Gérer les retards de vaccination - La Semaine Vétérinaire n° 1951 du 01/07/2022
La Semaine Vétérinaire n° 1951 du 01/07/2022

Prévention

FORMATION CANINE

Auteur(s) : Laurent Masson

D’après la conférence de consensus du Groupe d'étude en médecine préventine (Gemp), par Ludovic Freybruger et Vincent Thary, lors du congrès de l'Association française des vétérinaires pour animaux de compagnie (Afvac), à Bordeaux en novembre 2021.

La crise sanitaire a été l’occasion de réfléchir sur les bases des protocoles de vaccination et celles de la reprise ou non d’une primovaccination en cas de retard. Pour cela, il convient de se remémorer les caractéristiques des vaccins (réplicatif ou non réplicatif, adjuvé ou non à l’aide d’hydroxyde d’aluminium, de dérivés de saponines, d’adjuvants huileux), les conditions de mise en place de l’immunité (OI) et de la durée de l’immunité (DOI).

Considérer les caractéristiques des vaccins

Les vaccins réplicatifs (vivants atténués) se multiplient et se disséminent dans l’organisme, induisent une réponse généralement rapide (une seule injection de vaccins réplicatifs s'ils sont injectés après l'âge de 6 mois) et durable, mais ils sont sensibles aux anticorps d’origine maternelle. La période critique vaccinale est lorsque l’animal n’est plus protégé par les anticorps de la mère et ne l'est pas encore par sa propre immunité.

Les vaccins non réplicatifs ne se multiplient et se ne disséminent pas dans l’organisme. Ils nécessitent généralement la présence d’adjuvants (Letifend est par exemple un vaccin non réplicatif non adjuvé) ; ils sont moins sensibles aux anticorps d’origine maternelle. L’induction de l’immunité consiste en deux injections espacées de 3 à 5 semaines (c’est-à-dire 4 semaines avec une tolérance d’une semaine avant et après) et une troisième un an après la deuxième pour maintenir l’immunité. Le maintien de la mémoire immunitaire est obtenu avec une injection en fonction de la DOI avec une tolérance généralement plus faible dans le retard entre deux rappels.

Pour les vaccins vectorisés (par canarypoxvirus par exemple), la réponse immunitaire induite se rapproche de celle d’un vaccin réplicatif, même s’il n’y a pas de réplication au sein de la cellule (les antigènes protéiques sont produits par la cellule et stimulent plus longuement l’immunité.)

En outre, le système immunitaire devenant totalement mâture à 6 mois, la réponse immunitaire sera d’autant meilleure que le chiot ou le chaton sera vacciné tardivement.

Voie d'immunisation

La voie d’immunisation a également son importance. Lors d’injection sous-cutanée (SC) ou intramusculaire (IM), la réponse est systémique et il y a une sensibilité des vaccins notamment réplicatifs à l’immunité d’origine maternelle. 

Lors d'administration intranasale ou orale, il y a une réponse de la muqueuse ainsi que systémique, cela permet de lutter contre l’agent pathogène à la porte d’entrée et sans interaction avec les anticorps maternels. 

Contextualiser, informer

Concernant la durée d’immunité, certaines données se sont pas démontrées scientifiquement par manque d’intérêt immédiat, parce que les modèles infectieux sont complexes ou parce qu’il s’agit d’études à réaliser à grande échelle au niveau de la population. Les recommandations présentées reposent sur celles WSAVA et des avis d’experts nationaux. Pour l’utilisation des recommandations, il est commandé d’informer le propriétaire et d’obtenir son consentement.

Enfin, il faut se rappeler qu’il existe trois types de protections vaccinales : une protection contre l’infection (l’animal ne peut pas être malade), une autre contre la maladie (l’animal peut être malade mais présente une forme atténuée) et une dernière contre l’excrétion. Il faut s’en souvenir pour comparer les vaccins : un vaccin prouvant son efficacité contre l’infection n’a en effet pas besoin de prouver son efficacité contre les deux suivantes. Un vaccin protégeant contre la maladie, l’animal peut tout de même présenter des symptômes atténués.

Recommandations

Parvovirose, maladie de Carré, hépatite de Rubarth

Chez le chien (tableau 1), les vaccins essentiels contre la parvovirose, la maladie de Carré et l’hépatite de Rubarth confèrent une protection contre l’infection avec une immunité stable et durable (plusieurs années, jusqu’à 9 ans). Chez le chiot, les premières injections sont réalisées à 8, 12 et surtout 16 semaines. Puis la visite pubertaire peut être l’occasion de réaliser le rappel devant avoir lieu entre 6 mois et un an d’âge. Par la suite, un retard de vaccination ne pose aucun problème puisqu’une seule injection suffit chez l’adulte. Concernant la parvovirose, il est recommandé d'effectuer un rappel annuel chez les animaux vivant en collectivité (élevage, meute ou refuge).

Leptospirose

Concernant la leptospirose, qui fait partie des valences essentielles au niveau national, l’immunité se met en place assez rapidement après la deuxième injection réalisée après 12 semaines révolues (une 3e injection est nécessaire si la 2e est faite avant 12 semaines). La durée d’immunité est de 12 mois, puis de 15 à 18 mois à partir de la 4e dose (soutien de l’immunité). La vaccination à 16 semaines n’est pas indispensable, mais il est recommandé de vacciner le plus tardivement possible.

Rage

La vaccination contre la rage est obligatoire pour voyager, mais elle peut s’avérer nécessaire quand l’animal est exposé à un animal enragé (risque d’euthanasie). Il convient de bien respecter l’âge minimum de 12 semaines ou de 3 mois selon les vaccins.

Leptospirose, leishmaniose, piroplasmose, Lyme

Le système immunitaire donne une très bonne réponse immunitaire antivirale, une moins bonne contre les bactéries, et encore une moins bonne contre les parasites. C’est pourquoi les vaccins contre la leptospirose, la leishmaniose, la piroplasmose et la maladie de Lyme nécessitent un rappel annuel. Un traitement antiparasitaire externe est recommandé en complément : ces maladies nécessitent d’abord une gestion parasitaire avant une gestion vaccinale.

Herpèsvirose et calicivirose

Chez le chat (tableau 2), les vaccins herpèsvirose et calicivirose procurent une diminution des symptômes uniquement, alors que celui du typhus protège contre l’infection. Vacciner tous les ans contre le coryza n'apporte pas de bénéfice. En cas de dépassement des trois ans après la dernière injection, il convient de réaliser deux injections pour reprendre le protocole de vaccination.

Leucose

La primovaccination contre la leucose doit être réalisée avec le même vaccin au minimum pour les deux premières injections et idéalement pour la troisième un an plus tard. Le maintien de l’immunité est obtenu ensuite avec un rappel tous les trois ans.

Chlamydiose

La vaccination contre la chlamydiose n’est intéressante qu’en collectivité ou pour éviter le risque de développement chez un chat exposé à son plus jeune âge (cela peut sous-entendre qu’il y a eu des cas cliniques dans l’élevage).

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