PRÉSERVONS LES ANIMALERIES - La Semaine Vétérinaire n° 1890 du 12/03/2021
La Semaine Vétérinaire n° 1890 du 12/03/2021

EXPRESSION

Notre confrère Jean-Pascal Giraud (A 90) intervient dans les collectivités animales. Il souhaite réagir à l’amendement de l’article L. 214-7 du Code rural et de la pêche maritime (CRPM), voté à l’Assemblée nationale fin janvier, qui vise l’interdiction de la vente de tous les animaux dans les animaleries à l’horizon 2024.

C’est un pan complet de l’activité liée à l’animal de compagnie qui va disparaître. Les animaux n’en sortiront pas vainqueurs ; les vétérinaires et, plus largement tous les professionnels des animaux de compagnie, non plus.

Défendre les animaux mais mépriser les Hommes

Les métiers d’animaliers, d’éleveurs, de vendeurs, de chefs de rayon, de grossistes, etc. sont concernés directement et indirectement par cette interdiction. Si le texte est adopté en l’état, tous ces professionnels vont disparaître sans espoir de reconversion dans des métiers équivalents. On estime à 30 000 le nombre d’emplois qui seront détruits. Or tous ces emplois sont occupés par des amoureux des animaux.

Un retour en arrière mécanique

Si le terme même « animalerie » a toujours eu une connotation négative, la situation réelle a évolué beaucoup plus rapidement que les mentalités. En un mot, l’animalerie est aujourd’hui un secteur professionnalisé, réglementé et très contrôlé.

Les 3 000 points de vente sont aussi 3 000 établissements déclarés auprès des directions départementales de la protection des populations (DDPP) qui font l’objet de contrôles réguliers. C’est un outil de maîtrise réglementaire du bien-être animal qui va disparaître au profit d’une atomisation sauvage des réseaux de distribution. On peut craindre une recrudescence du commerce illégal, direct ou indirect, digital ou non.

Les contrôles stricts des autorités profitent aux animaux, mais aussi aux acheteurs. Dès lors que cette pression disparaît, les garanties des acheteurs vont s’évanouir en même temps.

Supprimer les animaleries, c’est aussi désavouer le travail quotidien fait par les milliers de vétérinaires sanitaires libéraux locaux. Ce sont des compétences en gestion des animaux de collectivités, des affections de groupe, des réglementations des animaux non domestiques etc., qui sont balayées d’un revers de main. C’est également un outil de veille sanitaire important.

Faire payer le coupable idéal

Selon cet amendement, l’abandon des animaux serait directement lié au commerce des animaux et la suppression de ce dernier résoudrait par conséquent le problème. Comme si l’irresponsabilité de certains particuliers était liée à l’existence des distributeurs. Comme si les achats d’impulsion ne pouvaient pas avoir lieu aussi dans les élevages. Comme si les animaleries n’étaient pas beaucoup plus contrôlées, et donc beaucoup plus en conformité, que les autres activités.

Des pistes rationnelles, professionnelles et indépendantes existent

L’État doit créer des conditions plus favorables à l’installation et au développement des élevages professionnels déclarés et identifiés afin qu’il soit plus intéressant de produire en France que d’importer. Le tissu productif français doit pour cela se concentrer. Cette production locale doit permettre un approvisionnement régulier des structures de distribution qui doivent faire l’objet des mêmes incitations.

Depuis 2020, il existe un label animalerie qui permet à une structure de distribution de demander volontairement à un organisme certificateur indépendant (Socotec) de valider la conformité de l’établissement.

Le projet occulte une autre réalité de terrain. De nombreuses associations de protection animale présentent des animaux à adopter dans les locaux des animaleries, en complète collaboration. Sans cela, les animaux restent plus longtemps dans les refuges.

La protection animale et le commerce ne sont pas antagonistes comme le sous-entend cet amendement. Ils sont simplement deux faces d’une même réalité qui existe déjà.

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