CESARIENNE PAR VOIE BASSE : INDICATIONS ET TECHNIQUE - La Semaine Vétérinaire n° 1902 du 04/06/2021
La Semaine Vétérinaire n° 1902 du 04/06/2021

BOVINS

PRATIQUE MIXTE

FORMATION

Auteur(s) : CLOTHILDE BARDE

CONFÉRENCIER

XAVIER QUENTIN, vétérinaire (Manche)

Article rédigé d’après la conférence présentée lors du congrès de la Société nationale des groupements techniques vétérinaires (SNGTV) du 28 au 30 octobre 2020 à Poitiers.

Alors qu’auparavant les vaches gestantes d’un veau emphysémateux étaient souvent promises à l’euthanasie et parfois à l’abattoir, il existe des techniques permettant au vétérinaire de réaliser une césarienne dans une telle situation d’urgence.

Indications, site chirurgical et matériel

La césarienne par voie basse chez les bovins est principalement indiquée lors de dystocie avec présence d’emphysème fœtal, mais elle peut également être utile quand l’animal est nerveux, déjà en position couchée, quand l’entourage est peu compétent ou quand le praticien est moins expérimenté. Toutefois, bien que cette technique permette une meilleure extériorisation de la corne utérine et une réduction du risque de contamination abdominale, la césarienne debout doit être privilégiée dans la majorité des cas, car les risques de complications sont moindres (œdèmes postopératoires, abcès de paroi ou retard de cicatrisation, voire éventration). La vache étant couchée, quatre voies chirurgicales sont alors possibles : basse latérale, latéro-ventrale, paramédiane ou ventrale1. D’un point de vue pratique, en raison du risque d’éventration très important, seule la voie basse ventrale paramédiane peut être envisagée. Cette technique peut être réalisée sur le flanc droit ou gauche. Il est à noter que l’accès à gauche permet, par rapport à l’abord à droite, de ne pas encombrer le champ opératoire avec des anses intestinales. L’incision débute alors en avant de la mamelle et elle se fait à égale distance entre la veine mammaire et la ligne blanche. Le matériel nécessaire se compose d’un bistouri, de ciseaux de Mayo, de pinces à césarienne, d’un utérotome, d’une aiguille cadavérique, d’une aiguille courbe à section triangulaire, d’une aiguille courbe à section ronde, d’une casaque de vêlage, de gants pour exploration transrectale, de gants en latex, de fils de suture de préférence des fils monofilament et/ou tressé enduit de décimales importantes. Dans la mesure du possible, il est judicieux de prévoir deux boîtes de chirurgie : une boîte sera réservée pour les temps septiques et une autre pour les temps propres. Deux chirurgiens ou un éleveur, capable d’aider le vétérinaire (notamment pour repousser les viscères lors de la suture musculaire), sont nécessaires. Cette chirurgie étant septique, il ne faut pas hésiter à changer plusieurs fois de gants pendant l’intervention pour limiter les risques de contamination de l’abdomen.

Préparation chirurgicale et incisions

Au début de la chirurgie sont réalisées des injections de tocolytique, d’antibiotiques (pénicilline/streptomycine classique) et d’AINS à action antalgique. Une perfusion NaCl 7,2 % 3 l est également indiquée afin de gérer le risque élevé de choc. Le premier temps consiste à coucher la vache. Pour un animal un peu agité, une tranquillisation avec un alpha-2 agoniste (1 ml/100 kg Rompun et 1 ml/100 kg Kétamine 1 000 IV) associée à une anesthésie épidurale, peut faciliter la manœuvre. Après une tonte chirurgicale large et une désinfection de la zone opératoire, une anesthésie locale est réalisée sur la ligne d’incision. Les antérieurs de la vache sont tirés vers l’avant et les postérieurs vers l’arrière afin de laisser le site opératoire accessible mais également pour une question de sécurité. Une fois la vache couchée, la fixation d’une casaque de vêlage à usage unique 20 cm en dessous de la future zone d’élection de la chirurgie est conseillée car elle permet d’éviter que les viscères soient en contact avec le sol lors de leur extériorisation involontaire. L’anatomie de cette voie d’abord varie de celle rencontrée lors de l’abord par le flanc gauche ; ainsi le vétérinaire incisera successivement la peau, le muscle cutané du tronc, les aponévroses fusionnées des deux obliques, le muscle grand droit de l’abdomen, l’aponévrose du transverse et le péritoine. Le chirurgien doit ensuite élargir la fente opératoire avec les ciseaux ou le bistouri guidé avec le doigt pour protéger les viscères. Dans la majorité des cas, l’utérus étant placé dans la bourse omentale, le vétérinaire devra repousser l’épiploon vers l’avant après avoir inséré la main en direction de la cavité pelvienne pour extérioriser l’utérus. L’idéal est ensuite de pouvoir extérioriser le postérieur du veau (pointe du jarret jusqu’au sabot) avant d’inciser l’utérus. Cependant, quand cela n’est pas possible, l’utérus est incisé à vue dans la plaie de chirurgie, ce qui ne semble pas pour autant altérer le pronostic de l’animal selon le conférencier. Le vétérinaire devra ensuite prendre à deux mains les membres du veau (en présentation antérieure) ou la tête (en présentation postérieure).

Réalisation des sutures

Une fois le veau sorti, le temps de suture commence par l’utérus avec deux surjets enfouissants (fil monofilament). Le risque majeur de complication de cette chirurgie étant la péritonite, l’utilisation d’un gel de carboxyméthylcellulose (Bovivet gel) est particulièrement indiquée car son effet lubrifiant limite la fixation de la fibrine à la surface de la plaie utérine. Certains auteurs préconisent une seule suture séro-séreuse de l’utérus suivant la technique de Lambert (fil perpendiculaire à l’incision) améliorée par la technique du point passé qui donne davantage de résistance à la suture1, mais il est également possible de réaliser une suture de Cushing (l’aiguille passe alors parallèlement à l’incision). D’autres recherches préconisent un double surjet de Lambert en prenant la musculeuse et la séreuse1. Néanmoins, il est admis que le deuxième surjet n’est pas nécessaire si les points du premier sont suffisamment serrés, si la paroi de l’utérus n’est pas fragilisée (atonie, torsion, hydramnios, etc.) et si le contenu de l’utérus n’est pas septique. Par ailleurs, quels que soient le type et le nombre de sutures, il faut éviter que les sutures soient présentes en surface de l’utérus. Après avoir réalisé la suture de l’utérus, le vétérinaire devra remettre ce dernier à sa place physiologique et faire sortir le maximum de liquides fœtaux à la main, le reste des liquides étant rapidement résorbé par le péritoine du fait de sa forte irrigation. Cependant, lorsque le contenu fœtal est septique, le risque de péritonite étant très important, il faudra alors réaliser une irrigation péritonéale à l’aide d’un grand volume d’eau tiède contenant un peu de povidone iodée ou de chlorhexidine. Enfin, le dernier temps chirurgical correspond à la suture de la plaie abdominale de laparotomie (trois à quatre plans de suture). Le premier plan permet de suturer le péritoine, l’aponévrose du transverse et le muscle grand droit de l’abdomen et il est conseillé de réaliser la suture avec des points individuels en X très rapprochés à l’aide d’un tressé enduit de forte section et aiguille triangulaire.

1. Hanzen Ch., Les interventions obstétricales chez les ruminants, faculté de médecine vétérinaire, service de thériogénologie des animaux de production, cours de 2e GMV 2008-2009.

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