Prendre l’avion sans stress avec son chat - La Semaine Vétérinaire n° 1982 du 24/03/2023
La Semaine Vétérinaire n° 1982 du 24/03/2023

Santé féline

ANALYSE CANINE

Auteur(s) : Par Tanit Halfon

Examen de l’animal, choix du matériel de transport, respect des procédures administratives, etc. sont autant de points clés à maîtriser pour réduire le stress d’un chat de compagnie lors d’un voyage en avion. La disponibilité de nouvelles molécules anxiolytiques permet d’envisager plus sereinement la mise en place d’un soutien médicamenteux.

Un voyage en avion avec un chat de compagnie ne s’improvise pas. Toute une préparation est à prévoir en amont du voyage mais aussi à l’arrivée, afin de gérer le stress de l’animal. C’est ce que s’appliquent à expliquer deux vétérinaires dans une publication1 de début d’année 2023 du Journal of Feline Medicine and Surgery de l’International Society of Feline Medicine. Le transport aérien est associé à de nombreux facteurs de stress pour un chat, tels que la modification de son lieu de vie ou le manque de contrôle et de prévisibilité de son environnement (présence de bruits imprévisibles, nouvelles personnes, etc.). De fait, il est essentiel de mettre en place une stratégie pour gérer le stress et ses conséquences physiologiques néfastes voire dangereuses (décompensation organique) lors d’un voyage en avion. Selon les autrices, il convient d’adopter une approche multimodale, basée sur une bonne préparation avant le vol, et une gestion adéquate de l’environnement de l’animal à l’arrivée. « Les facteurs de stress ne se limitent pas aux périodes de l’enregistrement et du vol, mais peuvent être présents bien plus longtemps avant et après », mettent-elles en garde.

Prendre les devants

Quelques semaines avant le vol, un examen de l’animal permet de s’assurer de son état de santé physique, mentale et émotionnelle, pouvant soulever la question de la pertinence d’un voyage. Un nouvel examen clinique, dix jours avant le départ, est à effectuer, comme généralement demandé par les compagnies aériennes. Procéder à des examens complémentaires (bilan sanguin, imagerie médicale, etc.) peut s’avérer nécessaire pour les chats atteints de maladies chroniques, tout comme il convient de réfléchir, à ce moment-là, aux modalités pratiques de traitement. En prévision du confinement durant le transport, il faudra s’attacher à familiariser l’animal avec sa cage par des méthodes de renforcement positif2. Pendant le voyage, on doit s’efforcer de réduire l’impact des stimuli sensoriels, par exemple à l’aide d’une serviette posée sur la cage pour limiter les sollicitations visuelles, ou encore d’amortisseurs acoustiques.

Rechercher l’effet anxiolytique

Un soutien médicamenteux peut être également utile à commencer quelques jours avant le vol : la gabapentine (hors autorisation de mise sur le marché) et la prégabaline (Bonqat, Orion Animal Health) sont deux molécules « véritables anxiolytiques » efficaces pour réduire les comportements de stress, tout en « préservant la capacité de l’animal à fonctionner relativement normalement, tant sur le plan physique qu’émotionnel ». Selon les autrices, la prégabaline a moins d’effets secondaires que la gabapentine et est plus puissante, mais elles n’ont pas encore eu l’occasion de l’utiliser dans leur pratique. La dose de la gabapentine recommandée est de 5 à 25 mg/chat PO toutes les huit à douze heures, et pour la prégabaline de 5 à 10 mg/chat PO toutes les douze heures. Il convient de tester la molécule en amont pour déterminer le dosage le plus adapté à son animal (efficacité/sédation).

Les autrices ne conseillent pas la trazodone du fait des effets sédatifs plus marqués ; ni les benzodiazépines en raison du risque d’effets secondaires, de plus, l’effet anxiolytique recherché n’est pas convaincant.

Anticiper l’arrivée

Attention, certains chats peuvent être déjà sous un traitement anxiolytique de long cours. Dans ce cas, cette médication doit être débutée au moins quatre à six semaines avant le trajet en avion pour être efficace. Elle peut être associée à des anxiolytiques de court terme, les interactions médicamenteuses étant rares, indiquent les autrices, sous réserve de bien contrôler la notice. À noter que le maropitant est aussi un médicament à envisager.

Selon les autrices, il est possible d’utiliser des phéromones dans la cage de transport (huit pulvérisations ou lingettes, quinze minutes avant d’y placer le chat), ou encore de l’alpha-casozépine, L-théanine ou tryptophane pouvant être commencés généralement deux semaines avant le vol et à poursuivre au moins deux semaines après. À ce stade de connaissances, le cannabidiol n’est pas recommandé. À l’arrivée, les méthodes classiques pour habituer un chat à son nouvel environnement sont à appliquer. Les anxiolytiques de court terme peuvent être continués si besoin pendant plusieurs jours voire semaines, tout comme les aliments complémentaires et phéromones.

Tous ces conseils peuvent bien entendu être suivis pour tout voyage de longue durée.

Les modalités de voyage

Gérer le stress de l’animal passe par la prise en compte des aspects matériels et logistiques.

Des équipements bien pensés pour le voyage

Pour le matériel, la cage de transport doit être suffisamment grande pour permettre au chat de pouvoir se tenir debout, en posture assise, se retourner et s’allonger ; la cage doit être solide avec des mailles resserrées. En cabine, le chat voyagera dans une caisse à parois souples qui se pose plus facilement à ses pieds lors des phases de décollage et d’atterrissage ; dans ce cas, il est intéressant d’habituer le chat à porter un harnais (avec laisse) pour sécuriser le voyage en cas d’ouverture délibérée ou accidentelle du sac. Ne pas oublier l’alèse. Pour l’eau, les autrices préconisent de remplir le bol accroché aux caisses solides (soutes) par de l’eau congelée pour éviter tout déversement. Un entonnoir peut être fixé à l’extérieur pour les voyages de plus de six heures, laissant la possibilité au personnel de la compagnie aérienne de verser facilement de l’eau. Pour la nourriture, il n’est pas nécessaire de la retirer quelques heures avant le départ, surtout si le voyage est long sans transit. Chaque modalité de transport a ses avantages et ses inconvénients, variables suivant l’individu. Il n’y a donc pas de recommandations particulières par les autrices si ce n’est les précautions évoquées précédemment.

Choisir les prestataires de transport

Il est classique que le chat voyage avec son propriétaire, en cabine ou en soute. Une alternative, qui peut être imposée notamment pour certaines destinations pouvant exiger une quarantaine à l’arrivée, est le transport par fret. On fera alors appel à un transitaire professionnel spécialisé qui pourra également assister pour les démarches administratives. Dans tous les cas, un garant de qualité pour les professionnels du secteur (transitaires, compagnies aériennes) est le fait d’appartenir à l’International Pet and Animal Transportation Association ou l’Animal Transportation Association (ATA), dont les membres sont censés respecter des normes qualité. Il existe aussi maintenant un programme de certification internationale (Center of Excellence for Independent Validators [CEIV] Live Animals) qui permet de valider, via un processus d’audits, les bonnes pratiques des transporteurs aériens en matière de manipulation et de transport d’animaux vivants. C’est l’ATA, avec l’Association internationale du transport aérien, qui a été à l’initiative du CEIV. Cela va de soi, mais rappelons qu’il conviendra également de se conformer aux procédures administratives demandées pour voyager. Plus que la longueur du voyage, les correspondances sont à éviter dans la mesure du possible. Pour les autrices, un vol direct, même s’il dure plus que quinze ou seize heures – le maximum généralement visé –, pourrait être moins stressant que plusieurs vols de courte durée avec escales.

  • 1. Jahn K., DePorter T. Feline stress management during air travel: a multimodal approach. J Feline Med Surg. 2023;25(1).
  • 2. Cat Friendly Clinic. Getting your cat to the vet. bit.ly/3mX4xr2.