LA MORSURE CANINE EST MULTIFACTORIELLE - La Semaine Vétérinaire n° 1890 du 12/03/2021
La Semaine Vétérinaire n° 1890 du 12/03/2021

COMPORTEMENT

PRATIQUE CANINE FÉLINE NAC

Auteur(s) : TANIT HALFON

Comme l’a souligné le dernier rapport de l’Anses, la race, ou type racial, n’est pas suffisante pour appréhender le risque de morsure d’un chien. D’autres facteurs tels que l’âge de l’animal, son sexe, son mode de vie, ou encore ses relations avec les humains, participent à l’apparition du comportement d’agression.

Prévenir et comprendre la morsure d’un chien implique de connaître les facteurs de risque qui y sont associés. Car oui, ils sont bien multiples, et pas uniquement en lien avec la race ou le type racial du chien, comme l’a souligné le dernier rapport1 de l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses), rendu public début février. Quels sont-ils ? Au total, le rapport en liste 17 : 9 facteurs d’émission du risque d’une morsure, et 8 facteurs d’exposition au risque de morsure. Pour les premiers, les données de la littérature montrent que les chiens mâles sont surreprésentés dans les chiens mordeurs, par rapport aux femelles. L’âge joue également, et la période adulte, entre 1 et 7 ans d’âge, serait la plus à risque, par rapport aux plus jeunes âges. Toutefois, dans certaines études, ce sont les chiens les plus âgés qui sont les plus à risque, dans certains contextes. S’assurer des conditions de développement du chien limite le risque d’agression à l’âge adulte. Cela implique de laisser le chien avec sa mère et sa fratrie jusqu’à 2 mois, habituer l’animal à plusieurs environnements, le familiariser à l’humain avant 14 semaines, faire des cours d’éducation par renforcement positif, avoir des conseils de vétérinaires avant 4 mois et enfin respecter la période de socialisation (3 semaines-3 mois) durant laquelle le chiot va pouvoir apprendre à réguler ses interactions, sa morsure et son impulsivité.

Répondre aux besoins du chien

Le mode de vie est un autre facteur à prendre en compte, et l’idée est que le chien dispose d’un environnement lui permettant de satisfaire ses besoins et attentes (bien-être). Plusieurs paramètres entrent en ligne de compte : activité physique, contacts avec congénères et humains, qualité de la relation avec les humains, alimentation, etc. Toutefois, les études manquent pour évaluer à quel point une modification de ces paramètres pourrait conduire à de l’agressivité. La santé mentale et physique joue aussi. Sans surprise, les affections douloureuses sont susceptibles d’induire un comportement agressif. Même constat lors d’affections impliquant des dysfonctionnements cognitifs et émotionnels, qui engendrent une modification de la perception de l’environnement. Les troubles comportementaux peuvent aussi favoriser l’apparition de comportements agressifs et de morsures. Certains médicaments peuvent modifier le comportement et augmenter l’agressivité. Enfin, les relations du chien avec l’humain pèsent sur le risque de morsure : des interactions positives pendant la vie du chien, les capacités communicationnelles du chien et l’emploi de renforcements positifs contribueront à limiter les risques d’agression.

À noter que le tempérament et le statut reproducteur (stérilisé ou pas) ne sont pas apparus comme des facteurs de risque.

Attention aux enfants

Pour les facteurs d’exposition, il s’agissait d’identifier les situations les plus à risque. Premier facteur : l’âge de la victime. Ce sont les enfants en bas âge qui sont les plus représentés dans les morsures létales, toutefois elles restent rares. Pour les morsures non létales, il n’a pas été possible de conclure, même si des études hospitalières montrent une surreprésentation des enfants de moins de 15 ans, avec des pics individuels avant 3 ans ou entre 5 et 9 ans. Le genre masculin est surreprésenté, notamment chez les enfants. Les professions qui ont des contacts avec les chiens sont plus à risque, notamment pour les fonctions avec chiens de travail. Pour les lieux de morsures, c’est dans l’espace privé que sont rapportées la majorité des morsures d’enfants de bas âge et d’adultes propriétaires. Au contraire, dans l’espace public, la morsure concerne surtout des personnes non familières de l’animal. Le mode de vie du chien entre aussi en ligne de compte, avec une réduction avérée des morsures si « le chien peut aller et venir librement et vivre en partie au contact de son propriétaire », a « un niveau de proximité, ni trop faible (chien en restriction sociale humaine et/ou en restriction spatiale - à l’attache, en chenil, etc.), ni trop important (par exemple chien admis sur le lit) ». Enfin, la reconnaissance des signaux émis par le chien et l’émission de signaux humains appropriés sont les deux derniers facteurs de risque identifiés. Cela concerne particulièrement les enfants, car ils peuvent être limités dans l’analyse des signaux, et avoir des gestes brusques avec l’animal. Il ressort aussi qu’avoir une expérience prolongée avec des chiens ne suffit pas pour être plus compétent dans la reconnaissance des signaux. Avoir une attitude positive et empathique permettrait d’améliorer ces compétences.

1. www.bit.ly/3qjXR2q

Pour aller plus loin : l’Anses a publié une fiche type Questions/Réponses à destination du grand public, qu’il peut être utile de communiquer à ses clients : www.bit.ly/38evoET.

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