Une nouvelle étude démontre l’influence du comportement humain sur les morsures de chien - La Semaine Vétérinaire n° 1931 du 08/02/2022
La Semaine Vétérinaire n° 1931 du 08/02/2022

Royaume-Uni 

ANALYSE CANINE

Auteur(s) : Bénédicte Iturria

Un nouveau rapport conclut que le comportement humain est un facteur déterminant dans la probabilité de morsures de chien. De fait, il s’avère important de disposer de meilleures connaissances sur le comportement canin avant l’adoption et durant la possession d’un chien.

En novembre 2018, le ministère de l’Environnement, de l’Alimentation et des Affaires rurales (DEFRA) britannique a chargé l'université du Middlesex de Londres d'examiner les mesures visant à réduire les attaques de chiens et à promouvoir la propriété responsable. La faculté a ainsi publié récemment un rapport1 intitulé « Enquête sur les mesures visant à réduire les attaques de chiens et à promouvoir la propriété responsable parmi les propriétaires ayant des problèmes de contrôle de chiens au Royaume-Uni ». Le but de cette recherche était de :

- fournir une compréhension approfondie de certains des défis auxquels sont confrontées les autorités compétentes dans la mise en œuvre des mesures liées au contrôle des chiens et aux attaques de chiens ;

- explorer les facteurs de risque liés aux attaques de chiens et identifier les interventions ciblées potentielles pouvant être utilisées pour promouvoir une possession de chien plus responsable parmi les propriétaires à haut risque ;

- analyser la collecte et le partage de données actuelles relatives aux attaques de chiens et fournir des recommandations pour les améliorer ;

- explorer l'utilisation et l'efficacité des pouvoirs accordés aux autorités locales et aux forces de police pour s'attaquer au problème des chiens dangereux, et identifier les opportunités pratiques d'amélioration ;

- améliorer l’enregistrement des données.

Pour mener cette étude indépendante, l'équipe de l’université a organisé une table ronde avec des représentants de plusieurs associations de protection animale comme Dogs Trust, la Royal Society for the Prevention of Cruelty to Animals (RSPCA), le Kennel Club et Battersea Dogs & Cats Home, ainsi qu’une dizaine d’autorités locales et six services de police. Les universités de Liverpool, de Lincoln, de Gand et d’Utrecht ont également apporté leur contribution.

L’étude a identifié une série de problèmes liés à l'enregistrement et à la compréhension des attaques de chiens, aux pratiques d'application de la loi et à l’aide nécessaire à fournir aux propriétaires ayant des difficultés pour contrôler leurs chiens. Elle recommande donc d’améliorer l'enregistrement des données sur les attaques de chiens et des caractéristiques des incidents. Il doit y avoir une approche beaucoup plus coordonnée pour résoudre ce problème, un meilleur partage d'informations, l’introduction de modèles d'orientation et une plus grande utilisation des modèles d'application préventive.

Une conclusion importante concerne les propriétaires. Le rapport évoque que « les attaques de chiens varient en termes de gravité, de fréquence, de motivation et de facteurs de risque situationnels, et le comportement humain est un facteur clé dans les morsures de chien et les comportements agressifs. Une série de facteurs situationnels peuvent provoquer ou rendre plus probables les attaques de chiens. Le comportement humain, en particulier un comportement inadapté auprès des chiens, doit être considéré comme un facteur de risque, surtout à la maison.  Des connaissances obligatoires avant de détenir un chien et une formation comportementale à la suite d'un incident d'attaque ont été identifiées comme une réponse appropriée. »

L’étude indique de plus que « les participants ont presque unanimement mis en doute l'idée que la race était un facteur à l’origine d'attaques de chiens, notant soit que les chiens ne sont pas intrinsèquement dangereux s'ils sont correctement socialisés et entraînés à adopter des comportements adéquats, soit que tous les chiens peuvent être dangereux s'ils sont placés dans de mauvaises situations et traités de manière inappropriée ».

Ce rapport, salué par une coalition de plusieurs associations de protection animale et la British Veterinary Association, conteste l'hypothèse principale de l'article 1 de la loi sur les chiens dangereux2 (voir encadré), selon laquelle certaines races de chiens sont intrinsèquement dangereuses. Introduite en 1991, cette loi interdit la possession, l'élevage, la vente, la publicité de chiens de type pitbull terrier, tosa japonais, fila brasileiro et dogue argentin.

Samantha Gaines, cheffe du département science et politique des animaux de compagnie et experte en bien-être animal de la RSPCA, a commenté les résultats du rapport dans les médias : « Cette recherche confirme la conviction de nombreux acteurs du domaine du bien-être animal et de la médecine vétérinaire selon laquelle la législation spécifique à la race, qui qualifie certains types de chiens comme présentant un plus grand risque pour la sécurité publique, est imparfaite. ». La vétérinaire a ajouté : « Nous sommes ravis qu'après des années d'appel à la modification de cette législation, ce rapport indépendant apporte des preuves supplémentaires de la nécessité d'un changement et reconnaisse que d'autres facteurs, notamment le comportement humain et particulièrement les comportements inappropriés autour des chiens, sont des facteurs de risque clés dans les morsures de chien et les comportements agressifs. Compte tenu de ces résultats, il est maintenant impératif que le gouvernement les utilise. »

Une porte-parole du DEFRA a déclaré à Sky News: « Les attaques de chiens peuvent avoir des conséquences horribles. C'est pourquoi c'est une infraction pénale de laisser n'importe quel chien, pas seulement les races interdites, dans une situation où il est hors de contrôle et dangereux. Nous saluons les conclusions du rapport de l'université du Middlesex et travaillerons avec la police et les parties prenantes pour examiner plus avant les recommandations. »

À propos de la loi sur les chiens dangereux

La législation est entrée en vigueur après qu’un enfant de 6 ans a été mutilé par un pitbull dans un parc de Bradford. Après onze attaques horribles en 1991, le ministre de l'Intérieur de l'époque, Kenneth Baker, a promis « de débarrasser le pays de la menace de ces chiens de combat ». Il est devenu illégal de posséder des chiens « appartenant à des types élevés pour le combat », à savoir de type pitbull terrier, tosa japonais, dogue argentin et fila brasileiro. Le fait de permettre à un chien (de toute race ou type) d'être hors de contrôle et dangereux ("dangerously out of ccontrol") est également devenu une infraction pénale. De nombreuses voix s’élèvent depuis longtemps pour dire qu'il n'y a pas de races prédisposées à la violence et que cette loi ne met pas l'accent sur le rôle de la propriété irresponsable dans les attaques de chiens. Selon la British Veterinary Association, les recherches n’ont pas montré de diminution des comportements agressifs et des incidents de morsure de chien depuis l'introduction de cette réglementation.

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