intégrité optimale (et les étalements doivent être réalisés sur des lames spéciales). L’immunohistochimie est intéressante pour un typage des lymphomes canins (encadré).

Limites de ces examens

Cependant, le panel d’Ac disponibles reste encore limité et les résultats peuvent être ambigus ou décevants. Par exemple, certaines tumeurs buccales peuvent poser un problème diagnostique, notamment le mélanome achromique à cellules fusiformes versus un sarcome à cellules fusiformes. Le marquage de l’antigène Melan A (un marqueur de différenciation des mélanocytes) devrait théoriquement permettre de distinguer les mélanomes, mais il peut se révéler négatif dans un certain nombre de cas. Une étude récente a montré l’intérêt d’utiliser une combinaison d’Ac dans ce genre de situation, mais ceux décrits ne sont pas encore disponibles en routine [15]. Le coût parfois élevé des Ac est également un frein au développement de ces techniques.

Cytométrie en flux

La cytométrie en flux est un outil diagnostique qui permet d’identifier et de caractériser avec précision une population néoplasique d’intérêt selon sa taille, sa complexité interne et la mise en évidence de marqueurs de différenciation. Des prélèvements de nature diverse peuvent être utilisés (exemple : sang, épanchement, cytoponction à l’aiguille fine de nœud lymphatique ou autre organe infiltré, remise en suspension) [14]. La cytométrie peut, par exemple, servir à déterminer le caractère réactionnel ou néoplasique d’une lymphocytose, à immunophénotyper un lymphome, à identifier un type de leucémie, et à distinguer un thymome d’un lymphome lors de l’exploration d’une masse médiastinale chez le chien [12, 14].

Test de monoclonalité par PCR (PARR)

Le PARR (PCR pour le réarrangement du récepteur à l’antigène) est un test innovant pour l’étude des hémopathies lymphoïdes. Il permet en théorie de distinguer une population lymphoïde réactionnelle (polyclonale) d’une population lymphoïde tumorale (monoclonale). La sensibilité et la spécificité du test demeurent dépendantes de chaque laboratoire, en fonction des amorces utilisées et de la technique appliquée. Il existe des biais pouvant induire des faux négatifs ou positifs. Ces derniers peuvent survenir si une cellule tumorale présente un réarrangement rare qui n’est pas pris en compte par les sondes utilisées, ou en cas d’hypermutation somatique présentée par certains lymphomes de type B. La présence d’une population lymphomateuse monoclonale peut passer inaperçue si elle est accompagnée par une abondante population lymphocytaire réactionnelle polyclonale. Inversement, il existe des cas où une population lymphoïde réactionnelle peut être clonale : cela peut survenir lors du rejet des histiocytomes cutanés canins par les lymphocytes T, et lors de certains processus infectieux chroniques (exemple : erhlichiose, leishmaniose, anaplasmose) [2, 7].

L’utilisation de la technique PARR dans le phénotypage des lymphomes est à éviter, les taux de concordance avec l’immunohistochimie et la cytométrie en flux étant faibles (respectivement 69 % et 63 %).

Recherche d’éléments infectieux

Dans certains cas, les hypothèses du diagnostic différentiel conduisent à rechercher ou à tenter d’exclure un agent infectieux. Il existe pour ce faire de nombreuses techniques (PCR, sérologie, culture) à choisir selon le contexte.

L’histologie n’est pas la technique la plus sensible pour la détection d’éléments pathogènes. Des colorations complémentaires (periodic acid schiff, de Fite Faraco/Ziehl-Nielsen, Gram) sont toutefois effectuées en routine face à certains processus pathologiques. Elles peuvent permettre de mettre en évidence des éléments bactériens ou fongiques. Leur identification précise, si nécessaire, doit toutefois souvent faire appel à une technique complémentaire.

Conclusion

La cytologie et l’histologie sont des aides précieuses pour l’établissement d’un diagnostic de cancer chez le chien et le chat. Elles possèdent toutefois des limites qui peuvent entraîner des incertitudes diagnostiques. Afin de réduire ce risque, il est indispensable de transmettre des commémoratifs et de bien choisir le type de prélèvement (cytologique et/ou histologique). En cas d’incertitude diagnostique liée à la nature même de la lésion, l’analyse cytologique et/ou histologique doit être complétée au cas par cas par d’autres examens complémentaires. Le dialogue entre cliniciens, cytologistes et pathologistes reste un élément crucial dans les cas inhabituels pour faire avancer le diagnostic.

  • (1) Voir l’article “Les lymphomes digestifs félins : épidémiologie, clinique et diagnostic” de M. Paulin et coll., dans ce numéro.

Références

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  • 2. Burkhard MJ, Bienzle D. Making sense of lymphoma diagnostics in small animal patients. Vet. Clin. Small Anim. 2013;43:1331-1347.
  • 3. Cagle LA, Epstein SE, Owens SD et coll. Diagnostic yield of cytologic analysis of pericardial effusion in dogs. J. Vet. Intern. Med. 2014;28(1):66-71.
  • 4. Christopher MM, Hotz CS, Shelly SM, Pion PD. Use of cytology as a diagnostic method in veterinary practice and assessment of communication between veterinary practitioners and veterinary clinical pathologists. J. Am. Vet. Med. Assoc. 2008;232(5):747-754.
  • 5. Goldman EE, Grindem CB. What is your diagnosis Lymph node aspirate from a 7-year-old dog with progressive lethargy and inappetance. Vet. Clin. Pathol. 1997;26(4):187.
  • 6. Gunn-Christie RG, Flatland B, Friedrichs KR et coll. American Society for Veterinary Clinical Pathology (ASVCP). ASVCP quality assurance guidelines: control of preanalytical, analytical, and postanalytical factors for urinalysis, cytology, and clinical chemistry in veterinary laboratories. Vet. Clin. Pathol. 2012;41(1):18-26.
  • 7. Keller SM, Vernau W, Moore PF. Clonality testing in veterinary medicine: a review with diagnostic guidelines. Vet. Pathol. 2016;53(4):711-725.
  • 8. Kiupel M, Smedley RC, Pfent C et coll. Diagnostic algorithm to differentiate lymphoma from inflammation in feline small intestinal biopsy samples. Vet. Pathol. 2011;48(1):212-222.
  • 9. Leclere M, Desnoyers M, Beauchamp G, Lavoie JP. Comparison of four staining methods for detection of mast cells in equine bronchoalveolar lavage fluid. J. Vet. Intern. Med. 2006;20(2):377-381.
  • 10. Lindley SW, Gillies EM, Hassell LA. Communicating diagnostic uncertainty in surgical pathology reports: disparities between sender and receiver. Pathol. Res. Pract. 2014;210(10):628-633.
  • 11. Moore AR. Preparation of cytology samples: tricks of the trade. Vet. Clin. North Am. Small Anim. Pract. 2017;47(1):1-16.
  • 12. Raskin RE, Meyer D. (eds) Canine and feline cytology, a color atlas and interpretation guide. 3rd ed. Elsevier, St. Louis, Missouri. 2016:544.
  • 13. Regan RC, Rassnick KM, Balkman CE et coll. Comparison of first-opinion and second-opinion histopathology from dogs and cats with cancer: 430 cases (2001-2008). Vet. Comp. Oncol. 2010;8(1):1-10.
  • 14. Reggeti F, Bienzle D. Flow cytometry in veterinary oncology. Vet. Pathol. 2011;48(1):223-235.
  • 15. Smedley RC, Lamoureux J, Sledge DG, Kiupel M. Immunohistochemical diagnosis of canine oral amelanotic melanocytic neoplasms. Vet. Pathol. 2011;48(1):32-40.
  • 16. Thalheim L1, Williams LE, Borst LB et coll. Lymphoma immunophenotype of dogs determined by immunohistochemistry, flow cytometry, and polymerase chain reaction for antigen receptor rearrangements. Vet. Intern. Med. 2013;27(6):1509-16. doi: 10.1111/jvim.12185. Epub 2013 Sep 20.

Conflit d’intérêts

Aucun.

ENCADRÉ
Cas particulier : typage des lymphomes canins

L’immunohistochimie est intéressante pour un typage des lymphomes canins (mise en évidence de marqueurs pan-T comme CD3 ou CD5 et pan-B comme CD20 et Pax-5). Elle est géneralement proposée à l’issue du diagnostic cytologique ou histologique, mais seuls des prélèvements de taille satisfaisante peuvent permettre sa réalisation. Cet examen peut egalement être propose, en cas de suspicion de lymphome de bas grade du chat (digestif ou hépatique), en complément à la réalisation d’un test de monoclonalité par PCR. La combinaison des resultats associée à l’aspect histologique ameliore la sensibilité diagnostique globale (estimée a 72 % pour l’histologie seule contre 82 % en associant toutes les techniques) [8]. Là encore, chaque technique connaît des limites et des biopsies transparietales sont souvent indispensables pour la mise en œuvre combinée d’un examen immunohistochimique et d’un test de monoclonalité.

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