INFORMATION, ENCORE ET TOUJOURS - La Semaine Vétérinaire n° 1889 du 05/03/2021
La Semaine Vétérinaire n° 1889 du 05/03/2021

DROIT

ENTREPRISE

Auteur(s) : CÉLINE PECCAVY

Votre obligation d’information, vous êtes persuadés de la connaître, de la maîtriser et surtout de l’appliquer. Pourtant, vous êtes encore fort nombreux à tomber dans ses pièges. Il est donc à propos de revoir non seulement les principes mais aussi les applications jurisprudentielles récentes.

Le pilier fondamental reste à ce jour le même à savoir l’article R. 242-48 II du Code rural et de la pêche maritime qui dispose que le vétérinaire « formule ses conseils et ses recommandations, compte tenu de leurs conséquences, avec toute la clarté nécessaire et donne toutes les explications utiles sur le diagnostic, sur la prophylaxie ou la thérapeutique instituée et sur la prescription établie, afin de recueillir le consentement éclairé de ses clients ». Les caractéristiques de l’information demeurent également : elle doit être « loyale, claire et appropriée » selon la formule consacrée par l’arrêt Guyomar du 14 octobre 1997 de la Cour de cassation.

Rapporter la preuve

Jusqu’ici tout va bien. Là où les choses se corsent et où les clients malhonnêtes vont chercher à engager votre responsabilité, c’est sur le terrain de la preuve. Les procès sont quasiment toujours engagés sur ce fondement. Pourquoi ? Tout simplement parce qu’alors qu’il vous appartient de rapporter la preuve de la délivrance de l’information, vous n’avez pas pris le soin ou le temps de faire signer à votre client un document écrit et détaillé. Est-ce vraiment au final si catastrophique que cela ? Pas forcément, même s’il est profondément désagréable d’entendre un client soutenir mordicus que jamais, au grand jamais, vous ne lui avez délivré l’information.

Par écrit, ou pas…

Vous n’aviez déjà nullement l’obligation de lui faire signer un écrit. Si le formulaire écrit que vous avez vous-même rédigé vous assure une tranquillité certaine, il n’est pas pour autant obligatoire légalement : « L’écrit ne constitue qu’un support de cette information mais n’est nullement exigé comme condition de validité du consentement éclairé » (Cour d’appel d’Aix-en-Provence, 3 juin 2009). Prenons donc l’hypothèse où vous avez reçu à plusieurs reprises un client qui tient une version totalement opposée à la vôtre. Serait-il opportun de faire attester votre ASV ? Il s’agirait là d’une démarche vouée à l’échec. Il a été rappelé en jurisprudence que les témoignages produits par le vétérinaire qui émanent tous de ses employés sont dépourvus de force probante. Votre salut ne viendra donc pas de vos assistants. Il peut cependant provenir d’un document auquel vous ne penseriez pas forcément : l’historique du dossier de l’animal. Un arrêt récent de la Cour d’appel de Dijon (4 avril 2019) est venu le confirmer. Dans cette espèce, la propriétaire d’un chien accusait le vétérinaire de ne pas l’avoir informée du fait que son chien n’avait plus qu’une très petite espérance de vie (tumeur de très mauvais pronostic) et de l’avoir convaincue de continuer les soins. Elle refusait en conséquence de payer une partie des honoraires. Le vétérinaire affirmait pour sa part qu’il avait maintes fois conseillé à la propriétaire l’euthanasie de l’animal. La Cour s’est appuyée sur l’historique médical du chien et les mentions portées sur celui-ci telles que « il faudrait arrêter mais Mme se refuse catégoriquement à l’entendre » pour juger que le vétérinaire apportait ainsi la preuve d’avoir attiré l’attention de sa cliente sur le pronostic vital engagé du chien et qu’il avait bien rempli son obligation d’information.

Des présomptions

À défaut d’historique médical détaillé, vous pouvez aussi valablement vous appuyer sur des présomptions liées à la personne de votre client. Dans la même affaire, il avait été également « relevé que Mme S., propriétaire de plusieurs chats et chiens, connaissait parfaitement le coût des prestations vétérinaires et l’ampleur que ces dernières pouvaient rapidement prendre, aucune obligation d’établissement d’un devis ne pesant par ailleurs sur le professionnel et Mme S. ne justifiant pas avoir demandé en vain à ce dernier une information sur ses honoraires. »

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