LES STAPHYLOCOQUES FÉCAUX NON-AUREUS SONT UNE CAUSE POTENTIELLE DE MAMMITE CHEZ LES BOVINS - La Semaine Vétérinaire n° 1867 du 18/09/2020
La Semaine Vétérinaire n° 1867 du 18/09/2020

CAS CLINIQUE

PRATIQUE MIXTE

FORMATION

Auteur(s) : CLOTHILDE BARDE

ÉTUDE

WUYTACK, A., DE VISSCHER, A., PIEPERS S. et coll., Fecal non-aureus Staphylococci are a potential cause of bovine intramammary infection, Veterinary Research, 2020, 51.

Les staphylocoques non-aureus (NAS) constituent un groupe hétérogène de bactéries qui sont les plus fréquemment identifiées dans les échantillons de lait de vache dans le monde1,2,3,4. Elles colonisent également l’apex des trayons des vaches en lactation et des vaches taries 5,6 ainsi que le canal des trayons7. Parmi ces bactéries, des études récentes ont montré que Staphylococcus (S.) agnetis, S. auricularis, S. chromogenes, S. cohnii, S. epidermidis, S. equorum, S. haemolyticus, S. hominis, S. kloosii, S. rostri et S. xylosus peuvent également être isolées dans les selles8, ce qui indique que les vaches les excrètent dans l’environnement. À cet égard, des travaux de recherche (Wuytack et coll., observations non publiées) ont déjà montré que les bactéries S. arlettae, S. auricularis, S. chromogenes, S. cohnii, S. devriesei, S. equorum, S. haemolyticus, S. hominis et S. vitulinus se retrouvent à la fois dans les selles, sur les apex des trayons et dans les prélevements de laits de bovins. De plus, selon l’équipe de Quirk et coll.7, la colonisation des canaux de trayon par S. chromogenes, S. epidermidis, S. equorum, S. haemolyticus, S. hyicus et S. simulans est à l’origine d’infections intramammaire (IMI) par migration dans la glande mammaire via le canal du trayon. Or, à ce jour, le lien possible entre la présence d’espèces de NAS dans les fèces et sur les apex des trayons et l’IMI n’avait pas été étudié sous une approche de typage des souches. C’est pourquoi, dans le cadre de l’étude présentée ici, les chercheurs ont tenté de déterminer par typage si les souches de NAS présentes dans les fèces pouvaient être à l’origine de mammites à NAS via la colonisation de l’apex des trayons.

Certaines souches de NAS fécales sont responsables de mammites

Pour cela des prélèvements de lait ont été réalisés sur les apex des trayons et dans les fèces chez des vaches en lactation provenant de 5 troupeaux laitiers pendant un an. En parallèle, des échantillons de lait ont également été collectés lors de cas cliniques de mammite. Les 6 espèces de NAS les plus répandues, Staphylococcus (S.) chromogenes, S. cohnii, S. devriesei, S. equorum, S. haemolyticus et S. hominis, ont été sous-typées par une technique d’amplification aléatoire de la réaction en chaîne de la polymérase de l’acide désoxyribonucléique polymorphe (RAPD-PCR), lorsqu’elles étaient retrouvées dans les trois habitats dans un même troupeau. Les résultats ont permis de montrer que le même sous type de S. chromogenes, S. cohnii, S. devriesei et S. haemolyticus était présent dans les selles, sur les apex des trayons et dans les échantillons de lait, suggérant que les NAS fécaux peuvent infecter la glande mammaire bovine, au moins pour certaines espèces. En revanche, en ce qui concerne les espèces S. hominis et S. equorum, la présence des mêmes souches RAPD n’a pas pu être confirmée dans les trois habitats. Par ailleurs, bien que l’apex et le canal du trayon constituent la principale voie d’accès au pis pour les microorganismes9, certains auteurs suggèrent l’existence d’une voie dite entéro-mammaire10. En effet, le transfert de bactéries de l’intestin vers la glande mammaire par voie intracellulaire a été prouvé pour les souris et suggéré pour les humains11,12,13. Cependant, les systèmes immunitaires de la glande mammaire et de l’intestin ne sont pas aussi étroitement liés chez les ruminants que chez les espèces monogastriques14, ce qui rend moins probable l’hypothèse selon laquelle les NAS (ou d’autres bactéries) peuvent atteindre la glande mammaire sans entrer par le canal du trayon15.

Des données à compléter

Une étude testant cette hypothèse serait nécessaire pour apporter des conclusions. De plus, même si l’amplification aléatoire de l’ADN polymorphe est une technique rapide et facile à utiliser qui est couramment utilisée pour comparer les communautés bactériennes avec des résultats cohérents par rapport à d’autres techniques, il est reconnu qu’elle peut manquer d’un certain pouvoir discriminatoire pour certaines espèces16. À cet égard, les auteurs suggèrent que pour des espèces spécifiques, comme S. haemolyticus et S. simulans par exemple, la combinaison avec d’autres techniques telles que l’électrophorèse sur gel à champ pulsé (PFGE) ou que les méthodes de typage de fragments amplifiés, améliore la détection de la variation entre les isolats16,17. Enfin, le faible taux de mutation des gènes domestiques rend le typage de séquence multilocus plus approprié, mais il n’est actuellement disponible que pour S. epidermidis, S. haemolyticus, S. hominis, S. lugdunensis et S. pseudintermedius18,19,20,21. Le séquençage du génome entier offre une résolution théoriquement optimale, mais il est momentanément moins adapté à de plus grandes collections d’isolats et à des analyses de routine22.

Abonné à La Semaine Vétérinaire, retrouvez
votre revue dans l'application Le Point Vétérinaire.fr