LE SIMV AU CŒUR DES ENJEUX SOCIÉTAUX - La Semaine Vétérinaire n° 1908 du 27/08/2021
La Semaine Vétérinaire n° 1908 du 27/08/2021

PROFESSION

ANALYSE

Auteur(s) : CÉLINE GAILLARD-LARDY

Lors de sa conférence annuelle, le 29 juin dernier, le Syndicat de l’industrie du médicament et diagnostic vétérinaires (SIMV) a affirmé sa préoccupation pour les nouvelles thématiques mises en lumière par la crise du Covid-19, parmi lesquelles notamment la modification des relations homme-animal et l’autonomie alimentaire.

La crise sanitaire que nous traversons actuellement aura au moins permis de montrer que les vétérinaires peuvent apporter des réponses. C’est le message qu’a souhaité porter le Syndicat de l’industrie du médicament et diagnostic vétérinaires (SIMV), au cours de sa conférence annuelle organisée en ligne le 29 juin, dans laquelle étaient présents plusieurs acteurs de la santé animale vétérinaire, industriels ou praticiens.

L’élevage pointé du doigt

Sous la houlette de Jean-Louis Hunault, président du SIMV, plusieurs intervenants ont présenté les évolutions en santé animale, qu’elles concernent l’élevage ou les animaux de compagnie. La perception des animaux a beaucoup évolué ces dernières années, comme l’a expliqué Francis Wolff, philosophe, professeur émérite à l’École normale supérieure de Paris : « À mesure que se ­distancient les relations avec les animaux sauvages ou de rente, un sentiment de sympathie envers le monde animal apparaît. Aujourd’hui, la barrière entre l’homme et l’animal s’est écroulée. Les éleveurs sont devenus des parias, traités de tortionnaires, bien qu’ils se soient endettés pour améliorer les conditions d’élevage. » Pour Jean-Louis Hunault, il existe aujourd’hui un « agribashing, fondé sur le marketing de la peur vis-à-vis de nos produits. Dans ce contexte, notre responsabilité est d’affirmer la sécurité de ces traitements et de valoriser les efforts de la profession, notamment pour réduire le recours aux prescriptions d’antibiotiques. » Selon Valérie Normand, praticienne en production porcine, les nouvelles attentes des consommateurs ont permis d’améliorer la traçabilité des produits et le bien-être animal, par des évolutions réglementaires. La crainte des consommateurs est également liée aux traitements anti­biotiques, alors même que d’énormes progrès ont été faits par l’ensemble de la filière : l’exposition des porcs aux anti­biotiques a été réduite de 53 % depuis dix ans. Pourtant, ces résultats n’ont pas été relayés et les craintes demeurent. Certaines mentions sur les produits, comme « élevé sans antibiotiques », contribuent à la confusion puisqu’elles sous-entendent que les autres ne le sont pas. Cet état de fait entraîne un épuisement et une crise de vocation des enfants d’éleveurs, qui s’ajoutent à l’augmentation des contraintes financières et environnementales. « Aujourd’hui, on estime qu’il y aura une reprise pour trois départs à la retraite, la taille des élevages devrait donc mathématiquement augmenter », selon Valérie Normand. En parallèle, les élevages alternatifs se développent. Ce nouveau public est parfois particulier, par sa méconnaissance des risques sanitaires et sa méfiance, voire son aversion vis-à-vis de la vaccination. Pourtant, il existe aujourd’hui un désir d’autonomie alimentaire, accentué par la crise sanitaire que nous traversons actuellement. Elle est en contradiction totale avec la désaffection pour le métier d’éleveur.

La prévention, clé du contrôle des maladies

Que ce soit en productions animales ou chez l’animal de compagnie, la profession vétérinaire a accompagné les attentes des propriétaires et des éleveurs. En effet, « l’animal de compagnie fait maintenant partie de la famille et les propriétaires attendent des soins à la hauteur de la place qui leur est accordée, la multiplication de confrères spécialistes en est la preuve », affirme Petra Rouch-Buck, enseignante à l’École nationale vétérinaire de Toulouse (ENVT). Le vétérinaire n’est plus seulement sollicité en urgence, les propriétaires attendent aussi des conseils concernant les soins quotidiens, ce qui a permis le développement d’une médecine préventive.

C’est également le cas chez les animaux de production. Pour Philippe Pourquier, président d’Innovative Diagnostics, il existe une médecine de prévention, d’éradication et de contrôle des maladies. Ces programmes d’éradication ne peuvent être mis en œuvre qu’à grande échelle, par les États et/ou les organisations professionnelles. Ce sont des succès collectifs qui, au travers du diagnostic et de la vaccination, ont permis l’éradication de grandes maladies, délétères pour la production ou la santé humaine, comme la brucellose, la fièvre aphteuse, la leucose bovine, les herpès­virus. De nos jours, la mondialisation favorise l’émergence de nouvelles maladies, comme cela a été le cas pour la fièvre catarrhale ovine (FCO ou bluetongue). « Nous maintenons donc des ressources et des infrastructures pour réagir rapidement et massivement. Nous avons été les premiers à répondre à la bluetongue par la sérologie. Être prêt à répondre à l’émergence est presque une nécessité pour nous, car le changement climatique et le commerce international la favorisent. Nous avons donc été naturellement sollicités lors de la crise du Covid et nous avons pu fournir des tests PCR par le biais de notre filiale », explique Philippe Pourquier.

Une filière adaptable

Marc Prikazsky, P.-D.G. de Ceva Santé animale, a également évoqué l’adaptabilité de l’industrie et sa réactivité, avec la possibilité de production de masse très rapide de vaccins, d’autovaccins, de réactifs de diagnostic, mais aussi sa forte implication dans les nouvelles technologies. Selon lui, les vétérinaires sont des atouts dans la gestion des pandémies, car ils sont « d’abord formés à l’épidémiologie, en médecine des populations. Ils ont montré leur utilité dans la crise sanitaire, par leur connaissance des coronavirus en élevage. Les vétérinaires ruraux peuvent être comparés à des médecins de guerre, puisqu’avec peu de moyens, ils doivent soigner la masse. » Pour Jean-Louis Hunault, « le redimensionnement de l’industrie permet d’apporter des solutions nouvelles aux médecines individuelles, aux médecines préventives, mais aussi d’accompagner l’évolution du rôle du vétérinaire, dans un concept de One Health. Notre écosystème français marche sur plusieurs piliers : l’administration, les vétérinaires et les éleveurs. Je pense qu’il faut intégrer un quatrième pilier, avec l’industrie du médicament et du diagnostic. Quelle que soit la qualité de ces réseaux, ils ont besoin de nos produits et de nos solutions. »

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