Homéopathie, le débat est ouvert - La Semaine Vétérinaire n° 1910 du 03/09/2021
La Semaine Vétérinaire n° 1910 du 03/09/2021

Analyse juridique

ENTREPRISE

Auteur(s) : Par Christian Diaz

À la demande du Conseil national de l’Ordre, l’Académie vétérinaire de France (AVF) a déposé le 10 mai son rapport sur l’homéopathie vétérinaire1. L’avis qui accompagne ce rapport interpelle le lecteur non seulement sur l’aspect scientifique et éthique, mais aussi par ses implications en termes de responsabilité professionnelle.

Le rapport

L’Académie vétérinaire de France (AVF) confirme dans le domaine vétérinaire les conclusions concordantes des différentes études publiées en médecine humaine, par l’Académie des sciences et les académies nationales de médecine et de pharmacie. Ces deux dernières constatent que l’efficacité des préparations homéopathiques n’est démontrée par aucune méta-analyse. La Haute Autorité de santé considère qu’aucun mécanisme d’action autre que l’effet placebo n’a été démontré pour expliquer les réponses cliniques observées. Dans son rapport du 10 mai dernier, l'AVF déclare que « les études cliniques de tous niveaux n’apportent pas de preuves scientifiques suffisantes pour soutenir l’efficacité thérapeutique de la préparation homéopathique vétérinaire et pour soutenir l’homéopathie en tant que pratique vétérinaire (…) L’homéopathie doit faire ses preuves », il faut en revanche « encourager le développement de méthodes de recherche et former les vétérinaires, utilisant l’homéopathie ou non, aux méthodes de recherche, à l’approche critique des publications scientifiques, et à la prise de décision médicale ».

Avis et recommandations de l’AVF

« Aucune discipline médicale […] ne peut s’exonérer d’un devoir éthique de mise à l’épreuve. »

La médecine vétérinaire doit être fondée sur les faits et les preuves et ne doit pas être qualifiée d’allopathique.

L’homéopathie vétérinaire ne saurait relever d’un exercice exclusif.

Une communication institutionnelle doit apporter une information permanente sur les réalités d’une démarche scientifique à destination des vétérinaires et des détenteurs d’animaux.

« Le vétérinaire qui […] voudrait poursuivre cette activité » doit être conscient de l’engagement « de ses responsabilités en raison de l’absence actuelle de confirmation scientifique de l’efficacité ».

Il serait possible de recourir à l’utilisation de préparations (et non médicaments) homéopathiques, sous réserve de l’obtention du consentement éclairé et de l’assurance de l’absence de perte de chance.

L’homéopathie ne saurait faire l’objet de diplôme universitaire, en l’absence de démarche scientifique validée.

La formation initiale doit reposer sur un esprit critique, sans exclure les pratiques « non conventionnelles ».

L’encouragement de l’usage des préparations homéopathiques en agriculture biologique apparaît incompatible avec l’obligation de recourir à des techniques scientifiquement éprouvées.

Considérations sur les responsabilités du vétérinaire

L’AVF souligne l’engagement particulier de la responsabilité du praticien dans la pratique de l’homéopathie. Dans le contrat de soins (arrêt Mercier) qui définit sa responsabilité civile, le praticien est tenu, non pas de guérir le malade, mais de lui apporter des « soins consciencieux, attentifs, conformes aux données acquises de la science ». Pour engager la responsabilité, trois éléments sont indissociables : une faute, un dommage, un lien de causalité entre la faute et le dommage.

S’il apparaît que l’usage de l’homéopathie – faute, puisque non conforme aux données acquises de la science – est à l’origine, même partiellement, d’un dommage, la responsabilité du praticien est susceptible d’être engagée.

Une note d’information, destinée à obtenir le consentement éclairé, ne saurait exonérer la responsabilité du praticien en cas de faute prouvée. Il ne s’agit en aucun cas de décharge, contrairement à l’idée faussement répandue. De plus, l’assurance ne garantit pas les fautes intentionnelles, exposant ainsi le praticien à indemniser la victime sur ses propres deniers.

Eu égard à l’évolution actuelle de la relation praticien/client, rythmée par des procédures facilitées par le recours aux garanties de protection juridique, on ne saurait trop conseiller au praticien désireux de pratiquer l’homéopathie de s’assurer de la couverture de cette pratique par sa compagnie d’assurances.

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