Autovaccins à Streptococcus suis : des points de vigilance pour assurer son efficacité - La Semaine Vétérinaire n° 1916 du 15/10/2021
La Semaine Vétérinaire n° 1916 du 15/10/2021

Truies

FORMATION MIXTE

Auteur(s) : Morgane Rémond

D’après une présentation faite aux Journées 2021 de la recherche porcine, Étude de cas pour l’évaluation de l’efficacité des autovaccins à Streptococcus suis en élevage porcin, Morgane Rémond et coll., 53, 375-380.

Avec la réduction de l’utilisation des antibiotiques en élevage porcin, est constatée une tendance à la hausse de la prévalence de certaines affections dont la streptococcie à Streptococcus suis responsable de méningites et septicémies. Dans ce contexte, une étude1 s’est intéressée aux facteurs d’élevage pouvant influencer l’efficacité des autovaccins à S. suis. Ont été inclus 12 élevages de l’ouest de la France : 6 caractérisés « en échec » et 6 « en succès ». Un élevage est en échec quand au moins un des trois critères suivants n’a pas montré d’évolution favorable : fréquence de survenue d’épisodes cliniques, morbidité et mortalité lors de ces épisodes. Un audit de chaque élevage a permis de décrire précisément les pratiques mises en œuvre.

Deux facteurs principaux communs aux échecs

Les facteurs de risque associés à l’échec sont l’hyperprolificité des truies (>15 nés vivants dans l’étude) (p-value = 0,005) et le meulage des dents (p-value = 0,02). Le lien entre échec vaccinal et hyperprolificité s’établit au travers de la prise colostrale. En cas de grandes portées, les porcelets de petite taille et les derniers nés sont plus susceptibles de présenter un déficit immunitaire à cause d’une prise colostrale insuffisante2. Les porcelets en carence d’anticorps maternels seront plus sensibles à la streptococcie.

Le meulage des dents, difficile à réaliser sans atteindre la pulpe dentaire, crée des portes d’entrée vers le système sanguin favorisant les septicémies dues aux bactéries de la flore oropharyngée, S. suis inclus. Dans l’étude, le meulage est pratiqué dans les élevages hyperprolifiques. Ces élevages cumulent donc un potentiel déficit immunitaire chez certains porcelets et une voie d’entrée d’agents pathogènes, combinaison favorable à l’apparition de cas cliniques de streptococcie. De plus, un meulage réalisé dans les 24 premières heures de vie du porcelet perturbe la prise colostrale.

D’autres facteurs semblent favoriser l’échec de l’autovaccin (p-value ϵ[0.05 ; 0.1]) :

- un changement d’aiguille au mieux toutes les 5 truies lors de la vaccination favorise l’apparition d’abcès au site d’injection et limite la bonne prise vaccinale ;

- une corrélation temporelle entre troubles digestifs et cas de streptococcie (peu de données dans la littérature à ce sujet). L’hypothèse est que les lésions digestives et le potentiel déficit immunitaire local et général favorisent la survenue de cas de streptococcie.

Plusieurs profils d’élevage

L’analyse des données permet de distinguer des profils d’élevage « en échec » et « en succès » (voir tableau). Ces profils montrent l’importance de la gestion des co-infections respiratoires et digestives afin d’optimiser l’efficacité de l’autovaccin. En effet, les virus grippaux ou celui du syndrome dysgénésique et respiratoire porcin (SDRP) favorisent les infections par S. suis, de même que certaines bactéries.

L’étude révèle l’importance de la qualité de la prise colostrale et de la stabilité sanitaire dans l’élevage pour optimiser la mise en place d’un autovaccin à S. suis. Si les résultats nécessitent d’être consolidés par l’étude d’un plus grand nombre d’élevages, le vétérinaire praticien dispose désormais d’une base de travail pour mieux conseiller ses éleveurs et améliorer l’efficacité de l’autovaccination.

  • 1. Étude menée dans le cadre du projet Évasion financé par le plan EcoAntibio2, issue d’une thèse vétérinaire : http://www.bit.ly/3AScAaf
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