Endocrinologie
ANALYSE CANINE
Auteur(s) : Tanit Halfon
Lorsque des chats stérilisés présentent un trouble urinaire inexpliqué ou une agressivité ne répondant pas à un traitement classique, la possibilité d'une tumeur surrénalienne sécrétant des androgènes n'est pas à exclure. Selon une étude récente, une exploration poussée est toujours nécessaire.
Malpropreté urinaire, vocalisation, agressivité… Ces signes, pourtant courants chez le chat, peuvent cacher une maladie rare, la tumeur surrénalienne sécrétant des androgènes. C’est ce que rappelle une récente série de cas1 publiée dans la revue Frontiers par des scientifiques d’universités vétérinaires américaines. Dans cette étude rétrospective, huit chats stérilisés, cinq mâles et trois femelles, d’âge médian de 8,5 ans (7-15 ans) étaient présentés à leur vétérinaire pour des troubles urinaires et de comportement apparus depuis quelques jours à plusieurs mois : périurie, urine malodorante, vocalisation, agressivité, perte de poids, rarement hyperactivité, vomissements et polyphagie. Un chat mâle de 9 ans ne présentait que de l’agressivité depuis une semaine. Dans 7 cas sur 8, c’est l’absence de réponse à un traitement de première intention (antibiotiques, changement alimentaire, modification environnementale, thérapie chimique pour les troubles de comportement) qui a amené les cliniciens à pousser les explorations.
Une confirmation par l’échographie
Des modifications physiques ont ainsi pu être observées chez certains individus comme la présence de barbes péniennes (5 cas), une tête élargie (2 cas), un clitoris hypertrophié (1 cas), un souffle cardiaque parasternal (2 cas), et une vessie distendue et ferme (obstruction urinaire – 1 cas). Un des chats ne présentait aucune modification. Une mesure des concentrations sériques de testostérone a été réalisée pour tous les chats, associée au dosage d’autres hormones pour certains cas (aldostérone, cortisol, progestérone, œstradiol, androstènedione).
Confortant les dosages hormonaux, une échographie abdominale a révélé la présence d’une tumeur surrénalienne chez six chats, confirmée par un examen tomodensitométrique chez trois chats. Pour un des chats, c’est l’exploration chirurgicale qui a révélé le nodule. Pour un autre chat, aucune exploration plus poussée n’a été entreprise et le chat a été euthanasié. Mais une autopsie, associée à un examen histopathologique, a révélé la présence d’une tumeur surrénalienne.
Une prise en charge chirurgicale efficace
Quatre chats ont subi une surrénalectomie, permettant la disparition progressive des signes cliniques et la normalisation des taux sanguins d’hormones, avec des temps de survie2 de plusieurs mois après le traitement. Pour trois chats, seule une prise en charge médicale a été instaurée, avec des résultats plus ou moins mitigés. Les cinq examens d’histopathologie de la glande surrénale ont permis de mettre en évidence un adénome ou adénocarcinome corticosurrénalien.
Pour les auteurs, ces cas illustrent bien toute l’importance de la démarche clinique, qui doit inclure un examen physique très détaillé. À ce sujet, ils mettent en avant deux caractéristiques notables de ces cas que sont l’urine malodorante et les barbes péniennes / le clitoris hypertrophié. « Les tumeurs surrénaliennes sécrétant des androgènes pourraient être une cause sous-estimée d'anomalies comportementales chez les chats », avancent-ils. Cette maladie reste cependant rare, et il faut exclure toute autre possibilité, comme une rémanence de tissu gonadique, ou une exposition environnementale à des androgènes. Le fait que tous les chats diagnostiqués étaient stérilisés, comme c’était le cas dans de précédentes publications, peut faire craindre que l’absence de sécrétion d’androgènes par le tissu gonadique ne soit un facteur de risque pour le développement futur de telles tumeurs. » D’autres études sont nécessaires pour explorer cette question.