« LES LABORATOIRES PUBLICS DE RECHERCHE ET VÉTÉRINAIRES CONSTITUAIENT UNE IMPORTANTE RESSOURCE EN PLATEFORMES DE BIOLOGIE MOLÉCULAIRE » - La Semaine Vétérinaire n° 1875 du 13/11/2020
La Semaine Vétérinaire n° 1875 du 13/11/2020

PANDÉMIE

TRIBUNE LIBRE

Auteur(s) : RICHARD BONNE*, DIDIER MONTET**

Fonctions :
*ANCIEN VÉTÉRINAIRE INSPECTEUR DES SERVICES VÉTÉRINAIRES FRANÇAIS, EXPERT INTERNATIONAL EN SÉCURITÉ SANITAIRE DES ALIMENTS
**CHERCHEUR-EXPERT INTERNATIONAL EN SURETÉ SANITAIRE DES ALIMENTS

Une déclaration récente de François Blanchecotte, président du bureau national du Syndicat des biologistes (SDB), confirmant ce que nous avions prévu dès le début de la pandémie et écrit, doit retenir toute notre attention : « L’Allemagne avait déjà des plateformes de biologie moléculaire, pas nous. Nous avons dû investir dans l’achat de machines dédiées, qui coûtent entre 50 000 et 200 000 € pièce, et dont nous ne nous resservirons peut-être jamais, une fois l’épidémie terminée. »

L’affirmation selon laquelle la France ne disposait pas de plateforme de biologie moléculaire est parfaitement inexacte. Les laboratoires publics de recherche et vétérinaires constituaient une importante ressource en plateformes de biologie moléculaire avant même le début de la pandémie. Ressource qui a été estimée en mars à une capacité d’au moins 350 000 tests PCR par semaine. Cette situation tient au rôle de la médecine et de l’administration vétérinaires, ainsi que de leurs laboratoires pour prévenir et maîtriser les épidémies qui surviennent régulièrement sur le bétail et la volaille. Au quotidien, le rôle de la médecine et de la biologie humaines n’est évidemment pas de cette nature.

Pour ce qui concerne l’investissement de laboratoires de biologie humaine, avec l’aide de l’État, dans des automates PCR, on nous avait avancé très précocement la réserve qui suit dans un article publié sur le site de l’Ordre national des vétérinaires : « On peut s’interroger légitimement sur la rentabilité, en dehors des périodes de pandémies qui sont relativement peu fréquentes, de l’investissement de suréquipement (en automates PCR et de sérologique) à vocation épidémiologique, que les laboratoires de biologie médicale viennent d’acquérir. Un mécanisme de réquisition automatique des capacités analytiques des laboratoires publics de recherche et vétérinaires, inscrit dans la réglementation, aurait probablement permis de faire face à toute occurrence de pandémies, tout en limitant la dépense d’argent public. Un répertoire des machines PCR avait pourtant été demandé aux structures publiques au début de la crise et est resté sans suite. »

Le délai nécessaire à l’acquisition des machines PCR s’est traduit en France par la possibilité de ne lancer une campagne massive de tests qu’en juin, avec plus de 3 mois de retard sur l’Allemagne.

Sans compter que si ces machines acquises par les laboratoires de biologie humaine sont appelées à ne resservir qu’après quelques années, elles seront obsolètes.

En attendant, les biologistes s’appuient sur cette nécessité d’amortir rapidement leurs investissements pour justifier que les tests PCR soient facturés 73,59 € en France, pour seulement 50,50 € en Allemagne qui a utilisé ses plateformes de biologie moléculaires publiques.

Comme on le voit, la gabegie, véritable jackpot pour les laboratoires de biologie et les fonds d’investissement qui les détiennent à 80 %, ne porte pas seulement sur la masse de tests PCR réalisés en « open bar » et parfaitement inutilisables compte tenu des délais de réponse beaucoup trop longs pour qu’ils soient exploités. Elle porte aussi sur une aide surdimensionnée de l’État à l’achat par les laboratoires de biologie humaine d’automates PCR, qui s’avéreront probablement inutiles à terme.

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