Management
ENTREPRISE
Auteur(s) : Par Christelle Fournel
Aussi appelée « politique générale d’entreprise » ou « management stratégique », la notion de stratégie d’entreprise est souvent mal comprise. La définir nécessite un processus en plusieurs étapes, mené conjointement avec les salariés afin d’aligner les comportements sur la méthode choisie.
Bien souvent, le vétérinaire qui choisit d’être à son compte ne se pose pas la question de la stratégie, car sa valeur ajoutée semble évidente. Pourtant, l’absence de cap et de vision d’entreprise peut être une source de malentendus, d’incohérences, voire entraîner une perte de confiance ou de crédibilité au sein de son équipe et de sa clientèle. Penser sa stratégie d’entreprise et la décliner au niveau managérial est essentiel pour rassurer les autres sur sa capacité à être leader et dirigeant, mais aussi pour développer son activité ou simplement la pérenniser dans un contexte toujours plus concurrentiel.
Connaître ses forces
Définir une stratégie d’entreprise nécessite en premier lieu d’identifier ses ressources : qui sont les individus qui composent l’organisation ? Quelles sont leurs forces et leurs faiblesses ? Quelles sont les ressources financières disponibles immédiatement ou sur un plus long terme (trésorerie, compte épargne, patrimoine immobilier, etc.), les flux de revenus et le modèle économique ? Quelles sont les autres ressources internes et externes dont l’entreprise dispose – compétences des salariés, nature des prestataires et fournisseurs, liens privilégiés avec certains réseaux, etc. ?
Ensuite, les modalités d’utilisation de ces ressources – on parle d’un « choix d’allocation de ressources » – déterminent le périmètre d’activité de l’entreprise. S’il est vrai que les structures vétérinaires ont souvent un périmètre d’activité identique – la médecine et la chirurgie des animaux, la question vaut la peine d’être posée afin d’identifier d’autres opportunités de développement : une activité plus spécialisée, de nouveaux services pour les clients comme le click and collect, le développement d’une activité de dentisterie, etc. En outre, si toutes les structures vétérinaires d’un secteur ont strictement la même activité, elles deviennent substituables pour les clients comme pour les investisseurs. Cela ouvre également la porte à des non-vétérinaires pour préempter des territoires, qui constitueraient de vrais axes de développement stratégiques pour des structures.
De plus, classiquement, une stratégie d’entreprise est réussie quand l’organisation est performante, c’est-à-dire rentable pour les associés, de manière durable. De ce fait, chaque activité, chaque pôle de l’entreprise doit être passé en revue avec un arbitrage à avoir en tête : le service est-il économiquement rentable ? Et s’il ne l’est pas, quel est l’intérêt de la garder ? En effet, il peut être décidé de conserver une activité peu rentable car elle draine des clients sur d’autres activités plus lucratives et alignées avec la stratégie de l’entreprise.
L’identification des ressources, du périmètre d’activité de l’entreprise et de la raison d’être de chaque activité permet de déterminer les capacités stratégiques de l’entreprise, à savoir les ressources et les compétences qui la distinguent des autres.
Dans un deuxième temps, il convient de s’interroger sur l’environnement : quelles sont les menaces et les opportunités générées par les parties prenantes et les concurrents ? Cette question détermine les facteurs clés de succès du secteur, c’est-à-dire les éléments précis qui expliquent pourquoi certaines entreprises réussissent mieux que d’autres. À ce stade, on aura ainsi dressé le bilan des forces (strenghts), faiblesses (weaknesses), opportunités (opportunities) et menaces (threats), soit une analyse SWOT (voir schéma).
La comparaison entre les capacités stratégiques de l’entreprise et les facteurs clés de succès du secteur identifieront les actions concrètes à mener. Ainsi, si une structure a un spécialiste NAC qui est le seul dans le département, alors cette force devient une capacité distinctive. Si un CHV se construit à quelques kilomètres et met en place une consultation NAC, il s’agit d’une menace. Dans ce cas, un facteur clé de succès sera notamment d’avoir la capacité à garder ses clients par différents moyens. L’action à mener consistera à s’assurer d’avoir une clientèle fidèle, grâce à une médecine préventive bien développée.
Impliquer le personnel
Même s’il est naturel de penser que la stratégie d’entreprise est un sujet réservé aux associés de l’entreprise, organiser un atelier de réflexion avec les salariés peut s’avérer très riche d’enseignement et de nouvelles idées. C’est également un très bon moyen d’engager l’équipe dans les projets futurs et une façon d’ajuster les comportements pour mener à bien les actions décidées en amont. Autrement dit, traduire la stratégie d’entreprise à un niveau managérial revient à questionner l’équipe sur la mission, la vision et les valeurs de l’entreprise.
La mission définit pourquoi l’entreprise existe, ce qu’elle fait, à qui elle sert. Pour le salarié, elle se pose en ces termes : pourquoi sommes-nous là ? Pourquoi existons-nous ? Pourquoi nous levons-nous chaque jour et faisons ce que nous faisons ? Pour quoi sommes-nous payés ? Quelle est notre fonction dans l’organisation ? Pour qui ? Comment ? Prendre le temps de se poser les bonnes questions est essentiel, car elles peuvent induire différentes réponses qui se complètent l’une l’autre et apportent un éclairage exhaustif de la vision du salarié.
Quant à la vision de l’entreprise, elle correspond à la façon de se projeter dans les années à venir. Elle doit être exprimée avec précision, en cohérence avec le vécu des salariés afin de la communiquer facilement et de favoriser l’engagement de l’équipe.
On pourra ainsi remplir le texte à trous suivant :
xxx est une entreprise… qui (verbe d’action), en (manière, méthode).
Objectifs stratégiques :
1. (Verbe d’action n° 1) pour (but de l’action)
2. (Verbe d’action n° 2) pour (but de l’action)
…
Les valeurs d’une entreprise, définies comme des normes, des principes et des convictions, reflètent souvent la personnalité de ses dirigeants. Au quotidien, elles dictent une ligne de conduite à ses salariés, autrement dit ce que les clients, notamment, voient de nous.
Voici quelques exemples :
1. Intégrité, impartialité
2. Développement des compétences
3. Partage de la connaissance, apprentissage continu, etc.
Vérifier la cohérence externe
Une fois que la réflexion a été menée auprès des associés et salariés, il est essentiel de vérifier la pertinence des réponses. Ce que nous avons établi collectivement est-il signifiant pour nos clients, nos partenaires, nos futurs salariés, notre environnement ? Est-ce crédible vis-à-vis de l’extérieur ? Comment nous assurer que nos actions et comportements seront alignés avec notre mission, notre vision et nos valeurs ?
Une fois ces précautions prises, il convient de formuler des indicateurs de performance. Cela permet de maintenir la motivation, de déterminer les priorités et d’améliorer la satisfaction dans le travail de l’équipe. Il s’agira de fonctionner par étapes pour atteindre sa vision, sans oublier de détailler ces différentes phases aux équipes.