Comment gérer sa grossesse en tant que praticienne libérale ? - La Semaine Vétérinaire n° 1937 du 22/03/2022
La Semaine Vétérinaire n° 1937 du 22/03/2022

Droit

ENTREPRISE

Auteur(s) : Christelle Fournel

Chaque période avant, pendant et après la grossesse se prévoie et s’organise. Il convient avant tout de bien consulter son contrat de prévoyance avant d’être enceinte, et de le modifier le cas échéant, ainsi que d’anticiper ses besoins de trésorerie durant l’arrêt d’activité afin de passer les premiers mois de maternité dans les meilleures conditions possibles.

Quand une vétérinaire à son compte décide d’avoir des enfants, l’anticipation et l’organisation sont les maîtres mots. La gestion de la clinique en son absence, sa santé, et celle du bébé, ainsi que le confort financier constituent les trois préoccupations majeures dès que le projet prend forme.

Pour parer au pire, les conditions du contrat de prévoyance sont à considérer en priorité.

La différence de rémunération entre le revenu actuel et les indemnités versées par la CPAM est-elle bien prise en charge ? Certains contrats considèrent le revenu de l’année précédente, d’autres proposent un forfait, qu’il conviendra donc de privilégier.

Comment mon contrat de prévoyance assure-t-il la grossesse pathologique ? Parfois, l’assureur l’exclut totalement. Dans d’autres cas, la grossesse pathologique est totalement prise en charge ou bien dans un certain cadre. La grossesse pathologique est définie comme « un phénomène pathologique médicalement constaté et traité sans considération socioprofessionnelle ou de convenance personnelle ». Ce peut être une menace d’accouchement prématuré nécessitant une hospitalisation et/ou un traitement médical utéro-relaxant (ouverture anormale du col décelé par échographie), une grossesse extra-utérine, une fausse couche spontanée, un môle hydatiforme, un choriocarcinome, une toxémie gravidique ou une hypertension artérielle gravidique, un hématome rétroplacentaire ou encore un placenta prævia.

Enfin, il faudra prendre garde au délai de carence, qui peut être de 1 mois après l’installation.

Tout d’abord, si elles justifient de 10 mois d’affiliation à la date prévue de l’accouchement, les futures mères ont droit aux prestations maladie-maternité. Celles-ci sont identiques à celles attribuées aux salariées, soit, par exemple, 70 % pour les honoraires des praticiens, 60 % pour les honoraires des auxiliaires médicaux et les frais d’analyse, 80 % pour l’hospitalisation jusqu’au 30e jour, 100 % pour l’hospitalisation à partir du 31e jour,… La mutuelle santé (ou complémentaire santé) peut prendre en charger le reliquat en fonction du contrat signé.

Depuis le 1er janvier 2020, les vétérinaires sont affiliés au régime social des indépendants (RSI), qui gère le régime maladie maternité. Cela ouvre droit à deux types d’indemnités, l’allocation forfaitaire de repos maternel et l’indemnité journalière forfaitaire d’interruption d’activité, qui seront versées à la condition d’arrêter totalement son activité professionnelle au moins pendant 8 semaines, dont 6 après l’accouchement.

L’indemnité journalière forfaitaire d’interruption d’activité correspond au maximum à 1/60e du plafond mensuel de la sécurité sociale (3 428 € au 1er janvier 2022), donc 56,32 € par jour et 1 689,60 € par mois. La grossesse pathologique donne droit à 30 jours d’indemnités supplémentaires. Attention, lorsque le revenu d’activité annuel moyen sur les trois dernières années civiles avant l’arrêt est inférieur à 10 % de la moyenne des valeurs annuelles du plafond de la sécurité sociale (PASS, soit 3 428 € au 1er janvier 2022), le montant de cette allocation est de 5,64 € par jour pour un congé débutant en 2022.

L’allocation forfaitaire de repos maternel est versée en deux fois : 1 688,50 € à la fin du 7e mois de grossesse et 1 688,50 € après 8 semaines de cessation d’activité, soit 3 428 €. Là encore, lorsque votre revenu d’activité annuel moyen sur les trois dernières années civiles est inférieur à 10 % du PASS, le montant de cette allocation est réduit à 342,80 €.

À noter qu’en cas de naissance prématurée avant le début du congé prénatal, le congé de maternité débute le jour de l’accouchement et dure 8 semaines. Si la naissance a lieu plus de 6 semaines avant la date présumée de l’accouchement, la durée du congé de maternité est allongée du nombre de jours entre la date de l’accouchement et la date de début du congé maternité initialement prévue. Par ailleurs, l’allocation forfaitaire de repos maternel est versée en une seule fois.

D’un point de vue administratif, la grossesse est déclarée à la CPAM mais cela ne suffit pas. Il faudra aussi penser à avertir la CAF, la CARPV (ce qui permet de bénéficier de 100 points supplémentaires dans le régime de base) et son organisme de prévoyance, sans oublier de préparer une déclaration anticipée de manière à faciliter les démarches à la naissance.

Les maternités et les crèches étant prises d’assaut, une inscription la plus précoce possible est une sage précaution.

Au niveau professionnel, déclarer sa grossesse au plus tôt permet à chacun de s’organiser, à court et à moyen terme, voire de réorganiser intégralement l’équipe en conséquence. En effet, la vétérinaire enceinte ne pourra plus, ou difficilement, garder une position debout durant plusieurs heures, lever les bras ou faire beaucoup de route. Elle ne pourra non plus réaliser des prophylaxies ou des vêlages, se rendre en salle de radiographie, manipuler certains produits comme les hormones, etc. Des précautions doivent également être prises pour éviter les dommages corporels, notamment au niveau du ventre. Effectuer des sérologies toxoplasmose et fièvre Q est également nécessaire pour adapter les conditions de travail de la vétérinaire enceinte. Les examens médicaux obligatoires et l’entretien du 4e mois, mais aussi toutes les séances d’haptonomie et autres rendez-vous médicaux, doivent être planifiés, ce qui implique une adaptation de toute l’équipe.

D’autre part, la vétérinaire devra être remplacée pour une période potentiellement variable et les clients en seront avertis car ils peuvent être déstabilisés par un départ inopiné.

En fonction de la structure dans laquelle la future maman travaille et de ses conditions familiales, la baisse potentielle de revenu doit être compensée par des ressources financières immédiatement disponibles pour faire face aux charges fixes de la structure (loyer du cabinet, crédit de la voiture, charges sociales…) et du foyer (crédit immobilier, nourriture, impôts, électricité, etc.), à la perte potentielle de chiffre d’affaires, aux charges fixes et aux dépenses supplémentaires occasionnées par l’arrivée d’un enfant dans la famille.

Par ailleurs, les remboursements de la CPAM sont versés tous les 14 jours en fin de période et la prévoyance est parfois versée plusieurs mois après le début de la période de maladie. Il faut donc avoir assez de trésorerie personnelle pour faire face aux dépenses du quotidien.

Agenda

Au moins 1 mois avant d’envisager une grossesse : vérifier son affiliation à la CPAM et son contrat de prévoyance.

Un mois avant la date prévue de l’accouchement : versement de la première moitié de l’allocation forfaitaire de repos maternel.

Deux semaines avant la date prévue de l’accouchement : cessation de toute activité libérale.

Un mois et demi après l’accouchement : fin du congé maternité et versement de la deuxième moitié de l’allocation forfaitaire de repos maternel.

Deux mois après l’accouchement : fin du congé maternité en cas d’accouchement prématuré.

Deux mois et demi après l’accouchement : fin du congé maternité dans le cas d’une grossesse pathologique.

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