Une montée en puissance du plan de lutte - La Semaine Vétérinaire n° 1916 du 15/10/2021
La Semaine Vétérinaire n° 1916 du 15/10/2021

IAHP

ANALYSE MIXTE

Auteur(s) : Par Tanit Halfon

Deux arrêtés viennent d’être publiés pour accompagner la mise en œuvre de la nouvelle feuille de route contre l’influenza aviaire hautement pathogène. Y sont notamment définies les zones à risque de diffusion.

Avec la publication de trois arrêtés, la lutte contre l’influenza aviaire hautement pathogène avance. Deux arrêtés, en date du 29 septembre 2021, viennent, pour l’un1, introduire des nouvelles zones à risque, dites zones à risque de diffusion (ZRD), pour l’autre2, remettre à plat les mesures générales de lutte. Pour les ZRD, il s’agit de zones à forte densité d’élevage « dans lesquelles la probabilité que le virus de l’influenza aviaire hautement pathogène se propage d’un élevage à un autre, une fois le virus introduit dans la zone concernée, est supérieure au reste du territoire ». La conséquence est que ces zones font l’objet d’un renforcement de la biosécurité suivant le niveau de risque épizootique, en association avec une diminution de la densité (nombre de lots mis en place) en période à risque (15 novembre-15 mars), ce qui fera l’objet d’un accord interprofessionnel. En cas de risque « modéré », il est obligatoire de mettre à l’abri les palmipèdes de moins de 42 jours, pendant toute la durée d’élevage du lot, jusqu’à ce que le niveau de risque repasse à « négligeable ». Les rassemblements d’oiseaux sont aussi interdits. En cas de risque élevé, le dépistage virologique avant mouvement des palmipèdes doit être réalisé 72 heures avant le mouvement, au lieu des 10 jours, et les dérogations sont impossibles.

ZRD et ZRP

Font partie des ZRD 539 communes de 9 départements (Gers, Landes, Loire-Atlantique, Lot-et-Garonne, Maine-et-Loire, Pyrénées-Atlantiques, Hautes-Pyrénées, Deux-Sèvres, Vendée), ce qui aboutit à 3 zones à risque (voir carte).

Ces ZRD ne font pas disparaître les zones à risques particuliers (ZRP) qui représentent plus de 6 000 communes (voir carte). Dans certains départements, des communes qui n’étaient pas ZRP passent dans la nouvelle zone réglementée des ZRD. Toutes les communes des ZRP ne sont pas forcément classées dans les ZRD. Des communes sont mixtes : ZRP et ZRD. Un département, les Hautes-Pyrénées, qui n’était pas concerné par les ZRP, compte 16 communes dans les ZRD. Dans les ZRP, la réglementation générale n’est pas modifiée (sauf pour les appelants) : la biosécurité doit être renforcée dès le niveau de risque « modéré », avec en particulier la mise à l’abri des volailles et autres oiseaux captifs, y compris pour les exploitations non commerciales. De fait, dans les zones mixtes ZRD et ZRP, le renforcement de la biosécurité est à son maximum en niveau « modéré »3. Dans les ZRD, l’arrêté précise aussi quelques principes somme toute de base en matière de biosécurité : interdiction des mouvements tant qu’il n’est pas confirmé l’absence du virus ; accès de la zone d’élevage aux interventions d’urgence, sans faire impasse de la biosécurité ; désinfection des véhicules à l’entrée et à la sortie d’une exploitation.

Des mises à l’abri spécifiques aux types d’élevage

Le deuxième arrêté remplace celui du 16 février 2016 relatif aux mesures générales de biosécurité applicables dans les exploitations de volailles et autres oiseaux captifs. Il y a d’abord une réorganisation globale du texte qui facilite la compréhension. Les deux premiers chapitres portent sur les mesures générales de biosécurité que tout détenteur de volailles (et autres) se doit d’appliquer, tout comme les opérateurs extérieurs, au quotidien. Un troisième chapitre regroupe les dispositions spécifiques au risque influenza. Pour les changements de fond, le plus gros concerne bien entendu la mise à l’abri, avec des nouvelles règles applicables quelle que soit la zone (ZRD, ZRP, reste du territoire), et le niveau de risque (modéré, élevé). Fini le paradigme soit claustration soit dérogation, dorénavant, les modalités de mise à l’abri, d’alimentation et d’abreuvement varient suivant la situation d’élevage. Six situations sont listées dont trois types d’élevage pour les palmipèdes. Les conditions de mise à l’abri y sont plus ou moins rigides selon le cas (bâtiment fermé, filet, etc.). Il est toutefois à noter une dérogation possible sous la forme d’un parcours réduit, mais pour des élevages de gallinacés et pas de palmipèdes.

Pour les autres changements, est obligatoire un audit annuel de l’application du plan de biosécurité pour les élevages commerciaux, par un organisme tiers incluant le vétérinaire. En cas de bon résultat, le contrôle est renouvelé tous les deux ans. En cas de mauvais résultat, le vétérinaire sanitaire doit être prévenu : il sera en charge de définir avec l’exploitant les mesures correctives à apporter pour être en conformité. Pour les élevages de volailles reproductives, seul le vétérinaire sanitaire ou un organisme certificateur peut faire l’évaluation. Cet audit ne sera à envisager qu’à partir du 1er juillet 2022. L’obligation de recensement (géolocalisation et mouvements) – le délai est réduit à 48 heures en cas de risque épizootique élevé – par télédéclaration est aussi introduite.

En cas de manquement, comme pour le précédent arrêté du 16 février 2016, il est écrit que les indemnisations prévues en cas de foyer peuvent être refusées.

Le troisième arrêté4, en date du 17 septembre 2021, actualise l’arrêté du 16 mars 2016 relatif aux niveaux de risque épizootique. Il modifie les règles relatives aux appelants, et surtout fait disparaître le paragraphe permettant les dérogations à la claustration pour l’ensemble des exploitations de volailles et autres oiseaux captifs.

Un risque imminent

Cette année, les signaux d’alerte d’influenza aviaire hautement pathogène sont précoces. Selon le bulletin de veille épidémiologique1 du 5 octobre 2021 de la plateforme d'épidémiosurveillance en santé animale (ESA), depuis le début de la saison en août 2021, 10 pays européens sont déjà touchés : Belgique, Estonie, Finlande, France, Luxembourg, Pays-Bas, Pologne, Royaume-Uni, Suède, République tchèque. Au total, au 4 octobre, on compte 39 cas et 2 foyers. En France, 3 cas à H5N8 chez des détenteurs particuliers ainsi qu’un cas dans le compartiment sauvage (cygne) à Metz à H7N7 ont été confirmés.

L’an dernier à la même époque, le bulletin de veille2 du 6 octobre 2020 classait le risque influenza dans les « dangers sanitaires à actualité réduite ». En effet, les cas et foyers signalés étaient cantonnés en Russie et au Kazakhstan, au sud de l’Oural. Les premiers cas en Europe de l’Ouest n’avaient été confirmés que le 21 octobre dans l’avifaune sauvage aux Pays-Bas (H5N8). Suivi rapidement de confirmations d’autres cas (H5N8) dans l’avifaune sauvage en Allemagne le 30 octobre. Au 9 novembre, cinq pays d’Europe – Pays-Bas, Allemagne, Royaume-Uni, Danemark, Irlande – étaient touchés pour un total de 126 cas et 5 foyers. En France, les premières déclarations n’avaient été faites3 que le 16 novembre, et il s’agissait d’un foyer dans une enseigne de jardinerie en Haute-Corse. Les premiers cas dans l’avifaune sauvage n’avaient été confirmés qu’à partir du 5 décembre, avec les premiers cas dans le Morbihan, en Loire-Atlantique et en Meurthe-et-Moselle. Les trois communes concernées étaient situées en zones à risque particulier.

1. http://www.bit.ly/3Db4Yky

2. http://www.bit.ly/3uN3KsO

3. http://www.bit.ly/3oH18f4

Abonné à La Semaine Vétérinaire, retrouvez
votre revue dans l'application Le Point Vétérinaire.fr