Vaccination, des progrès mais aussi des disparités - La Semaine Vétérinaire n° 1991 du 26/05/2023
La Semaine Vétérinaire n° 1991 du 26/05/2023

Dossier

DOSSIER

Auteur(s) : Michaella Igoho-Moradel

Les données recueillies par l’Observatoire national de la vaccination des animaux entre 2017 et 2022 montrent que les niveaux de couverture vaccinale progressent chez les chiens, les chats et les chevaux. Mais elles révèlent également des écarts entre les espèces.

La vaccination des chiens, des chats et des chevaux progresse, notamment sur les valences essentielles. Le Syndicat de l’industrie du médicament et réactif vétérinaires (SIMV) a présenté, le 4 avril 2023, les données de 2017 à 2022 de son Observatoire national de la vaccination des animaux. « Avec six années de recul, nous parvenons à aller de plus en plus finement dans l’analyse, à tenir compte des événements liés à des épidémies et parfois à des accidents de marché, comme les ruptures de certains médicaments. Cet observatoire répond aux attentes des parties prenantes et sensibilise les acteurs sur le besoin de vacciner. La France est le seul marché au monde qui dispose d’un tel outil », explique David Lussot (MSD Santé animale, président du groupe communication du SIMV). « Le SIMV a fait le pari de développer un projet collaboratif permettant, sur la base des données de ventes annuelles fournies par l’Association interprofessionnelle d’étude du médicament vétérinaire, de suivre l’évolution de la couverture vaccinale toutes espèces confondues, tant en animaux de production (bovins, ovins, caprins, porcins, volailles) qu’en animaux de compagnie (chiens, chats, chevaux) », souligne le syndicat. En 2024, les données 2017-2023 de l’observatoire cibleront les animaux de production.

Plus de chats vaccinés contre le coryza et le typhus

Chez les chats, les données de couverture ciblent des valences essentielles : le typhus et le coryza, la leucose, la chlamydiose et la rage. Le taux de vaccination contre le coryza et le typhus progresse de plus de 1 100 000 chats en cinq ans. Cette progression s’explique par la forte croissance de la population féline estimée aujourd’hui à 15 millions d’individus. La parvovirose féline concerne des jeunes chats non vaccinés ou dont le protocole vaccinal est incomplet. « Nous savons que les épidémies de typhus concernent plutôt les collectivités, les refuges, les élevages, même les chats qui vivent en intérieur peuvent être touchés. Les propriétaires ne saisissent pas toujours l’importance de vacciner leur animal contre ces valences essentielles », commente Nadège Perier (responsable technique vétérinaire chez Boehringer Ingelheim). Mais la couverture vaccinale globale de la population totale reste bien en deçà des chiffres de celle du chien. Seuls 41 % des chats médicalisés seraient vaccinés.

Des progrès à faire sur les valences circonstancielles

Concernant les valences circonstancielles, la marge de progression reste importante. Par exemple, s’agissant de la leucose, une maladie due au virus de la leucémie féline, ce sont surtout les chats de moins d’un an qui sont à risque, et 34 % des chats médicalisés sont vaccinés contre cette maladie. « Nous estimons la prévalence à 1 %, ce sont des chiffres qui viennent d’une étude paneuropéenne réalisée en 2018. Il ne faut pas relâcher les efforts de vaccination. Le conseil et la prescription du vétérinaire restent indispensables pour encourager les propriétaires à faire vacciner leur animal contre la leucose », analyse Nadège Perier. La chlamydiose due à Chlamydia felis est également une valence circonstancielle. La vaccination est recommandée dans les collectivités avec un risque infectieux avéré. Mais la couverture vaccinale pour cette maladie ne dépasse pas 7 % chez les chats médicalisés. « Ces chiffres sont stables au cours des années. La vaccination est raisonnée pour le vétérinaire selon le mode de vie de l’animal et le risque associé. » Quant à la rage, la vaccination est réglementée chez les carnivores domestiques, notamment lors de voyage au sein de l’Union européenne, dans les pays tiers. Elle peut également être préconisée pour certains événements, comme des expositions. La vaccination antirabique chez le chat est bien inférieure à celle du chien. Seulement 1 % de la population féline est vaccinée contre la rage.

Une évolution positive de la vaccination essentielle chez les chiens

Chez les chiens, les données de couverture concernent la maladie de Carré et l’hépatite de Rubarth, la parvovirose et la leptospirose, le complexe infectieux respiratoire canin (anciennement toux de chenil), la rage, l’herpès virose et les trois maladies vectorielles (piroplasmose, leishmaniose et borréliose canine). Cette année, les résultats révèlent une évolution positive de la vaccination « essentielle », + 11 points entre 2017 et 2022. « Nous estimons que 93 % des chiens médicalisés et protégés contre ces maladies [la maladie de Carré et le virus de l’hépatite de Rubarth la leptospirose et la parvovirose, NDLR]. Il est essentiel de conserver un taux de vaccination élevée contre ces quatre maladies afin d’éviter leur résurgence et de nouvelles épidémies » indique Olivier Bidaud (directeur général de Virbac). Pour la toux de chenil, le taux de vaccination est moyen avec environ 31 % des chiens médicalisés protégés contre cette maladie. Une baisse conjoncturelle de la couverture vaccinale est observée en 2020, en lien avec le confinement. Une diminution de la vaccination contre la rage est également notée. Cette baisse est liée à la limitation des mouvements vers l’étranger.  « Cette vaccination reste préconisée car tout chien non vacciné contre la rage mais en contact avec un animal enragé sera euthanasié. Le risque n’est pas nul. Il existe aujourd’hui des importations de chiens qui ont la rage sans pour autant remettre en cause le statut indemne du pays. Le dernier cas date d’octobre 2022 », commente Olivier Bidaud. La vaccination contre l’herpès virose reste faible malgré un pic en 2020-2021, possiblement lié au nombre de naissances dans les élevages. De même, la rupture en 2022 du seul vaccin enregistré en France peut expliquer la baisse assez importante par rapport à 2021. Par ailleurs, le SIMV note une baisse de la vaccination contre les maladies transmises par les tiques et une augmentation de la vaccination contre la leishmaniose. « Les vaccinations régionales contre les maladies vectorielles ne sont pas présentes partout sur le territoire français. Pour les maladies transmises par les tiques, la tendance de la couverture vaccinale est à la baisse, même si la forte diminution observée en 2022 est liée à une rupture du seul vaccin sur le marché », poursuit Olivier Bidaud.

La vaccination contre la rhinopneumonie augmente

Chez les chevaux, les données de couverture concernent la grippe équine, le tétanos, la rhinopneumonie, l’artérite virale, le virus du Nil occidental et la gourme. « Le taux de vaccination grippe (obligation FEI et FFE) permet de faire face en France aux derniers épisodes majeurs de circulation virale (depuis 2019 et encore aujourd’hui) », explique le SIMV. Ce dernier observe également une augmentation de la vaccination contre la rhinopneumonie (notamment primovaccination). « La grande majorité des chevaux sont vaccinés avec cette double valence grippe-tétanos. Pour ces deux maladies, la couverture vaccinale est de l’ordre de 60 à 70 % avec une légère baisse de la couverture vaccinale du tétanos liée à des problématiques d’approvisionnement. Les conséquences médicales sont peu importantes car la couverture vaccinale contre le tétanos a une durée d’immunité plus longue que celle de la grippe », précise Sébastien Marty (responsable marketing chez Boehringer Ingelheim). Une forte augmentation de la vaccination contre la rhinopneumonie a été observée à la suite de l’épizootie espagnole. « À la suite d’un phénomène de panique, beaucoup de vaccinations ont été faites, ce qui a induit un travail assez intéressant pour essayer d’évaluer le taux de primovaccination qui n’est jamais une science totalement exacte. En 2022, le taux de vaccination recule du fait de la diminution de pression médiatique autour de cet épisode de Valence. La circulation du virus reste importante dans des foyers relativement maîtrisés, mais de nombreux chevaux sont touchés. » Enfin, trois maladies à transmission vectorielle (artérite virale, fièvre de West Nile et gourme) font très peu l’objet d’une vaccination régulière (entre 100 et 400 animaux vaccinés seulement chaque année pour chacune de ces trois maladies).

Méthode de calcul des indicateurs

Les données de l’Observatoire national de la vaccination des animaux proviennent des chiffres fournis par les adhérents du Syndicat de l’industrie du médicament et diagnostic vétérinaires (SIMV). Leurs responsables techniques de laboratoire ont déterminé la méthode de calcul du nombre d’animaux vaccinés pour chaque maladie en fonction du protocole vaccinal. Une analyse critique a ensuite été élaborée avec l’appui des équipes techniques et marketing de laboratoires adhérents au SIMV afin d’estimer les taux de vaccination pour chaque espèce et chaque maladie. L’objectif de ce travail est notamment « d’apporter des informations sur le taux de vaccination des animaux et son évolution dans le contexte de la santé animale, la santé publique et la lutte contre l’antibiorésistance », précise le SIMV. Il vise également à sensibiliser les différents acteurs du marché (dont les vétérinaires et les propriétaires d’animaux) sur la nécessité de vacciner.

Des objectifs ciblés

Lancé en 2018, l’Observatoire national de la vaccination du Syndicat de l’industrie du médicament et diagnostic vétérinaires est un outil pensé pour le suivi des maladies infectieuses et l’évolution des couvertures vaccinales chez les animaux en France. Ses objectifs sont les suivants :

- créer des indicateurs clés de médecine préventive biologique ;

- suivre l’évolution de la couverture vaccinale espèce par espèce ;

- répondre aux différentes attentes en matière de santé animale, de santé publique et de lutte contre l’antibiorésistance ;

- sensibiliser les différents acteurs du marché sur la nécessité de vacciner et démontrer le potentiel actuel de développement éthique du marché.

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