Technique de prélèvement en volaille - La Semaine Vétérinaire n° 1941 du 22/04/2022
La Semaine Vétérinaire n° 1941 du 22/04/2022

Médecine aviaire

FORMATION MIXTE

Auteur(s) :

D’après une conférence du e-congrès 2021 de MSD Santé animale, « Biochimie pour les débutants : quelle place dans l’arsenal vétérinaire ? », par Daniel Venne, diplômé du Collège américain des vétérinaires avicoles, responsable vétérinaire au couvoir Scott.

La biochimie clinique n’est pas réservée qu’à la seule médecine individuelle. En aviculture, plusieurs publications scientifiques démontrent son intérêt pour évaluer les effets sur des lots d’animaux, de l’alimentation et de l’environnement. Plusieurs désordres métaboliques peuvent être mis en évidence : hypoglycémie du poussin, déshydratation, pica/cannibalisme relié à des acidoses ou manque de sodium, hypo/hypercalcémie/phosphatémie, tétanie calcique ou hyperkaliémique, stress thermique, etc. Dans ce cadre, il convient de bien maîtriser la technique de prélèvement, afin d’éviter les erreurs d’analyse.

La prise de sang doit s’effectuer au plus près du lieu d’exploitation, tout comme l’analyse. En effet, le transport des animaux et des échantillons sanguins peuvent induire des variations de mesure. De plus, la plupart des appareils portatifs de biochimie fonctionnent dans un cadre précis de température : certains, par exemple, nécessitent une phase de préchauffage de plusieurs minutes avant usage. D’autres fonctionnent à température ambiante. De manière générale, il faut faire attention à ne pas les exposer à des températures trop basses. Pour le matériel de prélèvement, le tube vert à héparine est à privilégier pour la mesure des gaz sanguins et des enzymes, cependant uniquement à héparine lithium et non à héparine sodium, cette dernière interférant avec la mesure du sodium. Un tube sec (rouge) peut être utilisé pour les enzymes (et sérologie) à condition de le centrifuger immédiatement et de réfrigérer rapidement le surnageant. Le tube à EDTA (mauve) n’est utilisable que pour l’hématologie, l’EDTA interférant avec les valeurs de calcium ionisé. De la même manière, le tube bleu à citrate sera utilisé pour la mesure des temps de coagulation, et non pour la biochimie, les citrates interférant avec les mesures de calcium. Il convient de remplir les tubes contenant un anticoagulant liquide jusqu’au trait, pour ne pas risquer d’avoir un effet de dilution de l’anticoagulant, et donc d’erreurs de mesure. À propos du matériel de mesure, il faut prendre garde à ne pas toucher les connecteurs d’électrode des appareils iStat, et à vérifier la charge des batteries pour minimiser le risque d’erreurs. Quel que soit l’appareil utilisé, attention aussi à prélever un volume d’échantillon suffisant et à éviter les bulles d’air, en particulier pour les appareils type rotor VS2.

Pour les animaux pesant plus de 160 g environ, le prélèvement pourra être réalisé facilement au niveau de la veine de l’aile. Pour les poids inférieurs, une ponction cardiaque est possible mais les animaux prélevés devront être euthanasiés du fait du risque de tamponnade cardiaque. Les ponctions veineuses sont à éviter, pour exclure tout risque de contamination par des électrolytes si le sang coule sur la peau, sauf pour le dosage du glucose, des lactates et de beta-cétones. Le sang des jeunes oiseaux comme des animaux malades étant hypercoagulable, il convient d’utiliser un tube anticoagulant pour le prélèvement, pour éviter les erreurs de mesure. Au-delà d’une semaine d’âge, et si le test est réalisé immédiatement après le prélèvement, il est possible de se passer du tube anticoagulant. Un prélèvement de sang artériel est théoriquement envisageable mais plus difficile. Il est plutôt utilisé dans les projets de recherche, pour mesurer la saturation en oxygène ou en gaz sanguins artériels. Enfin, il convient d’éviter le guillotinage car il y a un risque de contamination par le bol alimentaire, ce qui peut induire en erreur ; il existe en particulier un risque de surestimation du phosphore ou du potassium sanguin.

Il n’existe pas de règle précise à propos du nombre d’animaux à prélever. Toutefois, étant donné que la génétique, la source d’alimentation/abreuvement et les systèmes de ventilation et de chauffage sont souvent relativement uniformes, il est possible de prélever un nombre limité d’animaux pour certains paramètres. En général, il convient de faire au moins quatre analyses pour pouvoir faire des comparaisons (quatre malades, quatre témoins).

Une interprétation variable

Les résultats d’analyse peuvent varier suivant l’âge de l’animal, le type de production, la race, le sexe, l’environnement (température, altitude), l’alimentation et l’eau. En matière d’âge par exemple, les jeunes oiseaux présentent de grandes variations durant les six premières semaines de vie. Pour le type de production, une poule pondeuse présentera une concentration de calcium plus élevée qu’un poulet de chair. Pour la race, la sélection génétique peut influencer les résultats d’analyse biochimique, il est donc recommandé de se créer une base de données d’oiseaux normaux par race. En pratique, il s’agit d’évaluer en particulier l’équilibre acido-basique de l’animal en contrôlant le pH sanguin afin d’identifier un état d’acidose ou d’alcalose (pH normal est de 7,35 à 7,45), puis le pCO2 (mmHg) et les bicarbonates (HCO3-) pour statuer sur l’aspect respiratoire ou métabolique. Cela se fait en lien avec l’analyse des électrolytes de l’alimentation des animaux. En effet, la balance électrolytique a un effet majeur sur l’équilibre acide base des oiseaux, et sur la survie des cellules. Une balance électrolytique de 220-250 mEq permet de conserver un équilibre acido-basique. En cas de déséquilibre de la balance, l’oiseau va compenser au détriment de ses performances. Les deux ions les plus importants dans la santé des volailles sont le calcium ionisé et le potassium.

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