L’univers sensoriel des tortues - La Semaine Vétérinaire n° 1898 du 07/05/2021
La Semaine Vétérinaire n° 1898 du 07/05/2021

NAC

FORMATION CANINE

Auteur(s) : Pierre Dufour

CONFÉRENCIER

DIDIER BOUSSARIE, consultant NAC à Fismes (Marne)

Article rédigé d’après une conférence organisée par l’Académie vétérinaire de France (AVF) le 11 mars 2021.

Les reptiles sont composés de 4 ordres, dont les chéloniens, qui regroupent 343 espèces de tortues. « Le mot tortue vient de “tartare”, pire région des Enfers dans la mythologie gréco-romaine. L’origine des tortues est sujet à débat, elle pourrait remonter à 200 millions d’années avec Odontochelys, un genre de tortue aquatique », introduit le conférencier. Les tortues sont présentes dans tous les milieux, sauf les régions polaires : forestiers, tropicaux, désertiques, jusqu’à une altitude importante (1 800 mètres), avec des territoires assez étendus ou au contraire très limités. Leurs organes sensoriels leur permettent de s’orienter dans leur environnement, de rechercher leur nourriture, de reconnaître les prédateurs et de trouver des partenaires sexuels. À l’instar des mammifères, elles possèdent cinq sens.

La vision et l’odorat : les sens les plus développés

Elles ont une bonne vision des couleurs mais une mauvaise appréciation des mouvements et des distances. Elles possèdent deux paupières (supérieure peu mobile), une membrane nictitante, deux glandes lacrymales sans système naso-lacrymal (prédisposition aux conjonctivites à la sortie d’hibernation). La pupille est ronde, l’accommodation est lente, grâce à un muscle irien, le vitré est non vascularisé. La rétine n’a pas de vaisseaux, ni de bâtonnets, ce qui explique une déficience de vision nocturne ou même crépusculaire. La rétine ne possède pas de fovéa mais quatre cônes : S (bleu), M (vert), L (rouge), VS (ultraviolet). Les tortues sont attirées par des aliments rouges, oranges ou bleus : « Elles voient mieux ces couleurs que les humains et perçoivent les ultraviolets, tandis que nous percevons mieux les jaunes et les verts », explique notre confrère.

Comme la vision, l’olfaction, développée, permet le choix judicieux de la nourriture grâce à la région olfactive et au vestibule olfactif, alors que l’organe voméronasal (organe de Jacobson) est uniquement présent chez les tortues aquatiques et marines. Leur goût leur permet de discriminer le sucré, le salé, l’acide et l’aqueux.

L’audition est assez sélective, avec une acuité auditive allant de 80 à 130 hertz – pour l’humain, l’acuité auditive va de 20 à 20 000 hertz. Certaines espèces terrestres perçoivent néanmoins des sons de 500 hertz. Les tortues ne possèdent pas d’oreille externe. La cavité tympanique dans l’oreille moyenne est reliée à la cavité buccale pharyngée par la trompe d’Eustache. Elle est traversée par une structure nommée columelle, qui transmet les sons captés par le tympan à l’oreille interne.

Le toucher est assuré par l’épiderme grâce à des mécano- et thermorécepteurs. Dans le derme nourricier, les chromatophores et guanophores donnent la couleur à la peau. La carapace est composée d’une couche supérieure, ou épidermique, constituée d’un matériau corné organisé en 54 écailles épidermiques, et d’une couche profonde, osseuse et thermosensible constituée de 58 plaques ostéodermiques. Les tortues ont une sensibilité extéroceptive, proprioceptive et nociceptive. « La nociception est déconnectée de la thermosensibilité, ce qui explique qu’une tortue peut se brûler sans percevoir de douleur », souligne notre confrère.

Une communication complexe

La communication chez les tortues comprend un ensemble de moyens à composante tactile, olfactive, visuelle ou auditive : signes de tête ritualisés, postures, chocs contre les carapaces, morsures, mouvements de pattes, vocalises, phéromones issues de sécrétions glandulaires diverses. « En particulier lors de l’accouplement, les tortues émettent des vocalises typiques très intenses », conclut notre confrère.

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