LES MATHÉMATIQUES AU SERVICE DE L’ÉLEVAGE - La Semaine Vétérinaire n° 1903 du 11/06/2021
La Semaine Vétérinaire n° 1903 du 11/06/2021

RECHERCHE

PRATIQUE MIXTE

Auteur(s) : CLOTHILDE BARDE

Certains troubles sanitaires des vaches laitières peuvent dorénavant être détectés avant l’apparition des premiers signes cliniques, grâce à un nouvel outil numérique développé par une équipe de chercheurs de l’Inrae, en collaboration avec le centre Clermont-Auvergne-Rhône-Alpes.

Détecter 90 à 100 % des anomalies dues à des problèmes de santé des vaches laitières un à deux jours avant l’apparition des premiers signes cliniques, telle est l’une des possibilités nouvellement offertes par les nouveaux outils de machine learning développés par une équipe de chercheurs de l’Institut national de la recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement (Inrae), en collaboration avec le département de physiologie animale et systèmes d’élevage du centre Clermont-Auvergne-Rhône-Alpes.

En effet, le rythme journalier des bovins étant altéré lors de stress ou de maladie souvent avant l’apparition des signes cliniques, identifier de telles perturbations pourrait aider les éleveurs à intervenir très rapidement (isolement de l’animal, traitement, etc.) ou au besoin les inciter à rechercher des signes complémentaires pour identifier la cause du trouble. Or, détecter ces perturbations du rythme d’activité nécessite des observations en continu. En partant de ce postulat, et grâce au développement de l’élevage de précision, Nicolas Wagner, auteur d’une thèse encadrée par l’Inrae et l’université Clermont-Auvergne, a cherché à mettre en place une méthode permettant de détecter des anomalies de rythme d’activité en lien avec un état de maladie, de stress, ou un événement lié à la reproduction (chaleurs, vêlage).

Des algorithmes de machine learning

Pour ce faire, les données issues de capteurs positionnés sur les vaches permettant d’estimer leur activité (repos, station debout, alimentation) ont été utilisées. Les chercheurs ont ainsi constitué quatre jeux de données avec un total de 120 000 jours d’enregistrements de tous les événements, sanitaires ou autres. Pour concevoir une méthode qui permette de classer le rythme observé un jour donné pour une vache donnée, comme normal ou anormal (le rythme normal correspondant à un jour sans événement particulier et le rythme anormal à un jour où la vache a été malade, perturbée, par exemple par un changement de parc, en chaleurs ou en train de mettre bas), des algorithmes récents de machine learning - ou apprentissage automatique - ont alors été testés avant qu’une méthode adaptée à des séries temporelles qui évoluent de façon rythmée puisse être développée. Cette dernière a permis de produire moins de 20 % de fausses alertes, de détecter 90 à 100 % des anomalies dues à un problème de santé ou à des chaleurs un à deux jours avant la détection des signes cliniques, et enfin 60 à 70 % des anomalies dues à un stress ont également pu être détectées.

Une réactivité favorisée

Comme l’ont indiqué les chercheurs, cette détection permettra, à terme, d’aider les éleveurs à prendre rapidement des décisions pour intervenir le plus tôt possible : rechercher des informations complémentaires pour diagnostiquer le problème, isoler l’animal, voire le traiter, et ce, sans attendre l’apparition de troubles cliniques. Le développement de la méthode devrait se poursuivre en intégrant d’autres notions mathématiques pour diminuer le nombre de fausses alertes et il restera ensuite à mieux identifier les spécificités liées aux différents troubles afin de distinguer maladie, stress, vêlage, chaleurs. L’équipe de l’Inrae est pour cela en relation avec deux entreprises d’élevage de précision qui pourraient utiliser cette méthode pour affiner les alertes transmises aux éleveurs.

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