Premières observations sur un nouveau système d’élevage plein air - La Semaine Vétérinaire n° 1944 du 13/05/2022
La Semaine Vétérinaire n° 1944 du 13/05/2022

Filière cunicole

FORMATION MIXTE

Auteur(s) : Tanit Halfon

Face à une demande sociétale pour la fin de l’élevage en cage, une équipe de chercheurs1 s’est penchée sur l’évaluation d’un nouveau système d’élevage de lapins ayant accès au plein air. Comme il est rappelé dans l’étude, la majorité des systèmes de production utilisent actuellement des cages. Des modèles de cages avec enrichissement existent, mais l’accès à un extérieur est limité à certaines productions de type bio ou label rouge. Selon les données disponibles, s’il apparaît un bénéfice sur le comportement animal avec la possibilité pour les lapins d’exprimer ses comportements naturels, ces systèmes de productions type bio ou label rouge auraient des conséquences sanitaires du fait de l’exposition des animaux à leurs excréments, et limiteraient aussi leur croissance. Le nouveau système développé par les chercheurs est un abri mobile de 30 m2 contenant à l’intérieur huit parcs à fond en caillebotis plastique de 2 m2 avec plateforme. Chaque parc donne face à une trappe permettant l’accès à un parcours extérieur herbagé. Le bâtiment est mobile pour limiter l’accumulation des déjections sur le parcours et permettre un délai de retour au même endroit de plusieurs mois.

Une activité augmentée

299 lapins sont inclus dans l’étude, répartis en quatre groupes : deux d’entre eux ont un accès continu à un parcours herbagé extérieur de 23 m2 à partir de 37 jours d’âge (en post-sevrage) ; tandis que les deux autres sont élevés uniquement en intérieur. Pour chaque groupe, deux niveaux de densité animale sont testés : une densité haute avec 17 lapins/m2 en intérieur (norme Afnor actuelle), et une densité plus basse avec 9 lapins/m 2. Le parcours extérieur est protégé par un grillage métallique doublé d’un système électrifié ainsi qu’un filet de volière permettant d’empêcher toute prédation. Tous les animaux sont nourris avec un aliment commercial pour lapins en croissance, contenant de la robénidine pour la prévention des coccidioses, mais pas ad libitum. Il ressort que les lapins avec accès à l’extérieur ont un poids plus faible à la fin de l’expérimentation, de même une vitesse de croissance réduite de 13 %, ce qui peut être attribué à plus d’exercice physique. Cela va dans le sens des données : les lapins sont en effet plus actifs en extérieur (sautiller, se lever, brouter, interactions…) qu’en intérieur, et ce quelle que soit la densité du groupe. Ceci dit, l’espace le plus occupé par les animaux ayant accès au parcours est en intérieur, sous les plateformes, l’extérieur n’arrivant qu’en deuxième position. Cela peut s’expliquer par le fait que les animaux considèrent cet espace comme un abri et que dans l’après-midi les animaux sont le plus souvent observés à l’intérieur. Le taux de mortalité tend à être plus élevé pour les animaux avec accès à l’extérieur, cependant sans différence statistiquement significative.

Des lapins plus peureux ?

Au fil du temps, les lapins mettent plus de temps à aller à l’extérieur (50 secondes le premier jour vs 10 minutes au 31e jour), et sont moins nombreux : à ce stade, il est difficile d’en tirer des conclusions, mais la réduction de la biomasse des pâturages (l’abri n’a pas été déplacé) peut être une explication. À ce sujet, quel que soit le jour de l’observation, les femelles sont plus fréquemment à l’extérieur que les mâles. Enfin, les lapins n’ayant pas accès à l’extérieur sont plus nombreux à toucher la main d’un expérimentateur connu. Ceux avec accès à l’extérieur sont moins réactifs au premier contact avec un nouvel objet et moins nombreux à s’en approcher. Une hypothèse peut être que l’accès à un extérieur donne des animaux plus peureux vis-à-vis d’autres stimuli pouvant être assimilés à des prédateurs. Au final, si l’accès à un extérieur permet aux animaux d’exprimer leurs comportements naturels, il peut aussi augmenter la vigilance et/ou la peur des animaux, indiquent les auteurs. D’autres recherches sont nécessaires pour optimiser le système, notamment par rapport à la surface de pâturage offerte aux animaux, la gestion du temps d’accès à l’extérieur et le choix de leur type génétique, afin qu’ils soient plus adaptés à ces nouvelles conditions d’élevage.

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