Conduites à tenir face une fièvre chez un cheval - La Semaine Vétérinaire n° 1938 du 29/03/2022
La Semaine Vétérinaire n° 1938 du 29/03/2022

Médecine interne

FORMATION MIXTE

Auteur(s) : Marine Neveux

D’après l’intervention de Jean-Luc Cadoré, dipl. ECVIM-CA, PhD, HDR, professeur à VetAgro Sup, sur les fièvres isolées présentée le 25 novembre 2021 lors des 6es Rencontres du Respe (réseau d’épidémiosurveillance en pathologie équine) à Caen (Calvados).

Des problèmes sont soulevés par la découverte d’une fièvre à la fois pour le détenteur, le propriétaire et l’utilisateur, mais aussi pour le vétérinaire. Il faut systématiser la prise de température standardisée et faire attention aux conditions dans laquelle elle est effectuée rappelle le professeur Jean-Luc Cadoré. Il souligne également qu’il ne faut pas sous-estimer une augmentation de la température corporelle en l’absence de causes évidentes de troubles de la thermorégulation dus à l’environnement. Il convient évidemment de tenir compte des antécédents pathologiques mais surtout du contexte épidémiologique.

Pour le détenteur, la difficulté est d’envisager qu’un syndrome fébrile suspecté chez un cheval puisse être un début d’évolution d’une maladie générale potentiellement contagieuse, et en particulier respiratoire. La question doit alors être posée de l’isolement du cheval. Idéalement, pour bien l’isoler, il faut déplacer les chevaux sains plutôt que d’emmener le cheval malade ailleurs. Dans la réalité, ce principe n’est pas toujours facile à appliquer bien entendu.

Pour le clinicien, la difficulté est d’abord d’objectiver la réalité clinique : s’agit-il d’un épisode fébrile autorésolutif ou pas ? S’agit-il de l’incubation d’une maladie infectieuse qui n’est pas encore cliniquement exprimée ? En fonction du contexte épidémiologique, de la médecine individuelle ou collective, les suspicions doivent être bien raisonnées.

En outre, ce premier épisode fébrile n’est peut-être que le signe avant-coureur d’une affection qui dira son nom dans 3 ou 6 mois, en entraînant une fièvre récurrente, ondulante, cyclique, ou le début d’un souci qui posera un réel problème diagnostic à l’avenir.

Pour le clinicien, il convient de tenir compte du contexte clinique et épidémiologique, et de se poser certaines questions : doit-on toujours aller vers un diagnostic étiologique, est-il réellement obligatoire ? Oui, incontestablement, pour la surveillance des maladies infectieuses ; la prise en charge systématique est-elle exigée, nécessaire ou opportune ? Certains épisodes peuvent être autorésolutifs. Ainsi, la réaction ne sera pas la même s’il est possible de faire surveiller le cheval, s’il n’y a pas de risque que le cheval fasse une babésiose dans le cas d’un contexte épidémiologique favorable, etc. En dehors de ces conditions, est-ce que le clinicien doit attendre d’avoir 3 prises de température sur 72 heures ? Est-ce qu’il n’a pas intérêt s’il suspecte une hémolyse, de quelque nature qu’elle soit et quelle soit la cause, à en rechercher les signes dans les urines ? Le professeur Jean-Luc Cadoré estime que le recours aux analyses d’urine est insuffisant chez le cheval, or il est intéressant, en premier lieu, de rechercher des signes d’hémolyse par ce biais.

Il rappelle aussi qu’il faut se méfier d’un diagnostic qui serait plus un refuge qu’une réalité médicale, comme cela peut être le cas avec les infestations parasitaires. Le problème posé au clinicien est souvent celui des examens paracliniques demandés trop tôt et dont les résultats arrivent parfois trop tard.

Chez le cheval, la toile de fond infectieuse domine incontestablement, mais un grand nombre d’autres maladies peuvent entraîner un syndrome fébrile, de façon isolée au début et parfois associée à d’autres signes ensuite, comme les maladies néoplasiques (en particulier le lymphome), les maladies inflammatoires non infectieuses ou à médiation immunitaire et les maladies infectieuses.

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