46 recommandations pour le bien-être équin aux Jeux olympiques - La Semaine Vétérinaire n° 1944 du 13/05/2022
La Semaine Vétérinaire n° 1944 du 13/05/2022

Protection animale

ANALYSE MIXTE

Auteur(s) : Par Marine Neveux

À deux ans des Jeux olympiques de Paris, le rapport du groupe d’étude Condition animale de l’Assemblée nationale, présidé par notre confrère Loïc Dombreval, émet 46 recommandations pour garantir le bien-être des équidés.

Depuis l’automne 2021, le groupe d’étude parlementaire Condition animale présidé par notre confrère et député Loïc Dombreval a lancé une série d’auditions à l’Assemblée nationale pour améliorer les pratiques sur les épreuves d’équitation des Jeux olympiques. Le déclencheur ? Les JO de Tokyo à l’été 2021, qui ont été émaillés par plusieurs incidents et polémiques : durant l’épreuve de pentathlon, avec un cheval frappé et maltraité par sa cavalière, plus tôt, l’euthanasie d’un autre à la suite d’une blessure à un membre, enfin, l’image d’un cheval aux naseaux en sang en finale de saut d’obstacles…

À deux ans des Jeux olympiques de Paris, ce rapport vise à prévenir de telles dérives et une image délétère. « Il nous semble donc essentiel que le comité olympique 2024 prenne dès à présent des mesures fortes aux côtés de la Fédération équestre internationale (FEI) et de la Fédération française d’équitation (FFE) pour garantir la durabilité de ce sport et que l’acceptation sociétale des contraintes imposées aux athlètes équins puisse être en adéquation avec l’évolution de notre société, qui apparaît de plus en plus sensible au respect du bien-être animal » conclut le rapport.

46 recommandations

Le rapport propose ainsi 46 recommandations, certaines générales, d’autres spécifiques aux disciplines. La dernière recommandation (n°46) traduit bien l’esprit général de la démarche : « Faire des Jeux olympiques de Paris 2024 les Jeux olympiques du bien-être équin en appliquant la charte et le guide de bonnes pratiques du bien-être équin réalisés par la Fédération nationale du cheval (FNC), l’Académie vétérinaire de France (AVEF), la Fédération française d’Équitation, l’Institut français du cheval et de l’équitation ( IFCE), France Galop, le groupement hippique national (GHN) et Le Trot ».

Les premières recommandations sont d’ordre général : sur les aires de détente et l’organisation de l’hébergement des équidés, l’alimentation, la surveillance, le contrôle des embouchures et harnachements, des aides artificielles, etc.

La lutte contre toutes les formes de dopage est remise en exergue dans plusieurs recommandations. Plusieurs mesures impliquent directement le suivi vétérinaire. La recommandation n°28 entend même « systématiser l’enregistrement vidéo des contrôles vétérinaires (visite avant compétition et examens de sensibilité) pour pouvoir réitérer à la demande le contrôle des allures au ralenti en cas de suspicion de boiterie, en cas de litige ou d’accident ultérieur et en vue d’utilisation pédagogique ».

Concernant les mesures plus spécifiques aux disciplines, l’hyperflexion en dressage est bien entendu en ligne de mire. En concours de saut d’obstacles (CSO), l’approche s’attache aussi aux conditions des épreuves : avec par exemple la recommandation n° 24, qui permet d’organiser « les épreuves comportant des sauts d’obstacles en plein jour, tout en évitant les périodes les plus chaudes de la journée. Envisager des changements de planning selon la météo. »

De même en concours complet (CCE), où il est recommandé d’équiper « le parcours de cross avec 100 % d’obstacles prévus pour céder en cas de chute ou d’accroche forte du cheval. »

En pentathlon, il est recommandé de ne pas élever les obstacles à plus de 110 cm.
Un rapport qui pourrait servir de base pour d’autres évènements d’équitation à terme ? Il est intéressant pour lancer la réflexion qui ne permet plus de s’affranchir aujourd’hui de la prise en compte du bien-être équin.

Extraits des recommandations du rapport concernant les soins et contrôles vétérinaires

19. Rappeler à tous que la lutte contre le dopage équin est la priorité de toutes les compétitions internationales, et que le règlement interdit l’accès des Jeux olympiques aux chevaux ayant subi tout type de névrectomie, à tous les niveaux, qu’elle soit chimique ou chirurgicale.

20. Multiplier l’utilisation aléatoire des tests d’hyposensibilité, d’hypersensibilité et de thermographie pour contrôler au moins 10 % des chevaux après chaque épreuve. Travailler à optimiser et faire valider ces tests comme parfaitement fiables, standardisés (spécificité et sensibilité) et reproductibles en amont des Jeux olympiques 2024. Imposer un examen clinique vétérinaire et un test de contrôle antidopage sur tout cheval positif à un de ces trois tests et prévoir la disqualification du couple.

21. Faire un suivi longitudinal des chevaux en préparation pour les Jeux olympiques et prévoir des prélèvements antidopage entre 1 mois et 15 jours avant la visite vétérinaire en amont des épreuves.

22. Interdire toutes les injections intra-articulaires, quelle que soit la nature du produit, 14 jours avant le début officiel de la compétition et jusqu’à la fin des épreuves, sans dérogation possible.

23. Imposer la tenue à jour du FEI Medication Logbook (registre des soins et des traitements médicamenteux administrés au cheval tout au long de sa carrière) et présenter celui-ci lors du contrôle vétérinaire avant les épreuves.

24. Veiller à ce que tous les médicaments apportés par les vétérinaires traitants et/ou d’équipe soient bien contrôlés dès leur arrivée et à la sortie, tracés par la tenue d’un registre contrôlé, administrés exclusivement à la clinique et uniquement lorsque nécessaire par les vétérinaires traitants habilités, sous la responsabilité de la commission vétérinaire de la fédération équestre internationale (FEI).

25. Faire un appel d’offres élargi pour le choix des laboratoires d’analyses à retenir pour les Jeux olympiques, en plus des 5 établissements déjà retenus par la FEI et, le cas échéant, prévoir une phase de tests comparatifs.

26. Rendre obligatoire la vaccination contre la rhinopneumonie selon un protocole validé en amont par les instances vétérinaires responsables, en plus de l’obligation réglementaire existante contre la grippe équine pour entrer sur le site des Jeux olympiques.

Des vétérinaires auditionnés

Nombre de vétérinaires ont été auditionnés à l’occasion de ce rapport : Agnès Benamou, référente bien-être équin pour VetAgrosup, Cécile Berault et Eva Van Avermaet, respectivement membre et fondatrice du Collectif pour les chevaux, Vincent Boureau, référent bien-être animal de l’Avef, Christine Briant, ingénieure de développement et de recherche à l’IFCE, Richard Corde, président de la Ligue française pour la protection du cheval (LFPC), Nathalie Crevier-Denoix, directrice de l’unité INRAE-EnvA 957 Biomécanique et pathologie locomotrice du cheval, Jean-Marie Denoix, fondateur du Centre d’imagerie et de recherche sur les affections locomotrices équines (Cirale), Arnaud Duluard, chef du département Élevage et santé animale de l’association Le Trot, Xavier Goupil, vétérinaire fédéral en concours complet d’équitation, Charles-François Louf, président de l’Avef, Jacques Nardin, spécialisé en contrôles antidopage des animaux chez FEI, Agence française de lutte contre le dopage (AFLD) et Fédération nationale des courses hippiques (FNCH), Jérôme Thévenot, vétérinaire fédéral en CSO, et Sonia Wittreck, responsable département Livrets et contrôles de l’association France Galop.

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