Les dermatoses virales félines - La Semaine Vétérinaire n° 1940 du 15/04/2022
La Semaine Vétérinaire n° 1940 du 15/04/2022

Dermatologie

FORMATION CANINE

Auteur(s) : Mylène Panizo

Conférencière

Céline Darmon, diplômée ECVD, spécialiste en dermatologie au centre hospitalier vétérinaire Frégis (94) et à la clinique Synervet (Le Grand-Quevilly, 76)

Article rédigé d’après une webconférence organisée par le GEDAC (Groupe d’étude en dermatologie des animaux de compagnie), l’AFVAC (Association des Vétérinaires pour Animaux de Compagnie) et en partenariat avec Boehringer Ingelheim, le 15 mars 2022.

Les dermatoses virales félines sont rares, mais certaines atteintes cutanées sont caractéristiques.

L’herpèsvirus 1 (FHV 1) a un tropisme principalement oculaire et respiratoire. Dans de rares cas, il est à l’origine d’une dermatite herpétiforme. Celle-ci se présente sous deux formes cliniques : la dermatite ulcérative faciale (la plus fréquente) et l’érythème polymorphe post-herpétique.

La dermatite ulcérative faciale correspond à des lésions d’abord vésiculeuses, puis érosives et ulcéreuses, provoquant des saignements, des croûtes, ainsi qu’un prurit intense. Ces lésions sont caractérisées par leurs formes en aile de papillon, elles se situent au sein d’un triangle formé par les deux canthi externes des yeux et du nez. Des lésions buccales et oculaires, ainsi que des symptômes respiratoires peuvent être associés.

Le diagnostic différentiel comprend une calicivirose, un prurit cervicofacial (d’origine allergique) et un carcinome épidermoïde. Le diagnostic de l’herpèsvirose est posé après l’exclusion des autres hypothèses et la réalisation d’examens complémentaires adaptés. Il est recommandé d’effectuer un examen histopathologique couplé à une PCR (sur cytobrosse orale et/ou conjonctivale). Le résultat de la PCR doit être interprété avec précaution : un résultat positif est à corréler avec l’intensité des signes cliniques. Un chat peut être porteur du FHV 1 sans avoir de symptôme.

L’herpèsvirus peut également, mais dans de rares cas, provoquer un érythème polymorphe post-herpétique. Il s’agit d’une dermatite érythémateuse, exfoliative, généralisée et douloureuse. Elle peut être associée à une stomatite érosive.

Le traitement de la dermatite herpétiforme fait appel à une antibiothérapie pour gérer les surinfections bactériennes. Seul le famciclovir a démontré une efficacité antivirale et une bonne tolérance chez le chat, mais il est peu disponible et coûteux. Il n’existe pas de consensus relatif à la dose (entre 40 à 90 mg/kg, une à deux fois par jour, et jusqu’à 125 mg/kg toutes les 8 heures) et à la durée du traitement (jusqu’à guérison, soit en général entre 3 et 6 semaines). La gabapentine peut être utilisée pour gérer la douleur. Toutes les molécules à action immunomodulatrice (ciclosporine, tacrolimus, oclacitinib, etc) et la corticothérapie sont formellement contre-indiquées.

Le calicivirus (FCV) est responsable de stomatite et de conjonctivite. Les lésions dermatologiques sont rares mais leurs localisations sont typiques : il s’agit d’ulcères situés au niveau du philtrum nasal avec une extension au philtrum labial.

La forme hypervirulente d’une calicivirose provoque des gonflements des membres, ainsi que des symptômes généraux. Des lésions inhabituelles peuvent être observées telles qu’une folliculite, un syndrome « patte-bouche » (lésions buccales associées à des lésions des coussinets) ainsi que des atteintes plus sévères sur la truffe, les coussinets et les mamelles (à distinguer d’un pemphigus foliacé). Des biopsies, couplées à une PCR, permettent d’établir un diagnostic de certitude. Une co-infection avec l’herpèsvirus est possible.

Le traitement comprend une antibiothérapie (pour la gestion des surinfections) et un traitement de soutien. La vaccination a une efficacité partielle. L’usage des immunomodulateurs est à éviter. Les anti-inflammatoires sont parfois conseillés en cas de formes chroniques, mais cela reste controversé.

Il s’agit d’une zoonose, l’humain pouvant se contaminer à partir d’un chat, ou d’un rat domestique, qui a été en contact avec des petits rongeurs (mulots, campagnols). C’est une maladie endémique et saisonnière, dont le pic d’incidence a lieu en automne.

La poxvirose féline est une dermatose ulcérative de la face et/ou des membres. L’atteinte initiale se situe au niveau du site de morsure. Il s’agit d’une macule, unique, érythémateuse puis ulcérative. Des surinfections (abcès, cellulite) sont possibles. Une à deux semaines après la contamination, des lésions cutanées secondaires apparaissent. Elles peuvent être multiples et réparties sur l’ensemble du corps. Ce sont principalement des macules, papules ou nodules ulcérés et prurigineux. Les symptômes généraux sont rares (des pneumonies ont été décrites) et, le plus souvent, ils sont associés à une co-infection avec le FIV ou le FeLV. Le diagnostic différentiel comprend l’herpèsvirus, un lymphome cutané et un pemphigus foliacé.

Il existe deux dermatoses associées au FeLV : les cornes cutanées et la dermatose à cellules géantes. Les cornes cutanées, uniques ou multiples, se développent sur les coussinets ou la face. Elles ne sont pas pathognomoniques d’une infection au FeLV. Elles peuvent en effet être idiopathiques, ou associées à un carcinome épidermoïde, à une kératose actinique (forme précancéreuse du carcinome épidermoïde) ou à des papillomes viraux.

La dermatose à cellules géantes se traduit par des lésions érosives et ulcératives qui peuvent s’étendre au niveau de la face ou des membres. Cette forme est très rare et son lien de causalité avec le FeLV n’est pas totalement établi. Le diagnostic passe par un examen histopathologique.

Des vascularites sur le pavillon auriculaire et les extrémités ont été observées dans de très rares cas chez des chats atteints du FeLV.

Les pododermatites plasmocytaires sont associées dans 60 % des cas à un FIV. Elles se traduisent par des gonflements douloureux d’un ou plusieurs coussinets, qui évoluent vers une ulcération. Le FIV peut provoquer également une chondrite plasmocytaire, qui correspond à un gonflement douloureux et symétrique des pavillons auriculaires, qui finissent par s’épaissir et se déformer. Enfin, une folliculite murale peut être observée chez des chats atteints de FIV.

En raison de l’immunodépression qu’ils induisent, le FIV et le FeLV entraînent surtout des dermatoses infectieuses (bactériennes et/ou fongiques) secondaires.

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