Parasitologie
ANALYSE MIXTE
Auteur(s) : Par Karim Adjou
Des vétérinaires, des médecins et des chercheurs, experts des protozooses intestinales transmises par voie hydrique les plus répandues dans le monde, la cryptosporidiose et la giardiose, se sont réunis en février 2025 à Melbourne en Australie pour le 8e congrès international sur Cryptosporidium et sur Giardia.
Environ 100 participants du monde entier (en présentiel et en distanciel) ont fait le succès de la 8e édition du congrès international sur Cryptosporidium et sur Giardia organisée du 23 au 26 février 2025 à Melbourne, en Australie. Présidée par le professeur Aaron Jex, enseignant-chercheur à l’université melbournienne, cette réunion scientifique a abordé une multitude de thèmes : biologie moléculaire et cellulaire, génomique, biologie des systèmes, taxonomie, phylogénétique, génétique des populations, diagnostic, épidémiologie, interactions hôte-parasite et immunologie, pathogenèse de la maladie, développement de nouveaux traitements et amélioration des stratégies de contrôle et des politiques de santé publique. Huit conférences plénières, 56 communications orales et 26 posters ont porté sur des sujets fondamentaux ou de recherche appliquée.
Des maladies en voie de progression
Lors de son discours introductif, Aaron Jex a rappelé que l’objectif principal de cette réunion était de permettre à des experts de divers domaines (vétérinaires, médecins, microbiologistes, informaticiens, spécialistes de l’eau, etc.) de dialoguer, d’échanger et de se connaître. Parmi les points essentiels à retenir de cette rencontre, l’augmentation considérable, depuis les années 2000, des cas de giardioses et de cryptosporidioses aux États-Unis, surtout chez les enfants, est à noter. La majorité d’entre eux étaient dus à la consommation d’eau de boisson contaminée. « Cryptosporidium a été à l’origine de plusieurs épidémies dans l’État de Victoria, en Australie, au cours des 15 dernières années, notamment par le biais de produits laitiers infectés, de piscines publiques et de contacts avec des animaux, précise également la docteure Marielle Babineau, de l’école des sciences vétérinaires de l’université de Melbourne. La cause de cette augmentation alarmante reste inconnue mais elle nécessite une surveillance accrue de ce parasite zoonotique. » De plus, un nouveau sous type de Cryptosporidium hominis a émergé ces dernières années. Enfin, il n’existe actuellement aucune thérapie pleinement efficace pour traiter la cryptosporidiose chez l’homme ou pour éliminer le parasite, ont noté plusieurs conférenciers. Plusieurs molécules ont une efficacité partielle mais insuffisamment démontrée par des études contrôlées. Seuls la paromomycine et le nitazoxanide ont fait l’objet d’études cliniques approfondies.
Des essais prometteurs
Toutefois, des résultats très encourageants d’essais thérapeutiques (association de deux molécules) ont été obtenus sur des patients immunodéprimés à la suite de greffes d’organes, a indiqué le professeur Gilles Gargala, du centre hospitalier universitaire de Rouen (Seine-Maritime). Les dossiers de 21 patients immunodéprimés atteints de cryptosporidiose sévère (détérioration de leur état général avec perte de poids et insuffisance rénale) ont été étudiés lors de réunions de concertation pluridisciplinaire (RCP) hebdomadaires mises en place de novembre 2023 à novembre 2024 par le centre national de référence de la cryptosporidiose, des microsporidies et des autres protozoaires digestifs français. Sollicité environ un mois après le début des symptômes et après l’échec d’un traitement de première intention, l’avis du centre national de référence de la cryptosporidiose, des microsporidies et des autres protozoaires digestifs français a permis une adaptation thérapeutique des dosages, d’utiliser des molécules parfois non connues des cliniciens demandeurs mais aussi de préciser la stratégie de suivi et de contrôle parasitologique des malades pendant et après le traitement. Dans ces 21 cas étudiés, il semblerait que la thérapie combinée avec plusieurs médicaments (généralement nitazoxanide et azithromycine) soit plus efficace que la monothérapie. En ce qui concerne les mesures de prévention de la cryptosporidiose, elle sont à la fois individuelles et collectives. Elles reposent sur l’hygiène alimentaire et la protection des ressources d’eau contre une contamination environnementale d’origine humaine et surtout animale. Enfin, l’identification chez l’humain et chez les ruminants en France dans les oocystes de cryptosporidies de « cryspovirus », dont le rôle reste inconnu à ce jour, ouvre des perspectives nouvelles. Ils pourraient servir de traceurs épidémiologiques du parasite Cryptosporidium puisque ses séquences génomiques sont différentes d’un continent à l’autre, d’un pays à l’autre, voire d’une région à l’autre comme cela a été montré au Japon. Pour conclure ce congrès riche de rencontres, de discussions et de projets, le comité international du congrès a annoncé que le prochain prévu en 2027 aura probablement lieu à Berne, en Suisse.