Un défaut d’information du vendeur ? - La Semaine Vétérinaire n° 2074 du 18/04/2025
La Semaine Vétérinaire n° 2074 du 18/04/2025

Jurisprudence

ENTREPRISE

Auteur(s) : Par Céline Peccavy

Les obligations d’informations du vendeur s’appliquent dans bien des domaines, y compris dans le cadre de la cession d’un animal domestique. Voici un exemple transposable.

Une fois n’est pas coutume, un arrêt rendu par la Cour de cassation le 23 mai 2024 dans une affaire qui ne concerne aucun animal dégage un principe fort intéressant et parfaitement transposable aux cessions des animaux domestiques. Après s’être approvisionnée auprès de la société B, la société A a vendu à la société D des appareils de traitement du vin. Le procédé employé reposait sur un acide technique et non alimentaire. Après avoir reçu des plaintes de clients sur l’impropriété à la consommation des vins ainsi traités, D a assigné A et B en indemnisation.

Le litige amène les magistrats qui vont se succéder pour juger cette affaire à se prononcer à la fois sur la garantie des vices cachés et sur le devoir d’information du vendeur. Nous nous attacherons ici seulement à ce second motif. S’ensuit un enchaînement de procédures : première instance puis appel et au final saisine de la Haute Cour pour contester l’arrêt rendu à Montpellier (Hérault) le 28 juin 2022. L’enjeu est de taille puisque la cour d’appel a en effet condamné les deux sociétés A et B pour la somme totale de 767 205,90 € en répartissant ainsi les responsabilités : 70 % pour B et 30 % pour A.

Un défaut d’information ?

C’est le cœur du problème entre A et B. Les 70 % mis à la charge de B par la cour d’appel se justifient, selon elle, par le fait que « la société B ne justifie pas avoir informé la société A lors de la vente de cet acide que celui-ci était susceptible de comporter telle ou telle impureté, notamment par le biais d’une fiche technique et du certificat de conformité, et que les formulations portées sur les fiches de sécurité sont imprécises et susceptibles de générer une confusion en ce qu’elles n’excluent pas un usage alimentaire ». Conséquence de ce raisonnement : la société B a manqué à son obligation d’information envers la société A.

Qu’en dit la Cour de cassation ? La Haute Cour n’est pas du même avis et motive comme suit : « En statuant ainsi, alors qu’elle relevait que la société A, spécialiste des produits œnologiques, avait commandé de l’acide chlorhydrique “technique” quand il existait également une qualité “alimentaire” de l’acide et que le contrat précisait que “les produits étaient de qualité industrielle standard, sauf stipulation contraire”, ce dont il résultait qu’elle disposait des moyens d’apprécier la portée exacte des caractéristiques techniques de cet acide, de sorte qu’il lui incombait de s’informer sur les caractéristiques techniques de l’acide technique dont elle faisait un usage alimentaire, la cour d’appel a violé le texte susvisé. »

Le principe dégagé est le suivant : l’obligation d’information et de conseil du vendeur à l’égard de son client, acheteur professionnel, n’existe que dans la mesure où la compétence de celui-ci ne lui donne pas les moyens d’apprécier la portée exacte des caractéristiques techniques du bien vendu.

Un principe confirmé légalement

Ici, si la Cour de cassation statue en 2024, il ne faut pas perdre de vue que les faits sont antérieurs à la réforme du droit des obligations de 2016. Pour autant, elle n’a pas remis en cause le principe posé par la cour. Le nouvel article 1112-1 du Code civil dispose ainsi que « celle des parties qui connaît une information dont l’importance est déterminante pour le consentement de l’autre doit l’en informer dès lors que, légitimement, cette dernière ignore cette information ou fait confiance à son cocontractant ».

En conclusion, on ne peut exiger du vendeur professionnel vis-à-vis de l’acheteur professionnel de même spécialité la même information que celle qui serait due à un simple consommateur. Le principe est incontestablement transposable aux ventes entre éleveurs de chiens, de chats ou de chevaux.