LE RECRUTEMENT POST-BAC EN QUESTION - La Semaine Vétérinaire n° 1883 du 22/01/2021
La Semaine Vétérinaire n° 1883 du 22/01/2021

ÉCOLES VÉTÉRINAIRES

ANALYSE

Auteur(s) : TANIT HALFON

Pour la rentrée 2021, il sera possible d’accéder aux écoles nationales vétérinaires directement après l’obtention du baccalauréat. Décryptage de cette nouvelle voie de sélection.

En 2021, les élèves de classe terminale qui souhaitent devenir vétérinaires pourront postuler directement dans les écoles nationales, juste après l’obtention de leur baccalauréat. Cette nouvelle voie post-bac offre 160 places, ce qui correspond à 20 % des places du concours, contre près de 60 % pour la voie des classes préparatoires (806 places au total). Une fois recrutés, les élèves suivront une première année de formation dans les écoles (40 élèves par écoles), et seront rejoints en deuxième année par les étudiants issus des autres voies de sélection. Avec cette voie, l’idée générale est de sélectionner des étudiants en capacité de suivre les études vétérinaires, mais aussi potentiellement plus conscients des réalités de la profession.

Un double objectif

La voie post-bac répond à deux objectifs principaux : d’une part, réduire la durée des études, d’autre part, diversifier le profil des candidats, tant du point de vue social que territorial. En aucun cas, donc, l’objectif visé est de sélectionner des candidats qui grossiront le rang des praticiens ruraux. « La France se caractérise par la durée d’études incontestablement la plus longue d’Europe, 7 à 8 ans, pour devenir vétérinaire, rappelle la direction générale de l’Enseignement et la Recherche du ministère de l’Agriculture. Mais avec la durée d’études vétérinaires réellement utiles pour l’exercice vétérinaire la plus courte, actuellement 4 à 5 ans car le dernier semestre d’études était jusqu’alors neutralisé par la préparation de la thèse1. » Le recrutement post-bac permettra d’arriver à 6 années de formation : une réduction qui peut se voir comme une augmentation des études vétérinaires stricto sensu pour la DGER qui décrit 6 années de formation « utiles à l’exercice et conçue dans un objectif de professionnalisation et de compétences », avec un programme de première année qui s’inscrit dans le référentiel de l’enseignement vétérinaire. Pour la suite, le contenu de la formation n’est pas modifié. De plus, cette réduction des études va dans le sens d’un système plus équitable puisqu’il permet de cibler des élèves qui renonçaient à s’inscrire du fait de moyens financiers plus limités. Enfin, la DGER indique qu’en gagnant du temps sur la préparation du concours, « un nombre croissant de jeunes vétérinaires pourra alors se projeter, par exemple dans des internats, des formations complémentaires, ou poursuivre une carrière dans la recherche avec un doctorat ».

Une admissibilité sur dossier scolaire

Le recrutement post-bac n’est pas une sélection sur dossier mais bien un concours à part entière, et commun aux 4 écoles nationales vétérinaires. Des phases d’admissibilité puis d’admission sont prévues. Comme l’explique Marc Gogny, directeur général adjoint à Oniris (Nantes, Loire-Atlantique), en charge de la mission nationale d’expertise sur le sujet, la première phase se fera via Parcoursup. « À ce stade, les critères retenus sont quantitatifs, à savoir les notes du baccalauréat des spécialités choisies en première et en terminale, avec un poids plus important pour les matières de sciences de la vie et de la terre, suivis des mathématiques et de la physique-chimie. Les notes obtenues en histoire-géographie et en langues étrangères, ainsi que celles de l’épreuve de français, compteront aussi, mais dans une moindre mesure, détaille-t-il. À cela s’ajoutent également des critères liés à l’environnement scolaire du candidat, basés sur l’appréciation faite par le corps enseignant de l’autonomie de l’élève, de sa méthodologie de travail, etc. Enfin, un nombre minimal de places, environ 7 %, sera réservé aux boursiers du lycée. » Un bémol cependant, la pandémie de Covid-19 va perturber cette étape : des épreuves du baccalauréat ont déjà été annulées, et donc les notes qui vont avec, et des interrogations se posent encore pour d’autres.

Des mini-entretiens multiples

Exit ensuite les épreuves académiques pour l’admission : la sélection se fera via des mini-entretiens, de 10 minutes chacun. Pour cette étape, « les compteurs seront remis à zéro et ce sont les scores critériels obtenus sur les 7 ateliers qui seront additionnés, explique la DGER. Chaque atelier évalue plus particulièrement un nombre limité et déterminé de compétences. » Les thématiques des entretiens sont « connaissance du monde animale, approche du bien-être animal, raisonnement éthique, interprétation des données, facultés arithmétiques, habileté manuelle et enfin définition du projet professionnel », détaille Marc Gogny. Ces mini-entretiens ne sont pas une pratique nouvelle dans les méthodes de sélection de l’enseignement supérieur, explique-t-il. « Ils sont apparus en 2004 au Canada, puis ont diffusé largement dans les pays anglophones, aux États-Unis et au Royaume-Uni, et sont également beaucoup utilisés dans les pays asiatiques. En France, la faculté de médecine d’Angers a expérimenté cette méthode pendant 5 ans, en fin de première année commune aux études de santé. De fait, les épreuves de la voie post-bac ont pu être définies à partir de la bibliographie existante sur les mini-entretiens multiples. » En outre, les études sur le sujet montrent que ce type d’épreuves est mieux corrélé à une bonne acquisition de compétences professionnelles, notamment dans le domaine médical, que les épreuves académiques classiques. En pratique, il s’agit de mettre l’élève face à une problématique spécifique, et d’évaluer ses capacités de réaction. « À la différence des entretiens de motivation classiques, dans lequel l’élève peut avoir tendance à raconter ce que le jury attend de lui, ces épreuves permettront d’évaluer réellement les qualités intrinsèques des élèves, souligne Marc Gogny. Ces épreuves sont, en outre, hyperscénarisées, afin de garantir leur reproductibilité et répétabilité. » De la même manière, le Covid-19 viendra perturber le déroulé des entretiens. « On sait déjà qu’on va devoir les faire en visio pour les lycées des territoires ultramarins et de l’étranger. Pour les autres, la question reste ouverte. »

Se poser les bonnes questions

Pour se préparer aux entretiens, la DGER indique que « les ENV ne conseillent pas de préparation particulière, en sus du développement des facilités de communication à l’oral qui est assurée par la préparation du « grand oral » du baccalauréat dans chaque lycée. La lecture de sites Internet, par exemple celui de l’Ordre des vétérinaires, pour connaître la réalité des métiers de vétérinaire, est également conseillée sur le site du concours. » Par ailleurs, lors de l’inscription sur Parcoursup, les élèves doivent au préalable remplir un questionnaire de pré-orientation, qui vise à les conforter dans leur choix d’études. « À travers ce questionnaire, l’idée est de leur faire se poser les bonnes questions : est-ce que je suis capable de suivre les études vétérinaires ? Est-ce que ma représentation du métier est réaliste ou fantasmée ? Est-ce que je suis motivé ? », détaille Marc Gogny. Ce questionnaire est totalement anonyme et ne pèse pas dans le processus de sélection. En parallèle, les élèves peuvent aussi consulter l’arrêté2 du 3 décembre 2020, qui liste les aptitudes et capacités à avoir pour envisager un parcours de formation vétérinaire.

1. Ce ne sera désormais plus le cas : www.bit.ly/35LK8dk

2. www.bit.ly/38Q3u2Z

Pour en savoir plus, un site spécifique au recrutement post-bac a été créé : www.concours-veto-postbac.fr

Abonné à La Semaine Vétérinaire, retrouvez
votre revue dans l'application Le Point Vétérinaire.fr