Néonatalogie
FORMATION CANINE
Auteur(s) : Conférencière Sylvie Chastant, professeure de reproduction, animatrice de l’unité NeoCare de l’École nationale vétérinaire de Toulouse (ENVT) Article rédigé d’après la conférence « Transfert de l’immunité chez les carnivores », présentée le 20 avril 2023 à l’ENVT.
Du fait de sa richesse en immunoglobulines de type G (IgG), le colostrum constitue une protection majeure contre les agents pathogènes – à condition qu’il soit avalé par les nouveau-nés dans les temps impartis. Lorsque le taux sanguin en IgG passe sous la barre de 2,3 g/l, la mortalité néonatale devient considérable (> 40 %). Le taux de croissance des chiots est corrélé à la quantité d’IgG circulantes : 96 % des chiots ayant un déficit en IgG perdent du poids dans les deux jours suivant leur naissance. Ainsi, peser les chiots à la naissance puis deux jours plus tard permet de déterminer quels sont les chiots qui n’ont pas pris ou qui ont perdu du poids, et qui n’ont donc pas bu assez de colostrum. Ces animaux seront à vacciner plus précocement que les autres, notamment contre la parvovirose (on pourra, par exemple, envisager une vaccination dès l’âge de 4 à 6 semaines, avec un vaccin recombinant ou surtitré, en accord avec les recommandations du fabricant).
La barrière intestinale des nouveau-nés est poreuse et laisse passer ces IgG colostrales seulement dans les premières heures de vie. On estime qu’elle se ferme dans les huit premières heures qui suivent la naissance, contrairement à une idée très répandue qui laisse entendre que ce délai serait de deux jours. Par conséquent, dès la naissance, le temps est compté : même si une chienne n’a pas fini de mettre bas, les premiers chiots doivent être mis à la mamelle. Des tétées précoces et répétées permettront d’optimiser la prise du colostrum.
En l’absence de colostrum
La stratégie la plus simple pour les éleveurs de chiens est de se créer une banque de colostrum. Une fois que la barrière intestinale des chiots de la portée est fermée (sachant que l’on peut attendre vingt-quatre heures au lieu de huit heures pour être certain de ne pas léser les chiots), il suffit de nettoyer les mamelles de la chienne, de la traire et de récupérer le colostrum dans des tubes d’environ 2 ml. Ces derniers peuvent être conservés quelques mois au congélateur. En cas de besoin, pour d’autres portées, ils pourront être décongelés (idéalement à température ambiante, jamais au micro-ondes ou bien dans de l’eau bouillante). Cette méthode est difficilement applicable chez la chatte qui ne se laisse généralement pas traire.
Les chiennes en lactation de pseudo-gestation peuvent avoir des sécrétions mammaires aussi riches en IgG que le colostrum. Ni le risque bactériologique lié à leur utilisation, ni leur efficacité n’ont été évalués. Utiliser le colostrum d’autres espèces animales n’est pas adéquat, car les anticorps ne cibleront pas les bons agents pathogènes.
Des études ont cherché à déterminer si le sérum canin (administré par voie orale) pouvait être un bon substitut au colostrum. Bien moins riche en IgG que le colostrum, ce sérum n’entraîne que peu à pas d’augmentation du taux circulant en IgG, rendant cette alternative peu pertinente. Chez le chat, le sérum du donneur doit être compatible avec le groupe sanguin du chaton.
Enfin, une autre possibilité est l’utilisation de poudre d’œufs hyperimmunisée. Impossible d’en faire soi-même ou avec un vétérinaire, il faut l’acheter dans le commerce1. En vaccinant des poules contre un antigène, des anticorps spécifiques sont produits et exportés en grande quantité dans le jaune. On peut ainsi obtenir une poudre riche en IgY qu’il suffit de mélanger à du lait maternisé. Ce substitut au colostrum présente de bons résultats, mais il ne contient que des anticorps dirigés contre le parvovirus canin CPV-2 et contre Escherichia coli2. Aucun n’est disponible chez le chat.