ALIMENTATION DU LAPIN DE COMPAGNIE : RECOMMANDATIONS PRATIQUES POUR LES PROPRIÉTAIRES - Ma revue n° 020 du 01/01/2020 - Le Point Vétérinaire.fr
Ma revue n° 020 du 01/01/2020

LES FONDAMENTAUX

Généralités, connaissances et gestes de base

Auteur(s) : Émilie Tessier*, Lucile Martin**

Fonctions :
*LC Vet, clinique réservée au chat et au lapin
15, quai des Alpes
67000 Strasbourg
**Professeur de nutrition animale et comparée
Oniris
101, route de Gachet
44300 Nantes

Ces recommandations visent à respecter les besoins et les particularités nutritionnelles du lapin de compagnie, un animal qui pratique la cæcotrophie et la sélection des aliments.

L’importance de l’alimentation pour la santé du chien et du chat est reconnue, mais il existe peu de recommandations et d’études chez le lapin de compagnie. Beaucoup de données sont issues des animaux de laboratoire ou de l’élevage pour la consommation humaine. Or chez le lapin de compagnie, les objectifs en matière de croissance et de longévité sont bien différents.

PARTICULARITÉS DU SYSTÈME DIGESTIF DU LAPIN

1. L’estomac

L’estomac du lapin adulte est volumineux et représente environ le tiers du volume digestif total (50 à 150 ml) [9]. Le pH, très acide (de 1 à 4), assure la destruction de la plupart des microorganismes et une substérilité. Le temps de séjour des aliments dans l’estomac du lapin est approximativement de trois à six heures [9]. L’activité de brassage y est réduite.

2. L’intestin grêle

L’intestin grêle du lapin ne représente que 12 % du volume digestif total. L’extrémité de l’iléon forme une ampoule, le sacculus rotundus, qui peut favoriser les obstructions digestives à cet endroit. Le transit dans l’intestin grêle est assez rapide, de l’ordre d’une heure à une heure et demie. Au niveau de la jonction iléo-cæcale, il n’y a pas de valvule, mais une volumineuse plaque de Peyer [1].

3. Le cæcum

Le cæcum du lapin adulte est volumineux, d’une contenance supérieure à celle de l’estomac (40 à 60 % du volume digestif total). Le temps de séjour des digesta y serait de douze à quinze heures [8]. Une activité contractile régulière (environ une contraction par minute) assure un brassage du contenu.

Le cæcum est le lieu de fermentations microbiennes intenses, les corps microbiens pouvant représenter jusqu’à la moitié de son contenu(1) [8]. Les produits de fermentation sont des acides gras à chaîne courte qui permettent au lapin de couvrir 30 à 50 % de ses besoins énergétiques.

4. Le côlon

Le côlon du lapin abrite une microflore bactérienne importante. Au niveau du côlon proximal, des contractions péristaltiques et antipéristaltiques assurent les échanges cæco-coliques. Le fusus coli joue le rôle d’un pacemaker, initiant les contractions péristaltiques dans le côlon proximal et distal. Un transit différentiel, régulé par le cycle nycthéméral, aboutit à la formation de deux types de fèces : les crottes dures et les crottes molles (ou cæcotrophes).

Les cæcotrophes se forment en fin d’aprèsmidi et la nuit. Les digesta de l’intestin grêle se répartissent dans le cæcum et le côlon sous l’effet d’un double péristaltisme. Le cæcum sécrète de l’eau, contribuant à faciliter le mélange et la séparation des contenus. Sous le contrôle du fusus coli, un jeu de contractions différentielles produit une ségrégation des particules grossières (supérieures à 300 µm) dans la lumière du côlon proximal, tandis que la partie liquide et les particules fines (moins de 100 µm) s’accumulent dans les haustrae, petits renflements dans la paroi. Les particules grossières migrent rapidement vers les portions distales du tube digestif et forment les crottes dures, par l’action compressive du fusus coli et la réabsorption intense d’eau et d’électrolytes dans le côlon distal. Les particules fines accumulées dans les haustrae sont refoulées vers le cæcum par les contractions antipéristaltiques. Le temps moyen de séjour des particules fines entre la bouche et le rectum est de vingt à quarante heures, dont quinze à trente entre le cæcum et le rectum [9].

5. La cæcotrophie

En fin de nuit ou en début de matinée, les digesta progressent rapidement du cæcum vers le côlon proximal sous l’action du péristaltisme de la paroi colique (vitesse multipliée par 1,5 à 2,5 par rapport à la formation des crottes dures) [9]. Les contractions du fusus coli baissent d’intensité, entraînant un moindre essorage du contenu digestif, donc une teneur en eau résiduelle supérieure. Enfin, l’activité de réabsorption hydrique du côlon distal diminue, tandis que du lysozyme est sécrété et que les cellules à mucus assurent un enrobage des crottes molles ainsi produites.

La cæcotrophie est un comportement commun à diverses espèces (léporidés, castor, koala, lemmings, etc.), qui ne doit pas être confondu avec la coprophagie. Cette dernière correspond à la consommation des excréments, qui peut être soit naturelle, soit une déviation comportementale selon les espèces. La cæcotrophie est régulée par le rythme d’ingestion. La consommation des cæcotrophes débute en moyenne huit à douze heures après le pic d’ingestion (ou la distribution des aliments) [9]. Les cæcotrophes du lapin sont des amas de sphères de 4 à 5 cm de diamètre, entourées par du mucus. Elles sont plus riches en eau et en azote (dont des acides aminés : lysine et méthionine), moins riches en fibres que les crottes dures. Elles sont consommées dès leur émission par l’animal qui les recueille directement au niveau de l’anus et les avale sans mastication. Protégées de l’acidité de l’estomac par le mucus, l’activité de fermentation bactérienne au sein des cæcotrophes se poursuit dans celui-ci. Elles se délitent et sont digérées dans l’intestin grêle, assurant ainsi un recyclage efficace de leur contenu. En situation physiologique, le matin, le fundus de l’estomac contient une grande quantité de cæcotrophes (environ 70 % de la matière sèche ingérée) [9]. La cæcotrophie débute à l’âge de 3 semaines, c’est-à-dire dès le début de la consommation d’aliments solides. Surtout observée tôt le matin et en début d’après-midi, elle représenterait 15 à 35 % de la matière sèche ingérée [9].

L’ensemble de ces mécanismes permet au lapin un niveau d’ingestion élevé, en triant au niveau de la valvule iléo-cæcale les éléments facilement digestibles ou fermentescibles qui seront digérés au maximum dans le cæcum, et éliminant rapidement les composants fibreux lentement fermentescibles dans le côlon. Ils permettent également la réingestion des bactéries et de leurs produits (acides gras à chaîne courte, acides aminés, vitamines des groupes B et C) et leur absorption dans l’intestin grêle. Bien que ce système soit essentiellement orienté vers une élimination rapide des déchets fibreux, il faut retenir que son principal moteur est justement la présence de fibres indigestibles dans l’alimentation.

LES BESOINS NUTRITIONNELS DU LAPIN

Connaître les besoins nutritionnels du lapin est fondamental. En pratique, il est plus difficile de les vérifier chez le lapin de compagnie par rapport au lapin d’élevage, encore nourri en grande partie aux granulés. En effet, il n’est pas aisé de connaître les caractéristiques nutritionnelles des différents types de foin et de la verdure, donc de faire correspondre la ration alimentaire complète aux besoins de l’animal. Toutefois, ces chiffres permettent de s’assurer que l’aliment complet est adapté, et l’ajout de foin et de verdure augmente principalement l’apport en fibres, ce qui est bénéfique.

1. Besoins énergétiques

Les besoins énergétiques d’entretien du lapin sont relativement élevés : 100 kcal d’énergie métabolisable (EM) × poids (kg)0,75 [6, 13]. Ils sont multipliés par 1,35 à 2 en période de gestation, par 3 en période de lactation et par 2 environ lors de la croissance. Plusieurs équations de prédiction permettent d’estimer la valeur énergétique des aliments du lapin, exprimée en énergie digestible (ED). Par exemple, celle de la Fédération européenne des fabricants d’aliments pour animaux familiers (Fediaf) permet de calculer la ration journalière (encadré 1) [6].

2. Besoins en glucides

Fibres alimentaires

Parmi les besoins nutritionnels du lapin, celui qui domine est le besoin en fibres alimentaires, qui jouent un rôle prépondérant en accélérant le transit dans l’intestin grêle et dans le côlon et en diminuant le temps de séjour dans le cæcum (tableau 1) [7]. Si la part des fibres diminue, généralement au profit de l’amidon, cela entraîne des troubles digestifs [3]. Par définition, les “fibres alimentaires” désignent la fraction glucidique indigestible dans l’intestin grêle, composée des polysaccharides non amylacés et des lignines (encadré 2 et figure, en complément sur Internet). En pratique, cela correspond à la donnée “cellulose brute” indiquée dans la composition des aliments, car il s’agit d’une mention obligatoire de leur étiquetage. Les apports en fibres alimentaires chez le lapin de compagnie ne peuvent ainsi pas être correctement appréciés. Un lapin ne peut pas consommer trop de fibres et ces valeurs sont donc plutôt des minima.

Amidon

Chez l’adulte, la digestibilité iléale de l’amidon peut varier entre 93 et 99 %, tandis que la digestibilité fécale est proche de 99 à 100 %, ce qui indique que tout l’amidon non digéré est dégradé au niveau cæcal sous l’action des bactéries amylolytiques [7]. Il convient d’être attentif aux niveaux d’apport, aux sources (origine botanique) et aux traitements technologiques (broyage, cuisson qui augmentent la digestibilité iléale, etc.) pour les amidons des aliments, notamment chez les jeunes animaux au potentiel amylolytique incomplètement développé [7]. Une surcharge alimentaire en amidon, en modifiant l’activité fermentaire microbienne (et le profil bactérien du microbiote), est susceptible d’induire des troubles digestifs, en particulier chez le jeune [7].

Protéines

La cæcotrophie permet un apport en azote bactérien de qualité. Il ne s’agit toutefois pas d’un apport net, mais de la valorisation d’un apport alimentaire parfois de qualité médiocre et d’une amélioration du recyclage global de l’azote. Cela permet au lapin une certaine autonomie en termes d’apport azoté. Les cæcotrophes contribuent à 15 ou 18 % de l’ingéré protéique total, apportant 18 à 20 % des besoins en lysine et 20 à 23 % de ceux en thréonine [9].

Lipides

Les lipides sont peu présents dans l’alimentation du lapin (3 à 4 % d’extrait éthéré, dont une partie seulement est constituée de lipides). Cependant, il semble bien tolérer des niveaux d’incorporation qui peuvent aller jusqu’à 8 ou 10 % [9]. Au-delà, l’activité de la microflore cæcale est affectée, comme chez les ruminants. Un apport spécifique en acide gras essentiel n’est pas indiqué.

Vitamines, minéraux et oligo-éléments

Chez le lapin, l’absorption de calcium est proportionnelle aux teneurs alimentaires et semble peu régulée via le calcitriol comme dans les autres espèces [9]. La calcémie reflète ainsi les niveaux de calcium alimentaire. Cette particularité se retrouve au niveau de l’excrétion rénale qui est la principale voie d’excrétion calcique chez cette espèce [9]. De plus, grâce aux phytases microbiennes cæcales et au processus de cæcotrophie, le lapin semble valoriser correctement le phosphore phytique [9]. Pour les autres minéraux et les oligo-éléments, aucune particularité n’est à signaler chez le lapin.

LE COMPORTEMENT ALIMENTAIRE DU LAPIN

Le lapin est un animal encore assez proche de ses origines sauvages, ce qui permet de comparer ses besoins à ceux de ses congénères dans la nature. À l’état sauvage, le lapin est un animal crépusculaire à nocturne, passant la journée sous terre et se nourrissant à la tombée de la nuit. Il vit en grands groupes sur d’immenses territoires herbeux. Il est sujet aux changements climatiques saisonniers, donc à la variation des ressources alimentaires, ainsi qu’à la prédation, la compétition intraspécifique et interspécifique. Fondamentalement herbivore et plus spécialement folivore, il est adapté à une ration à base de végétation verte [4]. En pratique, son régime est très diversifié, allant de l’herbe aux racines en passant par des feuilles, des bourgeons ou des écorces d’arbre. Cette ration, de faible valeur alimentaire et riche en composés indigestibles, est exploitée avec beaucoup d’efficacité grâce au système digestif complexe du lapin [4]. En situation de choix, le comportement alimentaire du lapin est très sélectif, car son odorat et son goût sont très développés. Il montre une préférence pour les saveurs douces et adore le sucre alors que, naturellement, il n’y a quasiment pas accès. Cet attrait, combiné à une alimentation triée, déséquilibrée et donnée à volonté, est à l’origine de nombreux problèmes de santé chez le lapin de compagnie.

RECOMMANDATIONS PRATIQUES

1. L’eau

Les besoins hydriques du lapin sont d’environ 100 ml/kg/jour. La quantité bue dépend de la ration en verdure qui apporte beaucoup d’eau. L’abreuvement est trois fois plus important dans des dispositifs ouverts (bol, gamelle, etc.) que par un biberon lorsque le lapin a le choix et l’habitude des deux [14]. Un abreuvement correct est l’un des points importants de la prévention des urolithiases et de la maladie rénale [11].

2. Le foin

Le foin est considéré comme la base de l’alimentation du lapin, mais il s’agit d’un substitut : la véritable alimentation est composée d’herbes. Le foin est surtout distribué pour des raisons pratiques d’approvisionnement.

Le foin est une source hétérogène de nourriture permettant au lapin d’exercer son comportement alimentaire sélectif, en choisissant les brins les plus digestes et en refusant les autres.

Les foins de prairie sont préférables aux foins de monoculture afin d’offrir un plus large choix à l’animal. Les propriétaires manquent d’informations sur l’intérêt primordial d’offrir plusieurs foins simultanément à leur lapin. Ils cherchent à lui faire plaisir en lui offrant des friandises et des aliments inadaptés alors qu’ils pourraient le faire en lui mettant à disposition plusieurs foins : un foin de prairie de base et un foin différent par jour (photo 1).

La qualité hygiénique du foin doit être irréprochable. Il est important d’expliquer les critères d’évaluation du foin aux propriétaires pour qu’ils puissent choisir en connaissance de cause (tableaux 2 et 3 en complément sur Internet) [5]. Le foin doit être bien vert, non tassé, non poussiéreux et avoir une bonne odeur.

En théorie, une alimentation uniquement sous fourrage est possible sans carences si plusieurs sortes de foin de provenances diverses sont offertes simultanément. Or, en raison de leur petite taille par rapport aux chevaux ou aux ruminants, les lapins ont souvent accès à la même botte de foin pendant un certain temps. De plus, le foin n’étant pas l’alimentation naturelle du lapin et particulièrement parce qu’il est trop sec, le régime tout foin est donc à éviter. Lorsque le foin est cité comme aliment de base du lapin, c’est par opposition aux autres aliments à éviter (mélanges de céréales, de fruits, etc.).

3. La verdure

Le deuxième pilier de l’alimentation du lapin est la verdure, c’est-à-dire des végétaux frais feuillus et verts, riches en fibres et au rapport phosphocalcique (Ca/P) équilibré : les fanes (carotte, radis, etc.), les herbes aromatiques (aneth, basilic, coriandre, menthe, etc.), le céleri branche, le fenouil, l’herbe à chat, toutes les salades, sauf la laitue iceberg qui est communément déconseillée car elle favorise les calculs d’oxalate, etc. Les choux peuvent être donnés en petite quantité, car ils peuvent notamment provoquer des ballonnements. Les légumes racines (navet, topinambour, panais, carotte) sont aussi appréciés, mais en quantité limitée car ils sont plus riches en certains glucides (fructo-oligosaccharides et galactooligosaccharides). Les fruits, trop riches en sucre facilement digestible et pauvres en calcium, sont à éviter et à réserver par exemple comme friandise après des soins (coupe de griffes, etc.). Si possible, il est conseillé de laisser pâturer le lapin dans un jardin ou un enclos extérieur pour qu’il mange de l’herbe et des plantes de son choix (photo 2). Il est aussi possible de faire la cueillette d’herbe verte, d’herbes sauvages, de feuilles et de plantes. Les coupes de tondeuse sont en revanche à proscrire. Il est en outre conseillé de sécuriser l’accès à certaines parties du jardin et de vérifier la toxicité éventuelle(2) des plantes qui y poussent. Le foin étant trop sec, la verdure apporte un complément en vitamines et en eau important. Très appétente et attractive pour l’animal, elle est donc un bon moyen d’enrichissement du milieu, en variant souvent les aliments : il est conseillé d’en donner trois à cinq différents par jour.

4. Les aliments complets

Trop riches et déséquilibrés en rapport phosphocalcique, les mélanges de céréales sont à proscrire. Il convient de préférer les mélanges homogènes, comme les extrudés ou les granulés. Malgré cela, ils doivent être donnés en quantité limitée pour que l’animal ne délaisse pas la consommation de verdure et de foin.

Seule la donnée “cellulose brute” est indiquée dans la composition des aliments. Les apports en fibres alimentaires digestibles et non digestibles ne peuvent ainsi pas être correctement appréciés. L’évaluation macroscopique de l’aliment permet cependant d’orienter sur le taux de fibres non digestibles (longues fibres visibles, friabilité, etc.). Les fibres digestibles ne doivent pas être les plus importantes, car elles surchargent le cæcum en nutriments pour les bactéries cæcales, provoquant une dysbiose avec des risques de diarrhée, d’entérotoxémie et de mortalité.

Il existe plusieurs types d’aliments complets qui résultent de processus de fabrication différents (photos 3) [11] :

– les granulés, plus riches en sucres car compressés avec de la mélasse de sucre de canne, ont la forme de cylindres ;

– les extrudés, issus d’un processus qui permet de limiter les pertes nutritionnelles et de maintenir les fibres longues intactes, sont souvent de formes et de couleurs différentes et plus appétents que les granulés ;

– les monoforages, longs bâtonnets très riches en fibres, ont une appétence moindre que les granulés ou les extrudés, mais leur intérêt dans l’alimentation du lapin est réel. Leur introduction est plus aisée si le lapin est jeune et a une bonne santé dentaire.

En théorie, il n’est pas nécessaire d’apporter un aliment complet si la ration est suffisamment équilibrée (différents foins d’origines variées, verdure très diversifiée, etc.). En pratique, il est difficile d’équilibrer parfaitement une ration chez le lapin de compagnie (encadré 3). Un aliment complet distribué en petite quantité permet d’apporter un complément intéressant en vitamines et minéraux, plus pour diversifier les apports que pour prévenir de réelles carences. Leur intérêt est aussi de satisfaire les propriétaires, qui peuvent s’en servir pour l’enrichissement du milieu (les cacher, les distribuer lors de jeux, etc.) et l’éducation (récompense).

5. La transition alimentaire

Tout changement alimentaire est délicat chez un lapin, d’autant plus si la teneur en sucre est réduite. L’animal refuse le nouvel aliment, gratte sa mangeoire ou la renverse. Toute transition alimentaire doit être très progressive (jusqu’à un mois) pour éviter le rejet du nouvel aliment et les troubles digestifs. Un mélange des deux aliments est réalisé graduellement. Placer le nouvel aliment dans le sac de l’ancien peut aider à sa consommation, car il aura ainsi une odeur connue et appréciée. Les transitions alimentaires sont surtout importantes pour le frais et les aliments riches comme les granulés, mais pas pour le foin.

Références

  • 1. Arrazuria R, Perez V, Molina E et coll. Diet induced changes in the microbiota and cell composition of rabbit hut associated lymphoid tissue (GALT). Sci. Rep. 2018;8 (1):14103.
  • 2. Boussarie D, Rival F. Médecine et chirurgie du lapin de compagnie. Vetnac éditions. 2013:480p.
  • 3. Chen SY, Deng F, Jia X et coll. Gut microbiota profiling with differential tolerance against the reduced dietary fibre level in rabbit. Sci. Rep. 2019;9 (1):288.
  • 4. Claus M, Hatt JM. Evidence-based rabbit housing and nutrition. Vet. Clin. North Am. Exot. Anim. Pract. 2017;20 (3):871-884.
  • 5. Claus M. Clinical technique: feeding hay to rabbits and rodents. J. Exot. Pet Med. 2012;21 (1):80-86.
  • 6. FEDIAF. The European Pet Food Industry. Nutritional guidelines for feeding pet rabbits, 2013. Consulté en mars 2020 à l’adresse : https://fediaf.org/self-regulation/ nutrition.html#rabbits
  • 7. Gidenne T. Conseìquences digestives de l’ingestion de fibres et d’amidon chez le lapin en croissance : vers une meilleure deìfinition des besoins. Inra Prod. Anim. 1996;9 (4):243-254.
  • 8. Gidenne T, Combes S, Licois D et coll. Écosystème cæcal et nutrition du lapin : interactions avec la santé digestive. Inra Prod. Anim. 2008;21 (3):239-250.
  • 9. Gidenne T, Lebas F, Savietto D et coll. Nutrition et alimentation. Dans : Le lapin, de la biologie aÌ l’eìlevage. Quae Versailles, France. 2015 ;(Chap 5):139-184.
  • 10. PFMA. Pet Food Manufacturers Association. Rabbit size-o-meters. Site internet : https://www.pfma.org.uk/pet-size-o-meter
  • 11. Proenca LM, Mayer J. Prescription diets for rabbits. Vet. Clin. North Am. Exot. Anim. Pract. 2014;17:485-502.
  • 12. Prosky L, Asp NG, Furda I et coll. Determination of total dietary fiber in foods and food products: collaborative study. J. AOAC Intern. 1985;68:677-679.
  • 13. Randall D, Burggren W, French K. Eckert animal physiology: mechanisms and adaptations. WH Freeman & Co. 1997:840p.
  • 14. Tschudin A, Clauss M, Codron D et coll. Preference of rabbits for drinking from open dishes versus nipple drinkers. Vet. Rec. 2011;168 (7):190.
  • 15. Van Soest P, Robertson J, Lewis B. Methods for dietary fiber, detergent fiber, and non-starch polysaccharides in relation to animal nutrition. J. Dairy Sci. 1991;74:3583-3597.

Conflit d’intérêts : Aucun

Encadré 1 : DÉTERMINATION DE LA VALEUR ÉNERGÉTIQUE D’UN ALIMENT À PARTIR DE SA COMPOSITION

Les différents composants analytiques sont les protéines brutes (14 %), les graisses brutes (3 %), les fibres brutes (20 %), les cendres brutes (7,5 %), le calcium (0,8 %) et le phosphore (0,6 %). Le taux d’humidité n’est pas indiqué. Par défaut, s’agissant d’un aliment sec à base de fourrage, il est censé contenir 8 % d’humidité.

• Étape 1 : calcul de la valeur “extractif non azoté” (ENA) :

ENA = 100 – protéines brutes (matière azotée totale, ou MAT) – graisses brutes (matières grasses, ou MG) – fibres brutes – cendres brutes – humidité

Attention, la dénomination “fibres brutes” est inexacte. Il s’agit en réalité de la valeur “cellulose brute”.

L’ENA est calculé en pourcentage (g/100 g d’aliment), puis est converti en g/kg :

ENA = 47,5, soit 475 g/kg d’aliment

• Étape 2 : calcul de la valeur “énergie digestible” (ED) :

ED (kcal/kg d’aliment) = – 1 801 + 7,1 × MAT + 12,01 × MG + 5,59 × ENA

Les pourcentages indiqués dans les composants analytiques doivent être convertis en g/kg d’aliment en les multipliant par 10 :

ED = – 1 801 + 7,1 × 140 + 12,01 × 30 + 5,59 × 475

ED = 2 208,55 kcal/kg d’aliment, soit ED = 221 kcal/100 g d’aliment

• Étape 3 : calcul de la ration journalière

Pour un lapin de 1,25 kg, l’apport énergétique est de 103 × 1,250,75 = 122 kcal ED par jour. La quantité d’aliment nécessaire est de 100 × 122/221, soit environ 55 g de cet aliment par jour. Sur les paquets d’aliments complets pour lapin, c’est cette quantité quotidienne qui est recommandée, car elle couvre les besoins nutritionnels de l’animal. Or la ration est aussi et surtout composée de foin et de verdure, dont les apports sont plus difficiles à quantifier. Il faut donc réduire cette quantité, d’où les recommandations générales qui limitent l’apport quotidien d’aliment complet à 1 % du poids vif de l’animal.

Points clés

• Les besoins énergétiques d’entretien du lapin sont élevés.

• 30 à 50 % des besoins énergétiques sont comblés par la cæcotrophie.

• Les besoins nutritionnels du lapin doivent être respectés, notamment celui en fibres (12,5 % du volume de la ration alimentaire).

• La donnée “cellulose brute” indiquée dans la composition des aliments ne permet pas d’apprécier correctement les apports en fibres alimentaires digestibles et non digestibles

Encadré 3 : ALIMENTS À DISTRIBUER AU LAPIN

Il convient de conseiller au propriétaire de donner :

– des foins de bonne qualité à volonté, plusieurs fois par jour : un foin de prairie de base et un autre changé régulièrement (avoine, phléole, Crau, etc.). Le foin de luzerne est à réserver lors de besoins en calcium augmentés (croissance, gestation, lactation, certaines convalescences, etc.) ;

– trois à cinq végétaux feuillus verts, à la quantité de 10 % au maximum du poids de l’animal par jour (100 g matin et soir pour un lapin de 2 kg ) ;

– un aliment complet, à la quantité de 1 % du poids de l’animal par jour pour les granulés/extrudés (soit 10 g matin et soir pour un lapin de 2 kg ), ou d’un à deux bâtonnets monoforage par kilo matin et soir. Cette recommandation, assez empirique, vise à limiter la consommation de l’aliment complet, qui n’est pas obligatoire.

Le suivi du poids et du score corporel de l’animal permet d’évaluer si la ration est adaptée en quantité (tableau 4) [10]. Les modalités de distribution des aliments étant tout aussi importantes, notamment chez les lapins qui n’ont pas accès à l’extérieur, il est fortement conseillé de sensibiliser les propriétaires à l’enrichissement du milieu de leur animal, qui passe principalement par la complexification de l’accès à la nourriture, en favorisant la recherche et le jeu, comme chez le chat.

CONCLUSION

Beaucoup de troubles de santé sont encore liés à de mauvaises conditions d’entretien du lapin, et principalement à l’alimentation : affections digestives (diarrhée, stase gastro-intestinale, accumulation de cæcotrophes, etc.), maladie dentaire, obésité et ses conséquences (pododermatite, boue vésicale, arthrite, lipidose hépatique, troubles cardio-vasculaires, etc.). Les vétérinaires ont un rôle d’éducation à jouer auprès des propriétaires. L’enrichissement du milieu (recherche active de nourriture) et la distribution quotidienne d’herbes, de verdure ou de plusieurs sortes de foin restent des besoins méconnus des propriétaires.

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