COMMENT CONCILIEZ-VOUS BIEN-ÊTRE ANIMAL ET ÉLEVAGE ? - La Semaine Vétérinaire n° 1922 du 26/11/2021
La Semaine Vétérinaire n° 1922 du 26/11/2021

EXPRESSION 

EXPRESSION

Auteur(s) : PROPOS RECUEILLIS PAR CHANTAL BÉRAUD

Quel rôle le vétérinaire, qui est considéré par le grand public comme le garant du bien-être animal (BEA), peut-il réellement jouer aujourd’hui auprès des animaux de production ? Mise en pratique avec des exemples concrets en élevage. 

ARNAUD BOURGEOIS (N 89)

Activité d’élevage et de transformation au Domaine de La Valette (Dordogne)

J’AI DÉVELOPPÉ UN PROJET AGRO-TOURISTIQUE

Après 25 ans au laboratoire Ceva Santé Animale, j’ai réalisé mon rêve d’enfant : au delà de métier de vétérinaire je souhaitais devenir un paysan respectueux du BEA. Avec mon épouse, Fabienne, nous avons des hébergements touristiques hauts de gamme1 plus une ferme d’élevage, qui est aux antipodes du modèle agricole industriel actuel. Cela passe notamment par un faible nombre d’animaux (une cinquantaine de bovins et une cinquantaine de porcs) et par le choix de races anciennes rustiques, adaptées à leur terroir (vaches bazadaises et bordelaises, porcs noirs gascons). L’élevage en plein air, la faible concentration et l’attention individuelle portée à chaque animal nous permettent d’éviter la plupart des pathologies classiques. Certifié BIO, je n’hésite pas cependant à demander conseil à mon vétérinaire en insistant sur le préventif... Nous transformons toute notre production par nous-mêmes et vendons en direct au consommateur final. C’est le seul modèle futur viable car il conjugue une alimentation saine de qualité, bien-être animal, respect de l’environnement ainsi qu’une rentabilité acceptable pour l’éleveur.

AMANDINE LAISNEY (T 20)

Vétérinaire mixte à Sainte-Mère-Église (Manche)

MA THÈSE CONCERNE L’AGROÉCOLOGIE

Mon père est éleveur de vaches laitières en Normandie. Je suis donc sensibilisée depuis toute petite au bien-être animal. Ma thèse portant sur l'agroécologie, elle valorise les pratiques respectant à la fois l'environnement et l’animal. J'aborde notamment des utilisations innovantes des ressources en herbe via le pâturage, qui contribuent sans nul doute à leur bien-être. Le vétérinaire y a alors tout son rôle à jouer pour ajuster au mieux ce type de ration aux valeurs alimentaires variables pouvant provoquer des pathologies nutritionnelles. Notre profession est garante du bien-être animal aux yeux du grand public et nous devons donc jouer notre rôle auprès des éleveurs pour les accompagner et les sensibiliser aux bonnes pratiques d'élevage, ceci afin de satisfaire au mieux les nouvelles attentes des consommateurs. Et puis il ne faut pas oublier qu'une vache "heureuse" produira plus et sera d'autant plus rentable pour l'éleveur. En définitive, nous marchons donc tous dans la même direction ! 

DOMINIQUE MARCHAND (N 92)

Vétérinaire conseil Réseau Cristal et à Epidalis (dans le Grand-Ouest principalement)

NOTRE PROFESSION DOIT INNOVER

Nous formons un cabinet indépendant de onze vétérinaires, spécialisés en production porcine. Un exemple concret que nous appliquons concernant le BEA est la sociabilisation du porcelet en maternité. Le premier éleveur à l’avoir expérimenté a d’ailleurs reçu le prix européen du BEA (EU PiG). Cette technique permet aux porcelets de se connaître entre eux avant le sevrage. De cette manière, les jeunes animaux sont moins stressés par la séparation d’avec leur mère, puisque leur vie sociale est constituée dès huit jours d’âge. Résultat économique en parallèle : le porcelet mange plus vite en plus grande quantité, les petits du lot en particulier. En fin d’engraissement, au même âge, le porcelet a 2 kilos de plus en moyenne. En outre, le travail de l’éleveur est simplifié puisque les porcelets sortent facilement de la maternité et ne sont pas triés par poids. Nos actions doivent aller dans ce sens d’une performance agroécologique, au sein d’élevages dits « traditionnels ». Notre profession doit donc innover pour être force de proposition et de changements positifs.

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