Enquête
ANALYSE GENERALE
Auteur(s) : Par Marine Neveux
« L'intelligence artificielle a un potentiel énorme pour transformer radicalement la pratique vétérinaire », du moins selon… ChatGPT. Vraiment ? À chacun de garder son esprit critique de scientifique ! D’ailleurs, lorsqu'il est question de limites, cette IA générative modère son contenu en évoquant le manque de données de qualité, la complexité des cas, l'absence de prise en compte du contexte global, etc. Décryptage.
La Semaine Vétérinaire a interrogé les praticiens pour connaître leur perception de l'intelligence artificielle (IA). Les résultats montrent un paysage contrasté quant à son adoption en pratique vétérinaire. L'enquête n'a pas pour ambition de proposer des chiffres rigoureusement représentatifs (taille de l'échantillon : 105 répondants), mais elle fournit des tendances, cohérentes avec les données fournies par les cliniques vétérinaires américaines et chez les médecins français*. Le verdict ? L'intérêt pour l'IA est là, mais c'est encore la prudence qui domine chez les vétérinaires.
Usages et appétence pour l’IA
Les vétérinaires sont 64 % à se déclarer utilisateurs de l’IA dans leur vie personnelle. Parmi eux, les fréquences d'utilisation varient. Ils sont 12 % à avoir recours à ce service quotidiennement, et 11 % une fois par semaine. Un usage mensuel est rapporté par 4 % des participants. Cependant, une proportion notable de l’échantillon global reconnaît n'employer l'IA que rarement ou jamais, avec 36 % pour chacune de ces catégories. Le niveau d’appétence globale pour les nouvelles technologies est d’environ 61/100 (avec un écart type de 26).
Les vétérinaires sont 57 % à se déclarer utilisateurs d'IA dans le cadre de leur travail. Parmi eux, seulement 18 % y ont recours quotidiennement. Un usage hebdomadaire est signalé par 15 % des répondants, tandis que 7 % indiquent l'utiliser une fois par mois. Cependant, une partie importante des répondants ne font appel que rarement à l'IA (18 %), et 43 % disent ne jamais l'employer dans leur exercice professionnel.
Verbatim : les réserves
« Je veux rester maître de mes décisions. »
« Je n'ai pas le temps de m'y pencher et de voir à quoi cela pourrait me servir. Je ne prends pas le temps d’en savoir davantage. »
« Mon cerveau, ma déduction logique, ce que j'ai appris à l'école et ensuite, mon expérience me suffisent à mon niveau de praticienne généraliste. »
« Refus de principe pour des raisons de fiabilité, de responsabilité, d'opacité des systèmes, de constitution des bases de données sans consentement des auteurs, de la fuite en avant de l'utilisation de cette technologie. »
« Pour ne pas être tributaire d'une machine ou d'un réseau, rester efficace même en “zone blanche”, rester autonome avant tout. »
« L'examen clinique va progressivement disparaître. C'est déjà commencé en humaine et c'est bien regrettable... »
« La high tech débridée n'apportera pas grand-chose en termes de progrès dans les soins, à part peut-être du confort (apparent) pour les soignants. Le coût économique et surtout le coût écologique sont des freins majeurs pour moi, face aux enjeux de raréfaction des ressources en énergie, en minerais rares. Nous sommes des vétérinaires qui soignent le vivant : alors, commençons par nous poser les bonnes questions pour préserver le vivant en amont ! »
« L'innovation est une chose excellente tant qu'elle reste sous contrôle de l'humain. Avec l'IA, on ne sait pas encore où on va. Et cela peut engendrer des catastrophes. On voit déjà comment Internet a perturbé les relations entre clients et soignants. »
« L'IA doit rester une aide dont les indications seront ciblées et maîtrisées. Certainement pas une béquille pour des compétences défaillantes. »
« Peur de l'impact écologique de l'IA, et de l'infantilisation de la profession. »
Verbatim : on aime
« De super outils. »
« L’aide au diagnostic, en raison du diagnostic différentiel complet. »
« Chercher des informations médicales, rédiger des documents de synthèse, résumer des articles, traduire des documents. .
« Super initiative, les vétérinaires ne doivent pas rater le train qui démarre (déjà bien vite) ! »