DOSSIER
Auteur(s) : Par Caroline Driot
Espaces lumineux et différenciés, signalétique personnalisée, mobilier chaleureux, couleurs apaisantes, isolation phonique… le confort des clients, de leurs animaux et du personnel est désormais un élément incontournable à prendre en compte dans l’aménagement intérieur des cliniques vétérinaires. De l’accueil au chenil en passant par la salle d’attente, petit tour d’horizon des tendances et conseils de professionnels en la matière.
Combien de vétérinaires se sont déjà mis dans la peau d’un client en franchissant la porte d’entrée de leur cabinet ? Corinne Dalaigre, fondatrice d’Atelier C, une agence de décoration d’intérieur, conseille cette expérience simple, mais riche d’enseignements : « Que ressent-on quand on entre ? A-t-on envie de rester ? » Pour cette déléguée commerciale reconvertie, « l’esthétique des locaux parle à l’inconscient des visiteurs et conditionne leurs préjugés sur le personnel ».
Agencer l’accueil et la salle d’attente
Mieux vaut donc soigner la première impression, autrement dit l’accueil et la salle d’attente. Les vétérinaires ne s’y trompent pas : « ils priorisent clairement ces deux secteurs dans les projets d’agencement et d’aménagement », confirme Charlène Bourriaud, de la société Athex. Avec un mot d’ordre : le confort des clients et de leurs animaux.
La première étape consiste à bien dimensionner et organiser les espaces. « Nous tenons compte de l’affluence, mais aussi du nombre de personnes qui travaillent en même temps, précise Clarisse Poirier, designeuse pour Athex. Le but est de prévenir les situations stressantes, comme la cohue au comptoir ou les interactions entre animaux ». Exigée par le programme Cat Friendly Clinic, la séparation des espèces en salle d’attente est ainsi largement entrée dans les mœurs, de même que l’installation de supports en hauteur pour les chats ou les NAC.
Structurer des espaces apaisants et confortables
Dans un second temps, les phases d’aménagement et de décoration visent à transformer l’accueil et la salle d’attente en espaces apaisants et confortables. Un objectif aussi esthétique que pragmatique. « La clinique représente un véritable outil de communication à destination des clients, estime Corinne Dalaigre. Et des propriétaires détendus, ce sont des animaux plus calmes et manipulables pour les vétérinaires et les auxiliaires spécialisés vétérinaires [ASV]. »
Ainsi, le mobilier en bois adopte des formes arrondies pour un effet plus chaleureux. Sur les murs, les motifs d’inspiration végétale s’associent aux teintes pastel, qui renvoient une impression de douceur. La signalétique joue également un rôle essentiel. Elle rassure les clients en leur permettant de s’orienter dès leur arrivée, et son aspect décoratif contribue à affirmer l’identité de la structure. Les logos des cliniques peuvent ainsi être déclinés en éléments de signalétique, pour un rendu personnalisé et harmonieux.
In fine, les espaces accueillant du public doivent refléter l’état d’esprit du personnel. « Il faut de la cohérence entre l’aménagement et la décoration d’une part, et le caractère de l’équipe soignante d’autre part, insiste Corinne Dalaigre. Cela sécurise les propriétaires de constater que les préjugés formés par leur inconscient sont conformes à la réalité. »
Créer un cocon autour de l’animal
Au-delà de l’accueil et de la salle d’attente, les préoccupations esthétiques cèdent la place à d’autres priorités : le bien-être animal et le confort d’usage. En ce qui concerne le premier, « l’objectif est de créer un cocon autour de l’animal », explique Charlène Bourriaud. Selon elle, les deux éléments clés pour réduire le stress dû aux interactions proches ou à distance sont l’agencement et l’isolation phonique des locaux.
En hospitalisation, la séparation physique du chenil et de la chatterie est entrée dans les habitudes. D’autres solutions sont envisageables quand la place fait défaut : cloisonnement partiel, orientation des cages évitant les vis-à-vis entre animaux. Plus soucieuses du bien-être des espèces accueillies, les dernières générations de cages d’hospitalisation connaissent par ailleurs un succès croissant. Intégrant une tablette fixée à la paroi, certaines permettent par exemple aux chats de se percher. Isabelle Metz, architecte et fondatrice de Véto Concept, a envisagé une autre astuce : des circuits d’éclairage différenciés, associant un interrupteur général et des lampes individuelles. Ces dernières, tamisées et ciblées sur les cages, permettent de soigner un animal la nuit sans déranger les voisins.
Envisager une salle de visite
En dépit de ces progrès, les chenils ou les chatteries restent des lieux de soins, sans vocation à recevoir du public. Pourtant, les visites représentent une demande forte des clients et un bénéfice pour les patients. Des salles y sont ainsi destinées dans quelques structures récentes. Pour Isabelle Metz, « 4 mètres carrés suffisent à accueillir un moment privilégié entre l’animal hospitalisé et son propriétaire. La décoration doit être chaleureuse ; il faut également prévoir une fenêtre sur l’extérieur, sécurisée pour éviter les fuites. Question ameublement, un canapé et une petite table pour poser les caisses de transport font l’affaire ». Dans un même souci du lien entre l’animal et son propriétaire, certaines salles de consultation peuvent être aménagées spécifiquement pour les euthanasies. Des sièges confortables permettent ainsi aux clients de se recueillir un moment, et un accès direct à l’extérieur leur épargne une sortie par l’accueil.
Privilégier le confort d’usage
Outre le respect du bien-être des patients et des clients, l’agencement et l’aménagement des établissements vétérinaires intègrent désormais un élément fondamental : le bien-être du personnel. « En tant qu’architecte, ma mission consiste à concevoir un espace de travail qui privilégie le confort d’usage de tous, affirme Isabelle Metz. Je discute avec les vétérinaires et les ASV de leurs besoins et de leurs contraintes. »
Les professionnels interrogent aussi les habitudes de chacun. Certains vétérinaires effectuent la plupart des actes médicaux en salle de consultation, alors que d’autres privilégient la salle de soins ou de préparation. L’agencement et l’aménagement doivent en tenir compte, et faciliter le quotidien. « On manque toujours de rangements, estime l’architecte. Ils doivent être suffisamment nombreux et accessibles pour y mettre documents, matériel médical et accessoires individuels, comme les laisses ou les colliers. En salle d’hospitalisation, je conseille de multiplier les prises électriques afin d’éviter les nœuds entre les câbles des pompes à perfusion et des matelas chauffants. »
Veiller à la qualité de vie au travail
Plus fonctionnels, les établissements vétérinaires se veulent aussi plus conviviaux. De la salle de pause à la « minicafétéria », les espaces de repos s’adaptent à la taille des structures. Avec la pandémie de Covid-19 et les confinements successifs qu’elle a imposés, les vétérinaires ont pris conscience du temps passé sur leur lieu de travail. « La crise sanitaire a accentué une dynamique à l’œuvre dans de nombreux secteurs d’activité : l’aménagement des locaux professionnels en espaces où il fait bon vivre et travailler », relève Corinne Dalaigre.
À l’instar des clients, le personnel est sensible à l’esthétique des locaux et à l’ambiance qu’ils dégagent. À l’heure où le recrutement de nouveaux collaborateurs s’apparente à une véritable opération séduction, mieux vaut mettre toutes les chances de son côté.
Tristan Arrachepied (T 95)
Vétérinaire à Joué-les-Tours (Indre-et-Loire)
Nous ne regrettons ni le temps ni l’argent investis
Jusqu’en septembre 2021, nous exercions dans des locaux peu pratiques, vieillissants et mal isolés. Le déménagement dans notre nouvelle clinique a eu des retombées remarquables ! En consultation, les animaux sont plus calmes, moins agressifs. En hospitalisation, ils retrouvent l’appétit plus rapidement et s’alimentent mieux. Les chats ne sont plus terrés au fond des cages. L’effet s’est également fait sentir sur le personnel : nos ASV se sont véritablement approprié les lieux, elles sont plus heureuses et s’investissent encore plus dans leur travail.
Pour moi, ces résultats reposent d’abord sur l’aménagement intérieur. Sobre et chaleureux, il renvoie une impression d’harmonie, notamment grâce à la signalétique personnalisée. Les salles d’attente sont lumineuses et confortables, et les locaux sont conçus pour limiter les contacts entre animaux. Par exemple, les clients accèdent aux consultations par le couloir qui dessert la salle d’attente, et ressortent par un couloir opposé qui donne sur l’espace de vente et d’encaissement. Autre point clé : le confort thermique. La climatisation réversible régule efficacement la température en toute saison. Nous l’avons constaté cet été : quand il fait 40 °C dehors, maintenir une température de 25 °C à l’intérieur aide tout le monde à rester détendu ! Enfin, nous avons soigné l’isolation phonique des locaux en posant de la laine de roche sur toutes les cloisons et les faux plafonds. Résultat : chaque pièce donne l’impression d’être dans une bulle, préservée des cris ou des aboiements des voisins.
Au-delà du confort, cette nouvelle clinique est aussi très fonctionnelle. Chacun des six vétérinaires dispose notamment d’une salle de consultation, aux dimensions suffisantes pour examiner les grands chiens au sol, et avec un accès rapide au laboratoire ou aux salles d’examen. Nous avions longuement réfléchi entre associés en amont du projet, et nous nous sommes entourés de spécialistes de la construction, de l’agencement et de l’aménagement des établissements vétérinaires. Nous ne regrettons ni le temps ni l’argent investis : depuis le déménagement, la fréquentation a augmenté de 10 % et les anciens clients sont pleinement satisfaits.
Cécile Vézier (Liège 05)
Vétérinaire à Évaux-les-Bains (Creuse)
Les locaux renvoient une image à la fois sérieuse et familiale
J’ai ouvert mon cabinet il y a sept ans dans une maison d’habitation que j’ai rénovée et aménagée. J’exerce seule, avec une ASV, auprès d’une clientèle familiale. J’ai récemment fait appel à une décoratrice d’intérieur pour rénover la pièce qui sert d’accueil et de salle d’attente et lui donner un aspect plus professionnel et moins provisoire. Les locaux étaient déjà spacieux, confortables et lumineux mais, dans un souci d’économie, j’avais opté lors de mon installation pour du mobilier basique et une décoration assez impersonnelle. Là, j’ai bénéficié des conseils d’une professionnelle pour la disposition des meubles et les associations de couleurs.
Fabriquée sur mesure, la banque d’accueil a été placée au centre de la pièce. Cela permet de séparer les espaces d’attente pour les chiens et les chats. Aux murs, les teintes naturelles apportent un côté végétal. Globalement, les locaux font plus rangés. Ils renvoient une image sérieuse, tout en conservant l’ambiance « comme à la maison » qui me tenait à cœur. Les clients apprécient. Côté budget, j’ai limité les frais en effectuant la plupart des travaux. Et la liste d’achats établie par la décoratrice, avec les références précises des produits, m’a permis de gagner du temps.
Thierry Azoulay (L 88)
Vétérinaire à Strasbourg (Bas-Rhin)
Nous nous sommes inspirés de différentes cliniques pour concevoir les espaces
Notre nouvelle clinique de référés a ouvert ses portes mi-septembre. Nous avons été accompagnés dans sa conception par l’une de nos clientes, architecte de profession. Côté agencement et aménagement, nous avons mis un point d’honneur à concevoir une clinique agréable pour le personnel afin de préserver la bonne humeur et l’entente au sein de l’équipe. Nous passons beaucoup de temps au travail, il est donc important de s’y sentir bien ! Par exemple, les nouveaux locaux comportent un grand réfectoire, une salle de sport, une terrasse, mais aussi une bibliothèque où les vétérinaires peuvent consulter des ouvrages professionnels. Nous avons également fait en sorte de rendre les lieux accueillants pour les clients. Le mobilier est en bois, les pièces lumineuses. La gestion du bruit a été pensée pour leur confort. Outre l’isolation phonique, nous avons dissocié physiquement le standard de l’accueil des clients, pour leur éviter les sonneries et les discussions téléphoniques.
Pour concevoir nos locaux, nous nous sommes inspirés de différentes cliniques, en France et à l’étranger, visitées en compagnie de notre architecte. Nous avons vu des établissements incroyables ! Aux États-Unis, un centre de référés possède un auditorium pour accueillir des conférences pour les vétérinaires référents. D’autres ont consacré des étages entiers à la dialyse ou à la cardiologie. En Suède, certaines cliniques mettent un sauna à disposition du personnel. Nous avons réuni les idées qui nous semblaient pertinentes et adaptables à notre projet.
Agencement ou aménagement ?
L’agencement désigne l’action d’organiser un espace (dimensions, disposition des pièces) en vue d’utiliser chaque zone de façon optimale.
L’aménagement consiste à choisir le mobilier et les accessoires (dont la signalétique) à installer dans des locaux préalablement agencés.
Les bases d’une construction réussie
En termes de construction, Johann Le Guillerm, directrice de projets chez Le Guillerm Constructions, délivre quelques conseils.
Choix du terrain :
- accessible et sans pente pour minimiser les coûts de construction ;
- suffisamment vaste pour différencier les espaces d’accueil et de livraison, construire un parking et d’éventuelles extensions.
Orientation du bâtiment :
- favoriser la visibilité de la structure ;
- optimiser l’exposition au soleil pour profiter de ses apports calorifiques gratuits en hiver ;
- tirer parti des masques solaires naturels, ces éléments (arbres, reliefs) qui dispensent de l’ombre et limitent le recours à la climatisation en été.
Confort thermique et phonique :
- installerer des protections solaires (auvent, brise-soleil) ;
- intégrer des ventilations double-flux performantes (meilleure qualité de l’air intérieur, récupération de chaleur en hiver et moindre consommation énergétique) avec des gaines dotées de pièges à sons pour limiter la transmission des bruits.
Confort d’usage :
- rendre les pièces aveugles plus chaleureuses en posant des portes intérieures vitrées ;
- utiliser des matériaux finis d’usine, plus facilement nettoyables et résistants à la désinfection ;
- respecter les normes d’accessibilité pour tous les espaces qui accueillent du public (accueil, attente, consultation).
Quand la place manque
Créer un espace cat friendly, développer un service qui nécessite des appareils volumineux, tel que l’imagerie ou la physiothérapie, tout en restant dans les mêmes locaux, peut relever du casse-tête. C’est pour répondre à ce besoin que 4Dfordev a imaginé un concept novateur : la gamme Cubiovet. Déclinées en plusieurs versions – Cat, Physio, Scan, Chenil et bientôt Horse –, ces extensions sont conçues grâce à un logiciel 3D, fabriquées hors site (donc sans les désagréments d’un chantier et écoresponsable), livrées et installées en 48 heures clé en main. Il est ainsi possible de proposer des services supplémentaires, pour peu que la structure dispose d’un terrain. « Il est souvent difficile de trouver des artisans qui acceptent de travailler à la création d’une petite surface. Cubiovet permet de s’affranchir de cette difficulté », témoigne Arnaud Duchêne, directeur du développement. Ce concept offre également la possibilité de repenser les locaux existants. « Par exemple, Cubio Chenil libère de la place pour le back-office, tout en offrant un espace d’hospitalisation qui tient compte de l’isolation phonique, entre autres », poursuit-il.