« LE GOLD STANDARD EST LE BROSSAGE DES DENTS » - La Semaine Vétérinaire n° 1866 du 11/09/2020
La Semaine Vétérinaire n° 1866 du 11/09/2020

HYGIÈNE BUCCO-DENTAIRE

PRATIQUE CANINE FÉLINE NAC

Auteur(s) : TANIT HALFON

La prévention de la maladie parodontale des carnivores domestiques implique un brossage journalier des dents, pouvant être associé à d’autres dispositifs mécaniques, comme les lamelles ou os à mâcher, et certaines croquettes spécifiques. Le point avec Philippe Hennet, spécialiste en stomatologie et dentisterie vétérinaire.

L’implication du propriétaire est essentielle pour s’assurer de la bonne hygiène bucco-dentaire de son animal, explique Philippe Hennet, spécialiste en stomatologie et dentisterie vétérinaire au centre hospitalier vétérinaire Advetia (Vélizy-Villacoublay).

En matière de prévention, certains produits valent-ils mieux que d’autres, en termes d’efficacité ou de praticité d’usage ?

Philippe Hennet : Avant tout, il faut bien comprendre qu’il n’existe aucun organisme régulateur pour les produits d’hygiène bucco-dentaire. Cette absence de cadre a amené des vétérinaires spécialistes américains, regroupés dans le Veterinary Oral Health Council1 (VOHC), à évaluer à partir des années 1990 les produits mis sur le marché. De fait, certains d’entre eux présentent aujourd’hui une estampille VOHC, censée légitimer les revendications des fabricants. Ceci dit, ce système comporte des biais. Le VOHC établit le seuil à 20 % de réduction de la plaque dentaire comme critère d’efficacité des produits. Or, il n’est pas prouvé que cela change quelque chose sur le long terme pour la maladie parodontale. Aujourd’hui, on sait bien qu’en matière d’hygiène bucco-dentaire le gold standard reste le brossage journalier des dents, bien qu’il existe des variabilités liées à la race et, comme chez l’homme, des différences individuelles. Il est possible d’y associer d’autres produits à action mécanique comme les lamelles et os à mâcher ou croquettes spéciales dents, qui revendiquent une efficacité antiplaque. Attention : comme le brossage des dents, cette efficacité n’est valable que pour un usage quotidien. En revanche, je suis plus réservé sur les additifs sous forme de liquide ou de poudre. Bien qu’une action antiseptique soit revendiquée, ils ne peuvent avoir d’action locale, puisqu’ils sont dilués dans l’eau ou la nourriture et directement avalés. Certains auraient également un effet immunostimulant, mais cela reste à démontrer en dehors d’études in vitro.

Comment bien utiliser ces produits ?

Pour le chien, le brossage doit être préconisé tous les jours, même si le fabricant stipule autre chose. Brosser les dents 1 à 2 fois par semaine, ou rien du tout, revient au même. Pour le chat, c’est plus compliqué, car ils souffrent d’autres maladies dentaires, comme les résorptions dentaires et les stomatites. Lors de maladie parodontale en revanche, les recommandations restent les mêmes que celles pour le chien, même si je conçois bien que le brossage des dents est plus compliqué. De fait, en pratique, souvent, on en reste au stade du massage des dents avec le gel dentaire associé à des croquettes spécifiques. Il faut expliquer au propriétaire la mise en place du brossage : lui dire de procéder par étapes avant d’en arriver à un brossage - manipuler la bouche, masser les dents avec le gel… -, récompense à l’appui, sans oublier d’utiliser une brosse à dents souple à ultra-souple. Il faut aussi vérifier que le propriétaire a effectivement bien compris les explications quelques semaines plus tard ! Ce suivi est primordial au risque que, si les choses se passent mal au départ, la motivation première du propriétaire disparaisse.

Le détartrage régulier fait-il partie de la bonne hygiène bucco-dentaire ?

Le détartrage est un acte thérapeutique, ce n’est pas de la prévention. Ne confondons pas avec ce qui se passe en humaine : les visites de contrôle chez le dentiste se font bien évidemment pour des individus qui sont censés avoir une bonne hygiène bucco-dentaire, ce qui n’est le cas que d’une partie infime de la population d’animaux que nous voyons. À ce sujet, une étude avait montré qu’un détartrage tous les 6 mois chez des Beagles ne changeait pas la cinétique d’installation de la maladie2. En médecine vétérinaire, le détartrage doit être vu en réalité comme de la chirurgie bucco-dentaire, car il est courant qu’on y associe d’autres actes, telles les extractions dentaires.

1. https://bit.ly/2GukboO

2. Morrison E.C., Lang N.P., Löe H. et coll., Effects of repeated scaling and root planing and/ or controlled oral hygiene on the periodontal attachment level and pocket depth in beagle dogs I. Clinical findings, J. Periodont. Res. 1979, 14 : 428-437.

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