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FORMATION MIXTE
Auteur(s) : Clothilde Barde Article est rédigé d’après l’étude Farooq M., Khan A.U., El-Adawy H., Mertens-Scholz K., Khan I., Neubauer H., Ho Y.S. Research Trends and Hotspots of Q Fever Research: A Bibliometric Analysis 1990-2019. Biomed Res Int. 2022:9324471.
La fièvre Q est une maladie zoonotique présente à l’échelle mondiale1 et considérée comme maladie à déclaration obligatoire dans certains pays2. Causée par Coxiella burnetii, une bactérie à Gram négative stricte, elle peut infecter l’humain ainsi que divers animaux3 (ruminants, oiseaux, reptiles, entre autres). Cette bactérie est présente dans les sécrétions vaginales et le placenta, l’urine, le lait et les matières fécales3,4 et se transmet principalement par inhalation d’aérosols contaminés. L’ingestion de lait cru contaminé peut également provoquer une séroconversion ; une transmission interhumaine, par transfusion de sang contaminé, contact sexuel et exposition à des sécrétions vaginales contaminées, a également été décrite.
Une première analyse bibliométrique
La maladie peut se manifester de façon aiguë ou chronique mais, comme elle est asymptomatique dans la plupart des cas, elle reste sous-déclarée. Différentes techniques sont utilisées pour son diagnostic, telles que les tests sérologiques (dosage des immunoglobulines G) et les tests moléculaires (détection de l’ADN)5. Malgré l’existence d’une grande quantité de données de recherche sur la fièvre Q, les auteurs de l’étude présentée dans cet article ont constaté qu’aucune analyse bibliométrique sur cette maladie n’était disponible. Or, la bibliométrie permet de suivre la dynamique et l’évolution des connaissances scientifiques sur un sujet donné, mais aussi d’identifier les futures directions de recherche à emprunter. C’est pourquoi ils ont analysé 3 673 publications associées à la fièvre Q (parues entre 1990 et 2019), extraites de la base de données Science Citation Index Expanded6, et ont identifié et discuté les tendances récentes des travaux menés. Cette investigation a permis de trouver 4 270 documents, dont 3 242 articles. En filtrant la recherche, 3 673 documents ont été retenus pour une analyse plus approfondie. Parmi les types de publications, seuls 2 840 articles ont été finalement sélectionnés, en raison de « la présence d’idées de recherche originales et de résultats »7.
Importance de connaître les voies de transmission et les méthodes diagnostiques
Dans les articles les plus cités, les travaux de recherche portaient en majorité sur les voies de transmission et d’excrétion de C. burnetii. Ainsi, il semblerait que le bétail joue un rôle clé dans le maintien et la transmission de la bactérie, même si la voie d’excrétion peut varier selon l’espèce atteinte. Pour les bovins et les chèvres infectés, il s’agit principalement du lait, tandis que pour les moutons, ce sont les fèces et les sécrétions vaginales. De plus, l’étude de Bouvery et al.8 a montré, après une infection expérimentale chez des chèvres, qu’il existe diverses voies d’excrétion de C. burnetii: la bactérie est retrouvée dans les sécrétions vaginales jusqu’à 14 jours après l’avortement et 52 jours dans le lait. Seules quelques chèvres excrètent C. burnetii dans les fèces avant l’avortement, mais elles excrètent toutes la bactérie après l’avortement. Une fois infectées, les chèvres peuvent connaître des troubles de la reproduction pendant au moins deux saisons de mise bas consécutives, elles continuent alors d’excréter des bactéries9. Pour détecter la présence de C. burnetii par polymerase chain reaction (PCR), les prélèvements des sécrétions vaginales doivent être privilégiés, selon les chercheurs, car le lait et les matières fécales peuvent contenir certaines substances inhibitrices de la PCR. Toutefois, en neutralisant ces dernières dans les matières fécales et en améliorant la purification de l’ADN dans les échantillons de lait, l’efficacité de la PCR peut être améliorée10. Par ailleurs, la détection moléculaire de l’ADN de C. burnetii par PCR dans les sécrétions vaginales, les fèces et le lait de brebis infectés permet de mettre en évidence le potentiel de diagnostic et de transmission de la maladie10. Dans l’expérience de PCR en temps réel (lait, fèces et sécrétions vaginales) de Guatteo et al.11, les auteurs ont rapporté que seulement 6 % des vaches infectées excrétaient la bactérie simultanément dans le lait, les fèces et les sécrétions vaginales. Par conséquent, l’identification de l’ADN à partir de différents types d’échantillons doit être préférée pour un meilleur diagnostic de la maladie. Entre outre, cette étude a démontré que les vaches infectées peuvent excréter de façon sporadique ou persistante C. burnetii. Les excréteurs persistants sont donc hautement séropositifs par rapport aux excréteurs sporadiques, c’est pourquoi ils peuvent être identifiés par des tests sérologiques, tels que Elisa11 (enzyme-linked immuno assay), selon Guatteo et al.
Des travaux de recherche à poursuivre
L’équipe de Schelling et al.12 a quant à elle prouvé que le plus haut taux d’incidence de la maladie chez l’humain a été signalé dans les zones où la densité de populations de moutons et les vitesses du vent sont plus élevées, ce qui peut supposer que la transmission par aérosol est la voie de contamination la plus importante13. Comme l’ont indiqué les chercheurs, l’implication des animaux en tant que source potentielle d’infection humaine par la fièvre Q nécessite d’améliorer la coordination entre les vétérinaires et les médecins en santé humaine. De même, la détermination des facteurs de risque associés à la transmission et au développement de la maladie ouvre la voie au développement de meilleures approches préventives et thérapeutiques. Ainsi, il ressort de cette analyse bibliométrique qu’il « pourrait être utile pour les chercheurs de collaborer avec les groupes de recherche concernés et d’inciter les postdoctorants et les doctorants à poursuivre leur carrière dans la recherche sur la fièvre Q, notamment avec de vrais travaux One Health, qui font malheureusement encore défaut ».