Comment gérer un collaborateur paresseux ? - La Semaine Vétérinaire n° 1967 du 25/11/2022
La Semaine Vétérinaire n° 1967 du 25/11/2022

Management

ENTREPRISE

Auteur(s) : Par Jacques Nadel

Au travail, on connaît tous au moins un collègue paresseux qui peut nuire à la bonne marche de l’entreprise ou semer la zizanie dans l’équipe. Marche à suivre pour changer son comportement.

Un collaborateur paresseux est capable de dépenser des trésors d’imagination pour vous abuser. La blouse laissée sur le dossier de son siège pour faire croire que son absence ne durera qu’une seconde ; la lumière du bureau maintenue allumée pour la même raison ; l’ordinateur ouvert et programmé pour envoyer des e-mails… Il est important de vite démasquer ceux qui appartiennent à cette première catégorie de « flemmards », et de les persuader d’employer cette belle énergie au service de l’équipe au lieu de se comporter comme des « saboteurs de productivité », par nature ou par volonté d’en faire le moins possible.

À ne pas confondre avec la catégorie des démotivés pour diverses raisons (moral en berne en cette période de crise, lassitude, perte de confiance et du goût du travail qui envahit petit à petit la personne, sentiment d’inutilité…).

L’approche sera différente avec les deux. « La théorie du management situationnel de Hersey et Blanchard est intéressante à appliquer, elle part du principe qu’il n’existe pas un seul mode de management, mais plusieurs, ce qui permet de s’adapter à la personne ou au groupe sous la responsabilité du manager », explique Sandra Chauvin, coache et cofondatrice d’Opale Conseil.

Un premier round observationnel

Avant cela, il faut commencer par identifier les employés paresseux et déterminer à quelle catégorie ils appartiennent. Pour mettre au grand jour son inaction, il faut fréquenter assidûment pendant une semaine les repaires notoires de sous-productivité : la machine à café, la salle de repos, la salle de stockage des médicaments et des produits vétérinaires, le parking pour la pause cigarette, la photocopieuse… À ce stade, observez mais ne dites rien.

« La première action à mener est de collecter des éléments factuels sur sa fainéantise, sans entrer dans le jugement de valeur. Ils serviront à appuyer les remarques lors du premier entretien et à aborder les problèmes que son comportement pose à l’entreprise », conseille-t-elle.

Ce simple tour du propriétaire et vos reproches muets (du regard) fléchés vers le salarié paresseux peuvent se révéler efficaces. Si ce n’est pas le cas, la deuxième étape de la reprise en main consiste à recadrer la personne qui, après plusieurs remarques / rappels, n’a pas changé de comportement et ne fait aucun effort pour s’améliorer.

Un second round relationnel

Pour être efficace lors de ce premier entretien de recadrage, organisez-le mais ne convoquez le collaborateur à chaud ou sous le coup de la colère. « Le but est d’avoir un échange bienveillant mais poussé sur ce qui le motive et le démotive dans son travail », livre Sandra Chauvin. Et, surtout, « tenez-vous en aux faits pour éviter tout malentendu ou contestation ».

Autres conseils : employez la première personne pour décrire la situation. Par exemple : « Je ne comprends pas. Tu es régulièrement le dernier arrivé le matin et le premier à partir le soir. Tu n’avances pas dans ton travail et cela ralentit la marche du service. »

L’objectif est d’instaurer un échange. Avec une personne de bonne foi, créer un climat de confiance permet d’obtenir des confidences. Attention ! Les fainéants sont souvent des manipulateurs, et d’excellents communicants.

Style directif ou participatif ?

Sandra Chauvin revient sur l’exploitation des matrices du modèle de Hersey et Blanchard du leadership relationnel. Ce modèle s’articule autour de comportements instrumentaux et de comportements relationnels. Les premiers ont pour objectifs d’organiser et de définir les rôles des membres de l’équipe. Les seconds intègrent toutes les relations personnelles qui existent entre le manager et les employés de son groupe. En croisant les deux variables (instrumentale et relationnelle), on obtient quatre styles majeurs de leadership : diriger, persuader, participer et déléguer. Dans le style directif, le management est très encadrant et peu encourageant. Dans le style participatif, le management est peu encadrant et très encourageant.

« La matrice définit quatre cadrans, elle permet de croiser les compétences et les motivations du salarié, explique-t-elle. Par exemple, si le “fainéant” est peu compétent et peu motivé, l’action consistera à renforcer ses compétences (formation) pour augmenter sa motivation. À l’inverse, s’il est compétent mais peu motivé, il faut comprendre pourquoi : ses talents ne sont peut-être pas utilisés à 100 %, il n’est pas affecté au bon poste, etc. Il faut parfois aussi aller chercher dans l’historique de l’équipe un conflit non résolu le conduisant à se mettre en retrait. Dans ces situations où il faut redonner de la motivation au salarié pour le remettre au travail, il conviendra d’adopter un style participatif. »

La quête de sens et l’entreprenariat sont aujourd’hui les deux facteurs les plus motivants pour la nouvelle génération arrivée sur le marché du travail. Mais, pour la génération Z (c’est-à-dire toutes les personnes nées après 1997), Sandra Chauvin constate que la quête de sens dans le travail est difficile. « Ils ne trouvent pas ou peu de sens à leurs actions il est donc important de les aider en trouver de façon à les entraîner dans la dynamique de l’entreprise. Dans cette situation, le style doit être plutôt directif. »

Enfin, l’entretien de recadrage doit être constructif. Demandez-lui de quoi il a besoin pour surmonter ce comportement. Problème d’emploi du temps ? de poste ? d’attribution de responsabilités ? des objectifs trop élevés ? Des formations attendues ou des évolutions de poste qui ne sont jamais arrivées ? Remettez-vous aussi en question, le manque de résultat peut provenir d’une erreur de management.

Suivre la reprise en marche

Cette mise au point étant faite, offrez-lui une seconde chance. Vos remarques doivent désormais être suivies d’effets. Établissez un planning à court terme, dressez un plan d’action pour le remettre en selle et évaluer les progrès réalisés au cours de cette période d’observation, pendant laquelle vous le suivez de près. À l’issue de celle-ci, tirez un bilan.

« Le dirigeant doit s’assurer que le salarié recadré fait preuve de bonne volonté et constater les résultats en s’en tenant toujours aux faits, insiste Sandra Chauvin. Au début, les rendez-vous avec lui devront être réguliers, le premier doit avoir lieu rapidement, dans les quinze premiers jours. Il faut faire preuve de souplesse si les premiers efforts accomplis ne sont pas à la hauteur des espérances, et donner la reconnaissance dont ce salarié a besoin (des résultats, de l’être, sociale, au regard de son intégration dans le groupe, etc.) pour continuer à progresser, mais pas de reconnaissance matérielle (prime) dans un premier temps. » Gare aux rechutes, un suivi de six mois ne sera pas de trop pour changer durablement le comportement de ce collaborateur.

Si, après plusieurs mises au point, vous ne constatez aucune amélioration, le temps est venu de durcir le ton, d’annoncer des sanctions ou un ultimatum en évoquant la possibilité d’un licenciement. Cela peut provoquer un déclic. Certains types de personnalité aiment jouer avec les limites et ont besoin d’un tel déclencheur pour revenir dans le droit chemin.

Comment mener un entretien de recadrage 

Pour recadrer un salarié paresseux, l’entretien doit être conduit de façon à être constructif. Utilisez la méthode DESC. Son objectif ? Faire passer vos idées en quatre étapes, sans « casser » votre interlocuteur :

- D comme « description des faits ». Détaillez-lui vos observations : négligences répétées dans son travail, non-réalisation des tâches demandées, manque de réactivité, report du travail sur ses collègues, etc.

- E comme « explication ». Expliquez-lui en quoi son comportement est pénalisant pour lui-même.

- S comme « solutions ». Suggérez-lui des issues : évolution de ses missions, formation, etc.

- C comme « conclusion ». Capitalisez les acquis de l’entretien par un engagement : « Es-tu d’accord pour te remettre au travail ? »

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